Live Japon : la téléphonie mobile et ses terminaux

11 août 2007 à 10h00
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La 2G a dégagé, la 3G domine le marché et la 3,5G est engagée

Premier pays à avoir lancé un réseau cellulaire commercial analogique (1ère génération) en 1979, à être passé au numérique (2ème génération) début 1993 et à avoir inauguré la troisième génération en octobre 2001, le Japon a toujours fait figure de pionnier dans le secteur des télécommunications mobiles personnelles. Et il le reste.

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Plus de 100 millions d'abonnements à un service mobile sont actuellement recensés sur l'Archipel, pour une population de 127 millions de personnes, dont 13% de moins de 15 ans et 20% de plus de 65 ans. Le taux de pénétration (nombre d'utilisateurs rapporté au nombre d'habitants) n'est certes pas plus élevé qu'ailleurs, même plutôt moins du fait de la pyramide des âges, mais les téléphones commercialisés, les services proposés et les usages sont très différents et bien plus avancés que dans tout autre pays, hormis peut-être dans la voisine Corée du Sud.

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Fin juillet 2007 (derniers chiffres disponibles à ce jour), sur 103,6 millions de clients mobiles, quelque 82,3 millions, soit en gros 80%, avaient déjà opté pour une offre de troisième génération (3G) ou même 3,5G pour ceux qui ont choisi un téléphone compatible. Le rythme mensuel de passage à la 3G/3,5G est d'environ un million d'utilisateurs par mois. Autant dire que ça va vite et que la 2G, qui reposait non pas sur le standard GSM mais sur une technologie locale inusitée en Europe ou ailleurs (le PDC), est en passe d'être enterrée. D'ailleurs, plus aucun téléphone mobile de deuxième génération n'est commercialisé au Japon depuis plus d'un an par les trois principaux acteurs du secteur japonais que sont NTT DoCoMo (53 millions de clients), KDDI (marque "au", 29 millions) et Softbank Mobile (16,5 millions).

Des téléphones vendus en pack uniquement

Tous les mobiles vendus au Japon le sont dans des packs d'opérateurs, associés à un abonnement ou lors d'un renouvellement de contrat. Autrement dit, il n'est pas possible d'acheter un terminal "nu" à utiliser sur le réseau d'un opérateur local en y glissant une puce SIM.

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N'espérez donc pas trouver au Japon un téléphone typiquement nippon à rapporter en France. Même en admettant qu'il corresponde au même standard de troisième génération (UMTS W-CDMA), il ne fonctionnera pas en Europe. Il faudrait pour cela que vous ayez souscrit un abonnement auprès d'un opérateur nippon utilisant ce standard (NTT DoCoMo ou Softbank), ce qui n'est possible que pour les personnes résidant au Japon. Sans compter que le coût serait prohibitif. En un mot : « oubliez ». Quant à KDDI, il a choisi le standard CDMA 1x EvDo non employé sur le vieux continent.

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Tous les téléphones mobiles proposés par les opérateurs japonais sont conçus conjointement avec les fabricants sur la base de spécifications archi-précises découlant des services proposés. Ils comportent systématiquement des fonctions spécifiques qui les rendent exclusifs à chacun.

Etat du marché

Plus de 95% des terminaux cellulaires vendus sur l'archipel sont de marque japonaise: Sharp (actuel numéro un), NEC, Panasonic, Casio, Toshiba, Hitachi, Sanyo, Fujitsu, Kyocera, Mitsubishi Electric ou Sony-Ericsson (nippo-suédois). Résultat, le finlandais Nokia, leader mondial (avec environ 38% de parts de marché dans le monde) est un nain au Japon. Il n'y vend quasiment aucun téléphone portable. Le deuxième géant de la planète, l'américain , en écoule quelques unités (mais très peu), de même les sud-coréens Samsung et LG Electronics, lesquels restent très très loin derrière les marques nationales.

