Cette trace sur une photo d'Hubble... C'est un trou noir suivi par des milliers d'étoiles !

Eric Bottlaender
Par Eric Bottlaender, Spécialiste espace.
Publié le 10 avril 2023 à 14h30
Juste un trait ? Pas vraiment... Il s'en cache des choses là derrière ! NASA, ESA, STScl Pieter van Dokkum
Juste un trait ? Pas vraiment... Il s'en cache des choses là derrière ! NASA, ESA, STScl Pieter van Dokkum

Intriguée par un trait lumineux sur une série de clichés, une équipe scientifique a découvert qu'il s'agissait probablement d'un trou noir supermassif, éjecté de sa galaxie et voyageant à très haute vitesse. Il laisse derrière lui une myriade d'étoiles réparties sur plus de 200 000 années-lumière…

L'astronomie n'en finit pas avec ses événements extrêmes !

Signez d'un trait

Hubble, comme tout télescope, est parfois sujet à des reflets, des « flares » ou des traits provoqués sur les images par des passages de satellites. Aussi lorsque l'astrophysicien Pieter van Dokkum et son équipe cherchaient des amas d'étoiles et qu'ils ont vu ce trait d'un blanc laiteux, ils l'ont d'abord pris pour un artefact, une erreur de mesure. Intrigués, ils ont demandé confirmation par spectroscopie à l'observatoire Keck (Hawaï), et le résultat a dépassé leurs attentes. Émanant d'une galaxie unique, il s'agit d'une véritable guirlande d'étoiles, de 200 000 années-lumière de long. Et le suspect responsable de ce grand chambardement n'est autre qu'un trou noir supermassif, voyageant à très grande vitesse. « C'est quelque chose que nous n'avions jamais observé auparavant », explique le chercheur de l'Université de Yale.

Trou noir, sillage brillant

Mieux, cette file indienne d'étoiles, qui suit le trou noir d'environ 20 millions de masses solaires, serait directement générée par ce dernier. En traversant un long nuage de gaz intergalactique à très haute vitesse (environ 6,5 millions de km/h), le gigantesque trou noir contracte et ionise les gaz ce qui a pour effet, comme pour une onde de choc, de les chauffer et, à ces échelles astronomiques, de permettre l'apparition de petites étoiles bleues, mondes nouveaux formés derrière lui. « Ce qui reste visible est la conséquence de son passage. Comme le sillage derrière un navire, nous observons cette ligne d'étoiles derrière le trou noir », décrit P. Van Dokkum. Un phénomène lointain même à l'échelle cosmique : la lumière de cet événement a mis environ 7,6 milliards d'années pour nous parvenir !

Vue d'artiste de cet étonnant trou noir supermassif, et de sa formation d'étoiles dans son sillage. Crédits NASA, ESA, Leah Hustak
Vue d'artiste de cet étonnant trou noir supermassif, et de sa formation d'étoiles dans son sillage. Crédits NASA, ESA, Leah Hustak

Je m'en vais comme un prince

Mais alors, qu'est-ce qui a pu éjecter un trou noir supermassif de sa galaxie hôte ? Le scénario privilégié pour l'instant (il s'agit, rappelons-le, d'une observation unique en son genre) est celui d'une fusion entre plusieurs galaxies, probablement trois. Au fil du temps, les trous noirs supermassifs en leurs différents centres ont fini par se perturber tant l'un que l'autre (telle une simulation du fameux « problème à trois corps ») que l'un d'entre eux a pu être éjecté à grande vitesse. Au point de partir si vite qu'il laisse un feu d'artifice étoilé derrière lui. Et tout cela d'un trait…

Source : Hubblesite

Par Eric Bottlaender
Spécialiste espace

Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser vos questions !

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Commentaires (10)
ayaredone

Hallucinant les chiffres… j’ai peine à imaginer

eaglestorm

extraordinaire

Bondamanmanw

200 000 années-lumière de long, ça fait combien d’années terrestres pour parcourir ce trait, à vos calculettes !

Thebadcrc

Ben… 200 000 annees? (en voyagant a la vitesse de la lumiere bien sur).

nicgrover

Ouf… Loin de chez nous…

PaowZ

Ça fait un trait d’une distance de 1,89216×10¹⁸ km… environ… peu importe la vitesse de déplacement max de la matière, ce sont des chiffres inappréhendables pour un cerveau humain… avec un trou de ver, peut-être ?

Regis_d_Acheres

A quelle vitesse faites-vous le parcours ? A la vitesse de la lumière je dirais … 200 000 ans :wink:

Regis_d_Acheres

Loin de chez nous, 7,6 Ma, notre système solaire était encore loin de naître, mais maintenant, dans le temps présent, où est-il ? Peut-être à notre porte !

nicgrover

Alors là je suis rassuré…

juju251

Cela a été dit, cela dépend à quelle vitesse la distance est parcourue.

Pour prendre un exemple connu :
La sonde Voyager est partie de la Terre il y a un peu plus de 45 ans et six mois.
Elle est aujourd’hui à une distance d’environ 23, 8 milliards de kms de la Terre.
Une année lumière vaut 9 460,730 milliards de km.

Il en manque encore beaucoup. :sweat_smile:

Et d’ailleurs, pour reprendre d’autres chiffres immenses dans l’article :

La lumière produite par cet événement a voyagé pendant environ 7,8 milliards d’années …
A la vitesse de la lumière dans le vide (299 792,458 km/s) … Ce n’est pas la porte à côté. :crazy_face:

Sachant, pour référence, que la Terre s’est formée il y a environ 4,5 milliard d’années.

Liens avec les infos utilisée (année lumière, statut des missions Voyager) :