On ne l'arrête plus ! Le télescope James Webb a réussi à photographier sa première exoplanète

Eric Bottlaender
Spécialiste espace
02 septembre 2022 à 18h45
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C'est bien l'exoplanète que l'on voit sur les points "de couleur" en bas, l'étoile étant cachée par... une petite étoile © NASA / ESA / CSA, A Carter (UCSC)
C'est bien l'exoplanète que l'on voit sur les points "de couleur" en bas, l'étoile étant cachée par... une petite étoile © NASA / ESA / CSA, A Carter (UCSC)

Performance rare, l'image directe d'une exoplanète apporte beaucoup d'informations. Et même s'il s'agit ici d'une géante gazeuse soumise à de très hautes températures, c'est un nouveau témoin des performances du télescope James Web… et ici, de ses coronagraphes, utilisés pour cacher l'étoile.

Il faut même s'attendre à de futures améliorations des mesures.

Livraison du James Webb !

Encore une première. Deux mois seulement après le début officiel de la campagne scientifique du télescope James Webb, la nouvelle de la moindre « early release » fait autant de bruit dans les laboratoires d'astrophysique que dans les colonnes des médias. Car, lorsque les responsables du programme ont annoncé que les résultats étaient meilleurs que prévu, ce qu'ils disaient en clair était simple : pratiquement chaque campagne d'observation du télescope sera une petite révolution, que ce soit en matière de photographie ou de résultats.

L'observation de HIP 65426 ne fait pas exception, même si ce n'est pas l'étoile de ce système qui intéressait les scientifiques, mais son exoplanète connue depuis 2017. Il s'agit d'une très jeune planète gazeuse de 15 à 20 millions d'années seulement et d'une taille impressionnante comprise entre 6 et 12 fois celle de Jupiter. Grâce à ses instruments équipés de coronagraphes, le télescope James Webb a pu littéralement cacher la lumière de l'étoile et ainsi emmagasiner suffisamment de lumière pour voir directement l'exoplanète géante.

Tout est dans la technique

L'image elle-même n'est pas fondamentalement révolutionnaire, d'autant plus lorsque les équipes du Webb ont habitué le public à d'hallucinantes photographies de galaxies et d'amas d'étoiles en seulement quelques semaines. La reconstruction (car ce n'est pas « un seul cliché ») est aussi moins belle et claire que ce qu'a pu produire l'instrument SPHERES du Very Large Telescope de l'ESO, lequel a également pu photographier la même exoplanète. Mais il ne s'agit pas ici d'esthétique, plutôt d'observation, de techniques et de bandes de fréquenc…

D'abord les coronagraphes ont été extrêmement précis pour éliminer la lumière de l'étoile (laquelle est 10000 fois plus brillante que son exoplanète). Ensuite, les coronagraphes ne faisant pas tout, il restait beaucoup de lumière « parasite » due à la structure même du Webb… Mais sa capacité à observer sur de longues fenêtres en restant extraordinairement stable permet d'éliminer ces parasites en post-traitement. Enfin, l'observation directe en infrarouge, grâce aux multiples instruments du James Webb, ouvre une nouvelle fenêtre sur la nature de ces planètes, leur caractérisation et celle de leur atmosphère. L'équipe scientifique, dans un article prépublié, estime ainsi avoir mesuré 97 % du spectre infrarouge réfléchi par l'exoplanète.

La même exoplanète, mais photographiée par le VLT (ESO). Notez que ni l'image du VLT ni celle du Webb n'est résolue, car la taille réelle de l'exoplanète ne dépasse pas celle d'un pixel sur les images (elle "brille" en particulier sur celles du JWST, car sa température atteint les 900 degrés Celsius).
La même exoplanète, mais photographiée par le VLT (ESO). Notez que ni l'image du VLT ni celle du Webb n'est résolue, car la taille réelle de l'exoplanète ne dépasse pas celle d'un pixel sur les images (elle "brille" en particulier sur celles du JWST, car sa température atteint les 900 degrés Celsius).

Il y en a sous le capot

Et ce n'était là qu'un cas d'étude. Comme le précise Aarynn Carter, qui a mené l'équipe de traitement des images, « ce qui est le plus excitant, c'est que nous n'avons que commencé. Il y a beaucoup d'autres images d'exoplanètes qui vont arriver et qui vont nous révéler à la lecture de leur lumière, leur physique, leur chimie, leur formation. » Une promesse…

Source : NASA

Eric Bottlaender

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Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser v...

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Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser vos questions !

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Commentaires (14)

