🔴 French Days en direct 🔴 French Days en direct

Larguer des fusées low-cost ne rapporte pas, Virgin Orbit en faillite ?

Eric Bottlaender
Spécialiste espace
31 mars 2023 à 10h05
11
Tout ce qui monte finit un jour par redescendre... © Virgin Orbit
Tout ce qui monte finit un jour par redescendre... © Virgin Orbit

Depuis jeudi dernier, les employés de Virgin Orbit sont renvoyés chez eux, en attente de leur sort. L'entreprise, devenue célèbre pour sa méthode de largage de fusées orbitales avec un Boeing 747 modifié, n'a plus d'argent. Un signal important, que de nombreux acteurs du secteur du NewSpace vont regarder de près.

Atteindre l'orbite ne fait pas tout…

Mise à jour du 31 mars : Après 15 jours de négociations, l'entreprise n'a pas trouvé de repreneur ni réussi à lever des fonds suffisants. 675 employés ont été licenciés tandis que la direction espère encore sauver l'entreprise et ses principaux atouts. Peut-être par un rachat, probablement plus grâce à une faillite sous le régime américain du « Chapitre 11 », qui gèle les activités le temps d'une reprise et d'un plan d'investissement.

Virgin portefeuille

C'était une rumeur qui courait depuis plusieurs mois : Virgin Orbit a un gros problème de fonds. L'arithmétique est relativement simple, dans une année comme 2022, l'entreprise installée à Long Beach a dépensé pratiquement 200 millions de dollars, avec moins de 30 millions de dollars de revenus. De quoi drainer les comptes rapidement, d'autant que l'entrée en Bourse en 2021 n'a pas apporté la manne espérée (228 millions au lieu de 483 attendus) pour espérer tenir plusieurs années et augmenter significativement les lancements, et donc les rentrées d'argent. En ce mois de mars 2023, la situation est devenue intenable.

Combien de LauncherOne l'entreprise pourrait-elle vraiment envoyer en orbite en 2023 si elle allait bien ? © Virgin Orbit
Combien de LauncherOne l'entreprise pourrait-elle vraiment envoyer en orbite en 2023 si elle allait bien ? © Virgin Orbit

Depuis jeudi dernier, les 750 employés de Virgin Orbit ont été renvoyés chez eux, au chômage technique : l'entreprise n'est plus capable de les payer. Et comme souvent dans ces situations, le coup d'arrêt est important. Soit un investissement important va avoir lieu (avec ou sans rachat à la clé), soit les dirigeants vont annoncer une mise en faillite. CNBC rapporte que de nombreux employés interrogés ont déjà entamé des recherches d'emploi. La direction, elle, refuserait les offres sous les 200 millions de dollars, sa valeur officielle en bourse (mais qui chute).

Cosmic dette

La situation à moyen terme de Virgin Orbit aurait été complexe même sans ces problèmes de fonds. En effet, en ce mois de janvier, la firme a souffert d'un échec en vol de sa fusée LauncherOne, larguée depuis le 747 modifié de l'entreprise… Alors qu'il avait pour la toute première fois décollé depuis l'Angleterre. Un problème lié à un filtre dans les lignes d'apport de carburant sur le deuxième étage.

« Space is hard », la formule est sans cesse renouvelée, mais elle ne dit pas tout : pour espérer réussir et dépasser le statut de start-up prometteuse, il faut non seulement atteindre l'orbite, mais le faire très régulièrement, à bas prix et avec une méthode qui donne confiance aux investisseurs. Avec un maximum de 2 lancements en 2021 et 2 en 2022, la cadence attendue et les promesses de « vol rapide à la demande » n'ont pu être tenues pour Virgin Orbit. D'autant qu'à environ 12 millions de dollars pièce, la fusée LauncherOne n'est pas la moins chère sur le marché.

© Virgin Orbit
© Virgin Orbit

Décollage (des investisseurs)

De nombreux autres acteurs du NewSpace américain observent la situation de Virgin Orbit avec attention (rachat ou faillite), car la leur n'est pas nécessairement meilleure. C'est le cas d'Astra, par exemple, qui a abandonné l'année dernière les travaux avec sa fusée Rocket 3, cette dernière n'étant pas assez fiable. Une partie du personnel a déjà été renvoyée le temps que les travaux préparatoires de Rocket 4 soient terminés… Globalement, aucun acteur public ou privé de ce secteur des petits lanceurs (Rocket Lab, Firefly, Relativity Space, ABL Space, Virgin Orbit, Astra et d'autres) n'a encore pu atteindre la tant attendue rentabilité. Rocket Lab y est presque, en grande partie grâce à ses investissements et rachats d'entreprises innovantes pour des composants de satellites et des panneaux solaires… Et ce malgré 9 lancements l'an dernier !

Les prix bas, la concurrence entre acteurs et le succès des vols groupés à prix plancher de SpaceX font mal au portefeuille. Plusieurs acteurs attendent des regroupements, des rachats et faillites dans le secteur, aux États-Unis surtout.

