WhatsApp : pour Kaspersky, "aucun type de communication en ligne ne peut être 100% privé"

Alexandre Boero
Chargé de l'actualité de Clubic
11 septembre 2021 à 09h19
11
© Clubic
© Clubic

Pour Kaspersky, le principe même de la messagerie électronique ne garantit jamais pleinement le secret des conversations. Et le cryptage de bout en bout notamment vanté par WhatsApp et ses concurrents n'y change rien. L'éditeur russe explique qu'une distinction des termes employés autour de ce nouveau scandale potentiel doit être faite.

La publication, mardi, de l'enquête de ProPublica pointant du doigt la possible entorse faite au cryptage de bout en bout par WhatsApp, a fait réagir le spécialiste de la cybersécurité, Kaspersky. L'éditeur de solutions décide de rétablir quelques vérités autour des révélations du média américain, qui explique, dans son papier, « comment Facebook compromet la protection de la vie privée des 2 milliards d'utilisateurs de WhatsApp ». Kaspersky explique notamment que l'accès du service à certains messages par des modérateurs ne remet pas en cause, d'un point de vue technique, le cryptage de bout en bout (E2E).

Des personnes ont « faussement conclu » que la pratique annulait le cryptage de bout en bout, explique Kaspersy

Selon ProPublica, les obligations légales imposées par l'État américain poussent WhatsApp à visionner les messages et contenus signalés, grâce à une petite armée de 1 000 modérateurs basés aux États-Unis, en Irlande et à Singapour qui, aidés par l'intelligence artificielle, scrutent et signalent à leur tour auprès des autorités américaines tout contenu pouvant avoir des répercussions pénalement importantes.

Expert sécurité chez Kaspersky, Victor Chebyshev nous dit que « de nombreuses personnes ont faussement conclu que ce règlement annule le cryptage de bout en bout ». Et le spécialiste de rappeler que « selon les conditions générales de WhatsApp, si un utilisateur se plaint de contenus inappropriés ou du compte d'une personne, le service a alors accès à ses messages récents ». Conclusion première donc : techniquement, le cryptage de bout en bout n'est pas remis en cause, en tout cas pas jusqu'au signalement.

Pour l'expert, il n'est donc « pas réaliste de prétendre que WhatsApp a accès à exactement cinq messages récents », comme on peut le lire dans l'enquête de ProPublica.

Faire bien attention aux termes employés

Kaspersky insiste sur un détail particulier : celui des termes utilisés qui, confondus, peuvent donner lieu à des informations erronées. Le cryptage de bout en bout et le bouton « Signaler » de WhatsApp sont guidés par des algorithmes totalement différents.

« Le cryptage de bout en bout donne à l'utilisateur et au destinataire une clé spéciale pour déverrouiller et lire les messages », explique Victor Chebyshev. Mais attention, car si la plateforme injecte ce cryptage, cela n'empêche pas une personne d'envoyer des messages privés d'une conversation à quelqu'un d'autre, et ce, à l'insu de son interlocuteur.

Le principe est le même pour le signalement. « Après avoir appuyé sur le bouton "Signaler", les modérateurs de WhatsApp n'ont pas accès à toutes vos données et ne les collectent pas », ajoute l'expert de Kaspersky. Les modérateurs de la messagerie reçoivent les informations fournies par la personne qui émet l'alerte, seulement après leur signalement. Cependant, « il n'y a pas encore de preuve technique concernant cette allégation », nuance l'éditeur russe, qui ne se base que sur les conditions générales de WhatsApp, dont on a tous à l'esprit les récents remous.

Une communication en ligne 100 % privée, ça n'existe tout simplement pas

Alors évidemment, cette révélation découlant de la modération des conversations ou comptes signalés fait remonter à la surface les problèmes de confidentialité de la messagerie du groupe Facebook. Déjà en juin dernier, le stockage d'une partie des conversations auprès de services tiers fut pointé du doigt, avec les potentielles conséquences que l'on a tous en tête (fuite, monétisation des informations, etc.).

Kaspersky l'affirme : « Aucun type de communication en ligne ne peut être absolument 100 % privé ». Ce constat semble teinté aussi bien de gravité que de lucidité. « La présence d'un système de cryptage la confiance dans une application sont deux choses complètement différentes », insiste-t-on du côté de l'éditeur. Se pose alors une question de confiance, celle accordée à la personne avec laquelle vous conversez sur WhatsApp. Mais là, c'est une autre question. « Même la discussion la plus secrète et la plus protégée peut être photographiée », ajoute Victor Chebyshev. Et là aussi, l'inverse est tout aussi vrai. Car le cryptage de l'échange de bout en bout n'empêchera pas la personne avec laquelle vous échangez d'envoyer votre message à une autre.

La coïncidence veut qu'il y a à peine un peu plus d'une semaine, WhatsApp a été condamnée à une amende de 225 millions d'euros par la Data Protection Commission, la « CNIL irlandaise », qui reproche à la plateforme de ne pas remplir ses obligations de transparence (vis-à-vis du RGPD) en matière d'informations aux utilisateurs. WhatsApp et la confidentialité, un couple qui doit donc encore apprendre à se connaître.

