Live Japon : Comment Sony va ? Couci-couça !

16 novembre 2013 à 16h36
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Sony fait la une de l'actualité cette fin de semaine aux Etats-Unis où la firme nippone a lancé vendredi sa nouvelle console de salon PlayStation 4 (PS4), 7 ans après la précédente, vendue à quelque 77 millions d'exemplaires (selon IDC). Voilà pour le volet positif. Mais récemment, le 1er novembre, l'action Sony a plongé de plus de 11% en une séance à la Bourse de Tokyo au lendemain de l'annonce de ses résultats financiers. Alors si vous nous demandez comment Sony va, eh bien la réponse va de soi, « couci-couça ». Du moins c'est ce que pensent les investisseurs mécontents du coup de sabre dans les prévisions financières du fleuron nippon de l'électronique. Quant aux simples consommateurs-joueurs japonais, autant le dire, ils sont très fâchés que leur firme porte-étendard ait choisi de privilégier les « hard-core gamers » américains tandis qu'eux devront patienter jusqu'à fin février 2014 avant de se déchaîner sur la nouvelle bête de course de la famille PlayStation. Sony répondra certes que c'est la faute aux développeurs de jeux nippons qui se consacrent désormais davantage aux jeux pour mobiles qu'à ceux pour consoles de salon, mais cela ne calmera pas la colère pour autant.

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Si Sony va mal, ce n'est cependant pas les consoles qu'il faut blâmer, mais les méventes de produits numériques et audiovisuels vedettes, TV en tête. Malgré des taux de change on ne peut plus favorables pour cette multinationale qui encaisse 80% de ses revenus à l'étranger (avec des devises américaine et européenne très fortes face au yen), Sony a fini dans le rouge la première moitié de l'année comptable d'avril 2013 à mars 2014.

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Du coup, tombent à l'eau les ambitions affichées en août dernier. Le groupe a ramené à 30 milliards de yens (230 millions d'euros) contre 50 milliards son estimation de bénéfice net annuel. Au lieu de 15 millions de téléviseurs, il n'en vendra probablement que 14. Le nombre de PC écoulés dans l'année a été abaissé à 5.8 millions au lieu de 6,2, le total d'appareils photo à 12 millions au lieu de 12,5 et les caméscopes à 2,3 millions plutôt que 2.5. De même s'attend-il à vendre moins de capteurs d'images qu'il ne l'espérait.Bref, les l'horizon n'est pas radieux, au grand dam du patron, Kazuo Hirai, qui s'est donné pour mission de remettre le géant d'aplomb. 

La seule excellente nouvelle pour Sony concerne les bons résultats de sa gamme de smartphones Xperia dont il espère livrer 42 millions d'exemplaires durant l'exercice actuel contre 33 millions vendus au cours du précédent. Certains placent aussi quelques espoirs dans la PlayStation 4 (PS4) qui a attiré du monde le premier jour de mise en vente aux USA, même si les râleurs se sont vite manifestés sur le Net au premier faux ou vrai bug détecté.

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Reste que même si les smartphones et consoles trouvent preneurs, cela ne suffira pas.  Le chiffre d'affaires annuel total du groupe ne devrait pas dépasser 7.700 milliards de yens (200 de moins qu'espéré précédemment). Cela représentera certes une augmentation de 13,1% sur un an, mais Sony était censé pouvoir faire mieux. Les avis des analystes sont quasi unanimes: « des changements plus draconiens pour réorganiser sa gamme de produits et réduire ses coûts apparaissent indispensables ». Et pourtant, cela fait des années déjà que l'inventeur du Walkman s'escrime à repenser son éventail d'activités, à modifier son mode de fonctionnement, à davantage sous-traiter, à liquider des usines, à tailler dans les effectifs. Las, même s'il a vendu des actifs à tour de bras ces derniers mois, il n'est pas parvenu à soigner le mal qui le ronge: une incapacité à suivre la fuite en avant concurrentielle imposée par des rivaux comme les sud-coréens Samsung ou LG Electronics. 

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« Il est difficile dans ce contexte d'améliorer les bénéfices sur les produits électroniques », souligne l'analyste de Kazaka Shoken, Yoshihiko Tanabe, sur un site d'informations économiques du groupe Nikkei. A l'instar d'autres commentateurs, il estime que la clef de la sortie de crise de Sony se trouve sans doute dans la diversification vers des domaines moins soumis à rude compétition, comme les technologies électroniques pour la médecine, une voie sur laquelle s'est effectivement engagé Sony en devenant le premier actionnaire de son compatriote Olympus, numéro un mondial des endoscopes.

Sony face à la fronde d'un actionnaire en colère

Les mauvaises perspectives avouées par Sony risquent en outre d'apporter de l'eau au moulin de Daniel Loeb, dirigeant du fonds d'investissement américain Third Point, un de ses plus gros actionnaires. L'homme, frondeur, réclame à cor et à cri depuis des mois une mise en Bourse partielle de Sony Entertainment, sa division de contenus audiovisuels et médias, pas en très grande forme au premier semestre. « Nous sommes convaincus que la transaction proposée permettra de renforcer Sony dans son ensemble en augmentant plutôt que diminuant la capacité du groupe à exploiter des synergies significatives entre les contenus et les appareils électroniques », arguait M. Loeb dans un courrier adressé à M. Hirai au printemps dernier.

