C’était l’un des marchés les plus actifs encore en ligne, et l’un des plus anciens encore accessibles. Après cinq ans d’existence, Archetyp Market a été démantelé dans le cadre d’une opération de police menée à l’échelle européenne.

Europol fait tomber Archetyp, l’un des plus gros marchés de stupéfiants du dark web. © M.a.u / Shutterstock
Europol fait tomber Archetyp, l’un des plus gros marchés de stupéfiants du dark web. © M.a.u / Shutterstock
L'info en 3 points
  • Archetyp Market, un des plus anciens marchés du dark web, a été démantelé par une opération policière européenne.
  • L'opération Deep Sentinel a mobilisé 300 agents et conduit à l'arrestation de plusieurs suspects en Europe.
  • Malgré ce démantèlement, les communautés du dark web se reconstituent rapidement, comme l'ont montré des cas précédents.

Restée en ligne pendant près de cinq ans, Archetyp Market s’était imposé comme l’une des plateformes les plus anciennes et les plus actives du dark web en matière de trafic de drogue. Accessible uniquement via Tor, elle reposait sur une infrastructure distribuée, n’acceptait que les paiements en Monero, et proposait de nombreuses substances illicites, dont des opioïdes de synthèse comme le fentanyl, rarement tolérés sur ce type de site. La semaine dernière, elle a été mise hors ligne dans le cadre de l’opération Deep Sentinel, coordonnée par la police criminelle allemande (BKA) avec le soutien d’Europol et de plusieurs services de police européens. Plusieurs interpellations ont eu lieu, les serveurs ont été saisis, et l’enquête se poursuit pour identifier d’autres membres du réseau.

Un marché très lucratif estimé à 250 millions d’euros

Au moment de sa fermeture, Archetyp comptait plus de 600 000 utilisateurs, quelque 3 200 vendeurs et près de 17 000 annonces actives. Selon les estimations fournies par Europol, le volume total des transactions aurait dépassé les 250 millions d’euros en cinq ans.

L’opération, baptisée Deep Sentinel, s’est déroulée entre le 11 et le 13 juin. Pilotée par les services allemands, elle s’est appuyée sur une coopération étroite entre la BKA, Europol, Eurojust et plusieurs pays partenaires, dont l’Espagne, la Suède, les Pays-Bas, la Roumanie et les États-Unis, et aurait mobilisé plus de 300 agents. Le principal administrateur présumé, un ressortissant allemand de 30 ans, a été interpellé à son domicile de Barcelone, tandis que des fouilles ont été menées dans plusieurs de ses propriétés en Allemagne et en Roumanie.

En parallèle, sept autres suspects ont été arrêtés en Suède. Identifiés comme des modérateurs ou des vendeurs particulièrement actifs, ils faisaient l’objet d’enquêtes distinctes. Au total, plus d’une vingtaine de perquisitions ont été menées, principalement dans des logements liés à l’activité du site, à l’issue desquelles ont été saisis du matériel informatique – 47 smartphones, 45 ordinateurs, 34 supports de stockage –, des stupéfiants, ainsi que 7,8 millions d’euros d’actifs numériques. L’infrastructure technique d’Archetyp, hébergée aux Pays-Bas, a été désactivée dans la foulée.

Depuis la semaine dernière, Archetyp n'est plus. © BKA
Depuis la semaine dernière, Archetyp n'est plus. © BKA

Un modèle résilient malgré les opérations à répétition

Selon Europol, le démantèlement d’Archetyp est le résultat de plusieurs années d’enquête visant à cartographier l’architecture technique de la plateforme et à identifier les individus impliqués. Un modèle d’investigation déjà éprouvé lors d’opérations comme Endgame, mais qui a ici dû composer avec l’usage exclusif du Monero, dont les mécanismes de confidentialité compliquent fortement le suivi des transactions.

Pour parvenir à leurs fins, les enquêteurs auront donc dû s’appuyer sur une combinaison d’analyses forensiques menées sur le matériel saisi, de croisements de données entre juridictions, et de surveillances ciblées des infrastructures techniques associées au site.

Pour autant, malgré son ampleur, l’opération Deep Sentinel ne devrait pas bouleverser durablement l’équilibre de ce genre de sites sur le dark web. Les fermetures successives de plateformes comme Silk Road, AlphaBay ou, plus récemment, Bohemia/Cannabia ont montré la capacité des communautés à se reconstituer rapidement autour de services similaires, développés sur les mêmes bases techniques, avec les mêmes outils, les mêmes logiques… et souvent les mêmes vendeurs et acheteurs.

Sources : Europol, BKA