Sortie compliquée pour Thomas Pesquet et Shane Kimbrough sur les flancs de l'ISS

Eric Bottlaender
Spécialiste espace
17 juin 2021 à 15h49
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Coucou Thomas ! Accroché par les pieds, à 400 km d'altitude... Crédits ESA/T.Pesquet
Coucou Thomas ! Accroché par les pieds, à 400 km d'altitude... Crédits ESA/T.Pesquet

Malgré une longue préparation, la première sortie pour installer les nouveaux panneaux iROSA sur leurs supports de la grande poutre centrale de la station spatiale internationale fut émaillée de complications. Ces soucis, dont un problème de scaphandre pour Shane Kimbrough, ont retardé les opérations.

La prochaine sortie aura-t-elle lieu dimanche ?

La Loi de Murphy nous guette tous !

Après l'arrivée des nouveaux panneaux solaires déroulants sur l'ISS le 5 juin, il ne restait plus qu'à sortir pour les accrocher sur leurs supports ! Du moins, en théorie. Thomas Pesquet et son collègue américain Shane Kimbrough (qui avaient déjà réalisé une sortie en scaphandre en commun en 2017) s'étaient entrainés à ce véritable ballet pour déplacer ces deux imposants cylindres de 340 kg sur la poutre centrale de l'ISS depuis pratiquement un an et demi… Mais parfois, le matériel refuse de participer aux efforts ! La sortie (officiellement US-74) avait pu démarrer à l'heure, après un réveil matinal, quelques heures à respirer de l'oxygène pur, puis le test des scaphandres avant de passer dans le sas et d'entamer la dépressurisation. A 14 h 09 (Paris), l'écoutille était ouverte et les deux astronautes avaient débranché leur combinaison du support-vie de la station. Toujours reliés par des filins de sécurité à différents points d'ancrage, ils sont sortis et ont vérifié une fois de plus leur équipement.

Thomas Pesquet sort du sas Quest en première position.crédits NASA/ESA/T.Pesquet
Thomas Pesquet sort du sas Quest en première position.crédits NASA/ESA/T.Pesquet

Un souci, deux soucis, trois..

Pour Shane Kimbrough, les ennuis ont démarré dans la foulée. Thomas Pesquet est allé s'occuper des panneaux, stockés sur un site temporaire car ils ne pouvaient pas être amenés jusqu'au bout de la poutre centrale de l'ISS avec le bras robotisé. Il fallait donc d'abord les séparer de leur palette de transport. Mais l'opération a pris du retard : la couverture thermique refermant le sas refusait obstinément de tenir en place, et l'américain a dû se démener pour y arriver. Presque un détail, mais en réalité une mise en bouche avant le reste des pépins techniques qui se sont accumulés. Car après avoir desserré quasiment toutes les fixations de sécurité pour détacher les panneaux, et une fois que Thomas était debout sur le bout du bras robotisé Canadarm2, le système ventral du scaphandre de Shane Kimbrough (le DCM ou Display and Control Module) est entré en anomalie.

C'est que mine de rien, c'est encombrant... Crédits NASA
C'est que mine de rien, c'est encombrant... Crédits NASA

Rien de grave ou de dangereux pour l'astronaute, mais ce dernier comme les équipes au sol doivent être informés en permanence de l'état de la combinaison, et pouvoir régler différents paramètres. Du coup, Shane Kimbrough a dû s'arrêter, puis revenir au sein du sas pour rebrancher son scaphandre au système central de l'ISS et pouvoir redémarrer le DCM. On s'en doute, ce n'est pas une opération qui ne dure que quelques minutes : entre le début de la panne et le moment où Shane Kimbrough a pu revenir aider Thomas Pesquet, ce sont pratiquement 90 minutes qui ont filé. D'autant que les équipes au sol ne devaient pas faire le mauvais choix : pas question d'autoriser Thomas à embarquer les cylindres jusqu'à leur point de fixation si c'est pour se retrouver tout seul au milieu de l'opération !

Ne pas tomber dans le panneau

Les deux astronautes ont été efficaces ensuite, mais ils avaient perdu trop de temps pour pouvoir rattraper l'agenda d'une sortie déjà très dense. Après un véritable numéro de Thomas Pesquet au bout du bras robotisé (techniquement peu complexe mais visuellement ahurissant) pour transporter le panneau, les deux hommes ont pu les installer sur le support prévu, et s'assurer qu'ils resteraient en sécurité. Mais le déploiement n'a pas pu avoir lieu suite à un ennui supplémentaire : un équipement a bloqué le dépliage des deux cylindres contenant le panneau roulé, les empêchant de se mettre dans leur position finale. Ce dernier élément, qui est pour l'instant le plus ennuyeux pour la suite des opérations, a tout de même été photographié sous plusieurs angles différents par les astronautes, avant qu'ils ne quittent leur site de travail.

