Artemis : la NASA choisit SpaceX pour emmener ses astronautes sur la Lune

Eric Bottlaender
Par Eric Bottlaender, Spécialiste espace.
Publié le 17 avril 2021 à 12h27
Vue d'artiste présentant un Starship-HLS sur la surface lunaire. Les astronautes font petits, en bas. Crédits SpaceX
Vue d'artiste présentant un Starship-HLS sur la surface lunaire. Les astronautes font petits, en bas. Crédits SpaceX

Dans le cadre de son programme Artemis, l'agence américaine a sélectionné le Starship de SpaceX pour devenir le HLS (Human Landing System). Le grand vaisseau aura pour mission d'emmener des astronautes depuis l'orbite vers la surface lunaire.

Les concurrents de SpaceX étudient déjà leurs options pour un recours.

SpaceX partout !

L'annonce a fait l'effet d'un coup de tonnerre, quelques heures avant le départ en week-end des américains : la NASA, qui est encore sous administration provisoire, a sélectionné SpaceX pour son « contrat géant » HLS. Un chèque de 2,89 milliards de dollars que l'agence américaine fournira à l'entreprise d'Elon Musk au fur et à mesure qu'elle remplit les étapes qui permettront d'envoyer des astronautes américains fouler à nouveau le sol lunaire. Dans les faits, le Starship, imposant véhicule de 50 mètres de long et 9 mètres de diamètre, devient le nouveau « LEM » (ou LM, Lunar Module) duquel ils sortiront fouler le régolithe, à petits pas pour l'Homme et à pas de géant pour l'humanité.

Un projet, mais un concept qui s'affine

Pour autant, la NASA n'abandonnera pas son lanceur super-lourd Space Launch System (SLS) qui propulsera la capsule Orion habitée vers la Lune avec 4 astronautes à bord. Contrairement au profil de vol des missions Apollo, les occupants d'Orion ne retrouveront leur véhicule lunaire qu'en orbite autour de la Lune (avec ou sans passage au sein de la petite station spatiale internationale qui s'y construit, la Gateway). C'est donc à une centaine de kilomètres d'altitude au-dessus de la surface lunaire qu'ils entreront dans le Starship-HLS.

Version spécialisée du véhicule actuellement en développement (explosif) sur le site de SpaceX à Boca Chica au Texas, ce Starship sera envoyé vers la Lune sans occupants. Il sera stationné en orbite lunaire, et il est conçu pour transporter jusqu'à 100 tonnes vers la surface. A condition d'être ravitaillé, l'objectif est d'en faire un véhicule réutilisable, véritable « navette lunaire ».

Le contrat HLS prévoit que la NASA soutiendra le développement du véhicule avec un agenda qui vise un premier alunissage habité en 2024 au plus tôt, en sachant qu'il faudra impérativement une première mission réussie sans astronautes avant d'envoyer « la première femme et la première personne de couleur » (NASA) fouler le sol lunaire. Pour la première mission, deux astronautes resteront en orbite lunaire, les deux autres passeront environ une semaine sur la surface. La NASA envisage un nouvel appel d'offre pour les missions habitées d'ici la fin de la décennie afin de laisser la porte ouverte et éviter un monopole de SpaceX sur les opérations lunaires.

Une proposition que la NASA ne pouvait refuser ?

Si ce choix est un coup de tonnerre, c'est aussi parce qu'il restait deux concurrents en lice face à SpaceX dans ce « round final » depuis l'année dernière : la National Team (association de Blue Origin, Lockheed Martin, Northrop Grumman et Draper) et Dynetics (associé à Thales Alenia Space). Leurs propositions, qui semblaient plus classiques sur le papier, n'ont pourtant pas eu le soutien des évaluateurs, SpaceX obtenant la meilleure note technique et la meilleure évaluation de faisabilité du projet. Il faut souligner également que la NASA comptait bien sélectionner deux fournisseurs pour plus de sécurité, mais que le budget que le Congrès américain lui a alloué n'en permettait… aucun. SpaceX aurait amendé sa proposition (selon le Washington Post) pour qu'elle rentre dans l'enveloppe disponible.

Cette décision fera encore beaucoup parler d'elle. Cela étant, elle inscrit aussi dans la réalité la volonté de la NASA de poursuivre l'objectif fixé par l'administration précédente d'aller à nouveau fouler le sol lunaire.