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Pourquoi? Eh bien parce que depuis l'origine, tous les fabricants japonais se sont pliés aux desiderata stricts des opérateurs, allant même jusqu'à accepter de masquer leur nom et logo au profit de ceux de l'opérateur donneur d'ordres. N'ayant jamais admis ce principe, et n'en faisant qu'à sa tête, Nokia a raté le marché très haut de gamme japonais, lequel représente grosso-modo chaque année 50 millions d'exemplaires. Cela ne grève guère son budget et ne peine pas davantage ses actionnaires puisqu'il se rattrape largement en Chine et ailleurs en vendant des dizaines de millions de produits de plus bas niveau.

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A l'inverse, les fabricants japonais restent dans ce domaine souvent cantonnés au marché nippon. Leurs produits, trop sophistiqués et trop calés sur les spécificités nippones, ne rencontrant pas le même engouement à l'étranger même si les concurrents étrangers s'inspirent intelligemment de leurs idées et leur achètent les composants de base de leurs terminaux (module photo, circuits intégrés, écrans...)..

Quels modèles de téléphones mobiles ?

A quoi ressemblent les téléphones mobiles nippons? A des "couteaux suisses vitaux", selon les hommes, à des "accessoires de mode indispensables" selon les filles. Tous les appareils, souvent en forme de coquillage (clamshell) sont en effet pourvus d'un luxe de fonctions (utilisées), bénéficient d'un design léché oeuvre d'un créateur renommé (parfois en série limitée), sont constitués de matériaux soigneusement sélectionnés, le tout pour cibler telle ou telle catégorie de clients de toutes générations.

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Tous les terminaux sont évidemment munis d'un large écran couleurs. Ils donnent accès à des milliers de sites spécifiques voire aux pages internet normalement destinées aux ordinateurs grâce à un navigateur dit « universel ». L'échange d'e-mails traditionnels (jusqu'à 5.000 caractères japonais), avec icônes animées, fontes colorées et autres fioritures fait partie des fonctions de base depuis 1999 (création de l'i-mode de NTT DoCoMo), à l'instar de l'appareil photo (depuis 2001).

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S'y ajoute le lecteur de QR Code et Color Code, sorte de codes à barres en deux dimensions à photographier sur une affiche publicitaire, dans un magazine ou sur une carte de visite pour saisir des adresses de site ou des coordonnées personnelles sans utiliser les touches du clavier. Comme on l'a déjà indiqué ici, les Japonais n'utilisent pas les SMS puisqu'ils disposent tous sur leur téléphone de la fonction e-mail et d'une adresse électronique mobile identique sur la forme à celle d'un PC. Il est donc possible d'envoyer et recevoir de longs courriels traditionnels accompagnés de liens et pièces jointes entre mobiles ou de mobile à ordinateur et vice versa, pour un prix ridicule frôlant la gratuité.

La consultation de sites d'informations, de cartes météo ou de magazines, le téléchargement de sonneries, chansons intégrales, jeux ou applications diverses, de même que le shopping en ligne (cosmétiques, vêtements, légumes frais, CD/DVD...), les enchères, la réservation de billets d'avions ou de place de concerts, la lecture de livres, le boursicotage, la recherche d'horaires de métros ou trains et la création de blogs ou la participation à des sites communautaires (SNS) font partie des utilisations les plus fréquentes. La liste n'est pas exhaustive, loin s'en faut.

Bilan : la facture mensuelle moyenne par abonné dépasse allègrement les 35 euros et grimpe chez les jeunes adultes bien plus haut. Elle est à hauteur d'environ un tiers imputable aux échanges de données dont la proportion augmente pour combler en grande partie la baisse inéluctable du tarif des communications vocales.