Alexandre Boero

Chargé de l'actualité de Clubic

Chargé de l'actualité de Clubic

Journaliste, chargé de l'actualité de Clubic. Reporter, vidéaste, animateur et même imitateur-chanteur, j'ai écrit mon premier article en 6ème. J'ai fait de cette vocation mon métier (diplômé de l'EJC...

Lire d'autres articles

Journaliste, chargé de l'actualité de Clubic. Reporter, vidéaste, animateur et même imitateur-chanteur, j'ai écrit mon premier article en 6ème. J'ai fait de cette vocation mon métier (diplômé de l'EJCAM, école reconnue par la profession), pour écrire, interviewer, filmer, monter et produire du contenu écrit, audio ou vidéo au quotidien. Quelques atomes crochus avec la Tech, certes, mais aussi avec l'univers des médias, du sport et du voyage. Outre le journalisme, la production vidéo et l'animation, je possède une chaîne YouTube (à mon nom) qui devrait piquer votre curiosité si vous aimez les belles balades à travers le monde, les nouvelles technologies et la musique :)

Lire d'autres articles
Vous êtes un utilisateur de Google Actualités ou de WhatsApp ? Suivez-nous pour ne rien rater de l'actu tech !
google-news

A découvrir en vidéo

Rejoignez la communauté Clubic S'inscrire

Rejoignez la communauté des passionnés de nouvelles technologies. Venez partager votre passion et débattre de l’actualité avec nos membres qui s’entraident et partagent leur expertise quotidiennement.

S'inscrire

Commentaires (11)

exoje
De la même manière qu’aucune serrure n’est infaillible, il y aura toujours quelqu’un pour la percée, enfin ce message ça fait 20 ans qu’il circule apparemment ce n’est toujours pas rentrer dans les mœurs.
yam103
Joli jeu de mot. Mon WhatsApp, je l’ai aussi signalé depuis leur nouvelle CGU : J’utilise Signal avec mes proches <br /> Ceci dit, Kaspersky n’a pas tort, le message est envoyé par le destinataire qui se plaint auprès de l’équipe de modération. Il n’y a pas de déchiffrement «&nbsp;magique&nbsp;». C’est tout du moins la version officielle, puisque comme le code source n’est pas ouvert, on ne peut pas garantir de la manière dont est fait le chiffrement.<br /> Ma méthode pour envoyer des messages vraiment sécure: utiliser l’application open source «&nbsp;Silence&nbsp;» qui envoie/reçoit des messages chiffrés par SMS.
sebstein
Ce n’est pas du tout la même chose…<br /> La métaphore ici serait plutôt : si tu laisses ta clé de serrure à un ami, rien ne l’empêche de donner tes clés à qqun d’autre…
exoje
Je ne fais pas spécialement référence à l’article, cette expression est universelle en informatique, rien n’est incassable.
notolik
Une communication 100% privée sur WhatsApp n’existe peut être pas, mais en dehors, si ça existe mais (effectivement) uniquement si la volonté du secret est maintenue par (tous) les pairs.<br /> Pour bien faire, ce «&nbsp;spécialiste de la cybersécurité&nbsp;» devrait peut-être le préciser : un secret peut être rompu.<br /> D’un autre coté ils ont raison de re-re-re-re-préciser que tout ce qui va sur le net est considéré comme «&nbsp;perdu&nbsp;».
AGASS007
@Clubic, «&nbsp;chiffrage&nbsp;» c’est pour évaluer, «&nbsp;chiffrement&nbsp;» c’est pour transformer des données.
AlexLex14
Ni l’un ni l’autre, en l’occurrence, le terme exacte ici techniquement, c’est «&nbsp;cryptage&nbsp;» comme je l’avais écrit au départ. On m’a remplacé le terme «&nbsp;cryptage&nbsp;» par «&nbsp;chiffrage&nbsp;» en relecture je pense, et j’ignore pourquoi. En tout cas, je viens de (re) modifier, merci pour l’alerte @gas !
AtomosF
«&nbsp;aucun type de communication en ligne ne peut être 100% privé&nbsp;»<br /> Surtout quand il y a Facebook derrière en fait…
SPH
Moi, je me suis programmé un logiciel de cryptage symétrique et je l’assure en sécurité maximale.<br /> Avec un mot de pass de 25 caractères, mon système a une chance sur 3,2009658644406818986777955348251e+59 d’être cassée… Donc : confiant
AlexLex14
SPH:<br /> Avec un mot de pass de 25 caractères<br /> … je pense que tu es à l’abri de toute attaque par force brute
AGASS007
Dans ce contexte, «&nbsp;chiffrement&nbsp;» me paraît plus à propos.<br /> https deux points slash slash chiffrer.info
Voir tous les messages sur le forum
Haut de page

Sur le même sujet