Le module Nauka s'amarre à l'ISS après 8 jours de vol et beaucoup de péripéties !

Eric Bottlaender
Spécialiste espace
29 juillet 2021 à 16h41
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Les derniers mètres de l'approche du module MLM Nauka, vu de la station. © NASA TV
Les derniers mètres de l'approche du module MLM Nauka, vu de la station. © NASA TV

Son décollage le 21 juillet dernier n'était pas le dernier moment de suspense dans la (déjà longue) carrière du nouveau module russe Nauka. Son arrivée sur la station spatiale internationale aujourd'hui s'est heureusement bien passée, après un transfert en orbite qui n'a pas manqué d'incidents.

Les astronautes vont pouvoir s'atteler à préparer le compartiment pour qu'il atteigne son plein potentiel.

Une vraie Kours d'endurance

Aussitôt en orbite, on aurait pu croire que la longue, très longue série de déboires du nouveau module scientifique russe MLM « Nauka » serait terminée. Toutefois, le véhicule de 23 tonnes réservait encore quelques surprises. Pour commencer, un souci mineur avec le déploiement de ses antennes, dont une partie nécessaire pour son amarrage avec l'ISS. Puis, plus grave, le système principal de propulsion n'a pas pu être allumé dans les heures suivant le décollage suite à un problème lié à la pressurisation de ses réservoirs. Il aura fallu environ 24 heures aux équipes au sol afin de rétablir la situation et d'utiliser les propulseurs secondaires pour corriger la trajectoire et faire en sorte que le rendez-vous entre le nouveau module et la Station Spatiale Internationale puisse avoir lieu.

Heureusement, malgré quelques articles de presse alarmants, la situation était réglée assez rapidement… Et même s'il restait quelques interrogations, entre autres sur le nombre d'approches de l'ISS possibles avec le carburant restant dans les réservoirs, elles resteront des hypothèses face à la réalité : Nauka, avec une approche finale un peu hésitante, s'est amarrée à l'ISS cet après-midi à 15 h 29 (Paris). L'approche a eu lieu en grande partie grâce au système automatisé Kours, l'astronaute Oleg Novitsky reprenant le contrôle manuel pour les cinq derniers mètres.

Adieu Pirs, bonjour Nauka

La confiance des autorités russes et des différentes équipes était évidente dès que l'ordre d'évacuation a été donné pour le véhicule Progress MS-17. Ce dernier s'est désamarré le 26 juillet à 16 h 51, emportant avec lui le module Pirs, qui a constitué durant pratiquement 20 ans l'un des ports d'amarrage et des sas russes les plus utilisés de toute la station.

Pirs est le premier module à quitter l'ISS pour une désintégration en bonne et due forme. © ESA/T. Pesquet
Pirs est le premier module à quitter l'ISS pour une désintégration en bonne et due forme. © ESA/T. Pesquet

Pirs n'étant pas compatible avec Nauka, il était nécessaire de le détacher pour laisser la place au grand module scientifique. Cela faisait plusieurs mois que le segment russe préparait ce départ, qui s'est déroulé sans incident… Et dès qu'il a eu lieu, les équipes en ont profité pour inspecter l'extérieur de l'écoutille pour être certains qu'il n'y avait pas de souci. L'approche et l'arrivée de Nauka a ensuite été confirmée.

Et maintenant au travail !

Il faudra quelques heures pour que l'atmosphère au sein de Nauka soit égalisée avec celle de l'ISS, que les connexions soient vérifiées et que les données du module soient étudiées en profondeur avant de pouvoir ouvrir l'écoutille, après quoi Oleg Novitsky et Piotr Dubrov pourront bénéficier d'un très grand module dédié à devenir le laboratoire scientifique russe. Il faudra, bien sûr, du temps pour qu'il soit pleinement opérationnel mais ce sera l'une des activités principales des occupants du segment russe pour l'année à venir… À l'intérieur et à l'extérieur. C'est aussi l'arrivée sur la station spatiale internationale du premier bras robotisé européen, offrant de nouvelles capacités pour l'ESA.

Une excellente nouvelle !

