Un audit le confirme, la NASA ne pourra sans doute pas marcher sur la Lune en 2025

Eric Bottlaender
Spécialiste espace
01 décembre 2023 à 19h31
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Vue d'artiste du Starship de SpaceX se posant sur la surface lunaire. © SpaceX
Vue d'artiste du Starship de SpaceX se posant sur la surface lunaire. © SpaceX

Ce n’est pas parce que l’agence américaine a signé d’importants contrats avec ses prestataires privés qu’ils seront prêts à temps. Le bureau des audits de la NASA pointe les retards du Starship de SpaceX, mais aussi des futurs scaphandres lunaires. L’agenda pour 2025 pourrait être bouleversé prochainement.

Une même semaine se termine sur deux sons de cloche différents... D’abord un directeur adjoint de la branche du spatial habité chinois, qui a confirmé que l’administration du pays communiste avait approuvé le plan pour que des astronautes de Chine aillent marcher sur la Lune avant 2030. Puis ce 30 novembre est paru le rapport public du GAO (le bureau des audits spécialisé de la NASA) sur l’atterrissage lunaire américain prévu pour 2025, mais qui ne pourra sans doute pas respecter cette date. Les agendas des deux grandes puissances spatiales se rapprochent !

D’abord on vise 2025, puis…

Lorsque le président américain Donald Trump a demandé à son administration de mettre en place un plan pour retourner marcher sur la Lune en cinq ans, les responsables et les spécialistes ont immédiatement pointé du doigt l’ampleur de la tâche. Sans fanfare, l’objectif de ce qui s’appelle désormais Artemis a ensuite été réorienté sur 2025. Et malgré la diversité des missions confiées à l’agence américaine, le retour des astronautes sur la surface lunaire est bel et bien devenu une priorité.

Politique, budgétaire, technique : la NASA a su répondre aux exigences ! La capsule Orion et son lanceur super-lourd ont effectué leur premier test l’an dernier avec Artemis I, et ce fut une ample réussite. La suite des opérations est limpide, avec un « tour de la Lune » de trois astronautes Américains et un Canadien à la fin de l’année prochaine. Reste que pour se poser sur notre satellite naturel, il faut deux autres éléments clés : l’atterrisseur lunaire HLS, et de nouveaux scaphandres. C’est là-dessus que s’est penché le GAO (Government Accountability Office) sur son dernier audit. Et ses conclusions ne sont pas tendres.

Même si ce n'est pas encore cette version qui emmènera des astronautes sur la Lune, la NASA attend des progrès rapides avec le Starship... Avant 2025 ! © SpaceX
Même si ce n'est pas encore cette version qui emmènera des astronautes sur la Lune, la NASA attend des progrès rapides avec le Starship... Avant 2025 ! © SpaceX

Des développements plus longs que prévu

« La NASA et ses sous-traitants ont progressé, et cela inclut le passage de plusieurs étapes importantes, mais elles font toujours face à de multiples obstacles dans le développement du HLS (Human Landing System) et des scaphandres », conclut le GAO. L’étude pointe notamment du doigt le Starship de SpaceX : ses deux premiers vols en 2023, ainsi que des travaux de développement plus éloigné du public ont permis de montrer des avancées significatives à la NASA… Mais il reste énormément à faire avant de pouvoir emmener des astronautes se poser sur la Lune. Au-delà d’une fiabilité vers l’orbite et dans l’espace qui fait encore défaut, le GAO pointe le défi majeur représenté par les multiples ravitaillements en ergols que le Starship lunaire devra recevoir en orbite basse avant de pouvoir se propulser vers la Lune. SpaceX n’aurait montré que « des progrès limités » sur le sujet. Ennuyeux, à moins de 2 ans de la mission supposée…

Selon le GAO, même le temps imparti à SpaceX lors de la signature du contrat était inférieur de plus d’un an au temps constaté jusqu’ici pour développer un véhicule habité au service des États-Unis.

D’autre part, le bureau des audits pointe les travaux d’Axiom Space, en estimant là aussi un retard sur le développement des premiers scaphandres lunaires produits en partenariat public/privé. La NASA a passé commande avec Axiom, qui devait à l’origine reprendre les travaux menés durant 14 ans dans les laboratoires de l’agence américaine. Mais depuis quelques mois, il semble que le matériel doit subir plusieurs modifications et améliorations pour prendre en compte tous les critères de sécurité liés à une sortie sur la Lune (y compris une réserve d’air d’une heure en cas d’urgence). Lesdites modifications, malgré la bonne volonté d’Axiom, vont faire prendre du retard au projet.

