Fraude fiscale : le Conseil constitutionnel autorise en partie la collecte de données via les réseaux sociaux

Alexandre Boero
Chargé de l'actualité de Clubic
31 mars 2020 à 11h21
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© Conseil constitutionnel

L'article 154 de la loi de finances pour l'année 2020, tant contesté, a finalement été validé. S'il a été partiellement censuré par les Sages, l'expérimentation aura bien lieu.

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Le 20 décembre 2019, le Greffe du Conseil constitutionnel avait accusé réception de trois saisines de députés (de droite, comme de gauche) et de sénateurs visant à faire censurer et annuler différentes dispositions de la loi de finances pour 2020. Parmi celles-ci se trouvait celle permettant l'expérimentation de la collecte et l'exploitation, par le fisc, des données rendues publiques sur les réseaux sociaux et les plateformes numériques, figurant à l'article 154 de cette loi. Les membres du Conseil constitutionnel n'ont prononcé qu'une censure partielle de l'article dans leur décision, rendue le 27 décembre 2019.

Les Sages acquiescent mais préviennent les autorités de ne pas abuser

L'article 154 de la loi de finances pour 2020 autorise l'administration fiscale et les douanes à collecter et à traiter, de manière automatisée, les données personnelles (photos, vidéos...) accessibles sur des services en ligne, comme les réseaux sociaux ou les autres grandes plateformes numériques. Et ce à titre expérimental pour trois ans.


La loi est, rappelons-le, destinée à lutter contre la fraude et l'évasion fiscales, qui est un objectif de valeur constitutionnelle. Mais vu la méthode, les Sages ont souhaité vérifier que l'objet de l'article 154 n'entrave pas l'exercice du droit de libre communication ni la liberté de parler, écrire et imprimer, qui sont des conditions de la démocratie. Ces derniers estiment que ces dispositions portent effectivement atteinte au droit au respect de la vie privée et à la liberté d'expression et de communication, en l'état. Cependant, « il en résulte également que l'atteinte portée à l'exercice de la liberté d'expression et de communication est nécessaire, adaptée et proportionnée aux objectifs poursuivis », selon l'institution.

Le Conseil indique que les contenus épiés par le fisc doivent être librement accessibles au public, ce qui exclut, de fait, ceux visibles qu'en cas d'inscription sur le réseau social ou la plateforme. Celui-ci précise également que les autorités compétentes devront veiller, sous le contrôle du juge, à ce que les algorithmes utilisés dans le cadre du traitement des données « ne permettent de collecter et de conserver que les données strictement nécessaires à ces finalités ».

La majoration de 40 % écartée par le Conseil constitutionnel

Nous parlions plus haut d'une censure partielle de l'article 154. Le Conseil constitutionnel a fait supprimer la disposition qui aurait pu permettre à l'administration fiscale de collecter et exploiter de façon automatique des données « pour la recherche du manquement sanctionnant d'une majoration de 40 % le défaut ou le retard de production d'une déclaration fiscale dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure ».


Les Sages précisent que dans une telle situation, les finances publiques sont déjà au courant de l'infraction de l'administré, et qu'aller plus loin porterait atteinte de façon disproportionnée au droit au respect de la vie privée et à la liberté d'expression et de communication.

Source : Conseil constitutionnel

Alexandre Boero

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Journaliste, chargé de l'actualité de Clubic. Reporter, vidéaste, animateur et même imitateur-chanteur, j'ai écrit mon premier article en 6ème. J'ai fait de cette vocation mon métier (diplômé de l'EJC...

