On en parle de plus en plus, mais au fait, qu’est-ce qu’une DMP ?

12 juin 2014 à 11h32
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L'un des mots à la mode du salon Digital Marketing One to One a sans doute été « DMP ». Alors que l'e-marketing se pilote de plus en plus à la donnée, revenons sur cet outil qui promet d'en tirer profit.

Les Français aiment les sigles, mais la « DMP » est bien américaine. Signifiant « data management platform », ces trois lettres « à la mode dans les conférences ces derniers temps » décrivent une plateforme centralisant les données des clients provenant de multiples sources. Sa raison d'être : aider à faire les meilleurs choix marketing, de l'achat d'espaces publicitaires à l'optimisation de son site e-commerce.

Une DMP a quatre buts

Stéphane Dugelay, consultant dans le marketing pendant quinze ans et à la tête de Mediarithmics, une plateforme de « data marketing », depuis deux, assigne quatre grands objectifs à une DMP. Il s'agit d'abord de « sécuriser l'accès au consommateur ». C'est-à-dire de créer un lien avec l'individu pour remonter des données. Cela peut être un cookie, idéalement, un compte client, un ID sur Facebook ou une adresse e-mail.

L'expert ajoute qu'avec les bonnes données, un annonceur peut optimiser ses achats média. D'une part pour affiner le ciblage et d'autre part pour maîtriser sa pression commerciale. « Un juste dosage de la pression peut être plus puissant que le ciblage », observe-t-il. En d'autres termes, ça n'est pas parce qu'une marque a ciblé des profils dans son viseur qu'elle doit les arroser de messages. La parcimonie est conseillée.


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Crédit : Makazi


C'est l'aspect, sans doute, le plus connu : quand les données de la DMP servent à « segmenter les audiences ». L'annonceur met chaque internaute dans une case, chacune correspondant à un ensemble d'attentes. Grâce à cela, le message publicitaire va pouvoir être personnalisé. L'intérêt de la DMP est de prendre en compte bien plus d'informations que l'historique d'achat comme, par exemple, le comportement de navigation en ligne.

Le dernier usage de la DMP peut être d'agréger les données. Emmanuel Durand, vice-président marketing chez Warner Bros, observe que « des entreprises ont compris l'importance stratégique des données mais ne savent pas encore comment les exploiter, alors elles les stockent » dans une « attitude patrimoniale ».

Le plus de data possible ?

Parfois (souvent ?), l'internaute a l'impression que chaque annonceur est un « big brother » capable de tout savoir sur lui - n'a-t-il pas été étonné la première fois qu'il a vu le produit cherché en ligne la veille resurgir le lendemain, dans une bannière, et sur un autre site ? Pourtant les annonceurs ne doivent pas tout prendre.

Ce sont les objectifs marketing qui décident des données à amasser. S'agit-il de réengager un client au moyen d'un reciblage publicitaire ? Il est dans ce cas pertinent d'analyser le comportement de l'internaute : « Pas seulement le nombre de pages consultées, prévient Stéphane Dugelay, mais la liste des produits regardés, le temps passé par fiche, bref des éléments sur le niveau de profondeur de l'engagement. »

Si ces données s'obtiennent au moyen de cookies, l'expert entrevoit déjà leur fin, poussés vers la sortie par les Google ID sous Chrome et Android, les comptes Facebook et consorts, qui ont l'immense avantage de reconnaître un individu indépendamment de son canal (ordinateur, smartphone, tablette et pourquoi pas boutique physique). Mais à ce jour, ce type de ciblage est encore complexe, et tous ne le pratiquent pas.


