Le directeur de l'ESA n'apprécie pas que les gouvernements donnent carte blanche à Elon Musk

06 décembre 2021 à 10h54
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© SpaceX
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Josef Aschbacher, directeur général de l’Agence spatiale européenne (ESA) depuis novembre 2020, a exprimé son inquiétude quant à la surreprésentation de SpaceX en orbite basse. Selon lui, il existe un manque de coordination flagrant entre les gouvernements pour mieux réguler les lancements de satellites. 

Les propos d’Aschbacher font suite à la décision récente de l’Allemagne de demander à l'Union internationale des télécommunications (UIT), qui coordonne l'utilisation des fréquences sans fil pour le transport de données, d'accorder au réseau Starlink de SpaceX un spectre pour environ 40 000 satellites. L’entreprise possède déjà l’autorisation d’en envoyer 30 000 dans l’espace. 

Les nouveaux satellites s’accumulent en orbite basse 

Josef Aschbacher estime ainsi que la complaisance des pays européens avec le réseau Internet Starlink risque d’avoir un impact direct sur le secteur spatial privé du Vieux Continent, qui n’aura pas assez de marge de manœuvre pour se développer tant SpaceX occupe déjà une place importante en orbite basse – zone qui se situe entre 250 et 1 500 km d'altitude. « L'espace sera beaucoup plus restrictif [en termes de] fréquences et de créneaux orbitaux. Les gouvernements d'Europe devraient collectivement avoir intérêt à donner aux fournisseurs européens des chances égales de jouer sur un marché équitable », a affirmé le directeur général de l’ESA. 

« Vous avez une personne qui possède la moitié des satellites actifs dans le monde. C'est assez incroyable. De facto, c'est lui qui fait les règles. Le reste du monde, y compris l'Europe... ne réagit pas assez vite », a-t-il continué, en faisant évidemment référence à Elon Musk, le P.-D.G. de SpaceX. 

Le secteur spatial privé est en plein boom grâce à la baisse des coûts de lancement mais également au développement de satellites moins imposants ; SpaceX, bien que leader, n’est pas la seule firme à vouloir exploiter l’orbite basse pour le déploiement d’une constellation de satellites. C’est également le cas d’Amazon avec le projet Kuiper, ainsi que de OneWeb. Dans ce contexte, la Satellite Industry Association estime qu’il pourrait y avoir plus de 100 000 satellites commerciaux en orbite d'ici 2029. 

Un manque de régulation à l’échelle internationale 

La hausse du nombre d’objets en orbite pose plusieurs problèmes, notamment l’augmentation de risques de collision et donc une hausse exponentielle du nombre de débris spatiaux. Par ailleurs, les astronomes se plaignent d’une baisse de la visibilité du ciel à cause de Starlink ; si de nouvelles technologies ont été incorporées aux satellites pour solutionner ce problème, il est certain que l’ajout de milliers d’appareils en orbite basse ne fera qu’empirer la situation. 

Les propos de Josef Aschbacher vont dans le même sens que ceux de Franz Fayot, Ministre de l’Économie luxembourgeois :

« Vous avez des gens comme Elon Musk, qui ne font que lancer des constellations et des satellites et lancer des Teslas en orbite. Nous devons établir des règles communes. La colonisation, ou le fait de faire des choses dans un espace complètement déréglementé, est une préoccupation ». 

Aujourd’hui, il n’existe pas d’autorité internationale ayant pour mission de réguler les lancements de satellites : c’est surtout ce manque de supervision, très préjudiciable au spatial européen, que Fayot et Aschbacher dénoncent. 

Source : Ars Technica 

Mathilde Rochefort

Après mes études de journalisme, j’ai décidé de m’orienter vers les domaines qui me passionnent : nouvelles technologies, jeu vidéo, ou encore astronomie. J’adore partager autour de ces sujets mais ma...

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Après mes études de journalisme, j’ai décidé de m’orienter vers les domaines qui me passionnent : nouvelles technologies, jeu vidéo, ou encore astronomie. J’adore partager autour de ces sujets mais ma curiosité m’entraîne à évoquer de nombreux autres sujets au travers de mes articles.