Source : Nasa

Eric Bottlaender
Par Eric Bottlaender
Spécialiste espace

Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser vos questions !

Vous êtes un utilisateur de Google Actualités ou de WhatsApp ?
Suivez-nous pour ne rien rater de l'actu tech !
Commentaires (0)
Rejoignez la communauté Clubic
Rejoignez la communauté des passionnés de nouvelles technologies. Venez partager votre passion et débattre de l’actualité avec nos membres qui s’entraident et partagent leur expertise quotidiennement.
Commentaires (10)
Fulmlmetal

Etrange décision de la part d’une administration provisoire de prendre une si grande décision pour la suite du programme. Il aurait été plus judicieux que Biden nomme rapidement un administrateur
et que celui ci décide.

« la première femme et la première personne de couleur »
Vu la tendance à la mode aux USA, je parie sur un acte double, une pierre deux coup, une femme noire pour le premier pas depuis Apollo.
Perso je n’aime pas ce genre de pratique à la mode, cela signifie que le premier ou la première ne sera pas choisi sur ses compétences mais sur son apparence. C’est regrettable.

tinou7789

Oui après je pense que tous les astronautes sont compétents dans leur domaine. Pour faire un premier pas (c’est vraiment symbolique) c’est pas la personne la plus compétente qui le fait.

tfpsly

Pas forcément : quand on arrive à ce niveau de sélection, il n’y a pas beaucoup de différences entre les compétences des candidats restants. Et il est probable qu’avoir une gueule charismatique a aussi aidé à être sélectionné dans les années 60s.

dapoussin

Super nouvelle, qui va donner à SpaceX les moyens de ses ambitions marsiennes :slight_smile:

Niverolle

Comme quoi, il ne fallait pas trop se faire de mouron pour le financement et le développement de Starship (ici). Finalement ce sera NASA, USAF (pour le moteur Raptor) et FCC (indirectement mais généreusement via Starlink).

ebottlaender

Ah c’est sûr que ça va beaucoup aider SpaceX, ça c’est certain ! Après il ne faut pas se leurrer non plus ces 3 milliards ne suffiront pas à tout couvrir (d’autant que la version lunaire est quand même bien spécifique), mais c’est un soutien de poids.

Starlink, ma foi on a déjà débattu et c’est pas le sujet ici, il faut voir si un jour le programme rapportera plus d’argent qu’il n’en coute (car le contrat FCC est dépendant du déploiement et du service rural, et lui non plus ne couvre pour l’instant pas les dépenses du projet).

Chirokee

Quelle étrange organisation. Tout cela me paraît bien compliqué et un tantinet alambiqué. Bon, autant l’avouer, je n’y comprend pas grand-chose. Par exemple, comment feront les autres entreprises pour accomplir leur mission d’exploration ? Leurs astronautes arrivés sur Gatexay devront emprunter le Starship pour aller se poser ? A quoi bon ? Bref, quelque chose m’échappe

tomcat75

Cela me parait avisé comme décision car le Starship me parait de plus en plus destiné à servir de navette : Terre - orbite terrestre, Lune -orbite lunaire (comme dans le projet de la NASA) et Mars -orbite martienne !
Les trajets Terre-lune et Terre-mars me semblent devoir être préférablement accomplis par des vaisseaux qui restent en orbite… Pour la lune, on peut envisager un Starship dédié qui ne se pose jamais, mais pour le voyage vers mars, je pense qu’un autre type de vaisseau s’impose (ce qui permettrait d’avoir peut-être une propulsion nucléaire par ex)

malak

SpaceX a revu à la baisse le coût de sa proposition pour choper le projet qui sinon allait tomber à l’eau…
Donc SpaceX n’a pas eu le choix, sa survie dépendant principalement du tapage médiatique… si SpaceX perdait ce projet, c’était tirer également un trait sur Mars… bref le Congrès a bien joué le coup et a profité de la situation.
Si SpaceX échoue, les pertes seront limitées pour la Nasa.

Niverolle

Tout à fait, mais maintenant que la NASA a apporté sa caution technique, ce sera facile d’attirer les capitaux privés nécessaire pour mener à bien le projet. Ce n’est pas un détail.