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Journaliste, chargé de l'actualité de Clubic. Reporter, vidéaste, animateur et même imitateur-chanteur, j'ai écrit mon premier article en 6ème. J'ai fait de cette vocation mon métier (diplômé de l'EJCAM, école reconnue par la profession), pour écrire, interviewer, filmer, monter et produire du contenu écrit, audio ou vidéo au quotidien. Quelques atomes crochus avec la Tech, certes, mais aussi avec l'univers des médias, du sport et du voyage. Outre le journalisme, la production vidéo et l'animation, je possède une chaîne YouTube (à mon nom) qui devrait piquer votre curiosité si vous aimez les belles balades à travers le monde, les nouvelles technologies et la musique :)

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Commentaires (9)

BetaGamma
Laisser la possibilité aux GAFA de ne pas abuser… c’est leur permettre une collecte complète et totale !<br /> Il a touché combien le père Fabius pour sortir une telle énormité ?
nikon561
« Les Sages acquiescent mais préviennent les autorités de ne pas abuser ».<br /> ouai, on sait exactement comment ca vas finir, c’est a chaque fois la meme chose, promis juré c’est QUE pour l’usage X. 3 mois plus tard, c’est etendu a quasi tout.<br /> et la CNIL la dedans, car ca vas a l’encontre du RGPD cet usage. facebook et autres n’ont pas vocation a ce que les données qui s’y trouvent servent a l’etat, donc ce detournement rend de fait illegal l’usage des données (Detournement de finalité), selon le RGPD. je comprend pas que le CC valide ca!
AlexLex14
nikon561:<br /> et la CNIL la dedans, car ca vas a l’encontre du RGPD cet usage. facebook et autres n’ont pas vocation a ce que les données qui s’y trouvent servent a l’etat, donc ce detournement rend de fait illegal l’usage des données (Detournement de finalité), selon le RGPD. je comprend pas que le CC valide ca!<br /> Effectivement… <br /> La CNIL a déjà pesté et marqué sa désapprobation, mais le Conseil constitutionnel reste le décideur suprême.<br /> Je suis d’accord avec toi, on risque d’assister à pas mal d’abus avec tout ça.
chaton51
vous feriez mieux de vous occuper de tous les politiques tous pourris jusqu’à la moelle de l’os… sans compter que c’est la porte ouverte a la suite… bref la chine 2020 c’est la France !
Kahn-San
peut être déjà commencer par recroiser les déclarations d’impôts et les cartes grises <br /> il y aura déjà matière à s’occuper<br /> et qu’en est-il du pote qui va se faire plaisir une journée sur circuit ou en louant une belle italienne pour un WE et poster sur les réseaux ? contrôle fiscal ?<br /> comme dit plus hait il serait déjà bien de commencer à balayer devant sa porte
nikon561
sauf que ce systeme, de base, est stupide.<br /> 1- il ne se base que sur les données publiquement accessibles =&gt; passer le compte en privé suffit a désamorcer le truc.<br /> 2- le principe même des réseaux sociaux fait que les gens ne postent que le meilleur, voir des choses enjolivées qui ne représentent donc pas la realité.<br /> au final, on a un truc qui bafoue la vie privée, la loi, inutile et potentiellement generateur de faux positif. voila, tout ca pour ca. encore un truc voulu, conçu et mis en place par des personnes qui n’ont pas la moindre idée de ce a quoi ils s’attaquent et bafouent au passage, une fois de plus, les libertés individuelle et la loi.
atahonfl
Juste un peu de dictature en plus, raison de plus pour combattre, aussi bien ces dirigeants corrompus que ceux, y compris ici, qui les soutiennent. Vous l’avez voulu, on y vient…
Blues_Blanche
En gros actuellement on peut voler tout le monde à la vue de tous, s’en vanter et il n’est pas possible pour le fisc de récupérer l’argent qui nous appartient. Les types qui fraudent devraient être punis car ils nous volent. Si en plus ils s’en vantent sur les réseaux sociaux ca mérite plus qu’un contrôle fiscal.<br /> Ce qui est affiché en publique est publique, ça n’a rien du domaine privé et montrer le fruit de ses méfaits n’a rien du droit à la liberté d’expression. Un voleur est un voleur.
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