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Commentaires (17)

norwy
C’est trop tard, la digue a sauté !
sofolic
C’est vrai qu’il doit avoir un poids démesuré dans le processus d’autorisation de lancement américain qu’a eu spaceX…<br /> Quelle sont les responsabilités de ce directeur et qu’est ce qui vous fait dire qu’il ne remplit pas ses prérogatives ?
arlesien13200
L’Europe en retard de tout, en retard partout. Tout ce qu’elle sait faire c’est mettre des amendes pour position dominante, bientôt SpaceX et Tesla. Quand on voit les foudres de guerre que sont les dirigeant européens, faut pas s’étonner des retards accumulés.
Wifi93
Et à part ça, il fait quoi ? Arianne 6 est déjà un échec avant même d’avoir atteint le pas de tir. De la jalousie plutôt mal placée dirons-nous. Même la Chine qu’on prenait pour des rigolos ont un programme spatial qui ramène celui de l’Europe au Spoutnik. Espérons qu’ils ne foire pas le lancement du télescope JW.
sofolic
Alors on va remettre les choses en perspectives<br /> quel est le bilan de la NASA ? (budget 22,629 milliard de dollar / 20 milliard d’euro)<br /> quel est le bilan de l’ESA ? (6,49 milliard d’euro)<br /> Il faut bien-sûr ne pas parler des entreprises privés (comme spaceX).<br /> L’Europe injecte moins d’argent, donc les résultats sont moindre, c’est étonnant ?<br /> Le secteur privé européen investi (me semble-t-il) moins que le secteur privé américain. Les résultats sont moindres, c’est étonnant ?<br /> L’Europe, et la France en particulier, n’investit plus sur l’enseignement et la recherche, donc on est en retard ou moins présent sur beaucoup de secteur, mais on reste présent malgré tout encore un peu.<br /> Est-ce qu’on peut en vouloir à un directeur qui a pris ses fonctions en 2021 de l’ensemble des décision d’austérité depuis presque 30 ans des pays européens ?
Bioti
Et sinon pour l’auteure de l’article une petite correction à apporter : «&nbsp;marche de manœuvre&nbsp;» → «&nbsp;marge de manœuvre&nbsp;»
SlowPulseBoy
Je propose également: " solutionner ce problème"-&gt; «&nbsp;résoudre ce problème&nbsp;» <br /> Pas faux, mais vraiment pas beau.
Palou
Bioti:<br /> pour l’auteure de l’article une petite correction à apporter<br /> C’est remonté à la Team, merci pour ta vigilance
Brunol74
L’ESA a beaucoup rigolé quand Space X voulait faire des fusées réutilisable.<br /> Maintenant elle veut tout faire pour le freiner.<br /> La France à toujours eu cette mentalité de rejeter les innovations. Trop conservatrice. Les chinois l’on bien compris et ils font la même chose que Space X.<br /> Investissement, innovation et prendre des risques.<br /> Je trouve ça vraiment dommage, car la France a d’excellents ingénieurs. Mais on a de très mauvais politique sur ce point.
Pck
Il n’est jamais trop tard pour avoir ce genre de bonne colère ! J’aime assez ce que dit aussi le Luxembourgeois : «&nbsp;La colonisation, ou le fait de faire des choses dans un espace complètement déréglementé, est une préoccupation&nbsp;»…
Gab1
Sûrement une contre-partie pour l’implantation de l’usine Tesla en Allemagne
LRH_79
Euh pourquoi une «&nbsp;carte blanche&nbsp;» ?
sofolic
Tous les acteurs du spatial on rit au nez de SpaceX lorsqu’ils ont annoncé leur projet de réutilisation.<br /> Il n’y a pas que l’ESA… C’est facile de ré-écrire l’histoire.
Nicolas_BARET
Après le fond de la question n’est pas seulement une histoire de technologie. Il faut dire que si on multiplie les objets en orbite sans anticiper des voies de sortie sécurisée, on risque de se coincer sur notre cailloux comme des gros cake…
orionb1
personne ne doutait que ce soit possible<br /> les américains le faisaient déjà avec la navette (une merveille, malheureusement chère et qui a connu trop d’accidents)<br /> par contre, c’était la rentabilité et la nécessité qui était en question<br /> la rentabilité n’a encore jamais été prouvée<br /> et SpaceX a dû créer le besoin avec son projet Starlink, projet qui n’est lui-même pas encore rentable<br /> donc bien malin, à ce stade-ci, celui qui peut dire si Musk a eu raison ou non. Après, je pense que si l’ESA envisage aussi la réutilisation, c’est qu’ils jugent la rentabilité comme crédibles ou qu’ils ont peut de paraitre arriérés pour leur image. On verra bien l’avenir mais je n’ai aucun doute que ce que les ingénieurs SpaceX savent faire, les ingénieurs européens savent également le faire.
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