Hope : les Emirats Arabes Unis deviennent la cinquième puissance spatiale autour de Mars

Eric Bottlaender
Spécialiste espace
09 février 2021 à 18h34
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Une petite partie de l'équipe qui s'est occupée de Hope, avec leur sonde. Crédits MBRSC
Une petite partie de l'équipe qui s'est occupée de Hope, avec leur sonde. Crédits MBRSC

Après sept mois de trajet, la sonde des Emirats Arabes Unis (EAU) Hope, aussi appelée Al-Amal, a allumé ses moteurs pour s'insérer en orbite de Mars. Une manœuvre capitale pour la réussite de la mission, qui a été exécutée avec brio. Après les Etats-Unis, l'Union Soviétique, l'Europe et l'Inde, c'est un nouveau pas vers une exploration débridée du Système Solaire.

La Chine, elle, devra attendre demain…

Voir rouge, pour la bonne cause

Depuis plusieurs jours, l'événement était très attendu dans les Emirats. À Dubaï, les plus importants monuments ont été éclairés de rouge toute la semaine, et les responsables de la mission Hope se sont succédés dans les médias. Le premier ministre (et dirigeant des UAE) Sheikh Mohammed Bin Rashid Al Maktoum lui-même est intervenu plusieurs fois pour rappeler quelle fierté cette mission apporte au petit pays de la péninsule arabique, et quel espoir elle représente pour sa jeunesse, en termes d'accomplissement technologique comme de message.

Difficile en effet d'oublier à quel point cette sonde est un symbole, puisqu'elle a ouvertement été conçue pour être en orbite de Mars au moment de l'anniversaire des 50 ans de la création et de l'indépendance des Emirats.

La stressante ligne d'arrivée

Ce 9 février, ce sont six années d'efforts qui se sont vus concrétisées en quelques minutes, puisque la sonde Hope a allumé ses moteurs pour s'insérer en orbite de Mars. Une opération régulièrement réussie durant les deux dernières décennies, mais qui requiert à la fois un matériel en bon état après plusieurs centaines de millions de kilomètres de trajet, et une précision sans faille pour la manœuvre. Heureusement, tout s'est bien déroulé, et l'équipe de 200 émiratis qui s'occupe de la mission a pu célébrer l'événement comme il se doit. Les propulseurs se sont allumés comme prévu à 16h30 (heure de Paris) durant 27 minutes, avant de transmettre les signaux de télémesure vers la Terre.

La mission avait décollé depuis le Japon. Crédits JAXA/MHI
La mission avait décollé depuis le Japon. Crédits JAXA/MHI

Hope est la première des trois missions ayant décollé à l'été 2020 pour se rendre autour et sur la planète rouge. En effet, les UAE « coiffent » la Chine sur la ligne d'arrivée martienne pour devenir la cinquième puissance spatiale à entrer en orbite de la Mars après les Etats-Unis (1971), l'Union Soviétique (1971), l'Europe spatiale (ESA, 2003) et l'Inde en 2014. La très ambitieuse mission Tianwen-1 devrait quant à elle allumer ses moteurs pour entrer en orbite martienne demain, le 10 février.

Après le succès national, une aventure scientifique

Ce succès est déterminant pour les Emirats Arabes Unis en tant que puissance spatiale. Certes, une part importante de la mission Hope a été conçue et réalisée aux Etats-Unis. Pourtant, les équipes émiraties ont toujours été au cœur du projet, y compris dans la formation des ingénieurs et chercheurs locaux qui s'occupent de la mission aujourd'hui, et il serait bien abusif de résumer Hope à une mission « achetée » sur étagère.

De même la question du prestige est centrale aujourd'hui pour la mise en orbite, mais l'apport scientifique de la mission sera au cœur des deux années à venir, avec la transmission de données sur l'atmosphère martienne et les effets saisonniers. Elles viendront compléter les relevés européens de Mars Express, les compositions chimiques mesurées par Maven et l'inventaire précis des gaz à faible concentration enregistré par ExoMars TGO.

Eric Bottlaender

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Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser v...

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Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser vos questions !

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Commentaires (10)

ebottlaender
La mission a pour ainsi dire des sous-traitants internationaux, c’est très vrai. Il n’en reste pas moins qu’elle est émiratie (ou émirienne) à coeur, et que pour l’intention comme pour la réalisation finale, ils sont au centre du projet.<br /> Evidemment, il y a un côté nationaliste assumé (5è puissance autour de Mars, anniversaire des 50 ans du pays), qui est logique car c’est une étape prestigieuse pour eux, vis à vis de leur relativement petit programme spatial. La Chine effectivement, c’est tout l’inverse (sauf coté nationalisme), mais pas toujours par choix : leur isolement est largement imposé par la position des Etats-Unis, même s’ils communiquent internationalement sur la science.
carinae
Serais-tu en train de nous dire que le spatial c’est du politique ? Mince moi qui pensais que ça n’était qu’une partie de techniciens <br /> Bon après c’est vrai que les Emirats dans l’espace alors qu’ils ont ni technologie ni culture spatiale c’est clair que ça ne peut être qu’une question de prestige
ebottlaender
Non c’est faux, il y a depuis une décennie une culture spatiale qui s’installe, et un centre technologique d’excellence, le Mohammed Bin Rashid Space Center (MBRSC) qui a vraiment acquis ses galons.<br /> Nous ferions bien de ne pas trop les regarder de haut, car certes dans les premières années ils ont beaucoup acheté de compétences sur étagère, mais ils ont aussi beaucoup progressé et motivé de grandes équipes de jeunes ingés, chercheurs et techniciens très compétents. Les jeunes du golfe ne sont pas plus bêtes que les autres.
dapoussin
Excellent, j’espère que la suite de la mission se déroulera bien. Mais pourquoi avoir attendu 2021 pour qu’un pays musulman commence à contribuer à l’exploration spatiale ? Je pose cette question en toute objectivité. Ce n’est apparemment pas un problème d’argent…
ebottlaender
Cela fait une petite décennie qu’ils s’y sont mis. Tout cela prend du temps en plus de beaucoup d’argent, car il faut mettre en place une infrastructure, une hiérarchie etc. Les UAE ont commencé par des satellites opérés sur place, puis des instruments faits sur place, puis une sélection astronautique (vol de Hazaa Al-Mansouri il y a 2 ans) avant une sonde martienne. Ils ont déjà une mission lunaire qu’ils préparent avec un robot.<br /> Après, c’est une question de priorité et d’investissement. Les saoudiens, de ce que je comprends, se sont plus tournés vers l’énergie verte et l’aviation. Les irakiens ont les problèmes que l’on connait, les omanais sont en plein changement de régime, etc.
carinae
Oui enfin 1 Décennie ce n’est pas le non plus le top. D’autant plus qu’ils ont pas mal sous-traité.<br /> Ce qui, personnellement m’enbete le plus la dedans, c’est que tout le monde y va de sa fusée, son satellite, sa sonde …et a l’arrivée c’est le même bazar que sur Terre…sans compter qu’à un moment où un autre va se poser les problèmes de territorialité… Il vaudrait peut être mieux faire des missions Internationales non ? Style ISS
ebottlaender
Ben on peut difficilement reprocher à quelqu’un les actions passées, surtout quand ça part d’une bonne volonté.<br /> Chacun y va de sa fusée, sa sonde et ses satellites, oui, c’est ça la démocratisation de l’espace. Un peu comme l’aviation, en somme. Est-ce tant le bazar avec les avions sur Terre ?
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