Pour le moment, le conseil d'administration de Sony a poliment retoqué cette proposition, mais sa position est fragilisée par les récentes mauvaises performances de films comme White House down, d'autant plus visibles qu'elles contrastent avec les exploits l'année précédente de The Amazing Spider-Man.

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Pourtant, la filiale de divertissement Sony Entertainment restera la propriété intégrale de la maison mère Sony nous a affirmé le PDG Kazuo Hirai. « Je voudrais encore réaffirmer mon engagement dans l'activité de divertissements de Sony qui est un pilier-clef pour la croissance du groupe », a-t-il dit à quelques journalistes. « Par conséquent nous allons continuer d'en conserver 100% pour être en mesure de prendre rapidement des décisions et les exécuter avec célérité » a expliqué le patron du groupe qui entend dynamiser les activités de contenus, compléments essentiels des produits électroniques proposés par Sony.

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M. Hirai, aux commandes du fleuron nippon de l'électronique depuis avril 2012, est cependant très diplomate, puisqu'il indique que, malgré les courriers enragés reçus de M Loeb, « il n'y a pas eu de harcèlement », récusant les formules employées par la presse pour qualifier les relations entre les deux hommes.

« Il nous a envoyé une lettre très courtoise en tant qu'actionnaire important, courrier dans lequel étaient présentés certains problèmes et posées certaines questions. Le conseil d'administration a étudié cela de façon très sérieuse durant plusieurs heures point par point et à l'unanimité nous avons pris la décision d'envoyer une lettre (de refus) à Third Point », a expliqué M. Hirai. « Par la suite, nous avons eu des échanges de courriels avec M. Loeb », « c'est un actionnaire important et nous voulons maintenir cette relation », a encore assuré M. Hirai.

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Par ailleurs, M. Hirai a souligné que Sony avait été en mesure ces derniers temps de sortir des produits très performants, citant notamment des appareils photos et téléphones mobiles (smartphones). Ce dernier classe aussi parmi les produits forts les nouvelles télévisions au format 4K et dans le domaine de l'audio, « qui reste important », des Walkman, casques et amplificateurs « compatibles avec la qualité high-res, bien supérieure à celle du CD ».

Quand le PDG de Sony salue la politique économique du Premier ministre japonais

Sortant en outre de son registre habituel, M. Hirai a volontiers répondu à nos questions sur la politique économique surnommée « Abenomics » du Premier ministre japonais Shinzo Abe, tout en prévenant que le défi résidait dans la mise en oeuvre des réformes attendues. « De mon point de vue le gouvernement semble être de retour pour accomplir sa mission, et ce qu'il fait me paraît aller dans le bon sens, mais je pense que le plus grand défi est que les promesses soient mises en oeuvre. Il y a une forte attente de la communauté financière, des milieux d'affaires et des Japonais en général » et « si le gouvernement n'est pas capable d'y répondre, il y aura un impact très fort sur les perspectives économiques », a-t-il averti.

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Pour l'heure, « la politique menée a eu des effets sur le cours du yen et cela est favorable pour les entreprises japonaises », a souligné celui qui est devenu PDG de Sony huit mois avant le retour au pouvoir de M. Abe. Ce dernier a lancé un ensemble de dispositions en coordination avec la Banque centrale du Japon qui ont eu pour conséquence de faire baisser la valeur du yen vis-à-vis de celles de l'euro et du dollar, ce qui favorise grandement Sony et ses compatriotes sur les marchés extérieurs, à condition toutefois que leurs produits se vendent.

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Interrogé sur le fait que le gouvernement demandait aux entreprises de participer à l'effort de redressement durable de l'économie nippone, notamment en investissant dans l'archipel et en augmentant les salaires, M. Hirai a indiqué que le facteur décisif était le potentiel client et la compétitivité. « Une grande part des investissements majeurs de Sony dans la production sont réalisés au Japon, dans le domaine des semi-conducteurs, et la plupart de la production autre est confiée soit à des sous-traitants soit à des coentreprises à l'étranger », a-t-il précisé.

Quant aux salaires, « ils sont discutés de façon annuelle et sont une part importante des relations avec les employés », mais là encore, ce qui est pris d'abord en considération, c'est la position de Sony dans son secteur d'activité et sa compétitivité vis-à-vis des concurrents.

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Selon le patron de Sony, les réformes du marché du travail que veut conduire le gouvernement devront être équilibrées pour que salariés et employeurs en bénéficient, « qu'il n'y ait pas seulement plus de mobilité d'employés mais aussi des filets de sécurité pour s'assurer qu'aucun ne reste au bord de la route ».

Au-delà, le Japon doit aussi selon lui se poser la question de laisser entrer ou non plus d'étrangers pour compenser un déclin démographique. « La population de ce pays ne croît pas, le marché et la main-d'oeuvre se réduisent. Il faut une plus grande participation des femmes mais pas seulement, il faut un débat sur l'immigration », une question jusqu'à présent écartée, note M. Hirai.
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