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La plupart des mobiles font aussi office de baladeur audio-vidéo numérique, avec une capacité de stockage en théorie très élévée puisqu'ils disposent tous systématiquement d'un emplacement pour carte additionnelle amovible (mini-SD, micro-SD ou autre) en plus d'une mémoire interne confortable. NTT DoCoMo propose un service de téléchargement direct de musiques et clips vidéo en lien avec Napster Japon (groupe Tower Records Japon détenu à 44% par NTT DoCoMo lui-même) pour un forfait mensuel illimité (moins de 15 euros). Son rival KDDI l'avait devancé et a séduit une grande partie des jeunes avec son service LISMO, équivalent d'iTunes d'Apple accessible directement depuis un téléphone 3G ou un PC. Plus de 80% des musiques (chansons intégrales ou extraits) téléchargées au Japon le sont à partir des mobiles, tant en volume (nombre de titres) qu'en valeur (montants dépensés).

Autres fonctionnalités originales

Le récepteur de signaux de positionnement par satellite GPS fait désormais également partie des composants standard, puisqu'à la demande des autorités, cet outil de localisation géographique est obligatoire sur tous les nouveaux mobiles vendus au Japon depuis le 1er avril 2007. Les services de secours ont en effet souhaité et obtenu cette mesure pour pouvoir déterminer la provenance exacte d'un appel d'urgence même si la personne en détresse n'est pas capable de dire précisément où elle se trouve.
Evidemment, le récepteur GPS est avant tout utilisé pour le radioguidage sonore et visuel en temps réel avec cartes en deux ou trois dimensions, des piétons, cyclistes ou même des automobilistes qui ne disposent pas d'un équipement de bord. On peut même dicter ses requêtes de trajet, sans rien saisir au clavier.

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Les fonctionnalités de porte-monnaie électronique, cartes de crédit ou de fidélité, badges d'entreprises, titres de transport multi-compagnies/multi-trajets, sont en passe d'être généralisées, puisque désormais, une grande partie des nouveaux modèles sont pourvus d'une puce sans contact inamovible (Felica de Sony), différente de la puce SIM. Le téléphone portable remplace donc ainsi les traditionnelles cartes en plastique pour franchir les quais de gare et métros, payer dans les commerces, accéder à son bureau ou encore accumuler des points de fidélité dans les commerces, simplement en effleurant un lecteur dédié avec le dos de son téléphone.

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Pour régler un achat dans un commerce acceptant le paiement sans contact (on en dénombre plusieurs dizaines de milliers), il suffit d'approcher son portable de la caisse enregistreuse, laquelle ponctionne en une fraction de seconde dans la puce le bon montant d'argent virtuel pré-chargé ou lit les références d'une carte de crédit à débiter. Rapide, pratique, ludique, tel est le sentiment de la plupart des autochtones qui utilisent ces services en fort développement. Même si un téléphone peut stocker plusieurs dizaines de milliers de yens (plusieurs centaines d'euros), le risque de se le faire chaparder est minime.

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L'auteur de ces lignes a récemment perdu son téléphone dernier cri avec 4000 yens en argent virtuel à l'intérieur. Perte signalée au poste de police du coin dans la soirée, coup de fil au bureau deux jours plus tard, mobile retrouvé par un passant qui l'a bien vite apporté aux objets trouvés. Et ce n'est pas exceptionnel, bien au contraire, cela arrive à des dizaines de Nippons chaque jour.

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Pour autant, comme les Japonais aiment être rassurés a priori et adorent les technologies avant-gardistes tape-à-l'oeil, les opérateurs et fabricants n'hésitent pas à doter leurs appareils de fonctions de sécurité avancées, lesquelles lèvent les craintes même si in fine elles s'assimilent à des gadgets très rarement employés. Outre les banals codes PIN (que personne ici n'utilise!) existent ainsi des mobiles avec reconnaissance d'empreintes digitales, signatures vocales, authentification faciale ou bippeur à glisser dans une poche qui sonne quand le mobile est un peu trop loin. La différenciation biométrique de l'utilisateur par l'iris de l'oeil ou le réseau vasculaire du doigt est attendue dans quelques mois !

