Face aux problèmes techniques, la NASA renvoie le lanceur géant SLS dans son hangar

Eric Bottlaender
Spécialiste espace
18 avril 2022 à 12h55
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Finalement, elle retournera au hangar sans que le test ne soit complété. © NASA / B. Smegelsky
Finalement, elle retournera au hangar sans que le test ne soit complété. © NASA / B. Smegelsky

Le Space Launch System et ses infrastructures n’étaient finalement pas suffisamment prêts pour le décollage. Après trois essais de compte à rebours simulé dans les conditions réelles, l’agence américaine a décidé de le ramener dans son bâtiment d’assemblage. Rien d’inattendu, mais le calendrier sera repoussé.

Pas de panique, mais toujours beaucoup de travail…

Étape par étape…

C’est l’apanage des lanceurs neufs, et de leurs zones de lancement neuves elles aussi. Même si le Space Launch System (SLS) a repris pour sa conception un certain nombre d’éléments des navettes STS, la fusée de 98 m de haut est fondamentalement nouvelle, et il s’agissait de son premier voyage vers le LC-39b, équipé pour son futur décollage. Les équipes s’attendaient donc à une multitude de petits soucis désagréables et… Elles ont été servies. À chacune des trois tentatives majeures pour exécuter le test WDR (Wet Dress Rehearsal, un compte à rebours simulé en conditions réelles, arrêté si tout va bien 9 secondes avant le décollage), la NASA a dû stopper le processus le temps d’identifier fuites et messages d’erreur de ce gigantesque système.

Problème sur les conduites d’hélium du site de lancement, fuite d’hydrogène sur les caissons d’avitaillement au pied de la fusée, vanne de pressurisation défectueuse sur le deuxième étage de SLS… Des pépins techniques que le test avait justement pour but de révéler (et en cela, c’est une réussite), et que les équipes vont pouvoir gommer dans les semaines à venir.

Prendre le temps des réparations

Samedi soir, la NASA a en effet annoncé à la surprise générale qu’elle allait ramener son lanceur géant sous la protection de son bâtiment d’assemblage (le VAB) le temps d’effectuer quelques travaux sur le site de lancement… Temps dont elle va bénéficier pour régler les détails sur la fusée elle-même. Ce n’est pas une décision à prendre à la légère : il faut plus d’une journée pour ramener SLS dans son hangar avec son véhicule à chenilles, qui mobilise plusieurs dizaines de travailleurs.

Une fois dans le VAB, les équipes pourront accéder à toutes les cases à équipements du SLS. © NASA
Une fois dans le VAB, les équipes pourront accéder à toutes les cases à équipements du SLS. © NASA

Surtout, le planning global est modifié. L’agence ne peut pas annoncer avoir passé le test de compte à rebours avec succès : avec 49 % de remplissage sur le réservoir d’oxygène et 5 % sur celui d’hydrogène, il restait encore de nombreuses étapes. Ce sont autant de détails qui pourront aussi être corrigés sur les futurs exemplaires, mais reste-il encore quelques vices cachés ? Restent donc aussi des décisions difficiles à prendre après les réparations…

Quel planning pour 2022 ?

Alors, retourner sur le site et prendre le temps de passer le test de compte à rebours simulé, ou bien préparer le lanceur pour son futur décollage et tester le compte à rebours en situation réelle ? Dans tous les cas, le lancement prévu au mois de juin (la date n’était pas précisément arrêtée) ne semble d’ores et déjà plus réaliste. Comme toujours, le projet SLS aura besoin de plus de temps…

Mais la patience, dans ce genre de projet démesuré, est plutôt une qualité : après plus d’une décennie de travaux, la NASA et les industriels du Space Launch System ne peuvent se permettre un raté pour la campagne Artemis 1. Les enjeux sont colossaux, et le soutien politique toujours fragile. Il faudra donc attendre d’en savoir plus sur une possibilité de décollage vers la Lune cet été ou à l’automne.

Source : Spaceflightnow

Eric Bottlaender

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Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser v...

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Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser vos questions !

