Le duo de satellites Proba-3 jouera un ballet bien précis pour observer le Soleil

Eric Bottlaender
Spécialiste espace
30 mars 2023 à 16h10
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Rien de tel que de cacher le Soleil pour mieux voir sa couronne. Crédits ESA/P. Carril
Rien de tel que de cacher le Soleil pour mieux voir sa couronne. Crédits ESA/P. Carril

Pour observer la couronne solaire, le plus efficace est encore d'éclipser le Soleil lui-même… C'est le principe de la mission Proba-3 qui est bientôt prête à partir pour le vide spatial. Un matériel impressionnant, même s'il est considéré comme un démonstrateur avant tout. Le vol en formation devra être d'une précision sans failles.

Les promesses sont nombreuses, et pas seulement pour l'héliophysique !

144 mètres et pas un de plus

Le matériel est presque prêt, il reste encore à le tester étape par étape avant un décollage prévu l'année prochaine grâce à un lanceur indien. Et après quelques années de travail, Proba-3 a fière allure. Le double véhicule est actuellement en préparation à Kruibeke, en Belgique, dans les locaux de Redwire Space. Leurs petits noms ? L'OSC pour Occulter Spacecraft et CSC pour Coronagraph Spacecraft. Le premier aura pour mission de voler 144 mètres devant le second, et de lui cacher le Soleil grâce à un disque de 1,4 mètre de diamètre. À cette distance, il devrait exactement cacher la surface solaire pour que l'instrument coronographe du CSC (appelé ASPIICS) puisse observer confortablement la couronne de notre étoile. Un vol en formation à petite distance qui va requérir une précision de placement toute particulière.

En effet, l'ESA espère pouvoir, en une orbite très elliptique (600 x 60000 km) qui va durer 20 heures, assurer 6 heures de mesures continues pour le coronographe. En plus de minuscules propulseurs à gaz froids, les deux véhicules sont équipés d'un ensemble de capteurs spécifiques à cette mission, pour connaître en permanence leur position l'un par rapport à l'autre : navigation GPS et inertielle, liaison radio inter-satellite, laser altimétrique et caméra optique… Rien ne doit être laissé au hasard.

Le petit satellite OCS et son disque de 140 cm de diamètre (il manque encore un revêtement) Crédits ESA
Le petit satellite OCS et son disque de 140 cm de diamètre (il manque encore un revêtement) Crédits ESA

Les proba, c'est comme les ennuis, ils volent…

S'ils décolleront évidemment ensemble, l'OSC et le CSC effectueront plusieurs tests de vol en formation à quelques mètres : 25 mètres puis les fameux 144 mètres nécessaires à son instrument pour observer la couronne solaire. « Les observatoires spatiaux et au sol incorporent régulièrement des coronographes sur leurs instruments, c'est même le cas sur notre mission SOHO, mais leur efficacité est limitée par le phénomène de diffraction, la lumière "fuit" sur le contour du disque. Avec un coronographe situé à 144 mètres, dont on peut ajuster la distance, on réduit la diffraction et on améliore la visibilité au voisinage du Soleil… », explique Jorg Versluys, ingénieur de l'instrument.

Le satellite avec le coronographe. Crédits ESA
Le satellite avec le coronographe. Crédits ESA

Technique pour plus tard

Il s'agit autant d'une démonstration scientifique que technique. Le vol en formation à courte distance est en effet un des éléments-clés pour plusieurs missions futures, qu'elles relèvent de la sécurité et de la défense (comme les petits satellites de protection rapprochée de la France), de la gestion des débris avec les approches contrôlées, ou du service des satellites en orbite. Et la longue distance n'est pas oubliée, avec de futurs observatoires spatiaux qui envisagent l'utilisation de coronographes du même type mais pour occulter la lumière d'étoiles distantes, en se plaçant à plusieurs dizaines, voire plusieurs centaines de kilomètres. Enfin, on peut citer la mission LISA, qui fera intervenir trois satellites éloignés chacun l'un de l'autre de 2,5 millions de kilomètres. Pour avoir une chance de détecter des ondes gravitationnelles, ces derniers devront être alignés avec une précision qui dépassera de loin celle de Proba-3. Mais d'abord, le Soleil…

Source : Esa

Eric Bottlaender

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Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser v...

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Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser vos questions !

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Commentaires (4)

Maraut
Si je ne dis pas de bêtises, le GPS est un système de satellites américain qui tourne autour de la terre et qui par triangulation donne la positon sur terre !<br /> Comment des satellites à des millions de km de la terre peuvent-ils connaître leur position l’un par rapport à l’autre avec le GPS ?
ebottlaender
En fait la triangulation (qui porte assez mal son nom, pour un très bon positionnement GPS, il faut 4 satellites) marche plutôt bien aussi pour les satellites proches (ici le plus loin = 60000 km). Le plus complexe est d’obtenir un signal, les antennes étant dirigées vers la Terre.<br /> Le principe du GPS est de calculer les différences de références temporelles et de les mixer avec la position attendue des satellites, ça fonctionne assez bien en tout point, et ça a déjà été testé plusieurs fois.<br /> A noter quand même que ce n’est pas la seule méthode utilisée ici, car ce n’est pas assez précis.
Maraut
la triangulation porte bien son nom il faut 3 satellites pour avoir une position, peut-être pas précise, mais suffisant après tout dépend de la demande de précision. avec 4 effectivement c’est plus précis.<br /> Merci pour l’explication qui suit
Snow24
@Maraut,<br /> En observant les étoiles, nous pouvons nous situer dans l’univers.<br /> En effet, si tu prends un point fixe (comme au temps des navigateurs et du compas avec l’étoile polaire), en déterminant deux autres étoiles, tu peux déterminer ta position.
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