La sortie aura finalement duré 7 heures et 15 minutes et fut fatigante et frustrante pour les astronautes comme pour toute la grande équipe qui a permis que cette EVA puisse avoir lieu. Les astronautes ont cependant été félicités par leurs agences respectives, ayant réussi à faire du mieux qu'ils pouvaient dans ces conditions.

Si on ne retient que les passages à l'extérieur, une EVA c'est aussi une longue préparation... Crédits NASA/JAXA/A. Hoshide
Si on ne retient que les passages à l'extérieur, une EVA c'est aussi une longue préparation... Crédits NASA/JAXA/A. Hoshide

Une deuxième installation de panneaux est prévue dimanche, et pour l'instant maintenue : Thomas et Shane devront ressortir pour terminer le déploiement du premier panneau avant de répéter toute l'opération. Reste que réussir à tout concentrer en « seulement » six à sept heures de travail sera compliqué, même dans le cas où ils ne rencontreraient aucun point bloquant. Les équipes au sol étudient un éventuel report, le temps de bien documenter le souci pour le déploiement avant de demander aux astronautes de sortir à nouveau.

Source : YouTube

Eric Bottlaender

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Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser v...

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Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser vos questions !

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Commentaires (20)

manufr
Le truc dingue c’est que Thomas Pesquet gagne 2 voir 3 fois moins que la streameuse Amouranth, comme quoi lécher des micros en yoga pants c’est la voie royale
VegaWeb
Oui en effet, sauf que Thomas finira dans les livres et les musées.<br /> Dans 2 millions d’années quand tout le monde aura son propre vaisseau spatial nous irons voir l’histoire de ces astronautes qui nous auront menés jusque là.
Space_Boy
il y aura une annexe qui parlera de Nabilla et Kim, les reines d’Internet…
tinou7789
le plus dingue c’est de penser à elle et voyant une news sur T.Pesquet en fait.
VegaWeb
Tu viens de tuer mon rêve, moi qui pensait avoir mon propre vaisseau et vivre plus de 2 millions d’années
kanda
Quand ça veut pas, ça veut pas. Espérons que tout ira bien à la prochaine sortie. Merci pour l’article!
xeno
Au moins ils n’ont pas a se soucier des conditions météo
dancod
Il a encore une chance d’y arriver en se faisant poser des seins en silicone
marco3522
a manufr : et moi qui ne sais même pas qui est Amouranth…
manufr
Dieu t’en garde
manufr
Je me suis posais la question de combien pouvait gagné un mec qui part dans l’espace faire ce genre de chose, et quand j’ai vu que c’était environ 8k par mois (bien sûr énorme salaire mais moins qu’un médecin en privé ou un député endormi à l’assemblé)mais quand tu les compare à une Amouranth et ses 30/40k $ / mois tu te dis que la race humaine est vouée à disparaitre.
Alexol
Exactement, je trouve ça très faible, par rapport aux risques du métier (les décollages ou atterrissages des fusées c’est quand même dangereux, les sorties spatiales, passer 6 mois dans une boîte de conserve…)<br /> ça devrait être minimum 20k€/mois le temps de la mission, et 8k€ pendant qu’il est sur Terre à s’entraîner comme un fou, c’est sûr…
PaowZ
j’ai suivi en fond l’intégralité de l’opération. Je suis estomaqué par la qualité du flux que la NASA mettait à disposition, surtout depuis les cameras HD des casques. On réalise alors pourquoi il faut 7h pour mener à bien la tâche. Je voyais Shane K. galérer avec la protection thermique de l’écoutille, c’était aberrant… quelque chose qui devrait être simple à résoudre prend des proportions pas possible, dans le vide et sans point d’appui…<br /> J’aurais bien voulu voir la procédure de réinitialisation de la combi de Shane K. Est-ce qu’il a un câble qui sort de la station auquel se brancher ?
Maspriborintorg
Vu la mentalité de l’humanité, il ne reste probablement pas plus d’un siècle de civilisation, détruite par une guerre nucléaire générale ou en tout cas par le réchauffement climatique et l’épuisement des ressources naturelles. L’élément indispensable à la vie est le phosphore qui n’est pas en quantité illimitée et que l’on gaspille sous forme d’engrais qui finissent dilué à l’infini dans les océans. Si des extraterrestre ne nous ont pas rendu visite c’est que sur les 14 milliards d’année de l’Univers, La formation des planètes dure 1 milliard d’année et il faut attendre 500 millions d’années pour qu’apparaisse la vie sous forme d’unicellulaires et 3 milliards d’année pour qu’une civilisation soit en mesure d’émettre des ondes radio et il faut encore 1 siècle pour faire des intrusions dans le cosmos, et ensuite 1 siècle pour provoquer l’apocalypse nucléaire ou environnementale pour tout détruire.
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