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Commentaires (22)

Felaz
Gloups…
PaowZ
Des fuites, une fois que la fusée est sur le pas de tir, ok… mais des histoires de vannes défectueuses, ça se checke pas en amont ? Avant de sortir ?<br /> Curieux… ou alors, il faut des conditions de mise sous pression réelle…
tinou7789
J’ai tendance a penser qu’il y 40 ans la fusée aurait décollée même avec ces problèmes.
Nmut
Je pense aussi. La contrainte c’était le temps, le budget était secondaire.<br /> Maintenant c’est l’inverse. Question de priorités politiques…
Wifi93
La Nasa, tout comme Boeing ne savent plus faire. Qu’il laisse le boulot à Space’X qui a prouvé son savoir faire dans le domaine du Spatial. S’il faut attendre après la Nasa pour aller sur Mars par exemple, on n’est pas près d’y mettre le pied.
tinou7789
Rien à voir, les normes de sécurités ne sont plus les même qu’il y 40ans. Ils savent y faire, ils ne veulent juste pas se louper car l’argent public ce n’est pas la même confiture qu’avec de l’argent privé.
gothax
Il reste toujours Soyouz si besoin !<br /> Merci Éric pour ton article
Martin_Penwald
@Wifi93 La NASA a posé plus de missions sur Mars que SpaceX n’en a posé sur la Lune. Donc la notion de savoir-faire, c’est tout relatif.
Korgen
Au contraire, ils savent faire. Quand tu as une nouvelle fusée tu as fatalement des protocoles différents à réajuster au fur et à mesure des essais, tu as aussi des échecs. C’est à ça que servent les essais. D’ailleurs pour rappel Space X a enchainé les échecs et les explosions pendant des années, au point de devoir se mettre en faillite en cas de nouvel échec.<br /> A savoir aussi qu’il est IMPOSSIBLE de reprendre les schémas des lanceurs et modules Saturn/Apollo. Les normes de fabrication ont changé, ainsi que les règlementations (utilisation d’amiante, etc…).
Martin_Penwald
Oups. Ya pas moyen de supprimer un commentaire ?
Martin_Penwald
Il y a 40 ans ou presque, on a vu ce que ça a donné avec Challenger.
Martin_Penwald
D’un autre côté, sans argent public, SpaceX n’existerait probablement plus.
juju251
gothax:<br /> Il reste toujours Soyouz si besoin !<br /> Soyouz ?<br /> A terme, SLS vise la Lune, hors Soyouz n’a jamais eu et n’aura jamais les capacité de viser l’obrite lunaire.<br /> Selon Wikipedia, Soyouz a la capacité d’emporter 9 tonnes en orbite basse terrestre, SLS 95 tonnes en version « bloc 1 ».<br /> Les deux lanceurs ne sont pas comparables du tout sur ces points là.<br /> Alors, oui Soyouz est un lanceur rustique, fiable, sans doute esthétique (la croix de Korolev ), mais il n’est pas (n’a jamais été et ne sera jamais) adapté à une mission lunaire.
tinou7789
d’où les nouvelles normes
Martin_Penwald
Qui n’ont pas empêché l’accident de Columbia.
tinou7789
d’où les normes encore plus récentes
Martin_Penwald
Certes.<br /> Néanmoins, il semble quand même que SLS, c’est du grand n’importe quoi en matière de dépassement de budget et que ce genre de retard n’aide pas l’image de la NASA.
zmed
Soyouz n’a jamais était conçu pour des missions lunaires. Les Russes pour les 24 missions lunaires qu’ils ont accomplis en 15 ans (impacteur, orbiteur, atterrisseur, rover, retour d’échantillon) ont utilisé les lanceurs Luna, luna2,Vostock(Molnia), puis proton K.<br /> Sa nouvelle génération de lanceur Angara pourra dans sa version la plus puissante emporter 40 tonnes de charges utiles. Le dernier test réussi a eu lieu en 2020 avec une Angara A5<br /> Ils ont aussi en train de mettre au point un lanceur réutilisable à la SpaceX.
_Troll
C est vraiment une fusee de 98m de haut ?
ebottlaender
Non c’est une grande raquette de tennis, mais à la NASA ils sont forts, ils l’ont fait ressembler à une fusée.
_Troll
Pourquoi une raquette de tennis ? Elle n’est pas vilaine sur la photo. Je ne parlais pas de son aspect physique, mais de sa taille de 98m de haut. Ce doit etre difficile et couteux de la deplacer sans la faire tomber.
ebottlaender
Oui c’est bien sa taille. Elle utilise pour se déplacer avec sa tour de lancement un énorme véhicule à chenilles.<br /> Clubic.com – 18 Mar 22<br /> Les incroyables images de la première sortie du Space Launch System<br /> Après 12 ans de travaux, c'est la première fois que le SLS, entièrement assemblé, fait le voyage pour son site de lancement au Centre Spatial Kennedy. Un trajet qui a duré onze heures, grâce aux chenilles du vénérable véhicule Crawler. Mais surtout,...<br />
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