Facebook : la fronde interne contre la désinformation continue, entre départs et lettres publiques

05 octobre 2020 à 15h12
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Les décisions de Facebook en matière de désinformation ne plaisent pas à tout le monde, et surtout pas aux employés du groupe.

Facebook peut-il éradiquer les fake news et la haine de sa plateforme ? De nombreux (ex-)employés, mécontents des choix de leurs dirigeants, estiment en tout cas que le réseau social pourrait mieux faire.

Une pluie de départs en 2020

« Je ne peux plus contribuer à une organisation qui profite de la haine aux États-Unis et dans le monde » : début septembre, un des ingénieurs logiciel de Facebook, Ashok Chandwaney, annonçait sa démission de Facebook en ces termes, par le biais d’une lettre ouverte. Il mettait notamment en cause l’incapacité du réseau social à combattre la haine en ligne.

Ce départ, un de plus pour l’entreprise de Mark Zuckerberg, est révélateur d’un climat de tensions et de fronde interne. En juin dernier, aux cœur des manifestations en soutien à George Floyd, un groupe d’employés avait lancé une grève en ligne. D’autres ont préféré démissionner. Le motif : la non-modération des messages polémiques, voire haineux du président Donald Trump.

« J'ai regardé la situation et je me suis dit que je ne voulais tout simplement plus travailler ici, » explique Chandwaney. Il y a quatre mois, Timothy Aveny, un autre ingénieur démissionnaire, s’indignait : « Facebook fournit une plateforme qui permet aux hommes politiques de radicaliser des individus et de glorifier la violence. Nous regardons les États-Unis basculer dans le même genre de discorde alimentée par les réseaux sociaux, qui ont causé la mort de personnes aux Philippines, au Myanmar et au Sri Lanka ».

L'adhésion des employés : enjeu stratégique pour Facebook

Le manque d’action et de résultats dans la lutte contre la désinformation a mené un groupe d’experts, d'universitaires et de défenseurs des droits civiques à lancer le Real Facebook Oversight Board (RFOB) la semaine dernière. Son but : analyser et critiquer les décisions de modération de Facebook durant les élections présidentielles américaines.

Une décision qui désavoue les actions de Facebook en la matière. L'entreprise avait pourtant lancé son propre Oversight Board en novembre 2019… Mais ce comité avait décidé de ne surveiller aucun contenu ou activité de Facebook pendant les élections, annonçant qu'il ne se prononcerait qu'après le résultat du vote.

Facebook en pleine crise ? Plutôt que les critiques externes, ce sont celles émises en internes qui peuvent marquer un véritable tournant pour le réseau social : « Les employés de Facebook ayant de nombreuses opportunités d'emploi à leur disposition ont un poids énorme dans la réforme de l'entreprise », affirme Varoon Bashyakarla, membre de l'ONG Tactical Tech.

Un avis partagé par Ashok Chandwaney : « Je pense qu'il y a beaucoup de personnes […] qui poussent l'entreprise à s'améliorer. Nous le voyons avec celles et ceux qui se présentent aux discussions internes et aux séances de questions-réponses de Mark Zuckerberg, en parlant d'intégrité des élections, des droits civils et du mauvais traitement de certains travailleurs de Facebook, [ainsi qu'avec] la hausse du nombre d'employés qui parlent anonymement aux journalistes ».

Source : The Guardian

Edouard Luquet

Rédacteur web, je suis de près le monde de la tech, les réseaux sociaux et les évolutions du numérique dans nos sociétés. Auteur en herbe, j'ai aussi co-fondé une revue littéraire où j'écris quelques...

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Rédacteur web, je suis de près le monde de la tech, les réseaux sociaux et les évolutions du numérique dans nos sociétés. Auteur en herbe, j'ai aussi co-fondé une revue littéraire où j'écris quelques histoires.

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Commentaires (13)

