Tout savoir sur la station spatiale internationale (ISS)

Matthieu Legouge
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03 mars 2020 à 16h21
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Station spatiale internationale
© NASA

Emblématique, unique, ambitieuse : les adjectifs ne manquent pas pour qualifier cette station orbitale née d'une collaboration étroite entre les grandes organisations spatiales et avec la participation de 16 pays. En orbite depuis plus de 20 ans et occupé en permanence, ce véritable laboratoire scientifique qui joue un rôle crucial dans plusieurs domaines arrive cependant en fin de vie et pourrait être désorbité entre 2024 et 2028. Zoom sur un programme vers lequel les regards du monde entier se tournent régulièrement.

Naissance de l'ISS : un jeu de Lego spatial

L'ISS - International Space Station - est un projet qui a de quoi surprendre et même si aujourd'hui, en 2019, nous commençons à être habitués aux annonces ambitieuses et autres projets titanesques, la Station spatiale internationale demeure, plus de 20 ans après son lancement, l'objet le plus considérable construit par l'Homme à graviter autour de la Terre.

Cette aventure qui a débuté durant le siècle dernier a constitué un sérieux défi pour les différentes agences spatiales qui ont participé au programme (NASA, ESA, JAXA, Roscosmos, ASC) : l'ISS est en effet un véritable Lego spatial qu'il a fallu assembler module par module et non sans difficulté. Les challenges imposés par ce puzzle ont d'ailleurs revêtu presque autant de complexité lors du lancement de la construction en 1998, de l'assemblage de la station jusqu'en 2011 (sans compter les extensions qui ont suivi), que dans l'historique de ce projet développé par la NASA qui a finalement mené à la collaboration de 16 nations avec un budget total estimé à 115 milliards de dollars.

ISS - 1999
L'ISS en juin 1999

Théorisé dès les années 60 par la NASA, le concept de station orbitale polyvalente permettant de mener à bien des programmes scientifiques divers et variés (biologie, observation terrestre et météorologie, physique, astronomie, etc.) et éventuellement de servir de base relais a vite vu le jour en 1973 avec le lancement de la station spatiale Skylab. En raison de finance limitée à la suite du programme Apollo et avec le développement subséquent de la navette spatiale Enterprise OV-1010 en 1972, Skylab subira quelques désagréments et ne sera malheureusement occupée que par trois équipages successifs durant 6 mois (le dernier équipage établira tout de même un nouveau record en y séjournant 84 jours) et se désintégrera dans l'atmosphère en 1979.

Skylab a malgré tout lancé les prémices de ce que sera l'ISS près de 30 ans plus tard, mais c'est aussi le contexte de compétition entre l'URSS et les États-Unis qui favorisera le développement d'autres programmes ambitieux, à commencer par les stations russes Saliout et Almaz dès 1971, puis la station Mir en 1986.

Les déboires de la NASA à la fin des années 80, notamment avec la terrible désintégration en vol de la navette spatiale Challenger seulement 73 secondes après son décollage, emportant avec elle ses sept membres d'équipage, ralentiront grandement le développement de l'ISS. Il faudra finalement attendre le début des années 90 pour voir la Russie rejoindre le programme et apporter son expertise acquise grâce à Mir, ainsi qu'une manne financière indispensable. Cette collaboration marque également le début d'une nouvelle ère entre les États-Unis et la Russie après l'effondrement de l'URSS.

Un assemblage long et minutieux

La construction et l'assemblage de l'ISS débutent en 1998. Une démarche qui ne sera pas sans effort, puisqu'il faudra effectuer une quarantaine de vols à l'aide de la navette spatiale américaine ainsi qu'avec le lanceur russe Proton pour mettre en orbite à environ 400 km d'altitude des dizaines de composants pour une masse totale qui avoisine les 400 tonnes. Malgré cet assemblage long et minutieux qui se terminera en 2011, le premier équipage à partir à destination de l'ISS s'envolera le 31 octobre 2000, battant par la même occasion le précédent record en séjournant 136 jours consécutifs dans l'espace ! Malheureusement, un autre accident entachera et ralentira le programme avec la désintégration de la navette spatiale Columbia le 1er février 2003 lors de sa phase de rentrée atmosphérique. Les sept membres de l'équipage périront lors de cet accident.