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Crédit : Makazi


Proche du retargeting, la recommandation fait appel à d'autres éléments. Ici, Mediarithmics conseille de stocker les données de relation entre les visiteurs et les produits et services : « Grâce à la DMP on peut faire du temps réel. En se basant sur les achats des uns, on peut conseiller les autres, dont le profil est proche. »

Dans le cas d'un calcul de l'attribution (déterminer dans quelle mesure une action marketing a contribué à une vente et ajuster ses dépenses en conséquence), la DMP servira à recueillir les points de contacts entre un visiteur et, par exemple, une bannière display, un e-mail, une application... Mais pour y parvenir, « il faut des partenaires qui apposent des tags sur les bannières hors de son site, ce qui peut s'avérer coûteux ».

Quelques cas d'application

Hervé Malinge, fondateur de ScoreMD et associé chez Makazi, illustre l'utilité de la DMP avec un individu qui n'a jamais acheté sur un site e-commerce donné, Weekendesk par exemple, mais qui a accepté de recevoir des e-mails de sa part. « Je vais détecter qu'il a une appétence à certains de nos thèmes, comme le bien-être, mais ça n'est pas pour cela que je vais lui proposer des week-ends partout en France », explique-t-il.

« La plupart des personnes ne partent pas à plus de 200 km, donc je vais utiliser ses données de localisation, couplées à ses données de navigation (pour déterminer ses goûts), afin de lui proposer un séjour axé sur le bien-être dans un rayon de moins de 200 km. Ainsi, cette personne recevra une offre potentiellement pertinente pour elle, alors qu'elle n'avait pas exprimé ses besoins explicitement », finit-il de démontrer.

Autre scénario d'application, bien popularisé par les plus gros sites de e-commerce, Amazon en tête : un individu, encore une fois, enclin à recevoir des e-mails promotionnels, a acheté un appareil photo chez Cdiscount et rien de plus. « Dans l'optique de réaliser des ventes complémentaires, notre algorithme va scruter les paniers des personnes qui ont acheté le même type de produit, c'est là qu'il verra que certaines ont aussi acheté une carte SD », décrit Hervé Malinge, qui proposera donc une telle carte au client ciblé.


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Crédit : Makazi


La DMP peut aussi servir à la transformation d'un visiteur en client, en établissant un parallèle entre deux profils similaires, dont l'un a réalisé des achats et dont l'autre a seulement manifesté ses appétences - observées par les cookies par exemple. Dans ce cas, il suffira de suggérer, pourquoi pas dans un e-mail, les produits achetés par le premier, au second, « car il n'y a pas de raisons que cela ne l'intéresse pas ».

La DMP où on ne l'attend pas

Ce type de technologie a des bénéfices sur le ciblage, c'est indéniable, confirme Stéphane Dugelay, mais son principal avantage se situe sur le terrain de la stratégie d'achat. « C'est en pilotant l'achat de ses publicités par la donnée qu'un annonceur réalisera les meilleurs gains, car la DMP va l'aider à optimiser ses coûts d'acquisition. » C'est en effet la DMP, nourrie de data, qui décidera des achats sur les plateformes RTB.

Mais une plateforme de gestion de données peut aussi se muer en « outil de protection du contrat de collecte des données de première partie » (liées au site), affirme le patron de Mediarithmics, afin de « s'assurer que les éléments collectés ne soient pas détournés ». Il rappelle qu'un client « accorde sa confiance à une marque ou à un e-commerçant, pas à une DMP, dont il ne connaît pas l'existence. Il y a un enjeu business derrière ».

Pour lui, il n'existe pas de solution technique, hors de celle précitée, permettant de vraiment protéger ces données. « Lorsqu'on confie un fichier à un partenaire, on lui confie la responsabilité de ce qu'il contient. » La DMP peut aussi encadrer les données tierces (collectées par un cookie tiers, posé par un acteur tiers au site visité). Car si Google interdit de garder ces informations après une campagne, tous ne le font pas.

Au-delà d'encadrer ou de protéger ces données, ce sont surtout leurs connexions et leur interprétation qui importent vraiment. Stéphane Dugelay est formel : « La richesse des données vient beaucoup plus de la densité des connexions, que de leur quantité. » Il ne fallait pas trop vite parler de big data.



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