La justice tranche la question de la vidéosurveillance des employés en entreprise : avantage aux employeurs désormais !

Alexandre Boero
Chargé de l'actualité de Clubic
28 mars 2024 à 10h02
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Une caméra de vidéosurveillance © randomasiandude / Shutterstock
Une caméra de vidéosurveillance © randomasiandude / Shutterstock

La Cour de cassation a validé l'installation, sans prévenir les employés, de caméras de vidéosurveillance dans les entreprises. Elles ne sont plus obligées d'en informer les salariés, si le motif est jugé valable.

Au sujet de la vidéosurveillance sur le lieu de travail, deux philosophies s'affrontent : celle qui déplore l'espionnage du salarié d'un côté, et celle qui trouve une telle pratique normale de l'autre. La Cour de cassation, plus haute juridiction française, a rendu un arrêt, le 14 février 2024, qui est déterminant quant à l'installation de dispositifs de surveillance vidéo dans les entreprises. Il vient faire jurisprudence en permettant à un employeur d'installer un tel dispositif, sans avoir à préalablement informer ses salariés. Comment en est-on arrivé là ?

La salariée fut licenciée pour avoir été surprise, via la vidéosurveillance, en train de voler dans sa pharmacie

Tout a commencé avec l'histoire d'une salariée, hôtesse de caisse en pharmacie qui, licenciée pour faute grave, avait décidé de saisir le conseil de prud'hommes pour contester la rupture, en demander l'annulation et obtenir des dommages-intérêts. La dame fut écartée de son entreprise en raison de vols, repérés grâce à la vidéosurveillance. Il faut savoir qu'elle n'avait pas été informée du dispositif.

C'est ensuite devant la cour d'appel que la plaignante a tenté d'obtenir gain de cause. Mais la juridiction rejeta sa demande, en lui indiquant que le système de vidéosurveillance était indispensable pour produire la preuve de vols dans les stocks de produit. Son utilisation était même proportionnée, aux yeux de la cour.

La salarié est donc allée au bout de la procédure, en se pourvoyant en cassation. La haute juridiction a définitivement tranché le sujet, en rejetant le pourvoi. Quelle fut la justification exacte ?

Le juge justifie l'utilisation des caméras de surveillance pour la préservation des stocks

Selon la Cour de cassation, l'employeur peut tout à fait installer un dispositif de vidéosurveillance dans un magasin, une boutique, une entreprise, sans avoir préalablement informé ses salariés. Mais à une condition : que cela soit proportionné au but poursuivi, en l'occurrence la protection des biens de l'entreprise.

C'était ici le cas, puisque l'intérêt des caméras de surveillance était de vérifier (ou d'obtenir un moyen de preuve) que personne ne vole dans le stock de la pharmacie. Quant à la question de l'atteinte portée à la vie personnelle de la salariée, la Cour de cassation a aussi rejeté cet argument. Elle l'estimait ici proportionnée, dans la mesure où les fameux enregistrements n'ont été vus que par la patronne de l'entreprise, et ce dans un laps de temps limité.

La décision de la Cour de cassation du 14 février 2024 confirme donc bien la légalité de l'installation de dispositifs de vidéosurveillance dans les entreprises, sous réserve que leur utilisation soit proportionnée et nécessaire à la protection des intérêts légitimes de l'employeur. La jurisprudence fournit ici de vraies lignes directrices importantes pour les employeurs et les salariés concernant la mise en place de mesures de surveillance dans le cadre professionnel.

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Source : Legifrance

Alexandre Boero

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Journaliste, chargé de l'actualité de Clubic. Reporter, vidéaste, animateur et même imitateur-chanteur, j'ai écrit mon premier article en 6ème. J'ai fait de cette vocation mon métier (diplômé de l'EJC...

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Journaliste, chargé de l'actualité de Clubic. Reporter, vidéaste, animateur et même imitateur-chanteur, j'ai écrit mon premier article en 6ème. J'ai fait de cette vocation mon métier (diplômé de l'EJCAM, école reconnue par la profession), pour écrire, interviewer, filmer, monter et produire du contenu écrit, audio ou vidéo au quotidien. Quelques atomes crochus avec la Tech, certes, mais aussi avec l'univers des médias, du sport et du voyage. Outre le journalisme, la production vidéo et l'animation, je possède une chaîne YouTube (à mon nom) qui devrait piquer votre curiosité si vous aimez les belles balades à travers le monde, les nouvelles technologies et la musique :)

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Commentaires (34)