Navette spatiale STS-114
Premier lancement de la navette spatiale STS-114 deux ans après le drame de Columbia en 2003

Les vols reprendront 2 ans plus tard, en 2005, et la NASA prendra la décision de lancer son programme COTS pour prendre la relève de la navette spatiale dont l'arrêt est programmé pour 2011, à la fin de l'assemblage de la station, qui comportera alors 13 modules pressurisés.

Par la suite, la NASA signera plusieurs contrats dans le cadre du programme COTS avec des acteurs privés qui sont régulièrement placés à la Une des médias du monde entier. Il s'agit bien entendu de SpaceX, Boeing, ou encore Orbital Sciences. Ce programme permet à la NASA de confier le transport de fret au secteur privé.

Configuration de l'ISS - juin 2017
Configuration de l'ISS en juin 2017 © NASA


La relève après l'arrêt de Space Shuttle

Il sera suivi en 2010 par le programme CCDeV (Commercial Crew Development) à laquelle de nombreux candidats répondent : Sierra Nevada Corporation, Boeing, Blue Origin, United Launch Alliance, etc. Le CCDeV a pour but de transporter les astronautes américains jusqu'à l'ISS depuis le sol américain, et ainsi de se passer des services du Roscosmos et de sa fusée Soyouz. En 2014, SpaceX et Boeing remportent tous deux le contrat. Leurs deux vaisseaux, le Dragon Crew et le CST-100 Starliner, seront financés par la NASA.

Crew Dragon - SpaceX
Crew Dragon - SpaceX

À l'heure actuelle, la NASA a prolongé son contrat avec le Roscosmos pour l'expédition d'astronautes jusqu'à l'ISS. Les vaisseaux de Boeing et SpaceX devraient cependant être prêts dans les mois qui viennent. La société d'Elon Musk a par ailleurs obtenu sa certification pour effectuer des vols habités suite au succès de son décollage avec Crew Dragon, mais une récente défaillance lors d'un test statique pourrait repousser encore l'échéance de cette première mission entièrement américaine de plusieurs mois. Une échéance qui s'avère pourtant pressante pour restaurer la grandeur spatiale Américaine, et bien que le vaisseau Soyouz soit encore l'un des plus sûrs, l'incident qui s'est déroulé en octobre dernier soulève des questions et aurait bien pu tourner au drame.

Une station en fin de vie ?

La plupart des composants de l'ISS ont été conçus pour une durée de vie de 15 ans. La NASA et ses différents partenaires ont d'ores et déjà programmé la fin de vie de la station entre 2024 et 2028, année où elle soufflera ses 30 bougies.


Seulement, son rôle et ses objectifs scientifiques sont nombreux puisqu'ils permettent notamment d'étudier la physiologie humaine en orbite, de faire des recherches sur la physique et la science des matériaux, des études biologiques, mais aussi d'observer la Terre et l'espace grâce à ses multiples instruments.

La perte de l'ISS serait donc énorme, d'autant plus qu'il s'agit ici d'un programme collaboratif auquel de nombreux pays participent et nous espérons bien revoir Thomas Pesquet à l'œuvre ! Néanmoins, plusieurs projets sont actuellement en train de voir le jour pour remplacer l'ISS. La NASA entend ainsi mettre en place une plateforme qui orbitera cette fois-ci bien plus loin, autour de la Lune avec la Lunar Orbital Platform-Gateway (LOP-G).

Thomas Pesquet - ISS
Thomas Pesquet lors d'une sortie extravéhiculaire © NASA

Le Roscomos ainsi que l'agence spatiale chinoise ont eux aussi leurs projets. Les Russes entendent développer un nouveau projet nommé OPSEK - Orbital Piloted Assembly and Experiment Complex - qui se situera en orbite basse terrestre, tout comme l'ISS. L'Empire du Milieu ambitionne quant à lui de devenir une superpuissance spatiale et outre ses projets de colonisation de la Lune, la CNSA compte lancer dès 2020 son « Palais Céleste » Tiangong.

