Saturne, la géante aux mystérieux anneaux

Eric Bottlaender
Spécialiste espace
13 avril 2021 à 17h08
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Saturne 1
Saturne, vu par la mission Cassini. © NASA/JPL-Caltech/SSI/Cornell

Si loin de nous, la géante aux anneaux est une destination incontournable de notre catalogue. Saturne et ses lunes sont de véritables eldorados scientifiques. Pour le tourisme ? C'est un peu plus compliqué...

La dernière des cinq planètes visibles à l'œil nu paraît élusive dans le ciel de nuit... Mais c'est avant tout parce qu'elle est presque deux fois plus loin du Soleil que Jupiter !

Relation longue distance

Saturne et ses lunes résident à presque 1,5 milliard de kilomètres du Soleil. Trop loin, par exemple, pour y envoyer une sonde équipée de panneaux solaires : ces derniers ne recevraient plus l'énergie nécessaire au fonctionnement de l'appareil. Moins volumineuse et dense que sa cousine, Saturne n'en est pas moins une géante gazeuse. Et si toutes les planètes géantes de notre Système Solaire ont des anneaux, ceux de Saturne sont les plus visibles et les plus étendus : plus de 300 000 kilomètres de large... Et seulement quelques mètres d'épaisseur pour cet amas de glace et de poussière.

Tout comme Jupiter, Saturne émet plus d'énergie qu'elle n'en reçoit du Soleil, avec un cœur dense et chaud, si compressé qu'il contiendrait de l'hydrogène métallique. Sa surface paraît pâle et uniforme, mais il ne faut pas s'y fier : il y a régulièrement de grandes tempêtes formant des tâches blanches que l'on peut observer depuis la Terre (certaines seraient saisonnières, mais une année saturnienne durant 30 ans, nous ne disposons pas encore de toutes les données). La journée sur Saturne ne dure, elle, qu'un peu plus de 10 heures, soit moins que certains repas chez mamie.

Saturne tempête
Voici à quoi peut ressembler une impressionnante tempête sur Saturne. © NASA/JPL-Caltech/Space Science Institute

Drôle de famille lunaire

Ce sont bien les lunes qui font la richesse de Saturne, avec une impressionnante diversité et des vues à couper le souffle sur la géante et ses anneaux. Elle est actuellement la planète qui compte le plus grand nombre de satellites naturels, avec 82 lunes officielles. La plus grande et impressionnante est Titan : c'est la seule lune du Système Solaire dotée d'une atmosphère dense, et elle ressemble, selon les scientifiques, à la Terre primitive... Sauf qu'il y fait beaucoup plus froid, que les blocs de glace n'y fondent jamais, qu'il y neige du méthane et que vos chances de survie sont faibles. Mais avec ses déserts, lacs et canyons, la zone invite à l'aventure. Un paradis pour les hydrocarbures !

Les autres satellites de Saturne ne sont pas en reste. Il y a Encelade bien sûr, et son épaisse croûte de glace que traversent de gigantesques geysers au pôle Sud (laissant supposer un océan avec peut-être, qui sait, des traces de vie...), mais aussi la lune « Etoile Noire » Mimas, une autre, criblée d'impacts avec une rotation imprévisible, Hypérion, et bien sûr les blocs isolés au sein même des anneaux de Saturne, dont la rotation créé des remous et des vagues dans leur fine structure...Jusqu'à Pan et son étrange forme de hamburger.

Saturne Lune Pan Anneaux
La petite lune Pan projette son ombre sur les anneaux de Saturne. © NASA/JPL/Space Science Institute

Aller en apprendre plus

La sonde Pioneer 11 est la première a avoir survolé Saturne en 1979, et elle fut suivie de près par les deux sondes Voyager 1 (1980) et Voyager 2 (1981). Mais la véritable découverte en profondeur de la planète aux anneaux a dû attendre vingt années supplémentaires : le 1er juillet 2004, la sonde Cassini de la NASA a freiné et est entrée en orbite de Saturne. Elle a étudié ce système planétaire et ses lunes (dont plusieurs furent découvertes grâce à ses images) durant plus de 13 ans, avant de plonger une dernière fois dans son atmosphère en septembre 2017.