Ce n'est pas le tout de les produire, il faut aussi que les nouveaux systèmes internes soient modernisés... © Axiom Space
Ce n'est pas le tout de les produire, il faut aussi que les nouveaux systèmes internes soient modernisés... © Axiom Space

Si ce n’est pas 2025, alors ce sera quoi ?

2025 sera-t-elle une date impossible à viser ? Le GAO n’a pas de boule de cristal, le bureau est là pour mettre le doigt sur les problèmes de budget, d’agenda et de gestion de la NASA. Il livre néanmoins ses propres estimations, sur la base des progrès observés aujourd’hui, et conclut à une fenêtre possible en 2027. Si la NASA arrive à la même conclusion, il serait théoriquement possible d’intercaler une autre mission en lieu et place d’Artemis III et de passer l’atterrissage lunaire à Artemis IV, mais cela poserait d’autres problèmes. Il faudrait en effet modifier le contrat actuel des productions du lanceur géant SLS, Artemis IV devant pour l’instant utiliser un nouveau matériel (l’étage supérieur EUS).

Nul doute que 2024 sera une année pivot pour le programme, et ce, d’autant plus du fait des élections présidentielles à venir : ce sont les politiciens qui fixent chaque année le montant alloué à l’agence américaine. Depuis le 1er octobre, comme les représentants et sénateurs américains ne se sont pas mis d’accord, la NASA est financée par une résolution CR, c’est-à-dire qu’elle ne sait toujours pas son budget pour 2023-24 et qu’elle opère à l’aveugle sur un niveau de financement équivalent.

On n'oubliera pas qu'opportunément, une autre équipe développe actuellement un atterrisseur lunaire américain... © Blue Origin
On n'oubliera pas qu'opportunément, une autre équipe développe actuellement un atterrisseur lunaire américain... © Blue Origin

En attendant, malgré leurs tarifs élevés, les contrats passés par la NASA avec SpaceX et Axiom sont budgétairement avantageux pour le contribuable américain : retard ou pas, les montants sont les mêmes. Au prix du calendrier ?

Source : CBS News

Eric Bottlaender

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Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser v...

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Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser vos questions !

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Commentaires (20)

