Qui est Relativity Space, la start-up spatiale qui vient de lever 500 millions de dollars ?

24 novembre 2020 à 16h40
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Relativity Space Terran-1 © Relativity Space

Le 23 novembre 2020, la société américaine Relativity Space a finalisé une levée de fonds de 500 millions de dollars. Ce montant exceptionnel, qui n’a jusqu’ici été atteint que par SpaceX et OneWeb, fait entrer cette jeune start-up dans le club restreint des grands noms du New Space. Le secret de Relativity Space : proposer un accès à l’espace grâce à une fusée intégralement imprimée en 3D !

Retour sur ce petit acteur du spatial qui a tout pour devenir grand.

Révolutionner l’accès à l’espace grâce à la fabrication additive

Relativity Space a été fondée en 2015 au Texas par Tim Ellis et Jordan Noone, deux anciens ingénieurs de chez SpaceX et Blue Origin. Leur idée : appliquer les avancées révolutionnaires en matière d’impression 3D au secteur des lanceurs spatiaux légers. Grâce à cela, Relativity Space devrait pouvoir réduire considérablement sa masse salariale, ses coûts logistiques et surtout, le nombre de pièces à assembler dans chaque fusée. À la clé : un lanceur plus simple, beaucoup moins cher et pouvant être produit bien plus vite qu’avec des méthodes traditionnelles.

Relativity Space a donc conçu ses propres imprimantes 3D géantes. Équipé de plusieurs bras articulés, leur modèle intitulé Stargate fait ainsi plus de 10 mètres de hauteur et est capable d’imprimer d’une traite un premier étage de fusée légère. Mieux encore, la fabrication additive permet de concevoir des pièces très complexes ne nécessitant aucun assemblage. C’est particulièrement vrai au sein des moteurs, qui s’en retrouvent simplifiés à l’extrême. Ainsi, le moteur AEON développé par Relativity Space ne comporte qu’une centaine de pièces, là où un moteur de fusée en comprend habituellement plusieurs milliers.

Outre les imprimantes elles-mêmes, la société a bien entendu dû concevoir ses propres alliages d’aluminium. Dans l’imprimante, chaque bras articulé dépose ainsi la poudre d’alliage qui est fondue par un arc à plasma. Le contrôle qualité s’effectue en permanence, au moyen de rayons X notamment. Le « machine learning » permet à l’imprimante Stargate de détecter d’éventuels problèmes et de les corriger automatiquement sur les pièces suivantes. Ainsi, Relativity Space peut améliorer en continu ses fusées et ses moteurs.

L’objectif de l’entreprise est de pouvoir produire en moins de deux mois une fusée comprenant moins de 1 000 pièces, là où un lanceur classique se compose de plus de 100 000 pièces et nécessite deux ans de fabrication et d’assemblage.

L’impression 3D dans le secteur spatial

L’impression 3D séduit depuis longtemps les acteurs de l’industrie spatiale, à la fois dans le New Space et dans les agences historiques. En diminuant la complexité des moteurs, notamment, la fabrication additive permet d’accroître la sécurité des vols, qui est toujours au cœur des priorités. Dès 2017, la NASA a ainsi testé un moteur RS-25 (qui équipera le futur lanceur lourd SLS) intégrant certaines pièces imprimées. Le projet de moteur réutilisable de l’ESA, Prometheus, repose également sur ce type de technologies, tout comme le moteur de la fusée Electron de Rocket Lab.

Une des imprimantes 3D de Relativity Space. Le plus grand modèle dépasse les 10 m de hauteur.
Une des imprimantes 3D de Relativity Space. Le plus grand modèle dépasse les 10 m de hauteur.

Néanmoins, Relativity Space propose de pousser le concept beaucoup plus loin, en produisant 95 % de ses lanceurs grâce à des imprimantes 3D : coiffe, réservoirs, chambres de combustion, tuyères… À part l’électronique, les câblages et certains joints en caoutchouc, tout devrait y passer !