Les données de Cassini ont représenté un apport majeur dans l'étude des planètes géantes, dans la mesure des caractéristiques des anneaux de Saturne, et dans l'étude de ses lunes, en particulier Encelade et Titan. Les images et relevés transmis sur Terre sont encore inégalés et serviront de base d'étude pour des décennies. Cassini embarquait avec elle la petite sonde européenne Huygens, qui est devenue le premier robot à réussir à se poser aussi loin de la Terre. Un succès immense pour l'une des premières missions planétaires européennes !

Encelade geyser saturne anneaux
On voit très clairement Encelade dégazer lorsqu'on l'observe à contre-jour ! © NASA/JPL-Caltech/Space Science Institute

Dragonfly se prépare

Il existe cependant une mission actuellement en préparation à destination de Saturne. Elle n'aura pas pour objectif d'étudier la planète, car il s'agit d'un robot uniquement dédié à se poser sur Titan et... À y voler. En effet, Dragonfly est un impressionnant drone multirotor, à huit moteurs, qui étudiera la surface et l'atmosphère de Titan en effectuant des courts vols d'un site à l'autre. Un audacieux pari technique qui devrait décoller en 2026 et atterrir sur la Lune de Saturne en 2034.

Fun fact :
Vous n'avez rien contre une petite bise ? Sur Saturne, les vents à l'équateur peuvent dépasser les 1 800 km/h ! Une vitesse cinq fois plus élevée que celle des vents terrestres. Par ailleurs, sans obstacle ou variation de surface, les tempêtes et courants de vents adoptent d'étranges formations. C'est donc le cas sur Saturne, avec un hexagone à son Pôle Nord. Une structure que l'on peine encore à expliquer.

Hexagone Saturne Cassini
La (très connue) tache en forme d'hexagone au pôle Nord de Saturne. © NASA/JPL-Caltech/Space Science Institute


Notes touristiques :
  • Voyage 3/10 : Avec un minimum de six ans de trajet (mais plus probablement huit ou dix) pour vous y rendre, il faudra un programme chargé sur place pour vous faire oublier le confinement.
  • Paysages 9/10 : La lune éponge, l'étoile noire, les anneaux de Saturne... Difficile de faire plus exotique. En 13 ans sur place, Cassini n'a pas réussi à en faire tout le tour. Arriverez-vous à faire mieux ?
  • Habitabilité 4/10 : Quelques conditions parfaites pour la vie si vous êtes habitués aux extrêmes, sous un océan de glace et près d'un volcan. Ou bien si vous préférez les hydrocarbures à l'oxygène. Pour les autres, restez dans le véhicule.


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Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser v...

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Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser vos questions !

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Commentaires (5)

ebottlaender
Merci pour ce petit mot, ça met toujours la pêche !
juju251
Vraiment top cette série d’articles ! <br /> 1 800 km/h de vents … Enfin, une petite brise sympa pour y faire voler un cerf-volant. <br />
phx1138
Bonjour,<br /> Merci pour cette série touristique. Encore 2 étapes (3 si l’on est américain… ).<br /> Les gens savent-ils qu’ils peuvent voir Saturne de leurs propres yeux, même en ville et même avec des moyens très modestes, type lunette de supermarché ?<br /> Ou tout simplement que la Lune, même avec les plus modestes jumelles, vaut déjà le détour et peut faire l’objet d’explorations régulières (en fonction des phases et de l’éclairage plus ou moins rasant…).<br /> Bref : je suggère une petite extension de la rubrique vers une sous-rubrique « Observation », très simple, à destination principalement des débutants urbains.<br /> Ca permet aussi de prendre l’air (depuis un balcon, ou même une fenêtre) en ces temps de confinement généralisé.<br /> En tout cas bravo, tout ça ouvre l’esprit, et continuez !
ebottlaender
Deux étapes, mais on fera peut-être quelques charters plus tard dans l’année <br /> Pour l’observation c’est une bonne idée, il faudrait peut-être que je demande à quelques spécialistes de faire une intervention à ce sujet car personnellement, à part la Lune, Venus, Jupiter et l’ISS (j’ai l’appli :/) je manque un peu de pratique.
phx1138
Merci pour votre réponse. On trouve, ou on peut faire facilement, un petit éphéméride de phénomènes visibles aisément, à l’oeil nu et souvent en ville, comme ici le 10 avril dernier :<br /> Un bel alignement Mars - Saturne -Jupiter ! Principalement des objets brillants et bien visibles en ville.<br /> Ces occasions (petites conjonctions et autres rapprochements apparents…) permettent de repérer et d’identifier facilement les planètes dont il est question par exemple dans vos articles récents !
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