Les astronomes viennent d’identifier une nouvelle source d’or et d’argent dans l’univers. Elle ne se trouve pas dans une galaxie lointaine, mais dans les archives d’une vieille explosion cosmique observée il y a vingt ans.

- Les astronomes ont identifié une nouvelle source d'or dans l'univers via des archives d'une explosion de magnétar datant de 2004.
- Cette découverte pourrait expliquer la présence de métaux lourds bien avant la fusion des étoiles à neutrons.
- Elle ouvre la voie à de futures observations des magnétars pour détecter la formation d'éléments lourds.
En 2004, un sursaut de rayons gamma a été détecté dans la Voie lactée. Il provenait d’un magnétar, une étoile à neutrons à la puissance extrême. Pendant longtemps, ce type d’événement n’avait pas été lié à la formation de métaux lourds. Or, deux décennies plus tard, de nouveaux modèles théoriques viennent éclairer les données de l’époque sous un jour inédit.
Une éruption vieille de vingt ans montre qu'il existe une autre usine à métaux que les collisions d’étoiles
Depuis des années, la science reliait l’origine des métaux précieux à un seul événement cosmique : la fusion de deux étoiles à neutrons. Ces collisions extrêmes libèrent une quantité d’énergie phénoménale et produisent des éléments lourds comme l’or ou le platine. Ce scénario restait la seule explication solide, jusqu’à ce que des chercheurs revisitent les données d’une éruption observée en 2004.
Cette explosion provenait d’un magnétar, une étoile à neutrons dotée d’un champ magnétique exceptionnellement intense. L’éruption avait déjà attiré l’attention à l’époque. Elle avait dégagé plus d’énergie que le Soleil ne le fait en un million d’années. Mais c’est un signal secondaire, détecté dix minutes plus tard, qui intrigue encore aujourd’hui. À l’époque, les instruments avaient bien repéré cette trace supplémentaire, mais son origine restait floue.
En revisitant ces données anciennes avec de nouveaux outils, les chercheurs ont comparé ce signal à des modèles récents. Il s'est avéré qu'il correspond exactement à ce que les physiciens s’attendent à voir lors d’un processus nucléaire bien spécifique, appelé « processus r ». C’est ce mécanisme qui permet la création d’atomes lourds à partir de noyaux instables, ceux-là mêmes qui finissent en or ou en argent.
Anirudh Patel, astronome à l’université Columbia et auteur principal de l’étude, reconnaît l’étonnement de l’équipe. « Aucun d’entre nous n’aurait pu imaginer que les données resteraient là pendant 20 ans et que nos prédictions théoriques correspondraient aussi parfaitement », explique-t-il.

Ce phénomène ne suffira pas à expliquer tout l’or de la galaxie, mais il ouvre une nouvelle piste
Même si cette éruption ne représente qu’environ 10 % des éléments lourds de la Voie lactée, elle change la donne. Jusqu’ici, les fusions d’étoiles à neutrons étaient les seules à figurer au tableau. Le problème, c’est qu’elles sont trop rares et trop tardives pour expliquer la présence d’or dans les étoiles anciennes. Il fallait donc un autre mécanisme plus précoce. Le magnétar de 2004 pourrait bien en être un.
Des simulations montrent qu’un certain type d’éruption magnétique peut produire les conditions idéales pour le processus r. Ce scénario restait théorique. La rémanence lumineuse de 2004 semble désormais le confirmer. Le rayonnement gamma détecté correspond pile aux prévisions.
Pour les chercheurs, cette piste ouvre une nouvelle phase d’observation. Contrairement à la fusion de 2017, qui s’était produite à une distance astronomique, les prochaines éruptions de magnétars pourraient être assez proches pour permettre une analyse précise des éléments produits. Charles Horowitz, physicien à l’université d’Indiana, y voit une opportunité. « La possibilité la plus prometteuse de cette étude est peut-être que, lors de la prochaine éruption géante de magnétars, nous pourrions détecter des éléments individuels », avance-t-il.
D’autres candidats sont à l’étude. Anirudh Patel mentionne un type rare de supernova, capable d’engendrer des étoiles à neutrons en rotation rapide. Ces configurations extrêmes pourraient, elles aussi, favoriser le processus r. Rien n’est encore tranché, mais les données actuelles montrent clairement que la fusion d’étoiles à neutrons ne suffit plus à tout expliquer.
Dans les faits, la découverte élargit la carte des « fabriques » cosmiques de métaux. Jusqu’ici, on connaissait l’atelier principal. Désormais, on découvre les annexes. Les astronomes vont devoir explorer le ciel autrement, en guettant ces éruptions brèves et intenses.
L’or qui compose une alliance ou le platine d’un composant électronique a peut-être jailli d’un événement que personne ne soupçonnait. La matière précieuse, au sens chimique du terme, est souvent née dans la violence. Mais cette violence peut prendre plusieurs visages. Les prochains télescopes tenteront justement de les distinguer. En attendant, inutile d'enfiler tout de suite son scaphandre de cosmonaute et de prendre sa batée pour aller jouer aux orpailleurs de l'espace.
Source : Science.org