SPH
Une voleuse qui se pourvoit en cassation ! Elle ne manque pas de toupet…<br /> «&nbsp;J’ai volé mais une caméra m’a filmé !! On ne peux plus rien faire dans ce pays…&nbsp;»<br />
eFBe
La Cour de Cassation juge le fond et non la forme.
bugoutfr
C’est exactement ce que je me suis dit aussi, elle manque pas de culot celle-là !
MattS32
eFBe:<br /> La Cour de Cassation juge le fond et non la forme.<br /> Non, c’est l’inverse. La cassation juge la conformité avec la loi des décisions prises par les juridictions précédentes, c’est donc un jugement sur la forme et non sur le fond (les faits), qui sont examinés en première instance et en appel.
Lepered
Atteinte à la liberté individuelle de voler en toute impunité, c’est absolument scandaleux. Si maintenant la justice se mêle de soutenir les victimes des vols, ou va t’on ? Bientôt des peines de prison effectuées par les délinquants ? C’est pire qu’une dictature /s
ayaredone
Pour avoir des rapports sexuels au travail, bien vérifier qu’on est dans l’angle mort
jvachez
Tout comme les squatteurs qui portent plainte car le propriétaire les a expulser ou les voleurs parce que leur photo a été diffusée. Il y a plein de cas dans le genre en France. Ils connaissent toutes les failles.
Martin_Penwald
Peu importe les conditions, je trouve inadmissible que l’employeur n’ait pas à avertir ses employé•es de l’installation de caméra de vidéo-flicage. En quoi ne pas prévenir les employé•es protège-t-il plus les biens de l’entreprise ? Ça n’a pas de sens.
MHC
Un squatteur devrait être mis à la porte dans la seconde avec un dédommagement du propriétaire lésé surtout si il y a dégradations.<br /> C’est tout simplement dingue qu’on tolère ne serait ce que une seconde le fait que quelqu’un puisse venir s’installer chez toi (le chez toi pour lequel tu t’es démené pour payer un crédit pendant 25 ans) impunément et te foutre dehors.
MHC
Tant que ce n’est pas aux toilettes ou dans un vestiaire, il n’y a rien de choquant surtout quand comme là, ça a été installé pour suspicion de vol.<br /> La cour a très bien fait et elle aurait même dû, pour l’exemple, appliquer une peine exemplaire à cette voleuse qui a l’indécence de faire perdre du temps (précieux, on a qu’une vie) à d’honnêtes gens et également de l’argent à la Justice et donc aux contribuables que nous sommes.
vidarusny
J’imagine que l’argument serait que le voleur peut désactiver le système si il en est informer. Ou possiblement procéder autrement et continuer son forfait.<br /> Admettons, mais comment garantit-on que ce sera la seule utilisation effectuée ?<br /> Reste que la voleuse ne manque pas d’aplomb pour faire une telle procédure.<br /> Et que cette décision risque de multiplier les formes d’espionnages, avec des justifications très variées. Et sur ce point je suis d’accord avec toi l’installation de vidéo-surveillance sans prévenir est clairement gênante.
vidarusny
Les frais de procédures ne sont pas à la charge du perdant ?
MattS32
Les frais engagés par le gagnant (et encore, il me semble que c’est plafonné). Pas les frais que ça a occasionné au niveau du système judiciaire (rémunération des magistrats, etc…).
MHC
Et pourtant, cela devrait être le cas, sans aucun plafonnement et même avec des dommages &amp; intérêts systématiques.
MattS32
Non, ça donnerait un pouvoir démesuré aux plus riches : personne ne prendrait le risque de les attaquer en justice, car les plus riches ont les moyens de dépenser beaucoup en avocats, et le risque serait donc énorme pour le plaignant en cas de défaite…
MHC
L’effet de bord bien plus important, c’est que les gens utilisent impunément la justice dans beaucoup de cas car il n’y a pas de réelles conséquences en cas de défaite.<br /> C’est simplement normal si on a attaqué une personne abusivement, qu’on lui a fait perdre, du temps, de la vie, de l’argent, de l’énergie de payer systématiquement des dommages &amp; intérêts pour couvrir le préjudice subit.<br /> Idem pour les frais de justice, ce n’est pas au contribuable de les supporter et c’est encore plus flagrant dans ce cas précis où le contribuable a payé toute une procédure à … une voleuse.
MattS32