Autre grande fonction en vogue: la télévision numérique terrestre (TNT) mobile. De nombreux modèles aujourd'hui en rayon intègrent un récepteur de signaux de TV hertzienne diffusés depuis les sites émetteurs de radiodiffusion traditionnels (différents des antennes-relais des infrastructures cellulaires des opérateurs). Pour regarder, gratuitement, les programmes des chaînes terrestres (NHK, Fuji TV, TV Tokyo, Nippon TV...), il suffit donc d'allumer la télé du mobile, sans avoir à se connecter à un quelconque service. C'est dont très différent de la soi-disant "TV mobile" des opérateurs français. Ces derniers emploient abusivement cette dénomination à des fins commerciales en trompant les profanes, alors même que, contrairement au Japon, il ne s'agit nullement de diffusion TV, mais de transmission en flux point à point (streaming), payant, sur réseau 3G, lequel n'est assurément pas fait pour cela, puisque la vidéo est archi-gourmande en ressources!

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La radio FM est une fonction déjà quasiment basique et la radio numérique suivra. Même si la diffusion numérique n'est pas encore lancée officiellement, des terminaux proposés depuis quelque mois (Sony Ericsson) permettent déjà de recevoir les programmes de plusieurs stations, comme Tokyo FM, émis en numérique à titre expérimental. Qualité exceptionnelle.

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Signalons aussi que certains modèles spécifiques pour personnes âgées sont désormais aussi pourvus d'une fonction loupe d'écran, de touches d'accès direct à certains numéros (urgences, famille), d'un mode d'écoute par transmission osseuse et d'un système de ralentissement du débit de la parole de l'interlocuteur.

Pour les enfants on trouve des téléphones avec exercices scolaires, emploi du temps, portails de services bridés avec contrôle parental et sirène d'alarme assourdissante. D'autres enfin intègrent des dispositifs de reconnaissance de mouvements (pour les modèles destinés aux adolescents fans de jeux) et diverses fonctions plus ou moins gadgets visant à séduire les plus exigeants ou les plus marginaux.

Les téléphones/assistants numériques personnels à clavier alphanumérique intégral restent jusqu'à présent très peu utilisés. Toutefois, la sortie récente de certains modèles haut de gamme (Sharp, Toshiba, HTC) chez les petits opérateurs Willcomm et e-Mobile pousse les poids lourds NTT DoCoMo, KDDI et Softbank Mobile à s'intéresser aussi à ce segment. Il devrait toutefois ne pas représenter plus de 5 à 10% de l'ensemble, à moyen terme.

Les tarifs

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Au total, environ 200 à 250 modèles de mobiles en différentes variantes colorées sont en permanence disponibles dans les rayons des enseignes spécialisées et hypermarchés de l'électronique. Le rythme d'arrivage des nouveautés est élevé, du fait d'une concurrence acharnée et de l'ajout incessant de nouveaux services et fonctions. Le prix d'un terminal va de 1 yen (rien du tout) à 40.000 yens (300 euros) au plus, sachant toutefois que le tarif est dépendant de l'abonnement (obligatoire), de la période de renouvellement et de la durée d'engagement.

Ce mode tarifaire, qui repose sur une subvention élevée des terminaux par les opérateurs (plus de la moitié de leur coût réel) en échange d'une promesse de fidélité de la part du souscripteur, pourrait toutefois évoluer d'ici quelques années, et le marché davantage s'ouvrir aux mobiles étrangers. C'est en tout cas le souhait de l'Etat. Mais même l'iPhone d'Apple, en dépit de son logo et de ses fonctionnalités alléchantes, aura encore fort à faire pour égaler les appareils locaux. Il devra commencer par être adapté à la 3G, sans quoi il n'a aucun avenir au Japon où il n'est d'ailleurs pas attendu avant mi-2008, au plus tôt. Et d'ici là, les mobiles locaux auront franchi au moins un palier qualitatif de plus.
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