Si certains observateurs soulignent que l’impression 3D n’est pas forcément la plus économique pour certaines pièces, notamment les réservoirs, Relativity Space rappelle que la réduction des coûts ne tient pas seulement aux processus de fabrication. En construisant elle-même, en un lieu unique, la quasi-totalité de sa fusée, la jeune entreprise simplifie considérablement sa logistique et ne dépend d’aucun sous-traitant, ou presque.

La fusée Terran-1 : un lanceur pas si léger

Le premier lanceur de Relativity Space est le Terran-1. Le premier vol de test était initialement prévu pour 2020 avant d’être reporté à l’année prochaine, crise sanitaire oblige. Haut de 35 mètres et capable d’emporter 1,2 tonne en orbite basse, Terran-1 se situe dans la catégorie haute des lanceurs légers. Outre le marché des SmallSats et des constellations en orbite basse, Terran-1 pourra ainsi envoyer jusqu’à 900 kg en orbite héliosynchrone, utilisée notamment pour les satellites météo ou d’imagerie.

Malgré sa taille relativement imposante, Terran-1 devrait être peu coûteux à fabriquer et à mettre en œuvre. Pour l’heure, Relativity Space affiche ainsi un coût de lancement de 12 millions $, là où les fusées conventionnelles équivalentes sont commercialisées entre 15 et 18 millions $. Et il semble bien que ce soit l’impression 3D qui autorise une telle compétitivité, puisque le reste de l’architecture est assez conventionnelle. Le premier étage est ainsi propulsé par neuf moteurs AEON et le deuxième étage par un unique AEON amélioré pour le vide spatial.

Vers l’orbite basse, et au-delà ?

En octobre 2019, Relativity Space avait déjà levé 150 millions de dollars, qui venaient s’ajouter aux 45 millions obtenus depuis 2015, auprès de divers investisseurs. En récoltant cette fois-ci un demi-milliard de dollars, Relativity Space confirme son ambition de venir jouer dans la cour des grands. S’il ne viendra pas concurrencer SpaceX ou Blue Origin, qui développent des lanceurs lourds, Relativity Space pourrait cependant introduire un nouveau standard de compétitivité dans le domaine des lanceurs légers, que la plupart de ses concurrents ne pourront pas suivre.

Mais au-delà de Terran-1, quels sont les plans de Relativity Space ? On peut parfaitement imaginer que l’entreprise développe par la suite un Terran-2 plus lourd, capable de viser l’orbite géostationnaire. À très long terme, les deux fondateurs de l’entreprise ont avoué rêver de fusées imprimées en 3D directement sur Mars. Mais dans l’avenir proche, Relativity Space pourrait bien changer la donne en matière d’impression 3D réalisée directement en orbite. Que ce soit pour améliorer une station spatiale, pour construire un miroir de télescope, ou encore pour réparer un satellite coûteux, les besoins potentiels ne manquent pas. Et Relativity Space dispose pour l’heure d’une bonne avance dans ce domaine !

Source : Space News

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Commentaires (6)

Niverolle
L’impression 3D n’a pas attendu Relativity Space. On pense évidement à Rocket Lab et, plus généralement, il me semble bien difficile de trouver un acteur de ce domaine qui ne s’y essaie pas (voir même qui ne s’y emploie pas déjà).
mecatroid
12 millions $ pour placer 900 kg en orbite héliosynchrone, cela voudrait dire environ $50 000 pour un Cubesat 3U de 4 Kg. Pour l’instant c’est uniquement des promesses, mais ça semble alléchant.
Element_n90
Va en falloir des lancements à 12 millions pour rembourser les 500 investis !!
Niverolle
Jusqu’à présent, les politiques se sont montrés d’humeur extrêmement généreuse avec l’argent du contribuable. Donc si tout ce passe comme pour les autres boites dites du « new space », elle aura droit à son coup de pouce.
Cmoi
Et pourquoi en Europe, on a pas ce genre de start-up?
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