Le régulateur français des télécoms, l'ARCEP, alerte la Commission européenne sur les risques de monopole autour du cloud et de l'intelligence artificielle. Auprès de Bruxelles, il espère freiner la concentration des géants technologiques.

L'ARCEP tire la sonnette d'alarme. L'autorité française des télécoms vient de répondre à la consultation de la Commission européenne sur les politiques cloud et intelligence artificielle, en brandissant ses résultats français comme modèle continental. L'objectif du régulateur hexagonal est d'éviter que les géants du numérique deviennent des « gatekeepers » incontournables qui se livreraient à de la concentration sur ces deux secteurs stratégiques.
Le modèle télécom français pour inspirer la régulation cloud et IA européenne
À Bruxelles, l'ARCEP vante ses résultats dans les télécoms comme modèle européen. L'autorité exhibe le dernier classement de la Commission européenne, qui place la France au premier rang pour les abonnements fixes supérieurs à 1 Gbit/s en vitesse, sans doute une conséquence du co-investissement dans la fibre optique.
« On entend actuellement une petite musique, chantant les bénéfices supposés de la dérégulation, pour favoriser les investissements... Le marché des télécoms en France nous apporte la parfaite preuve du contraire : la régulation a apporté stabilité et prévisibilité, mutualisation et efficacité, innovation et compétitivité des prix », martèle Laure de La Raudière, la présidente de l'ARCEP.
L'autorité propose d'appliquer ses recettes éprouvées au cloud et à l'IA, avec transparence sur l'accès aux infrastructures, un suivi rigoureux des investissements, et l'ouverture systématique aux nouveaux entrants. Des outils pensés pour créer un cadre de confiance durable dans l'écosystème numérique européen.
L'ARCEP veut empêcher les Big Tech de contrôler l'accès à l'IA
L'émergence de l'intelligence artificielle générative agentique inquiète l'Arcep sur les risques de concentration. L'autorité redoute que les géants technologiques s'imposent comme « gatekeepers » incontournables, des entités qui contrôleraient l'interaction entre les nouveaux modèles d'IA et les services traditionnels, comme les plateformes vidéo, les moteurs de recherche ou les services de cartographie de type Google Maps et Waze.
« La Commission aurait raison de désigner les géants du numérique comme des gatekeepers pour leurs services de cloud, sans quoi l'histoire va se répéter : de nouvelles barrières à l'entrée de petits acteurs innovants vont s'ériger », prévient Laure de La Raudière. Une mise en œuvre agile des réglementations de type Data Act et du Digital Markets Act pourrait servir cet objectif d'ouverture.
L'ARCEP milite aussi pour une approche environnementale harmonisée à l'échelle européenne. Elle prône l'écoconception des services d'IA « à la source » et l'intégration des enjeux climatiques dans le déploiement des centres de données, véritables leviers de compétitivité mondiale au service de l'autonomie stratégique européenne. Affaire à suivre donc.