Jensen Huang : le stratège devenu star à la tête de l'empire NVIDIA

Camille Coirault
Publié le 08 juin 2024 à 13h03
 Jensen Huang lors de son discours à Computex 2024, acclamé comme une rock star © NVIDIA
Jensen Huang lors de son discours à Computex 2024, acclamé comme une rock star © NVIDIA

Jensen Huang, PDG de NVIDIA, a fait de sa start-up un véritable titan du secteur de la tech en trois décennies. Au passage, lui aussi est devenu l'une des figures les plus emblématiques de la Silicon Valley. Retour sur une ascension fulgurante sur fond de american dream.

NVIDIA, voilà un nom qui résonne avec force pour n'importe quel amateur de technologie. Cofondée par Jensen Huang, Chris Malachowsky (toujours vice-président) et Curtis Priem (directeur technique), qui aurait pu parier que cette minuscule start-up aux ressources limitées devienne 30 ans après l'une des sociétés les plus influentes du domaine ? L'entreprise a été d'abord connue du grand public par ses avancées monumentales dans le domaine des cartes graphiques qui ont tout simplement révolutionné le monde des jeux vidéo et du traitement visuel dans la décennie 90.

Elle est toujours à la pointe de ce secteur même si elle se tire la bourre depuis la fin des années 2000 avec AMD qui a depuis réussi à rattraper un peu son retard. Malgré tout, NVIDIA reste leader sur ce marché et depuis le début des années 2010, également sur celui de l'IA. Elle a su faire son nid et gagner la confiance des entreprises et chercheurs travaillant sur le deep learning grâce à la puissance de ses GPU à partir de 2012 pour devenir aujourd'hui un acteur majoritaire du secteur.

OpenAI nourrit ChatGPT grâce aux puces NVIDIA, Tesla aussi est un de ses très bons clients, tout comme Google pour ses centres de données, Amazon Web Services pour ses services cloud, Microsoft pour Azure et Facebook pour ses infrastructures de machine learning.

Comment Jensen Huang, ce jeune diplômé en génie électrique, est-il parvenu à devenir une icône de la tech tout en propulsant son entreprise vers les sommets, dominant à la fois le marché des puces graphiques et de l'intelligence artificielle ?

Du rêve taïwanais au rêve américain

Jensen Huang, né le 17 février 1963 à Tainan (Taïwan), a déménagé en Thaïlande avec sa famille à l'âge de cinq ans. Quelques années plus tard, lui et son frère furent envoyés poursuivre leurs études aux États-Unis, sous la tutelle de leur oncle à Tacoma. Ce dernier, dans l'espoir de leur offrir une éducation d'excellence, les inscrivit par mégarde dans un internat baptiste des plus stricts à Oneida, au Kentucky.

Loin des prestigieuses institutions escomptées, les deux jeunes garçons y vécurent une expérience rude et marquante. Après ce séjour exigeant, Jensen retrouva ses parents en Oregon où, déjà remarquablement doué, il franchit les étapes académiques avec une certaine célérité, obtenant son diplôme dès seize ans en sautant deux classes.

Cette précocité hors norme le mena naturellement à l'Université d'État de l'Oregon où, en 1984, il décrocha un diplôme en génie électrique. Passionné par l'électronique et l'informatique, il poursuivit sur cette voie à Stanford, y décrochant en 1992 un master dans cette même discipline. Durant ses années estudiantines, pour assurer sa subsistance, le jeune Huang dut occuper des emplois de serveur et de commis dans un restaurant Denny's. C'est d'ailleurs, par un surprenant coup du sort, dans un établissement de cette même enseigne à San José que, quelques années plus tard en compagnie de Chris Malachowsky et Curtis Priem, ils eurent l'idée géniale de fonder NVIDIA en 1993. Un modeste écrin pour ce qui allait devenir un colosse de la technologie.

La montée en puissance de NVIDIA

Visionnaire, Jensen Huang insuffla à NVIDIA une stratégie décisive pour son immense succès. Son expertise en génie électrique, rehaussée par son expérience antérieure chez LSI Logic et AMD, fut un atout majeur pour la conception des premières puces graphiques révolutionnaires de la société. Sous son impulsion, de grandes innovations virent le jour, parmi lesquelles le GPU GeForce 256 en 1999, souvent considéré comme le premier véritable GPU, marquant les prémices de la domination de NVIDIA dans l'industrie graphique.

La même année, l'entreprise fait une entrée fracassante en bourse. Sous l'impulsion de Huang, NVIDIA s'élança sur une trajectoire ascendante fulgurante. Guidée par une stratégie cohérente, la société élargit considérablement ses horizons, se projetant bien au-delà des seules puces graphiques pour investir le champ des processeurs dédiés à l'intelligence artificielle. Résultat, le 25 mai 2023, la valorisation en bourse de NVIDIA atteignit la somme faramineuse de 1 000 milliards de dollars. Actuellement, celle-ci est proche des 3 000 milliards, un accomplissement herculéen qui cimenta définitivement la stature de Huang au rang des plus éminents leaders technologiques mondiaux.

