L’Autorité de régulation des communications électroniques, que l'on connaît mieux sous l'acronyme ARCEP estime que l’essor de l’IA générative remet en cause le fonctionnement ouvert et libre d’Internet. Son rapport 2025 décrit les risques liés à la concentration des services, aux algorithmes opaques et aux nouvelles habitudes de navigation.

- L'ARCEP s'inquiète de l'impact des IA génératives sur l'accès libre à Internet, modifiant la navigation traditionnelle.
- Les IA génératives, en synthétisant les contenus, risquent d'invisibiliser certaines informations et de réduire la diversité.
- L'ARCEP propose une régulation pour garantir la transparence et la neutralité du Net face à ces nouvelles technologies.
Quand une IA répond directement à une requête, elle peut faire disparaître les sources. Pour l’ARCEP, qui a déjà émis des recommandations pour réguler le cloud, ce basculement modifie en profondeur la manière dont les internautes accèdent à l’information. Dans son rapport annuel publié début juillet, l’autorité indépendante s’inquiète de l’influence des interfaces pilotées par des modèles d’IA. Elle y consacre une partie entière de son bilan, une première. À ses yeux, ces outils modifient les règles du jeu, car ils ne renvoient pas vers des sites, mais synthétisent des contenus qu’ils n’ont pas produits. L’ARCEP redoute qu’un petit nombre d’entreprises n’impose des filtres automatisés à l’ensemble du web, sans transparence sur les critères de sélection. Cette évolution remet en cause l’un des piliers du Net tel qu’on le connaît : l’accès libre, égal et neutre aux contenus.
22 janvier 2025 à 12h13
Les IA génératives filtrent l’accès à Internet au lieu d’ouvrir la navigation
La critique principale concerne le fonctionnement des agents conversationnels et autres modules de réponse intégrés aux moteurs de recherche. Contrairement à une liste de liens, ces modèles formulent une réponse unique, produite à partir d’un traitement algorithmique. « Ils interviennent comme une nouvelle interface entre l’utilisateur et les contenus disponibles en ligne », observe l’Arcep. Cette réponse se substitue au choix libre de l’internaute. Il ne navigue plus vers des sources, il reste dans l’environnement du moteur.
Ce changement appauvrit la diversité de l’accès. Il modifie aussi les leviers de visibilité des sites web, qui n’apparaissent plus dans les résultats traditionnels. L’autorité alerte sur un risque d’invisibilisation de certaines informations, notamment celles qui ne sont pas optimisées pour ces modèles ou qui ne proviennent pas de plateformes partenaires. Ce mode d’interaction transforme l’usage du web, parfois sans que l’utilisateur en ait conscience.
L’ARCEP veut une régulation de l’IA compatible avec un Internet libre et neutre
Pour l’ARCEP, l’IA générative impose un nouveau cadre de régulation, car elle agit à la fois comme intermédiaire, éditeur et filtre. L’autorité souhaite éviter qu’un nombre restreint de sociétés privées concentre les moyens de production, de diffusion et d’hébergement des contenus générés.
Elle propose plusieurs pistes. Les modèles devraient rester compréhensibles pour les utilisateurs, avec des réglages simples à modifier. L’émergence d’outils alternatifs semble aussi indispensable pour préserver une certaine diversité. Les principes de pluralisme, d’interopérabilité et de transparence devraient devenir des critères techniques à part entière.
L’ARCEP évoque également les textes européens déjà en discussion, comme le Data Act ou le futur règlement IA, qui pourraient fournir des leviers pour encadrer ces nouvelles pratiques. Elle cherche à faire coexister ces nouvelles règles avec le principe de neutralité du Net, inscrit dans le droit depuis 2015.
L’autorité attire aussi l’attention sur l’impact environnemental des modèles d’IA générative, dont les besoins en calcul dépassent ceux des usages traditionnels. Elle souhaite que leur performance soit mesurée à l’aune de leur efficacité énergétique et que leur coût écologique fasse partie du débat. Les premières recommandations concrètes sont attendues avant la fin de l’année. En attendant, les plus curieux et férus de lecture d'entre vous peuvent consulter le rapport dans sa totalité sur le site de l'ARCEP, dont le lien figure au bas de cet article.
Source : Arcep