Source : Direct

Eric Bottlaender

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Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser v...

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Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser vos questions !

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Commentaires (19)

nicgrover
Merci de cette excellente nouvelle qui prouve que la technologie russe n’a rien à envier à celle de la NASA.
kasuya_mishima
Bonsoir, sur la légende la photo il est noté « …désintégration en bonne et due forme… » 100% du module est désintégré lors de son entrée dans l’atmosphère ? Aucune matière ne résiste à de telle température ? Est-ce que l’altitude (ou distance) joue un role dans cette désintégration ? Merci pour vos éclaircissements.
juju251
nicgrover:<br /> Merci de cette excellente nouvelle qui prouve que la technologie russe n’a rien à envier à celle de la NASA.<br /> Alors …<br /> La technologie Russe n’est pas sans faille non plus. <br /> Le module Nauka a rallumé ses propulseurs une fois arrimé à l’ISS. <br /> Et bien entendu, ce n’était pas du tout prévu, vous vous en doutez bien. <br /> Résultat des courses, un changement d’attitude de 45° (quand-même) de l’ISS, un allumage des moteurs de Zvezda et Progress pour redresser et les moteurs de Nauka qui ont bouffé tout leur carburant (j’ai sans doute oublié des détails, ce n’est qu’un très rapide résumé). <br /> Quand ça veut pas, c’est jusqu’au bout. <br /> Tweet de la NASA par rapport à ce soucis :<br /> twitter.com<br /> NASA (NASA)<br /> ICYMI: Earlier today, the Russian Nauka module inadvertently fired its thrusters while docked to the @Space_Station. Mission Control teams corrected the action and all systems are operating normally. The crew was never in any danger. Stay tuned for a media telecon later today: https://t.co/bjuDmdiZu5<br /> 6:21 PM - 29 Jul 2021<br /> 1.3K<br /> 290<br />
ebottlaender
L’altitude joue, c’est sûr… Mais surtout la vitesse de rentrée. Je ne peux garantir que 100 du module est désintégré, mais les particules et éventuels tout petits bouts restants tombent, pour leur part, dans un coin du Pacifique loin de toutes les routes de navigation. Cela reste le plus «&nbsp;propre&nbsp;» que l’on puisse faire aujourd’hui.
Yannick2k
je crois que tu n’as pas bien lu le début de l’article
aegir_fr
En général il reste toujours quelques petits morceaux surtout si l’engin était doté de propulseurs, auquel cas en général des morceaux de réservoirs résistent à la désintégration. Le facteur le plus important c’est la vitesse ( ~28.000 km/h dans ce cas).
nicgrover
Je comprends bien mais je voulais dire qu’après plusieurs dizaines d’années d’un régime communiste ils ont toujours su tenir le cap face à la NASA. Et les échecs, certes, se comptent des deux côtés. Là ce n’est qu’un désagrément qui a été, heureusement, corrigé.
kasuya_mishima
@ [aegir_fr] merci à vous, le poids joue donc un rôle 28000km/h quelque soit l’objet ou le corps qui pénètre dans l’atmosphère ? autre question peut-on contrôler ou ajuster son point de chute (je sais pas si c’est comprehensible)
ebottlaender
C’est pas tant le poids que la densité ou les matériaux résistants <br /> Dans le cas d’un cargo comme ici (même avec Pirs sur le dos) il se désorbite très précisément en visant une zone dans le Pacifique. C’est relativement précis, mais pas autant que lorsque c’est un véhicule type capsule qui rentre et traverse l’atmosphère avec des astronautes : on sait alors être précis à moins de quelques kilomètres d’écart.
kasuya_mishima
