Il fait chaud chez vous ! James Webb déchiffre l'exoplanète Trappist-1b, à 40 années-lumière

Eric Bottlaender
Spécialiste espace
27 mars 2023 à 17h35
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Vue d'artiste de Trappist-1b avec son étoile naine rouge. Crédits NASA, ESA, CSA, Joseph Olmsted (STScI)
Vue d'artiste de Trappist-1b avec son étoile naine rouge. Crédits NASA, ESA, CSA, Joseph Olmsted (STScI)

Grâce à l'instrument infrarouge MIRI, les scientifiques ont utilisé le télescope James Webb pour mesurer les températures sur une exoplanète rocheuse du système Trappist. Une première qui livre des informations importantes pour comprendre des mondes plus lointains (et on l'espère, un peu moins violents).

Le James Webb continue d'impressionner par ses prouesses.

Une Trappist bien chaude

Lors de la découverte des sept exoplanètes du système Trappist-1 orbitant autour de leur petite étoile naine rouge en 2017, les astrophysiciens savaient qu'elles feraient l'objet de nombreuses observations futures. Car Trappist-1 est proche, à seulement 40 années-lumière, et ces exoplanètes rocheuses ont des caractéristiques qui les rapprochent de celles qui sont dans notre propre Système solaire. Bien sûr, elles sont bien plus proches de leur étoile que Mercure, Vénus, la Terre ou Mars, mais elles reçoivent des niveaux d'énergie similaires. Les étudier, c'est mieux comprendre les exoplanètes rocheuses, mais aussi leur étoile. « Il y a dix fois plus de naines rouges dans la Voie lactée que d'étoiles comme le Soleil, et deux fois plus de chances d'avoir des exoplanètes rocheuses autour, explique Thomas Greene, auteur principal de cette nouvelle étude de Trappist-1. Mais ces étoiles sont aussi très actives, très brillantes lorsqu'elles sont jeunes, avec des bouffées et des rayons X qui peuvent annihiler une atmosphère ». Est-ce un scénario possible pour Trappist-1b ? Les mesures du télescope James Webb ont montré que cette exoplanète n'a pas d'atmosphère et que côté jour, il y fait environ… 225°C.

MIRI tient ses promesses

Voilà qui n'en fait pas une planète idéale. Les scientifiques savaient déjà que Trappist-1b n'est pas dans la « zone habitable », et que cette exoplanète est en rotation synchrone : elle présente toujours le même côté à son étoile. Mais grâce aux mesures de l'instrument MIRI, ils ont pu mesurer sa température en analysant le flux d'émissions thermiques lors d'une éclipse. Ce qui revient, en prenant quelques raccourcis, à soustraire la chaleur de Trappist-1b à celle de son étoile lorsqu'elle passe derrière elle ! Un exploit technique (l'exoplanète est 1 000 fois moins brillante en infrarouge que son étoile) qui n'a été possible que grâce à l'extrême sensibilité de l'instrument… auquel le CEA français a beaucoup participé. Ces mesures du système Trappist-1 sont d'ailleurs directement liées au temps d'observation alloué aux scientifiques à l'origine de MIRI, dont le chercheur Pierre-Olivier Lagage qui avait évoqué avec nous les capacités de James Webb l'an dernier (il est co-auteur de cette étude sur Trappist-1b).

En voilà un qui n'a pas fini d'explorer autour de lui. Crédits NASA/Adriana Manrique Gutierrez
En voilà un qui n'a pas fini d'explorer autour de lui. Crédits NASA/Adriana Manrique Gutierrez

Atmosphère ou pas, sur cette exoplanète rocheuse ?

Les observations précédentes avec les télescopes Hubble et Spitzer avaient permis d'éliminer l'hypothèse d'une atmosphère fine sur Trappist-1b, mais les mesures du James Webb viennent aussi infirmer toute possibilité d'une atmosphère très dense. En effet, d'après les simulations, la chaleur serait moindre sur ce type de planète si elle possédait une atmosphère, cette dernière étant possiblement refroidie du côté qui se trouve « de nuit » en permanence. Mais pour prouver définitivement la mesure, l'équipe de recherche espère pouvoir mesurer les émissions thermiques de Trappist-1b sur l'ensemble du cycle de son orbite et non plus seulement par « masquage » lors d'une éclipse. Obtenir la température « côté nuit » lèverait les derniers doutes. Quoi qu'il en soit, cela a déjà de quoi donner du grain à moudre pour affiner les modèles des exoplanètes proches des naines rouges… En sachant que pour le moment, le James Webb est le seul instrument au monde capable d'établir ces mesures.

Source : webbtelescope.org

Eric Bottlaender

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Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser v...

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Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser vos questions !

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Commentaires (4)

JulienBache
Merci Éric de nous tenir informés!<br /> J’espère qu’il n’y aura pas de lecteur furieux qu’on parle de trappiste sans mentionner que c’est aussi de la bière
DrGeekill
Merci aussi pour cet article passionnant
f-dzt
un bel article, merci !<br /> comme toujours avec les planètes à rotation synchrone, on peut se demander si quelque chose de viable pourrait exister sur le terminal, le long de la limite jour/nuit, une zone peut-être vaguement tempérée … mais pour aller mesurer cela … pas facile
loloaml
Cette référence permanente au AL (années lumière) m’énerve.<br /> Voyager II se déplace à 15 km par seconde….
ebottlaender
C’est la seule unité qui n’implique pas des ordres de grandeurs énormissimes pour exprimer des distances. Elle est utilisée à la fois par les agences spatiales et par les chercheurs dans tous les papiers scientifiques du domaine.<br /> Mais bon, désolé que ça vous embête.<br /> On peut utiliser des kilomètres, si vous voulez (aucun rapport avec Voyager 2 par contre).<br /> Trappist-1b est à 378 400 000 000 000 000 km environ.
loloaml
Ok, ok, mais qui ne connaît un humain ayant 40 ans ou plus?<br /> Personne…<br /> Dire qu’à la vitesse de voyager 2 il faudrait 8000 années pour y arriver, recadrerait les échelles de valeurs.<br /> (J’aime beaucoup STARWARS, mais je n’ai pas entendu un scientifique envisager l’hyparespace demain…)
ebottlaender
Mais en fait c’est inaccessible pour les humains, on n’est pas dans Star Wars, et ça c’est relativement acquis je pense. Peu de gens connaissent la vitesse de Voyager 2 par exemple, c’est une comparaison qui n’a pas vraiment de sens (comparé à 40 années lumières, qui est une unité reconnue, soit 40 ans pour que la lumière de leur étoile nous parvienne).<br /> Même en unité « années Voyager 2 », ça ne fait pas 8000, mais 800 millions d’années…<br /> 15km/s → 52000 km/h → x24 x365 = 473 millions de km/an
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