Le regard amusé, Jensen Huang signe un autographe sur les dessous féminins d'une fan lors du Computex 2024.  © chinlun31 / Threads
Le regard amusé, Jensen Huang signe un autographe sur les dessous féminins d'une fan lors du Computex 2024. © chinlun31 / Threads

La « Jensanity » : une véritable Rock Star de la tech

Huang est aujourd'hui plus qu'un PDG, c'est une véritable superstar. Lors du Computex 2024 à Taïwan, l'homme a été accueilli tel le Messie (voire vidéo ci-dessus), les foules scandant son nom et se bousculant pour des selfies avec lui. Une véritable liesse fut baptisée la « Jensanity ». Bien qu'absent du programme officiel, sa seule apparition a suffi à attirer d'immenses cohues de fans endiablés.

Mark Zuckerberg lui-même, reconnaissant l'aura d'Huang, le compara à « Taylor Swift, mais dans la tech ». Selon Bob O'Donnell, analyste technologique : « Il est littéralement traité comme une rock star ». Si dans les années 1980, il n'était pas rare de voir un Axl Rose (chanteur de Guns N'Roses) ou un Gene Simmons (bassiste de Kiss) signer des autographes sur les sous-vêtements de leurs groupies, aujourd'hui c'est au tour de Huang (voire photo ci-dessus). Lors de la dernière conférence NVIDIA à San José, l'événement eut lieu dans un stade archicomble, avec d'immenses files d'attente à l'extérieur, recréant une ambiance digne d'un véritable concert rock.

Huang est également célèbre pour son look vestimentaire, en particulier ses vestes en cuir. Un style qu'il dit devoir à sa femme et sa fille, qui en ont fait sa marque depuis plus de deux décennies. Sa veste actuelle, une pièce Tom Ford à 9 000 dollars, est devenue l'emblème de son image publique. Comme l'explique la styliste Sera Murphy : « Les vestes en cuir peuvent signaler une certaine audace : une volonté de briser les codes, de faire différemment et de défier le statu quo ». Steve Jobs avait, lui aussi, son style, plus passe partout, tout comme Zuckerberg. Chez les PDG de la Silicon Valley, le look vestimentaire est une signature de première importance.

Issu d'un milieu modeste, Huang aujourd'hui l'heureux détenteur d'une confortable fortune dépassant les 100 milliards de dollars, le hissant au 14ᵉ rang des plus grandes fortunes mondiales. Un parcours pour le moins atypique dont les derniers chapitres sont assurément loin d'être écrits. L'aventure NVIDIA n'est pas terminée et nul doute que les accomplissements futurs de l'entreprise promettent d'être tout aussi retentissants que les précédents.

Source : BBC

Par Camille Coirault

La tech est mon terrain de jeu, la science ma maîtresse capricieuse et le jeu vidéo (malgré mes overdoses récurrentes de AAA) mon péché mignon. Voici votre serviteur, explorant la jungle technologique armé d'un simple PC et salivant comme un bouledogue devant la moindre innovation. Transformer le jargon technique en prose savoureuse, traquer les news ultimes avec les neurones toujours à balle de caféine : voilà ma mission.

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Commentaires (3)
PEPSIMAX

Lui au moins c’est un ingénieur…dessiner une puce il sait faire…contrairement à d’autres patrons milliardaires uniquement financiers.

TNZ

Muscle car … c’est tout ce que nVidia sait faire.
Est ce que vraiment utile pour aller le pain ?

Agalma

Je n’ai jamais acheté Nvidia (l’Envie en latin…) même les chipsets (!!!) Abonné « Science et Vie Micro » dès sa parution (83) (si si…) Nvidia a accompagné ma vie liée à l’informatique d’une façon ou d’une autre. Et je ne suis (évidemment) pas le seul ici.
Il est donc très drôle pour nous de voir les médias découvrir ce que nous connaissons tous depuis, déjà, (bien) longtemps : Nvidia.
Jensen, haut QI (Musk, Page, Zuckerberg, Ellison, Jobs, etc.) figure (bien souvent) détestée par les joueurs à cause des prix, est découverte maintenant avec l’essor de l’IA.
Mélange de capacités intellectuelles et d’une époque, Jensen et son cuir éternel, émerge. Je pense qu’il est important de voir sa dernière keynote où, de retour chez lui, il mélange le chinois et l’anglais en présentant son matériel.
Oui, l’IA c’est l’avenir. La seconde marche après internet. Oui, des centaines de milliers d’emplois vont être remplacés. Oui, des robots polytechniciens s’occuperont des personnes âgées ; plus empathiques, plus forts, infatigables, sans grève. Pareil pour l’enseignement. Je vous laisse penser au reste.