De nouvelles simulations permettent d'espérer la présence de volcans sous-marins sur Europe, la lune de Jupiter

Eric Bottlaender
Spécialiste espace
02 juin 2021 à 17h30
6
Contraste augmenté pour cette vue de la lune Europe autour de Jupiter. © NASA
Contraste augmenté pour cette vue de la lune Europe autour de Jupiter. © NASA

Sous la couche de glace griffée de la lune Europe, se cache un vaste océan. Une équipe scientifique tchèque et française estime que le manteau rocheux en dessous est suffisamment perturbé par les effets de marée pour donner lieu à une activité volcanique soutenue. De quoi encore renforcer l'intérêt pour l'exploration…

Par chance, deux sondes vont se diriger vers le satellite !

À la poursuite des volcans sous-marins

Les océans sous les couches gelées d'Europe (autour de Jupiter) et d'Encelade (autour de Saturne) sont aujourd'hui considérés comme de véritables mines d'or potentielles pour tenter de découvrir une éventuelle forme de vie extraterrestre. Reste que pour ça, il faudra que les conditions soient réunies, et si le terme « océan » laisse rêveur, il ne faut pas oublier que ceux-ci se trouvent sous de gigantesques calottes de glace.

Des équipes scientifiques ont déjà observé de la vapeur d'eau autour d'Europe et du sel à la surface, ce qui laisse supposer qu'il existe des geysers quelque part, faisant sourdre de la vapeur à travers quelques cheminées creusées dans la glace. Fascinant mais… est-ce possible ? Une nouvelle simulation, réalisée par M. Behounkovà en République tchèque et une équipe du LPG (Laboratoire de Planétologie et Géodynamique) à Nantes, permet d'aller un peu plus loin pour espérer une activité volcanique sur le sol océanique d'Europe.

C'est normal, c'est marée basse

La lune gelée, qui met 85 jours pour réaliser une orbite autour de Jupiter, est fortement perturbée par la masse de la géante gazeuse, qui génère un très fort effet de marée. Ce dernier ne se ressent pas qu'à sa surface de glace, ni au sein de son gigantesque océan, mais jusqu'à son cœur. En modélisant Europe en 3D, l'équipe a examiné l'effet produit par les forces des marées sur sa croûte, les potentiels transferts de chaleur qui en résultent et les effets sous la surface des océans.

Dans un article scientifique paru dans les Geophysical Research Letters, l'équipe scientifique explique que les effets de contraction et de dilatation, renforcés par l'activité radiogénique du noyau, peuvent se traduire en chaleur et générer un manteau rocheux sub-océanique suffisamment chaud pour une activité volcanique soutenue.

Sans doute la photo la plus connue d'Europe, capturée par la sonde Galileo. © NASA
Sans doute la photo la plus connue d'Europe, capturée par la sonde Galileo. © NASA

Mieux encore, cette large activité sous-marine serait indirectement observable sur de futures missions, déjà en analysant finement les variations de gravité d'Europe et sa position orbitale fine, et ensuite en observant les taux gazeux de H2/CH4.

Patience avant l'affluence autour d'Europe

Rappelons qu'en plus de Juno, qui survolera trois fois Europe dans les années à venir (la sonde étant principalement consacrée à l'étude de Jupiter), c'est surtout la prochaine décennie qui devrait apporter des réponses et des questions beaucoup plus pointues sur les grandes lunes glacées.

La mission européenne JUICE (Jupiter Icy Moons Explorer) décollera en 2022 et passera cinq ans dans le système jovien entre 2029 et 2034. Elle s'intéressera bien à Europe avec deux survols proches, même si sa mission se concentrera dans les dernières années sur Ganymède, encore moins bien connue (et pourtant tout aussi fascinante).

La NASA ne sera pas en reste avec sa mission Europa Clipper, qui sera centrée sur le satellite et ses griffures sombres. Sans entrer en orbite, elle s'approchera 44 fois de sa surface gelée et de son océan enfoui. Assez pour révéler les volcans sous-marins ?

Eric Bottlaender

Spécialiste espace

Spécialiste espace

Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser v...

Lire d'autres articles

Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser vos questions !

Lire d'autres articles
Vous êtes un utilisateur de Google Actualités ou de WhatsApp ? Suivez-nous pour ne rien rater de l'actu tech !
google-news

A découvrir en vidéo

Rejoignez la communauté Clubic S'inscrire

Rejoignez la communauté des passionnés de nouvelles technologies. Venez partager votre passion et débattre de l’actualité avec nos membres qui s’entraident et partagent leur expertise quotidiennement.

S'inscrire

Commentaires (6)

rexxie
«&nbsp;Sans entrer en orbite, elle s’approchera 44 fois de sa surface gelée et de son océan enfoui&nbsp;»<br /> Pourquoi ne pas entrer en orbite? Il y aura beaucoup de carburant gaspillé pour rien non ?
Labarthe
A la différence de l’environnement martien, la trajectoire, inclinée par rapport au plan orbital des lunes principales, est optimisée avant tout pour minimiser l’exposition aux radiations intenses de Jupiter, précaution indispensable à la survie de l’engin pendant les quelques années prévues pour sa mission.
ebottlaender
@Labarthe a raison, il faut optimiser la trajectoire. En plus, en terme de mécanique orbitale, ça coûte moins de carburant de se rapprocher régulièrement d’Europe que de freiner pour s’installer autour.<br /> Heureusement qu’ils se sont fixés sur 44 d’ailleurs, il existait une option au début du programme pour laquelle ils ne la survolaient qu’une petite quinzaine de fois.
Fulmlmetal
Placer une sonde en orbite d’une lune consommerait au contraire beaucoup de carburant. Pas sur que la sonde en ait assez car son freinage pour entrer en orbite autour de jupiter aura déja consommé une large parti.<br /> Mieux vaut des orbites qui permettent des survols réguliers et ce d’autant plus qu’une orbite autour de jupiter permettra non seulement d’étudier Jupiter mais aussi ses divers autres lunes lors de croisement d’orbites. Ca permet une plus grande variété de missions.
Guillaume1972
Pas tant que ça si l’on utilise l’assistance gravitationnelle de Jupiter mais également celle d’Europe et peut-être d’autres satellites. l’assistance gravitationnelle est une aide géniale qui permettent aux sondes de gagner du temps sur le voyage mais également de consommer moins de carburant.
Guillaume1972
Idem que mon autre réponse sauf que l’assistance gravitationnelle peut-être utilisée pour accélérer ou décélérer un objet, c’est une question de masses, de vitesse initiale mais également de l’angle d’approche.
Voir tous les messages sur le forum
Haut de page

Sur le même sujet