Matthieu Legouge

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Commentaires (14)

Fulmlmetal
“Malgré cet assemblage long et minutieux qui se terminera en 2011, le premier équipage à partir à destination de l’ISS s’envolera le 31 octobre 2000, battant par la même occasion le précédent record en séjournant 136 jours dans l’espace”<br /> Record américain, car coté soviétique/russe le record était déjà bien dépassé à de multiples reprises, avec un vol qui n’a jamais été battu de 437j de Poliakov en 1995
Badulesia
Bonjour.<br /> Article globalement intéressant qui résume le sujet. Cependant il y a plusieurs coquilles et des erreurs.<br /> “l’objet le plus considérable construit …” : le plus gros, le plus lourd.<br /> “qui a débuté durant le siècle dernier” : au siècle dernier.<br /> “lors du lancement de la construction” : mieux vaut dire début, lancement à un autre sens dans un article d’astronautique.<br /> “Théorisé dès les années 60 par la NASA”. Tsiolkovski s’était déja penché sur le sujet en 1920/30, et vraisemblablement d’autres avant (à chercher)<br /> “le développement subséquent” : formule pompeuse <br /> “navette spatiale Enterprise OV-1010” Entreprise était une navette non opérationnelle, juste destinée à tester l’aterrissage, et son code était 101.<br /> “un poids total qui avoisine les 400 tonnes”. Le poids est une force qui se mesure donc en newton. 400t est une masse. Sérieux … un élève de 3ème sait fait la différence !<br /> “elle sifflera ses 30 bougies.” soufflera ?? <br /> "son rôle et ses objectifs scientifiques sont nombreux puisqu’ils permettent " : son rôle, donc le sujet est la station, il faut mettre “puisqu’elle permet …”<br /> Tiangong : le mot n’apparaît qu’à la fin. Même si en comparaison les stations spatiales chinoises étaient bien modestes, elles datent tout de même de 2011.<br />
Badulesia
Bien vu !<br /> Il faudrait préciser “jours consécutifs” pour que l’argument soit plus fort.<br /> PS : Poliakov
Fulmlmetal
Je rajouterai ceci à la liste:<br /> -" L’ISS - International Space Station - est un projet qui a de quoi surprendre et même si aujourd’hui, en 2019,": non ISS était un projet avant sa construction, maintenant qu’elle est faite il vaut mieux parler de réalisation ou de programme.<br /> C’est vraiment dommage de faire un si long article sans parler une seule fois du module européen Columbus et du ravitailleur (réellement) automatique ATV qui a fait un sans faute en 5 vols. Et dommage aussi de n’avoir fait aucune mention des astronautes européens et français qui y ont séjournés. Vous avez parlé plus de SpaceX (pour changer) alors que leur role a été plus mineur que celui des européens.
fawaz
Tu te rends compte à quel point tes critiques manquent de pertinence ? L’article est très bien rédigé sauf pour le record de séjour spatial relevé par Fulmlmetal.
Niverolle
Mais bien sûr, confondre poids et masse, ce n’est pas pertinent quand on parle d’astronautique <br /> Un petit détail comme celui-là, et c’est la crédibilité de l’auteur qui est remise en cause. Et pourquoi refuser la critique lorsque celle-çi est constructive (des propositions pour améliorer l’article) ?
fawaz
Parler de poids pour désigner une masse est malheureusement passé dans le langage courant y compris dans le milieu journalistique même si ça déplaît aux bacheliers qui viennent de décrocher leur bac S.<br /> Je ne trouve pas constructif de critiquer l’emploi des mots “lancement” et “subséquent”, Tsiolkovski évoque le concept de station spatiale vers 1903, la NASA travaille concrètement sur ce sujet dans les année 60. Pourquoi citer plutôt la simple et vague idée plutôt que le vrai travail d’une agence en plein programme spatial ? Même si la navette Enterprise n’est pas allée dans l’espace, son coût de développement additionné à celui du programme Apollo ont limité les finances allouées aux autre projets. En quoi c’est faux ? Pour l’usage de “rôle” les 2 sont permis par la langue française.<br /> Tiangong 1 et 2 ne sont que des prototypes, ok l’auteur aurait pu ajouter un “3” pour être plus précis. etc, etc …<br /> Bref, tout ce temps perdu à te répondre pour te dire que je trouve saoulant les gars qui se croient obligés de critiquer à tout va et qui essaient de faire passer pour un torchon des articles de vulgarisation qui s’adresse à un public large et qui font le job en terme d’information.<br /> Parler de Poliakov, là oui on est sur du commentaire pertinent !
