Pour l'inventeur du WWW, Tim Berners-Lee, la "mode" des géants du numérique ne durera pas

Alexandre Boero
Par Alexandre Boero, Journaliste-reporter, responsable de l'actu.
Publié le 12 mars 2021 à 15h30
Tim Berners-Lee (© Shutterstock.com)
Tim Berners-Lee (© Shutterstock.com)

Le papa du World Wide Web ne donne pas cher de la peau des grandes entreprises numériques à long terme. Pour lui, un changement est nécessaire pour éviter que les inégalités numériques ne se creusent davantage.

Ce n'est pas la première fois que le principal fondateur du WWW, le World Wide Web (et non pas le Wild Wild West !) né en 1989, sort du bois pour faire part de son inquiétude sur la toute-puissance des géants du numérique, ou pour appeler à une plus grande régulation de leurs activités. Tim Berners-Lee a récidivé, cette semaine, dans un entretien accordé à l'agence Reuters.

Berners-Lee ressent un « sentiment d'agitation »

Alors que le Web se détourne peu à peu de l'esprit prôné par ses créateurs, qui militaient pour la création d'un espace de liberté et d'ouverture, Tim Berners-Lee, l'un de ses plus éminents pionniers, estime que la domination des géants du numérique est une « mode » qui n'est pas faite pour durer.

L'informaticien britannique estime qu'il est urgent d'agir pour réduire la fracture numérique chez les jeunes et améliorer l'accès en ligne des personnes qui souffrent de difficultés aujourd'hui à se connecter au monde.

Ces temps-ci, Tim Berners-Lee ressent un « sentiment d'agitation, un sentiment que nous devons faire basculer les choses pour changer ». Les derniers événements en Australie, où Facebook a un temps bloqué les contenus d'actualité australiens de sa plateforme pour protester contre un projet loi visant à exiger du réseau social qu'il rémunère les médias locaux en l'échange d'une publication de leurs contenus, ont sûrement renforcé le point de vue de Berners-Lee.

Le vent du changement souffle-t-il sur les géants du numérique ?

En ce qui concerne un changement de relation futur entre les géants du numérique, les internautes et les gouvernements, Berners-Lee se dit « optimiste, car nous avons déjà vu des modes dominantes sur Internet… et puis les choses changent » avant d'ajouter qu'il y a « une grande conscience que les choses doivent changer ». Dans plusieurs pays occidentaux, les géants du numérique font l'objet d'enquêtes et de sanctions qui pourraient, à force d'intensification, mettre à mal leur domination du secteur à l'avenir.

Mais, pour lui, la volonté de la population de s'opposer à la ponction et au traitement abusifs de leurs données personnelles doit sonner comme une opportunité dont les gouvernements du monde entier doivent se saisir, comme il peut le faire avec sa plateforme Solid, via laquelle les données personnelles sont directement contrôlées par les utilisateurs, propriétaires de ces informations.

Tim Berners-Lee complète aussi son argumentaire en mettant en garde le monde contre la fracture numérique croissante qui toucherait plus d'une personne sur trois âgées de 15 à 24 ans. Le combat pour un numérique sain pour tous n'est donc pas encore gagné.

Source : Reuters

Alexandre Boero
Par Alexandre Boero
Journaliste-reporter, responsable de l'actu

Journaliste, responsable de l'actualité de Clubic. En soutien direct du rédacteur en chef, je suis aussi le reporter et le vidéaste de la bande. Journaliste de formation, j'ai fait mes gammes à l'EJCAM, école reconnue par la profession, où j'ai bouclé mon Master avec une mention « Bien » et un mémoire sur les médias en poche.

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MisterDams

Le problème, c’est que les géants du numérique sont tellement omniprésents qu’on ne voit même plus leur emprise.
Par exemple, combien de personnes tapent « facebook.com » pour aller sur Facebook ? De moins en moins, beaucoup tapent « Facebook » sur la recherche du Store ou du navigateur et attendent qu’un résultat les redirigent. Cette notion même qu’on peut accéder à un site ou service sans passer par un intermédiaire s’estompe.

Même constat sur les marketplace, on achète par confiance sur Rueducommerce ou la fnac, mais en réalité on achète à une TPE européenne sans vraiment en avoir conscience (j’ai déjà commandé un truc sur Amazon arrivé dans un carton fnac+ !)

Une prise de conscience est probable, mais c’est surtout toute une éducation à faire. Quand j’ai commencé internet (ça y est je parle comme un boomer), on savait toujours où on était, qui gérait le contenu qui s’affiche.
Aujourd’hui, une news qui s’affiche sur un flux Facebook est jugée légitime « par défaut », et sa lecture est souvent limitée au titre et au résumé, c’est quand même dangereux.
Même les pubs (autrefois plutôt un gage de confiance sur la fiabilité de l’entreprise qui pouvait s’offrir de la pub) te vantent « une charmante sélection de produits de haute qualité » mais dissimulent en réalité une société individuelle localisée dans un service de domiciliation et s’avère en fait faire du dropshipping.

norwy

Il y aura toujours des « pigeons », la principale cible de tout commerce qui n’a finalement pas vraiment de valeur ajoutée…

HAL1

J’aimerais être aussi optimiste que le Monsieur, mais je vois pas du tout la disparition prochaine des G.A.F.A.M., ni même leur affaiblissement…

SlashDot2k19

Ça fait un certain moment que la « mode » des GAFAM est là

cirdan

La plupart des internautes aimeraient qu’il ait raison sans vraiment trop y croire. Néanmoins, et pour aller dans le sens de changements à venir, il y a une actualité récente qui mérite d’être connue :

Pour le reste, WWW ça n’est pas seulement le World Wide Web ou Wild Wild West, mais aussi le génial What a Wonderful World : :wink:

jcc137

Même avis. Ces sociétés savent se mettre à jour, évoluer dans le sens du vent, rester constamment attractives (le gratuit fait beaucoup de choses) et attiser notre addiction à leurs services.
Tout ce qui reste, pour ceux qui craignent pour leurs données perso, c’est l’encadrement par la loi (encore et toujours)

pascal16

« …Joe Biden de poursuivre dans la voie de Donald Trump et de s’attaquer aux quasi-monopoles des GAFA… »
Un président américain ne va tirer sur ses forces économiques, il est la pour la grandeur de l’Amérique, il fera donc un truc qui en apparence sera noble et en réalité permettra de continuer comme avant

trollkien

Je pense qu’il a (malheureusement) tord, car aujourd’hui les GAFAM sont plus riches et puissants que de nombreux pays

Nerva

Imaginez un super-mega-hyper virus qui s’infiltre dans tous les datas centers des GAFAM et formate disques et sauvegardes ? Pis tant qu’à faire, un autre super-mega-hyper virus qui s’infiltre dans tous les produits Apple et flashe disons 90 % des chipsets ?

HAL1

Je ne suis pas d’accord sur le côté « gratuit ». Apple, Amazon et Microsoft ne se positionnent pas sur ce créneau, et elles n’en sont pas moins influentes et en position dominante que peuvent l’être Google et Facebook.

Je te rejoins par contre en ce qui concerne l’encadrement par la loi. Ce n’est pas à ces entreprises de déterminer ce qui est bon pour les utilisateurs ou pour le marché, mais c’est aux états de mettre de régulations en place pour limiter leur pouvoir.