nicgrover
C’est plus simple d’arroser les militaires que de faire avancer la science.
jllc
Avec quelques retards supplémentaires il seront sur la lune en 2029 pour le 60 eme anniversaire du premier homme sur la lune
JohnLemon
Ironiquement, les soviétiques s’étaient faits à l’époque coiffer au poteau à cause de leur incapacité à s’unir derrière un seul projet en charge de l’intégralité des composants. Il y en avait plusieurs en concurrence et ça leur a fait perdre un temps fou.<br /> Et aujourd’hui il se pourrait bien que la même arrive aux américains, pour des raisons similaires : on a certes la NASA qui coordonne le tout, mais cette multiplication d’acteurs dans tous les sens rend la mise au point du matériel beaucoup plus longue et aléatoire que dans les années 60.<br /> À voir comment la Chine décide de concevoir son plan, mais on pourrait bien être surpris à mon avis.
ccvman
Je suis persuadé qu’un jour la vérité va éclater et qu’on apprendra tous que les américains et la lune ce n’est qu’une histoire de mensonges.
Blackalf
Tiens, le retour du complot lunaire, ça faisait longtemps…
pinkfloyd
Ou ouvrir plusieurs livres d’histoire, de videos etc… et ce rendre compte que si, ils l’ont fait…<br /> Edward White, Roger Chaffee et Virgil Grissom ne sont pas mort pour rien !
Belgarath
Problèmes de scaphandre ? Ils n’ont qu’à ressortir les vieux de leur musée, ils fonctionnent encore surement. <br /> (Peut-être une histoire de design, ils ne sont plus assez beaux. )
Olivier22
La Nasa a perdu les technologies de 1969, elle ne sait plus faire un scaphandre. C’est ballot.
jeanlucesi
Je vous conseil de lire RÉVEIL de Laurent Gounelle.
Bombing_Basta
Je te conseille d’aller voir les photos prises par les indiens d’un des sites d’alunissage US…<br /> Futura<br /> Des images détaillées des sites Apollo sur la Lune<br /> Les nouvelles images des sites d'alunissage des missions Apollo, qui ont été prises par la sonde indienne Chandrayaan-2 en orbite autour de la Lune, ne convaincront sans doute pas les sceptiques...<br /> Edit : au passage «&nbsp;ton&nbsp;» GPS fonctionne grâce à des satellites US…
Squeak
En 1969, l’enjeu était avant tout politique pour en mettre plein la vue et ne pas perdre la face contre les soviétiques qui avaient une technologie plus avancée que les américains. Cette compétition était bénéfique.<br /> Pour les adeptes de complots, le film «&nbsp;Capricorn One&nbsp;» est sympa, il retrace le complot d’une fausse mission vers Mars, ce qui serait à mon avis plus d’actualité aujourd’hui.
info01
Ils ont payé combien l’audit ? Perso ça fait depuis le debut que je sais que 2025 etait irréalisable <br /> scoop: SpaceX ne marchera pas sur mars en 2030 comme Elon Musk l’a annoncé !<br /> (maintenant je veux bien mes millions de dollars pour mon analyse )<br />
MattS32
JohnLemon:<br /> Et aujourd’hui il se pourrait bien que la même arrive aux américains, pour des raisons similaires : on a certes la NASA qui coordonne le tout, mais cette multiplication d’acteurs dans tous les sens rend la mise au point du matériel beaucoup plus longue et aléatoire que dans les années 60.<br /> C’est aussi une question de budget… En dollars constant, le budget qu’avait la NASA pour aller sur la Lune en 69 était très largement supérieur au budget qu’à aujourd’hui la NASA pour y retourner. Il me semble même que ça dépasse en fait le budget total de la NASA aujourd’hui, alors qu’elle n’en consacre qu’une partie au retour sur la Luine.<br /> ccvman:<br /> Je suis persuadé qu’un jour la vérité va éclater et qu’on apprendra tous que les américains et la lune ce n’est qu’une histoire de mensonges.<br /> Dis toi une chose : si les américains n’ont pas mis les pieds sur la Lune à l’époque, les russes le savaient forcément, vu l’intensité de l’espionnage mutuel des deux camps à l’époque. Et pourtant, ils ont reconnu avoir été battus dans la course à la Lune. S’ils avaient eu la moindre information prouvant que ce n’est pas le cas, ils l’auraient utilisée pour ridiculiser les américains.<br /> info01:<br /> scoop: SpaceX ne marchera pas sur mars en 2030 comme Elon Musk l’a annoncé !<br /> Il avait même promis 2024 à la base Avec l’envoi d’une capsule Dragon non habitée dès 2018, puis deux vols intermédiaires non habités en 2020 et 2022 pour envoyer du matériel pour préparer l’arrivée de l’homme en 2024. Un grand visionnaire le bonhomme
Chirokee
Bah, on avait compris ça depuis pas mal de temps
Martin_Penwald
En quoi le fait d’être allé ou pas sur la lune devrait être une cause de peur ?
trollkien
Un peu comme les français avec les centrales nucléaires
MattS32
Olivier22:<br /> La Nasa a perdu les technologies de 1969, elle ne sait plus faire un scaphandre. C’est ballot.<br /> Non. C’est surtout que plus personne n’oserait aller sur la Lune avec le matériel de l’époque… Les astronautes d’aujourd’hui ne sont plus des têtes brûlées à la limite du suicidaire…