Merci, donc il peut rentrer en collision avec d’autres «&nbsp;objets&nbsp;» (débris, satellite…) toujours au sujet de ces chutes pour désintégrations :<br /> 1 - Est-il possible qu’il ne tombe pas dans les «&nbsp;temps&nbsp;» ou rester quelques jours en «&nbsp;vol&nbsp;» ou en orbite ?<br /> 2 - Ces chutes sont-elles programmées pour que tous les acteurs de l’espace puissent les suivre?<br /> 3 - Reste t il encore des «&nbsp;trous&nbsp;» pour passer dans ces mailles de satellites ayant des orbites et altitudes différentes ?<br /> Je reconnais que cela fais beaucoup de questions mais en vous lisant sur divers article j’ai cru comprendre qu’ il y avait beaucoup d’appareil au dessus de nos tête, et les laisser chuter m’interroge sur le comment, pourquoi (ne pas récupérer certaine pieces), les risques sont ils mesurés ou tout simplement il n’y en a aucun; ça descend ça se désintègre point <br /> Michel
ebottlaender
Les trajectoires des objets en orbite sont intégrées dans de grands catalogues, certains publics d’autres non, mais en tout cas on ne manoeuvre pas sans faire attention à une potentielle collision, surtout au départ de l’ISS ! Donc même si la rentrée atmosphérique est prévue plusieurs jours après le départ d’un module, sa trajectoire est très précisément calculée.<br /> Des fois, oui, un objet peut rester longtemps (quelques jours, semaines, mois) en orbite «&nbsp;actif&nbsp;» après son départ de l’ISS. Certains satellites éjectés de la station sont actifs plusieurs années.<br /> Ces chutes sont programmées oui, et tous les grandes agences les observent, qu’elles soient prévenues ou non.<br /> Il reste beaucoup de place, mais au passage de certaines altitudes il y a des «&nbsp;zones à risques&nbsp;» qui sont très surveillées.<br />
kasuya_mishima
Merci, peu de place pour l’imprévue donc et surtout pour la pollution des oceans
nordic16
Tout à fait sans compter que le niveau de richesses entre les USA et la Russie n’est pas comparable surtout depuis les lourdes sanctions misent contre la Russie depuis sa reprise de la Crimée. les Russes font malgré tout du bon boulot avec les moyens du bord.
Martin_Penwald
« J’ai glissé, chef ! »<br /> Ne serait-ce pas un des plus graves incidents que la station ait connus ?
Gus_71
C’était quand même chaud ! <br /> Un petit article sur les suites éventuelles de ces incidents serait bienvenu, car chez un de vos confrère/concurrent ont peut lire quelques interrogations que je n’ai pas vu évoquées ici.<br /> Exemples :<br /> … certains instruments à bord sont prévus et optimisés pour ne fonctionner qu’en l’absence de gravité. Un allumage de ce genre crée une gravité artificielle faible, mais suffisante pour endommager certaines pièces. …<br /> La perte d’altitude n’est pas un énorme problème pour la station, si celle-ci ne dure pas.<br />
ebottlaender
Il y a au contraire eu beaucoup d’articles catastrophistes sur ce quasi non événement, tourné en drame par certains commentateurs du Net. Elle a fait tourner la station de 45°, c’était inattendu et… C’est presque tout. La NASA a fait une très bonne conférence pour expliquer ce qui s’est passé.<br /> Il y aura des inspections sur les jointures des panneaux solaires pour être certains qu’il n’y a pas de dégâts mais les agences spatiales n’en attendent aucun.<br /> Et enfin, il n’y a eu aucune perte d’altitude.
Gus_71
Eric, merci pour les précisions !<br /> Je suis allé voir l’article source du site que je citais :<br /> L’article parle d’attitude, et ça a été retranscrit en altitude !<br /> Pas de bobo donc, n’empêche que si l’incident s’était produit lors de l’approche du module, vers les 200 ou 300 mètres de l’ISS ?
ebottlaender
Ah oui là, on en aurait peut-être plus entendu parler <br /> Mais il y a toujours une solution de secours, comme de prendre le contrôle «&nbsp;en manuel&nbsp;» ou de reculer un peu le temps que la situation se calme. C’est l’idée même des vols habités, il peut y avoir 2 ou 3 trucs de suite qui fonctionnent très mal et il y a quand même derrière des systèmes pour rattraper le truc.
Manzazuu
Le site http://www.stuffin.space/ permet de se faire une idée de ce qui tourne au dessus de nos têtes.
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