MHC:<br /> C’est simplement normal si on a attaqué une personne abusivement, qu’on lui a fait perdre, du temps, de la vie, de l’argent, de l’énergie de payer systématiquement des dommages &amp; intérêts pour couvrir le préjudice subit.<br /> Sauf que le caractère abusif ou non, il n’est pas forcément évident… Et donc ça devient un frein pour des gens qui sont dans leur bon droit (et ça on ne peut pas le savoir à l’avance, c’est justement à ça que sert la justice, déterminer qui est dans son bon droit…).<br /> Déjà que le fait d’avoir de gros moyens donne un avantage en justice, en donnant les moyens de se payer toute une armée de bons avocats, il faudrait pas qu’en plus ça dissuade les gens de lancer des procédures à ton encontre… Ce ne serait plus de la justice là.<br /> Ou alors, on plafonne justement les frais engageables, en fonction des moyens de la plus faibles des parties. Mais c’est difficile à contrôler.
MHC
Il y a certainement une réflexion à avoir mais il est clairement choquant que le contribuable finance le procès en cassation d’une voleuse.<br /> Et de la même manière, la culture des dommages &amp; intérêts doit vraiment s’imposer en France car il ne doit pas y avoir d’actes sans conséquences.
MattS32
En plus, je rappelle qu’une plainte peut être jugée non recevable avant même que la procédure ne démarre.<br /> Si elle est jugée recevable, on peut difficilement considérer ensuite que la procédure était abusive…
Bombing_Basta
Dans l’entreprise où je travaille, pas mon site un autre, ils avaient installé des caméras dans des détecteurs de fumée en salles de pause, c’était avant ce jugement et ça avait fait scandale auprès des employés quand ils l’avaient su, bien sûr elles ont été démontées fissa après ça…<br /> Je ne vois pas où est l’intérêt légitime là, mais voilà le genre d’utilisation que les «&nbsp;chefs&nbsp;» vont justifier, aussi…
vidarusny
vidarusny:<br /> Je ne vois pas où est l’intérêt légitime là, mais voilà le genre d’utilisation que les « chefs » vont justifier, aussi…<br /> Le vol de café ?<br /> Je suis d’accord, avec toi et @Martin_Penwald. Cette décision aura des conséquences néfastes et les justifications seront exotiques. La loi finira par cadrer tout ça a coup de décision…<br /> Reste à savoir comment ont été utilisé (ou non) les vidéos, puisque la décision est bien posé sur l’utilisation faites des vidéos et non sur le lieu et l’utilisation du lieux…
Bombing_Basta
Sinon sur le site où je travaille, ou des procédés jalousement gardés sont depuis quelques temps mis en oeuvre, les accès sont désormais filmés et badgés, mais on est prévenus et d’accord depuis le début et les caméras sont visibles.
vidarusny
Si tu veux un exemple, dans ma société on utilise un drone avec des cameras pour surveiller des bassins. C’était annoncé et dans les fait les exploitants trouvent cette solution adéquate puisque que ça évite les allées retours en voiture sur de grand ouvrages…<br /> Reste que forcément l’utilisation aurait dérapé avec un responsable qui aurait utilisé le drones pour surveillé les employés en filmant a travers les fenêtres…
gaadek
Moi je trouve inadmissible qu’un employé manque de loyauté vis à vis de son employeur. Du coup, on fait quoi?<br /> Si dans ce cas précis l’employeur avait prévenu de l’installation de caméras, l’employé malhonnête aurait probablement cessé ses vols, et il n’aurait pas pu être identifié.<br /> Voila ce que ça change.
Martin_Penwald
L’employeur, il va se faire voir. La loyauté, ça ne s’achète pas, ça se mérite. Il n’a pas à espionner ses employé•es sans leur consentement. Point. Les employé•es qui n’ont pas volé ont AUSSI été espionné•es à leur insu.
gaadek
Martin_Penwald:<br /> La loyauté, ça ne s’achète pas, ça se mérite. Il n’a pas à espionner ses employé•es sans leur consentement. Point.<br /> C’est drôle, je vois pas ce que la loyauté vient faire dans le débat.<br /> Et encore plus drôle, tu peux remplacer «&nbsp;Il n’a pas à espionner ses employés sans leur consentement&nbsp;» par «&nbsp;Il n’a pas à voler son employeur sans sont consentement&nbsp;», ça marche pareil.<br /> Alors, oui, pour tempérer, quand des caméras sont installées, il faut prévenir les employés. Ici, c’est un cas légèrement différent: le patron a remarqué des vols, mais sans être en mesure d’identifier le fautif. L’employeur a donc installé des caméras sans prévenir les employés pour confondre le voleur. Il n’avait pas d’autre moyens.<br /> D’ailleurs, je vais peut-être t’apprendre un truc: tu n’as pas le droit d’enregistrer tes collègues au travail à leur insu (je parle d’enregistrement sonore) sauf si c’est le seul moyen de prouver un harcèlement.<br /> En fait, y’a une notion de moyens nécessaires à prouver un fait qui ne peuvent être substitué par une méthode plus «&nbsp;classique&nbsp;».<br /> Ca ne signifie absolument pas que ces méthodes sont tolérées dans tous les cas, la nuance est importante.<br /> Donc t’inquiète pas, ton patron peut pas mettre de caméras pour surveiller si tu bosses (ou pas)