Niverolle
Quand on veut vendre de la pertinence, on évite les arguments subjectifs et surtout on s’interdit la mauvaise foi du genre “même si ça déplaît aux bacheliers qui viennent de décrocher leur bac S” ou “qui essaient de faire passer pour un torchon des articles de vulgarisation” !
Matthieu_Legouge
Hello,<br /> Merci pour vos retours qui m’ont permis de revenir sur certaines coquilles !
bullshit0
Merci pour l’article.
Fulmlmetal
Fawaz, Le problème c’est que la qualité journalistique est de plus en plus catastrophe sur le net, les articles sont de plus souvent baclés, mal travaillés et non vérifiés. Et c’est paradoxal qu’à une époque où on a jamais eu autant d’info dispo grace à internet les journalistes ne prennent meme plus la peine de vérifier certaines infos alors que la plupart des erreurs seraient évitable juste en ayant recherché quelques secondes sur google ou wikipedia. Les journalistes marquent de plus en plus n’importe quoi et ne veulent plus prendre la peine de vérifier. Et il n’y a pas de raison que cela change vu que la médiocrité semble plaire ou devenir la norme, et c’est trop souvent aux lecteurs/commentaires de corriger les erreurs et les fakenews ou finir l’article. C’est pas normal quand même.<br /> La cause de cette dégradation est multiple, la course au scoop pour annoncer vite fait la rumeur avant la concurrence, l’incompétence et l’emploi de personnes qui n’ont fait aucune étude de journalisme (la base du métier de journaliste est de vérifier et regrouper les infos et sources), des paiement à l’article qui poussent certains à écrite beaucoup d’article quitte à faire et dire n’importe quoi, et enfin des sites qui ont pour principal objectif de faire du clic et des visites, d’où le terme titre putaclic, afin d’attirer un max de monde pour gagner plus en revenu publicitaire.<br /> Bref, je trouve au contraire très sain de voir des gens finir le travail ou reprendre un auteur qui a baclé son article, de voir des gens corriger ou préciser des articles qui sont faux ou bourrés d’erreurs. Défendre la médiocrité n’apporte rien de bon et tirera de plus en plus la qualité vers le bas.
fawaz
Je suis complètement d’accord avec toi, et c’est pour ça que je ne lis que des articles commentés. Il m’arrive même de lire les commentaires avant l’article, chacun apporte sa pierre à l’édifice, souvent se sont de vrais passionnés qui partagent leurs connaissances, rien de mieux pur combattre les fake news ou compléter un article. Mais 80% des remarques de Badulesia étaient sans grand intérêt, on n’a pas forcément envie de perdre notre temps à lire un gars qui se noie dans ce genre de détails au point de friser le ridicule.
Fulmlmetal
Certains reproches étaient pourtant bien justifiés, certaine sétaient plus basés sur le style, sur le francais et là aussi je lui donne raison. autrefois les journalistes savaient écrire français correctement, et les rédactions faisaient relire et faisaient corriger, mais maintenant c’est fini, les auteur ne se relise pas, les rédacteurs ne lisent pas et balance immédiatement l’article ne ligne pour etre le premier, et au final on se retrouve avec des articles bourrés de fautes ou d’erreurs de style. Et comme je disais c’est en reprenant les erreurs qu’on arrivera à forcer les auteurs d’articles a faire un effort par la suite. si on accepte les faute,s les erreurs de style, puis les fake news c’est l’escalade et la justification vers la médiocrité.
Matthieu_Legouge
Les “erreurs de style” que vous dénotez sont purement subjectives. Je ne vois pas en quoi un auteur ne devrait pas employer de formules comme “lors du lancement de la construction”, “le développement subséquent”, ou “l’objet le plus considérable construit …”<br /> À ce moment-là vous pourriez revenir sur chaque mot de chaque article : “fabrication” aurait été mieux que “construction”, “renouvelé” que “prolongé” et ainsi de suite … c’est infini … euh, interminable pardon !<br /> Bref, vos commentaires sont tout de même les bienvenus, à partir du moment où ils sont respectueux je n’ai rien à redire ! Attention toutefois au procès d’intention … “les journalistes” par ci, “les médias” par là, encore une fois vous présentez une opinion personnelle qui s’apparente peut-être pour vous à une “vérité” mais qui ne l’est pas forcément (surtout en généralisant autant), et dans laquelle on peut simplement y voir un sophisme de plus.
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