Le petit lanceur Electron de Rocket Lab échoue pour la deuxième fois en deux ans

Eric Bottlaender
Spécialiste espace
19 mai 2021 à 16h15
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Le lanceur Electron sur son pas de tir en Nouvelle-Zélande. © Rocket Lab
Le lanceur Electron sur son pas de tir en Nouvelle-Zélande. © Rocket Lab

Au cours d'un décollage orbital avec deux satellites Blacksky, le lanceur Electron a souffert d'une anomalie qui a donné lieu à un échec total de la mission. C'est la deuxième fois en deux ans que l'ambitieuse entreprise Rocket Lab subit un pareil revers.

Ironiquement, elle a réussi à récupérer le premier étage…

Un lancement qui devait beaucoup faire parler de lui

La communication de Rocket Lab avait amplement préparé l'événement autour de ce troisième décollage de l'année. En effet, après avoir dévoilé un futur lanceur Neutron et orienté les efforts sur la plateforme satellite Photon, l'entreprise néozélandaise (installée à Long Beach, en Californie) souhaitait recentrer l'attention sur son lanceur « historique », Electron. En effet, Rocket Lab a investi beaucoup d'efforts pour rendre le premier étage de sa fusée réutilisable et, dans un premier temps, récupérable.

Après un premier essai réussi en décembre dernier, il s'agissait ici d'une deuxième tentative, avec un retour de l'étage sous parachutes, un repêchage dans l'océan, puis une inspection approfondie à terre. Malheureusement, après le décollage à 13 h 11 heure de Paris le 15 mai, cette opération est passée au second plan, puisque le lancement s'est soldé par un cuisant échec. L'entreprise a cependant réussi à récupérer le premier étage… en catimini.

Il s'allume, puis s'éteint…

En effet, après 2 minutes et 35 secondes de vol, le premier étage a éteint ses neuf moteurs Rutherford avec succès pour s'éjecter et laisser l'action au moteur unique du deuxième étage. Hélas, ce dernier s'est éteint après quelques secondes à peine, condamnant le vol tout entier.

Selon l'entreprise, qui a immédiatement démarré son enquête pour déterminer les causes de cet échec, c'est l'ordinateur de bord qui a commandé l'arrêt moteur, répondant à un impératif de sécurité (pour ne pas trop dévier de sa trajectoire). Reste à plonger à la racine du problème.

De nombreux observateurs pointent des similitudes avec le cas de Vega (vol VV-17) en novembre dernier, dont le système de contrôle de la tuyère, mal câblé, avait également conduit à l'échec du vol. Dans tous les cas, l'investigation livrera sans doute ses conclusions rapidement, la liaison de données entre le lanceur et le centre de contrôle de Rocket Lab n'ayant pas été coupée au moment du problème.

L'entreprise s'est excusée publiquement pour cet échec, notamment envers son client unique, Blacksky, qui envoyait deux satellites en orbite basse sur ce vol. Par chance, il s'agit de satellites faisant partie d'une constellation d'observation de la Terre, et ces derniers sont construits « à la chaîne ». La perte de ces unités, en prenant en compte l'assurance, sera donc sûrement rapidement amortie. Space is Hard, comme le rappellent tous les opérateurs de lancement.

Le lanceur Electron sur son pas de tir avec les deux satellites Blacksky. © Rocket Lab
Le lanceur Electron sur son pas de tir avec les deux satellites Blacksky. © Rocket Lab

Les concurrents observent…

Reste que, tout comme le lanceur européen Vega, la fusée Electron de Rocket Lab a subi un revers difficile. Le public comme les clients ne lui avaient pas trop tenu rigueur de l'échec de l'année dernière, car la transparence de Rocket Lab sur le problème, les efforts pour retourner en vol rapidement et la réputation de « jeunesse » de ce lanceur avaient répondu aux attentes. Avec un deuxième raté en moins d'un an, certains clients pourraient être amenés à attendre la réponse de la concurrence.

En effet, même si ces derniers montent encore en puissance (et qu'une majorité n'a pas atteint l'orbite), l'offre se développe avec Virgin Orbit, Firefly Space, Relativity Space et ABL… Et ce ne sont que les Américains ! Il faudra à nouveau faire preuve de pédagogie et d'humilité tout en promettant un rythme de lancement élevé, car Rocket Lab espère entrer en Bourse cette année. Pour des opérations sereines, il ne faudra pas rester sur ce 3e échec en 20 vols…

Source :SpaceNews

Eric Bottlaender

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Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser v...

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Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser vos questions !

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Commentaires (3)

molotofmezcal
Si la fusée n’a pas fait long feu, on a au moins eu droit a de beaux bruits de moteurs au décollage
Gizmo64
Epic fail, 2ème !! Et…action !!!
nicgrover
Et jamais deux sans trois… Mais deux échecs sur 20 lancers cela fait quand même 10% et si l’on relativise, cela donne quoi par rapport à la concurrence…
ebottlaender
Toujours hasardeux de comparer des lanceurs différents, d’autant que dans la classe d’Electron, il n’y en a pas tant (3 échecs sur 20 ça fait par contre 15% mais passons). Virgin Orbit a un échec, mais sur deux vols seulement… Et Pegasus, qui est dans la même classe, vole depuis 1991 et coûte pratiquement 8 fois plus cher, mais dispose de 30 lancements réussis d’affilée (statistique 39 réussis sur 44 tirs).<br /> Vega est à 2 échecs sur 18 vols.
nicgrover
Merci de ces précisions. Cela reste dans la moyenne des autres lanceurs. Mais je pensais que ce n’était que le deuxième échec sur 20 lancements.
ebottlaender
Non c’est expliqué dans l’article : 2è échec en 2 ans, mais 3è échec sur 20 tirs (la toute première tentative orbitale s’est malheureusement soldée en échec).
nicgrover
Ah merci de cette mise au point. N’étant pas spécialisé dans ce sujet je m’en remets à votre expertise0
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