Bombing_Basta
Universe’s wild, Webb.
ld9474
Oh la vache ! En bas à gauche on voit un petit bonhomme vert
taist
iquioussen, sort de la, on t’a trouvé !
Biggs
C’est plus un télescope, c’est un paparazzi.
jcc137
Je cherche l’intérêt d’examiner un pixel brillant qui serait une exoplanète de laquelle, hormis sa température, on ne saura rien de plus, et surtout,qu’on ne pourra jamais visité avant des milliers (millions ?) d’années, si elle existe encore au moment de sa visite (cf. vitesse de la lumière)
ebottlaender
Ah ben c’est raté, les scientifiques ont beaucoup plus d’informations que sa température.<br /> Par contre c’est vrai, on ne pourra pas la visiter, ce qui n’est pas bien grave car c’est une géante gazeuse chaude. On a déjà des géantes gaseuses beaucoup plus près. Mais l’intérêt n’est pas là, il est de comprendre comment fonctionne l’univers qui nous entoure, de quoi il est constitué, comment évoluent les planètes, etc.
jcc137
mmouii… L’évolution des planètes on en sait quelque chose rien que dans notre système solaire. Savoir qu’une gazeuse, aussi grosse soit-elle mais parmi tant d’autres, se trouve à 400 AL… D’accord c’est une ado d’une 20e millions d’années, mais je ne peux m’empêcher de rester dubitatif quant à l’intérêt.<br /> Enfin, James est dans l’espace, les clichés sont quasiment gratuits, autant s’en donner à coeur joie.
kplan
Vu sous cet angle, aucun télescope n’aurait d’intérêt. Aucune observation de notre univers ne serait pertinente.<br /> Alors je te pose la question en retour, à quel niveau on doit limiter notre intérêt pour la connaissance de ce qui nous entoure ? Quels critères doit-on s’imposer ?
xryl
Je reformule ta remarque:<br /> Vu que la communauté scientifique ne s’intéresse pas aux nombrils de quelques internautes, c’est tous des idiots.<br /> Sûr, tu peux pas aller visiter la centrale de Tchernobyl, pourquoi continuer à payer des glands pour mesurer et étudier les effets des radiations?<br /> Plus sérieusement, vérifier une mesure avec un instrument qui est un ordre de grandeur plus précis afin de détecter une potentielle anomalie et donc faire de nouvelles découvertes, c’est ça le truc. Peut être que cette planète n’est pas à 900°C mais à 800°C, ce que le VLT ne pouvait pas mesurer. Peut être que du coup, le modèle que l’on avait ne colle plus. Peut être qu’en cherchant plus, on se rend compte qu’en fait, il y a plus qu’une planète là bas, comme un gaz qui absorbe l’énergie thermique. Peut être qu’en faisant une étude spectrométrique de ce gaz, on découvre une nouvelle molécule de gaz qui permettra, sur Terre, de réduire l’effet du réchauffement climatique.<br /> Ou peut être que non, et dans ce cas, on vient d’augmenter la fiabilité des modèles théoriques. Dans tous les cas, c’est une avancée, pas pour que monsieur puisse aller passer 2 semaines avec Ryanspace en vacance à 400 AL, mais pour que les humains soient un peu plus conscient de comment fonctionne leur univers.
jcc137
Je n’ai pas la prétention de refaire le planning de nos scientifiques, mais excusez-moi de ne pas m’extasier avec autant d’enthousiasme que vous pour des découvertes de poussières (à l’échelle astronomique) de planètes situées tellement loin qu’on se demande, sauf vous, l’utilité finale. Alors oui, on risque de faire de nouvelles découvertes sur la composition des gaz de cette planète, l’historique de sa présence, des éléments autres qui satisferont la curiosité des grands scientifiques, et la vôtre. Mais bon, au final savoir qu’une gazeuse se trouve à 400 AL, et qui n’apporte rien d’autre pour l’instant, ça me laisse toujours aussi idiot.<br /> Ce qui m’extasierait ce serait d’explorer visuellement des planètes bien plus proches, qui nous donneraient des indications plus précises sur d’éventuelles formes de vie, sur leur composition rocheuse, leur éventuelle hydrologie, des éléments plus excitant que cette gazeuse si lointaine. Je pense que l’exploitation de James peut le permettre.<br /> Viser l’origine du Big Bang pour laquelle les scientifiques se posent déjà la question de l’avant BB, c’est pour moi viser trop haut en l’état actuel de la capacité de nos matériels.
kplan
Tu es tout pardonné de ne pas t’extasier, là n’est pas la question. Il y a des gens qui ne s’intéressent même pas au JWST et ça ne me chagrine pas.<br /> Ici il est surtout question des outils embarqués sur le JWST et qui fonctionnent déjà très bien.<br /> Évidemment qu’on voudrait tous pouvoir visiter une exoplanète et sortir de notre système, ça serait excitant.<br /> Cette gazeuse est la première à être détectée. On en attend beaucoup d’autres avec peut-être plus d’informations « excitantes », c’est surtout ça la bonne nouvelle.<br /> Bon, après tu dis que tu ne veux pas refaire le planning des scientifiques mais tu penses déjà que JWST ne pourra pas faire avancer nos connaissances sur le Big Bang et qu’il faut laisser tomber… Mais merci du conseil.
Blackalf
kplan:<br /> Il y a des gens qui ne s’intéressent même pas au JWST<br /> C’est mon cas, mais ça ne m’empêche pas de penser que si Copernic et Galilée n’avaient pas existé et fait ce qu’ils ont fait, que saurions-nous de l’univers aujourd’hui ?
xryl
Que tu descend d’Adam et d’Ève, et que cette dernière porte en elle le péché originel. Qu’il n’y aurait pas le droit de vote pour cet être abject qui a trahi l’humanité. Franchement, ça fait pas envie, mais je suppose qu’il faut tout type de mentalités dans le monde.
oXoshivas
Il y a un groupe de scientifiques qui ont repris la métrique d’alcubierre qui, avec une quantité moindre d’énergie, permettrait les voyages supra Luminique avec une faisabilité dans un siècle, suivants les capacités techniques qui évolueront au fur et à mesures du temps
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