"Peut-on avoir confiance en l'open source ?"

03 septembre 2007 à 10h42
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Bertrand Diard, co-fondateur et président de Talend, éditeur français d'une solution open source d'intégration de données, répond à une récente tribune libre de Didier Guyomarc'h, DG d'Informatica France, relative à la pérennité du modèle open source dans le système d'information des entreprises.

Peut-on avoir confiance en l'open source ?

Les logiciels open source sont souvent placés sous le feu roulant des critiques. Quelle fiabilité ? Quelle pérennité ? Quelles garanties de sécurité ? Ces questions sont le plus souvent posées, et laissées sans réponse, par les tenants de systèmes aussi propriétaires que traditionnels dont le maître mot est : pas de vague, business as usual ! Pourtant, 95% des plus grandes entreprises dans le monde auront une stratégie open source en 2008 (source Gartner).

Quelques clés pour comprendre

Sans être la panacée, l'open source offre « ici et maintenant » des solutions de mieux en mieux admises et de plus en plus encouragées par les entreprises. Car au fond, qu'attendons-nous d'un logiciel d'entreprise ? Avant tout, qu'il soit fiable et performant. Plus d'un serveur Web sur deux dans le monde entier utilise un logiciel Apache1. Selon l'étude récente de JoinVision "Open Source in the Fast Lane", les spécialistes informatiques déploient MySQL 30% plus fréquemment qu'Oracle, SQL Server ou DB2. Apache ou MySQL sont ce que l'on a coutume d'appeler des logiciels d'infrastructure, ceux-là mêmes sur qui reposent la fiabilité et les performances de toutes les applications de l'entreprise. Nous pouvons donc admettre qu'un logiciel open source PEUT être fiable et performant... au moins autant qu'un logiciel propriétaire.

Il est aussi important de souligner que la part des applications stratégiques dans les déploiements de logiciels open source est en pleine explosion. L'open source rentre dans une étape industrielle, où plus aucune entreprise ne peut se permettre d'ignorer les logiciels open source dans sa stratégie de système d'information. La conséquence est simple : de plus en plus de segments du système d'information se voient offrir des alternatives open source aussi performantes (voire plus) que leurs alternatives traditionnelles.

L'entreprise attend aussi de ces logiciels qu'ils s'intègrent le mieux possible dans leur infrastructure informatique. Cette intégration vaut autant sur le plan technique (APIs, interfaces diverses, interopérabilité...) que sur le plan fonctionnel et opérationnel, c'est-à-dire la capacité de trouver des techniciens aptes à les mettre en œuvre.

Sur le plan de l'ouverture, les logiciels open source sont... OPEN. Ils fonctionnent par définition en toute transparence et permettent à qui le souhaite de développer toutes les interfaces possibles. Cet élément est un des plus importants leviers pour l'entreprise. Les sociétés utilisatrices, en pleine phase d'urbanisation de leur système d'information, placent la rationalisation au cœur de leurs préoccupations, et le fait que les logiciels open source soient basés sur les standards est donc un argument majeur en leur faveur.

Le plus souvent, ces interfaces sont mises gracieusement à disposition des utilisateurs par leur concepteur. Les communautés open source regroupent souvent plusieurs centaines de milliers, voire plusieurs millions de membres. Si toutes les écoles d'informatique enseignent aujourd'hui Linux, Java, PHP, Perl, MySQL ou Apache, ce n'est pas par conviction religieuse, mais simplement pour que les compétences de leurs élèves correspondent aux attentes de leurs futurs employeurs.

Nous disposons donc de logiciels open source qui peuvent être fiables, performants, ouverts et qui disposent de nombreuses compétences pour leur mise en œuvre. Mais que dire de l'évolutivité ? Une légende court sur l'incroyable nombre de versions, patches, correctifs et autres modifications que les éditeurs open source s'ingénieraient à imposer à leurs utilisateurs.

De fait, il n'en est rien. La plupart des éditeurs open source publient des roadmaps détaillées, s'engagent sur des calendriers de mise à jour, proposent des versions intermédiaires correctives et des versions majeures qui incluent de nouvelles fonctionnalités. Toutes ces évolutions sont transparentes, leur mise en œuvre est laissée à l'appréciation des utilisateurs dont les demandes et commentaires sont, le plus souvent, pris en compte dans des processus clairs.