Martin_Penwald
Et encore, Apollo 1 les avait bien calmés. Et Gagarine et Terechkova ont eu pas mal de chance aussi.
philouze
Pas vraiment, puisque les EVA de l’ISS sont toutes le fait de scaphandres ricains.<br /> Seulement y’a un nouveau cahier des charges, plus sécure, plus léger, beaucoup plus maniable, plus d’axes de rotation résistant à la poussière de régolite, enfilable seul etc etc.<br /> AMHO ils ont été très (trop) ? ) «&nbsp;gourmands&nbsp;» niveau cahier des charges.<br /> Y’a probablement la peur de sortir un truc «&nbsp;ringard&nbsp;» face aux chinois, toute cette affaire étant une entreprise de soft-power américano occidental
jeanlucesi
Ou Russes Glonass .
Bombing_Basta
Non, historiquement c’est bien les satellites US qui sont là base du GPS.<br /> Le terme GPS est maintenant devenu un nom commun comme frigidère, et certains appareils «&nbsp;GPS&nbsp;» sont compatibles GLONASS, mais ça c’est très récent, tout comme la compatibilité avec les satellites Galileo l’est encore plus.<br /> Si un «&nbsp;GPS&nbsp;» n’est pas annoncé comme compatible aussi avec GLONASS ou Galileo, alors il fonctionne exclusivement avec le GPS.<br /> Et il y a aussi le beidu chinois au passage.<br /> fr.m.wikipedia.org<br /> Global Positioning System<br /> Pour les articles homonymes, voir GPS.<br /> Cet article concerne le système de géolocalisation américain. Pour l'assistant de navigation, voir GPS (assistant de navigation).<br /> fr.m.wikipedia.org<br /> GLONASS<br /> modifier GLONASS (en russe&nbsp;: ГЛОНАСС, acronyme pour глобальная навигационная спутниковая система, globalnaïa navigatsionnaïa spoutnikovaïa sistéma, soit «&nbsp;système global de navigation satellitaire&nbsp;») est un système de positionnement par satellites d'origine soviétique et géré par les forces spatiales de la fédération de Russie. Sa conception par le bureau d'études NPO PM (renommé par la suite ISS Reshetnev) débute en 1980 et il devient opérationnel en 1996. Mais la crise financière ...<br />
MattS32
Bombing_Basta:<br /> Si un « GPS » n’est pas annoncé comme compatible aussi avec GLONASS ou Galileo, alors il fonctionne exclusivement avec le GPS.<br /> De nos jours, non. Très souvent ce n’est plus précisé, alors qu’en fait c’est compatible avec quasiment tout.<br /> Par exemple, une recherche Google sur les terme «&nbsp;galileo&nbsp;» sur le site de Renault, Peugeot ou Citroën ne donne aucun résultat, à part quelques adresses italiennes de Peugeot et Citroën qui sont dans des «&nbsp;Via Galileo Galilei&nbsp;». Et pourtant sur le site officiel de Galileo recensant les appareils compatibles (useGalileo.eu), ils disent que presque tous les modèles de ces trois constructeurs sont compatibles.<br /> Et ce pour une raison toute simple : la plupart des réseaux utilisent des signaux compatibles. C’est le cas de Galileo, de QZSS, de Beidou 2 et 3, d’IRNSSs. Il faut juste parfois que le firmware soit adapté.
Bombing_Basta
MattS32:<br /> C’est le cas de Galileo, de QZSS, de Beidou 2 et 3, d’IRNSS et même de Glonass. Il faut juste parfois que le firmware soit adapté.<br /> Pas exactement.<br /> La structure des signaux émis par les satellites Glonass est différente de celle des signaux GPS et Galileo. Le terminal utilisateur doit pouvoir distinguer les signaux émis par les différents satellites. Pour ce faire, les satellites GPS et Galileo utilisent tous la même fréquence mais avec une séquence de code différente (technique CDMA pour Code Division Multiple Acces). Les satellites Glonass utilisent eux tous la même séquence de code mais émettent sur une fréquence différente (FDMA pour Frequency Division Multiple Access). Ce choix simplifie les opérations de corrélation et d’acquisition du récepteur et réduit le risque d’interférence par un système externe. Par contre, il complexifie les composants chargés de la collecte du signal ce qui se traduit pas un surcoût. Chaque bande de fréquence allouée au signal est découpée en douze fréquences d’émission. Dans la mesure où la constellation Glonass comporte 24 satellites, une fréquence donnée est utilisée par deux satellites. Les satellites partageant la même fréquence sont choisis de manière à être à l’opposé l’un de l’autre par rapport à la Terre.<br /> Mais bon, on ne va pas épiloguer.
Blackalf
Bombing_Basta:<br /> Le terme GPS est maintenant devenu un nom commun comme frigidère<br /> Frigidaire. ^^<br /> MattS32:<br /> Et pourtant sur le site officiel de Galileo recensant les appareils compatibles (useGalileo.eu), ils disent que presque tous les modèles de ces trois constructeurs sont compatibles.<br /> Almost all models pour toutes les marques, on peut difficilement être plus vague et imprécis que ça.
Bombing_Basta
Blackalf:<br /> Frigidaire<br /> Désolé je suis né après, pour moi c’était déjà le frigo
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