Martin_Penwald
gaadek:<br /> je vois pas ce que la loyauté vient faire dans le débat.<br /> Moi non plus. C’est pourtant dans la première phrase de ton commentaire.
gaadek
Ah, mais tu ne comprends pas ce que j’ai voulu exprimer.<br /> Pour moi, quand un employé travaille pour une entreprise, oui, il y a une notion de loyauté. Et celle-ci s’active à partir du moment où est signé le contrat de travail: tu as des droits et des devoirs (travailler pour l’entreprise, agir dans l’intérêt de l’entreprise, bénéficier des conditions de travail, tickets resto etc…) et inversement, l’entreprise qui t’emploie a également des droits et des devoirs envers ses employés (salaire pour le travaille accompli, versement des cotisations patronales etc).<br /> La loyauté est donc un point contractuel: celui de travailler pour l’entreprise (c’est pour cela qu’elle t’embauche) dans son intérêt (par exemple pour les clauses de confidentialités).<br /> Là, clairement, les agissements de l’employé vont à l’encontre des intérêts de l’entreprise (vol), c’est en ce sens que c’est déloyal.<br /> C’est pour cela que je comprenais pas la notion de «&nbsp;loyauté qui ne s’achète pas&nbsp;»
pecore
Moi, ce que je ne comprend pas, c’est qu’à la lecture de l’article, la cours de cassation semble s’être prononcée sur le fond, c’est à dire sur la légitimité de l’employeur à filmer ses salariés alors qu’elle n’est censée se prononcer que sur la forme de la décision de la cours d’appel.<br /> Mais peut être est ce du à une mauvaise compréhension de la décision : la cours de cassation a jugé recevable la décision de la cours d’appel dans la forme mais, par amalgame, cela a été interprété comme une confirmation du jugement sur le fond.<br /> Tout comme on interprète sans doute à tort cette décision comme l’autorisation de filmer ses salariés en toutes circonstances. Ici, la cours me semble plutôt reconnaitre le droit pour l’employeur de filmer ses stocks et non ses salariés. Que cela donne à l’employeur l’autorisation de placer des caméras n’importe où sur le lieu de travail me semble une interprétation toute personnelle.
gothax
Merci à @bombing basta et @pecore d’avoir relever le débat !<br /> Le storie telling est très important voir primordial<br /> Un article sur une caméra cachée au fond d’un WC qui aurait permis de licencier une employée en fauteuil qui passe trop de temps aux toilettes … Et l’histoire est différente !<br /> Les donneurs de leçons en pantoufles sont légions malheureusement
SlashDot2k19
Au moins on saura qui ne nettoie pas la cuvette des WC après avoir déposer sa pêche…
gaadek
La cours de cassation a bien jugée la forme (la manière de fournir des preuves) et non le fond (l’employée qui vole son employeur, qui a été jugé au pénal)<br /> La cours de cassation apprécie la légitimité d’une procédure. En déclarant recevable les preuves obtenues de manière à priori non conforme, la cours de cassation confirme le jugement en appel en ne cassant pas la procédure.<br /> C’est donc bien un jugement sur la forme (la manière dont les preuves ont été collectées) et non sur le fond
pecore
Merci de confirmer ce que je supposais. Cela me rassure, car je serai assez inquiet pour notre système judiciaire si la Cour de cassation se mettait à outrepasser sa fonction et à juger au fond.<br /> Mais quand on lit l’article, on a l’impression que la Cour de cassation a jugé les faits et non la forme. C’est d’ailleurs assez fréquent dans les articles parlant d’un arrêté de la Cour de cassation et cela induit une confusion malvenue auprès des personnes qui ne connaissent pas bien notre système judiciaire et se représentent alors la CCass comme une super juridiction de type Cour Suprême, ce qu’elle n’est fort heureusement pas.
ezechielxae
La preuve, la voleuse en question, en portant plainte, sous entend que si elle été au courant, elle aurai pas voler au nez de la camera (mais dans son angle mort…)
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