Dahita
Depuis quand Facebook est-il cense devenir le moderateur des elections americaines? Lutter contre les fake news n’est pas la meme chose que censurer un president, aussi controverse soit-il, tant qu’il respecte les lois de ce pays. Ce mode de fonctionnement s’apparente plus au fascisme qu’a une societe libre. Par ailleurs, juste apres le debat, j’ai trouve etonnant que la premiere video que Youtube me presente lors de ma visite soit intitulee « Biden for President »…
Foucal
Complètement d’accord avec Dahita. Il faut arrêter de demander la censure à chaque phrase et fake news.<br /> Qui est habilité pour considéré qu’une nouvelle est fausse. pour considéré que l’opinion de tel journal vaut miux que celui la…
frank38
Tant que cela ne touche pas au «&nbsp;Model business&nbsp;» qui veut une croissance du chiffre d’affaire ( et des bénéfices ) on aura le «&nbsp;Sorry&nbsp;» de Mark
spytec
Je vous invite a regarder l emission zone interdite du 4/10/2020 … oui les reseaux sociaux peuvent faire basculer une election …
cirdan
Dahita:<br /> Depuis quand Facebook est-il cense devenir le moderateur des elections americaines?<br /> C’est sa propre plateforme que modère FB, pas les élections américaines. Est-ce qu’il faut vraiment les blâmer d’essayer de limiter les immondices qui y sont déversés chaque jour ?<br /> Il existe suffisamment d’autres médias bien plus fiables pour se renseigner sur l’actualité, les élections ou les problèmes d’hémorroïdes, libre à nous de les découvrir et de les utiliser.
Dahita
Oui, il faut les blamer, parce que l’on parle des propos d’un president sur une plateforme qui est devenue un outil de communication publique par sa taille.<br /> On ne parle pas de se renseigner, on parle de laisser la libre parole dans la communication afin de ne pas favoriser l’agenda politique de tel ou tel parti. Imagine une plateforme sociale internationalement utilisee qui ne laisserait la communication ouverte qu’aux representants des bobo parisiens afin d’influencer les votes…
mokusansan
Entre modérateur et manipulateur mental, y’a un monde.<br /> Voir ce documentaire (pas fait par des bobos parisiens !) :<br /> Sciencepost – 18 Sep 20<br /> Ce passionnant documentaire Netflix fustige les réseaux sociaux !<br /> Un nouveau documentaire de la plateforme Netflix s'attaque aux géants du Web, et notamment les réseaux sociaux. Cette production intègre des témoignages des concepteurs des algorithmes régulièrement pointés du doigt pour diverses raisons. Un...<br />
genesya
Le mec quitte facebook parce qu’il a … la haine. Certains se prennent pour LA reference de la pensée, imagine un système immunitaire à qui on interdirait d’exterminer ce qui te tue parce que c’est… raciste. #LOL
carinae
Libre parole ne signifie pas raconter tout et n’importe quoi surtout sur les réseaux sociaux et encore plus quand on est président d’un pays…<br /> Après il faut trouver le juste milieu entre modération et sanctions … Si les gens ne le font pas eux mêmes il est normal que d’autres s’en chargent…
leibide
Malheureusement je ne trouve pas l’emission du 4/10/2020 de Zone Interdite. Je n’ai trouvé que celle du 12 avril 2018, mais c’est déjà pas mal.
cyrano66
Vous ne semblez pas connaître l’affaire Cambridge Analytica.<br /> Et la plus que probable influence des RS sur deux élections majeures le Brexit et la présidentielle US.<br /> Le fond du problème n’est pas que les gens s’expriment sur FB, c’est que les contenus soient filtrés par des algorithmes et leur visibilité dirigée sur un certain nombre d’électeurs en fonction de l’objectif de vote.<br /> C’est de la manipulation.<br /> De toute façon l’impartialité dans la modération de contenus politiques c’est impossible.<br /> Mon opinion serait de censurer 100% des<br /> Contenus politiques des 30 jours précédents le vote.
Dahita
cyrano66:<br /> us que probable influence des RS sur deux élections majeures le Brexit et la présidentielle US.<br /> Le fond du problème n’est pas que les gens s’expriment sur FB, c’est que les contenus soient filtrés par des algorithmes et leur visibilité dirigée sur un certain nombre d’électeurs en fonction de l’objectif de vote.<br /> C’est de la manipulation.<br /> Je connais parfaitement cette affaire. Je ne vois pas le rapport avec le fait de censurer directement le compte verifie d’un president qui respecte les lois de son pays.<br /> Je suis tout a fait d’accord avec cette idee des 30 jours!
johnguy_park
Dans l’affaire Cambridge Analytica, bien évidemment la boîte a préféré déposer le bilan pour éviter l’audit approfondi. Signe que ce qu’il y avait à cacher était… Big. Après l’audition de Zuckerberg devant le Sénat était un peu ridicule à mon sens. «&nbsp;Ce n’est pas bien ce que vous avez fait Marc&nbsp;» «&nbsp;Oui Messieurs les Sénateurs, désolé, je ne recommencerai pas (de manière aussi visible)&nbsp;». Je ne pense pas que l’outil Facebook soit à blamer, mais le fait que l’utilisation détournée de cet outil était parfaitement connue de ses auteurs (vu les budgets monstrueux des partis politiques) est à mon sens à la limite de l’éthique.
cyrano66
johnguy_park:<br /> Je ne pense pas que l’outil Facebook soit à blamer,<br /> Bien sûr que l’outil en soit n’y est pour rien.<br /> A moins de prêter des intentions politiques aux ordinateurs et qu’on rentre dans l’ère de l’algorithocratie.<br /> C’est les dérives de ces dernières années. Le modèle économique de FB est tombé dans son propre piège, du toujours plus de like pour toujours plus de pub.<br /> Le documentaire de Netflix est assez édifiant et pédagogique sur son fonctionnement et ses dérives.
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