Olivier GRAEFF : Swapcom et le SMS Cell BroadCast

Jérôme Bouteiller
Publié le 14 août 2002 à 00h00
JB - Monsieur Olivier Graëff, bonjour. En quelques mots, pourriez vous présenter votre parcours ainsi que votre société : Swapcom ?

OG - Mon parcours est totalement lié à l'évolution des technologies de l'information puisque j'ai débuté ma carrière professionnelle dans une société télématique, puis chez un fabricant de serveur de communication, avant de rejoindre l'opérateur Prosodie où j'ai assumé pendant 5 ans les responsabilités de Manager de Projets au sein du département Nouvelles Technologies.

J'ai quitté cette société au début de l'année 1999 pour créer Swapcom avec trois autres fondateurs. L'environnement financier favorable de l'époque nous a permis de développer rapidement notre activité. Notre société a réalisé 4M€ de CA l'an dernier et compte aujourd'hui une cinquantaine de salariés, répartis sur notre siège à Lyon, au sein de notre agence parisienne et à Shanghai (Chine).

Swapcom est aujourd'hui l'un des tous premiers acteurs européens dans l'édition de logiciels et de solutions mobiles, avec des références chez les principaux opérateurs européens et chez la plupart des fournisseurs de services mobiles. Notre forte expertise dans le domaine des technologies SMS, Cell Broadcast EMS et MMS nous permet d'être reconnus internationalement, notamment grâce à nos actions au sein des organismes de normalisation télécom, comme l'ETSI, le 3GPP ou le Cellbroadcast Forum dont nous assurons la co-direction.

JB - Swapcom édite des logiciels de gestion des SMS mais également ses propres applications. Comment peut-on définir votre métier ?

OG - Nous nous définissons en tant que « mobile software designer ». SWAPCOM propose une gamme complète de logiciels middle-ware permettant aux acteurs de la mobilité de s'équiper rapidement et d'être ainsi très réactifs dans la construction d'applications ou de portail nécessitant une connectivité aux différents réseaux mobiles de seconde et 3ème génération. Nous proposons également des solutions clé en main, fortement génératrices de revenus, construites à partir de nos composants logiciels et qui répondent aux besoins « time to market » des entreprises.

Nos produits s'adressent principalement aux « Mobile Services Providers », aux opérateurs de télécommunication ainsi qu'aux grandes entreprises.

JB - Vous travaillez énormément sur le SMS Cell BroadCast. Pouvez vous expliquer en quoi consiste cette technologie ?

OG - La technologie Cell Broadcast permet la diffusion de messages (un peu semblable au SMS), simultanément à l'ensemble des utilisateurs présents dans une zone géographique ciblée. Le principe est le même que celui de la radio ou de la télévision ; les utilisateurs doivent sélectionner un ou plusieurs canaux Cell Broadcast « à écouter » afin de recevoir les informations diffusées.

JB - Quel est l'intérêt économique du SMS CB pour les médias? Cela revient moins cher ?

OG - Comme le SMS et à la différence du WAP, le CB utilise le canal de signalisation des réseaux GSM pour la diffusion des messages et libère ainsi les coûteux canaux de données. Pour envoyer un SMS à 10 000 personnes, vous devez envoyer - et donc payer - 10000 messages. Avec le CB, vous envoyez un seul message qui sera diffusé à toutes ces personnes en même temps. Les Business Models sont différents et pour les fournisseurs de contenus ils seront liés à la location de canaux CB ou d'espace à l'opérateur télécom. Les opérateurs et fournisseurs de services pourront également inciter leurs abonnés à utiliser des services couplés Audiotel, SMS Premium ou Wap, augmentant ainsi leur revenu moyen par utilisateur.

JB - A quel type d'applications destinez-vous cette technologie ?

OG - Le CB est idéal pour les applications marketing géolocalisées : par exemple, vous êtes abonnés au canal d'information d'une grande surface, lors d'un déplacement, vous recevrez les promotions du magasin se situant le plus près d'où vous vous trouvez.