Source : CNBC

Eric Bottlaender

Spécialiste espace

Spécialiste espace

Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser v...

Lire d'autres articles

Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser vos questions !

Lire d'autres articles
Vous êtes un utilisateur de Google Actualités ou de WhatsApp ? Suivez-nous pour ne rien rater de l'actu tech !
google-news

A découvrir en vidéo

Rejoignez la communauté Clubic S'inscrire

Rejoignez la communauté des passionnés de nouvelles technologies. Venez partager votre passion et débattre de l’actualité avec nos membres qui s’entraident et partagent leur expertise quotidiennement.

S'inscrire

Commentaires (11)

Mayonnez
Bien triste tout ça.
baazul
Personne n’est intéressé pour dépenser quelques centaines de milliers d’euros pour 10 minutes dans en apesanteur?<br /> A part spaceX, les autres ne tiennent pas la route.
ebottlaender
(ce n’est pas Virgin Galactic, qui envoie des gens en apesanteur quelques minutes, mais Virgin Orbit, qui envoie des fusées larguées à l’aide d’un avion, cf les images et explications de l’article)
lepef32
Concernant le LauncherOne c’est probablement une fausse bonne idee:<br /> Contrairement a ce qu’on pourrait penser a premiere vu, le gain offert en baisse de conso de carburant (et donc d’augmentation de la charge utile) par le largage en altitude + avec de la vitesse est totalement negligeable … Reste la souplesse d’un largage a l’endroit le plus optimal mais ca ne fait pas lourd…
Nmut
Ca m’intéresse d’avoir les calculs. Parce que pour moi, si, c’est très intéressant.<br /> Par contre, est-ce rentable financièrement, ça je ne saurais le dire mais c’est probablement là que ça coince!
lepef32
Je n’ai plus l’article sous la main malheureusement, mais a la louche si on prend une orbite circulaire à 300 km au-dessus de la surface de la Terre, il faut par une vitesse de 7,8 km/s (28 000 km/h) …<br /> De la les 800km/h de vitesse initiale ne pese pas lourd a cote de 28000 (1/35eme)<br /> L’altitude idem 10 a 15km ne represente pas une grande part des 300km
Nmut
La comparaison directe ne tient pas, les forces ne sont absolument pas linéaires. Il faut voir que la pesanteur diminue avec l’altitude tout comme la résistance aérodynamique d’un facteur delta-altitude^2. De plus l’efficacité d’un avion est bien supérieure à celle d’une fusée pour diverses raisons. Au final le gain est loin d’être négligeable!
flgwen
L’énergie apportée par l’avion est complètement négligeable.<br /> il faut faire rapport entre l’énergie cinétique au largage de l’avion et l’énergie cinétique en orbite.<br /> On a 500kg de charge utile à accélérer de 800km/h à 28000 km/h<br /> Le rapport Ec iniial / Ec final est de 800²/28000² soit 0.0008<br /> Le largage par le 747 n’a donc amené que 0.08% de l’énergie cinétique à fournir à la charge utile pour atteindre l’orbite.<br /> Le largage par un avion ne permet que de choisir la zone de largage.<br /> D’ailleurs, si c’était si utile que ca, pourquoi tous les autre acteurs ne s’y sont pas mis aussi?
ebottlaender
Je me permets de rappeler à tous qu’on a fait un article qui parle des avantages et inconvénients des fusées larguées par avion !<br /> Clubic.com – 17 Sep 22<br /> Les lancements de fusées orbitales portées par avion, un délicat compromis<br /> Sur le papier, ce qui a l'air d'être une idée pratique peut rapidement se transformer en un cauchemar logistique et humain. Pourtant, régulièrement depuis 60 ans, de nouveaux acteurs tentent de marier les deux domaines… avec quelques succès, et...<br />
Nmut
L’énergie cinétique est une chose, mais tu ne tiens pas compte de l’énergie potentielle et du fait que le carburant économisé n’a pas à être propulsé (le plus gros gain est là).<br /> Le fait que seul les militaires ou Virgin utilise la technique à ma connaissance, c’est probablement plus une question de couts: maintenance de 2 engins totalement différents, R&amp;D plus couteuse, moins de flexibilité.
philouze
Tu oublies la trainée, qui grandit comme le carré de la vitesse, puis comme cube de la vitesse à partir de 500 km/h, alors qu’elle est négligeable en très haute altitude.<br /> S’affranchir des N 1000 premiers mètres d’atmosphère a sans doute un vrai impact, mais un 747 n’est peut être tout simplement ni assez haut, ni assez rapide pour que le gap soit suffisant.<br /> Je ne pense pas que les gens qui aient conçu le stratolauncher aient ignoré tes calculs au point de concevoir le plus grand avion du monde et d’avoir « loupé » ce détail.
Voir tous les messages sur le forum
Haut de page

Sur le même sujet