La communauté joue ainsi un rôle clé, en mettant à la disposition des éditeurs open source la puissance d'une équipe de tests qu'aucun autre éditeur (même pas Microsoft !) ne pourrait financer. C'est encore plus vrai pour des entreprises de la taille de Talend : nous disposons par exemple dans notre cas d'une communauté de plus 1000 bêta testeurs. Un éditeur propriétaire de notre taille ne pourrait jamais fournir le niveau de qualité que nous garantissons à ce jour à nos clients. Voici donc des logiciels open source qui peuvent être fiables et évolutifs.

Peut-on compter sur la communauté ?

Car l'entreprise a besoin de réactivité en cas de problème. C'est humain, personne ne veut être seul face à un problème. Les éditeurs propriétaires vantent les mérites de leur support 24/24, la compétence et l'expérience de leurs équipes, l'omniscience de leurs partenaires. « Pensez donc, une solution déployée partout dans le monde, nous avons forcément déjà rencontré votre problème...et trouvé la solution ! » Certes. Mais tout a un coût, surtout la compétence et il est quand même surprenant d'avoir à payer un éditeur pour obtenir la solution à un problème créé par son logiciel.

Dans le camp de l'open source, chacun vante les mérites de la communauté et de l'échange libre d'informations. C'est indiscutable, mais ne devrait pas empêcher une entreprise utilisatrice de faire appel, si nécessaire, aux services, payants, d'une société de services compétente - ou de l'éditeur open source lui-même, qui tout comme les éditeurs propriétaires, est à même de supporter ses solutions ! La différence, c'est que l'utilisateur a le choix de son canal de support - en fonction, entre autres, du prix qu'il est prêt à payer.

Zéro est arrivé

Ce qui nous amène à aborder le facteur économique. Et là, il n'y a rien à dire. Un logiciel open source est, le plus souvent, gratuit. Pas de licence, pas d'engagement : coût d'acquisition ZERO. Reste le fameux coût total de possession ou TCO (Total Cost of Ownership). Celui-ci dépend des besoins de l'entreprise, de ses propres compétences et du fournisseur auquel elle fait éventuellement appel.

Une situation classique et qui ne diffère du TCO des solutions propriétaires que par l'obligation qui est faite au client de passer entre les fourches caudines de l'éditeur ou de l'un de ses partenaires. Il faut cependant préciser qu'en se fondant principalement sur des standards comme Eclipse, Java, Perl ou PHP, les éditeurs open source ouvrent un champ de compétences beaucoup plus fourni que les éditeurs propriétaires, ce qui optimise encore les étapes de mise en œuvre.

Fiabilité, performance, ouverture, interopérabilité, disponibilité des compétences, évolutivité, économie, autant de qualités que les entreprises attendent de leurs solutions logicielles. Etre propriétaire ou open source ne garantit aucune de ces qualités. Dans un cas (solution propriétaire) l'entreprise doit faire un pari sur la pérennité de son fournisseur. Dans l'autre, l'open source, l'entreprise peut investir les économies réalisées sur l'achat des licences pour développer ses avantages concurrentiels. Pour certains, le choix est déjà fait.

En conclusion, je pense les modèles ne sont pas réellement concurrents, mais plutôt complémentaires. Cette complémentarité permet de capitaliser au cas par cas en fonction des besoins des utilisateurs et des solutions disponibles. Comme dans beaucoup d'autres industries, le logiciel est maintenant disponible sous différents modèles économiques.

Je suis convaincu que le monde du propriétaire et celui de l'open source vont cohabiter pour créer de la valeur, à l'image de ce que tentent de faire : avec Eclipse, Oracle avec le rachat de Sleepycat (base de données open source), Citrix avec le rachat de Xen Source ou encore RedHat avec le rachat de Metametrix. Et dans un domaine que je connais bien, celui de l'intégration de données, nous constatons tous les jours auprès de grands comptes que les solutions d'intégration open source de Talend sont utilisées non pas en lieu et place, mais plutôt en complément des solutions propriétaires comme celles d'Informatica ou de Business Objects.

Bertrand Diard, CEO et co-fondateur de Talend
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