Le CB est de plus particulièrement adapté à la réception des informations pour lesquelles le facteur temps est critique ( alertes boursières ou notifications sportives) car la pertinence de ces informations est directement liée au délais d'acheminement, donc à la capacité de diffusion des SMS de l'opérateur mobile. Le Cell Broadcast résout ce problème de diffusion massive et instantanée d'information puisqu'un seul message peut être envoyé à plusieurs milliers ou millions de personnes en même temps. C'est l'outil idéal pour par exemple du « but par but » pendant la coupe du monde.

JB - Est-ce que la technologie SMS CB pourra s'appliquer aux MMS ou se limite t'elle à des messages texte de 96 caractères ?

OG - Le message CB est similaire au SMS mais peut contenir jusqu'à 1395 caractères (au lieu de 160 pour le SMS). Mais la différence réside dans la méthode de diffusion plus que dans le format de message supporté, Il est donc tout à fait possible d'appliquer cette technologie à l'EMS et MMS. Swapcom a d'ailleurs réalisé une première mondiale en 2001 en montrant la diffusion de messages EMS via CellBroadcast.

JB - Comment expliquez-vous qu'un mobinaute accepte de payer 0.1€ pour envoyer un SMS alors que l'idée de payer l'envoi d'un e-mail rendrait hystérique un internaute ?

OG - Le taux de pénétration du mobile est tel aujourd'hui que l'on peut considérer que toute personne sur notre territoire est potentiellement joignable en temps réel où qu'elle se trouve grâce à son mobile.

On peut ainsi penser que, contrairement à Internet qui s'intègre dans notre domotique privée ou professionnelle, le mobile est à rapprocher des individus eux-mêmes, ce qui le positionne de facto comme le vecteur de communication le plus puissant. Le mobinaute achète ainsi le moyen de contacter immédiatement le destinataire. D'une part, le facteur temps réel est déterminant et d'autre part, du point de vue du mobinaute, le coût d'un SMS est à comparer au coût d'une communication téléphonique, il est donc moins cher..

JB - Contrairement à DoCoMo, les opérateurs GSM français veulent imposer leurs propres contenus sur les terminaux mobiles. Pensez-vous que celui puisse porter préjudice à une "mobile économie" ?

OG - Je ne pense pas que les opérateurs français soient dans cette logique. Mais il est certain que le périmètre de leur activité s'est considérablement étendue ces dernières années. L'opérateur n'est plus aujourd'hui uniquement un gestionnaire d'infrastructure et de « tuyaux télécom » mais également un fournisseur de services. Les « plus » services proposés initialement par Itineris et SFR par exemple, sont devenus des portails de services complets, comme ceux d'Orange ou Vizzavi, véritables vecteurs de communication de la marque, de la griffe de l'opérateur. Dans ce contexte, les opérateurs ne sont pas différents des autres fournisseurs de services, excepté que leur retour sur investissement ne se calculait pas uniquement sur la base des revenus générés mais également sur les retours indirects issus de l'image (cela est en passe de changer). Dans leur rôle d'opérateur de réseau, ils sont d'une part soumis aux réglementations françaises et européennes, et d'autre part à un « code déontologique » quant aux informations diffusés via leur réseau. Il est normal que l'opérateur ait un droit de regard sur le type d'informations qu'il transporte et qu'il puisse choisir les fournisseurs de services.

On imagine mal un transporteur faire fi du contenu véhiculé par ses camions ou de la qualité de son client.
Mais il n'est certainement pas de l' intérêt de l'opérateur télécom d'imposer son seul portail d'accès. L'exemple du vidéotex en France puis d'Imode au Japon démontre bien entendu la pertinence d'un modèle de rémunération partagée et équitable pour les différents acteurs de la chaîne de valeur.

JB - Souhaitez vous ajouter quelque chose ?

OG - Le marché s'organise depuis quelques mois sur des bases industrielles solides. C'est un facteur important qui rend les professionnels optimistes sur les perspectives de développement de ce marché. Nous n'en sommes encore qu'à la pré-histoire. L'alliance de l'Internet et du mobile est une réelle révolution, dont nous ne mesurerons réellement l'impact social que dans plusieurs années mais elle bouleverse fondamentalement notre lien avec l'autre.

JB - Monsieur GRAEFF, je vous remercie.
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