Le spaceport America n'accueille toujours pas de lancements, un flop qui se chiffre en dizaines de millions de dollars

Eric Bottlaender
Spécialiste espace
06 février 2024 à 19h01
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Pas d'avion, pas de client, pas de client, pas de barman, pas de barman... © Spaceport America/Virgin Galactic
Pas d'avion, pas de client, pas de client, pas de barman, pas de barman... © Spaceport America/Virgin Galactic


Les années passent, et l'activité ne décolle pas au Nouveau-Mexique. Virgin Galactic va même ralentir puis cesser un temps ses vols touristiques, tandis que les autres start-up sont absentes. Les autorités blâment une réglementation trop restrictive... En attendant, ce bijou reste la plupart du temps désert.

C'était le premier des « spatioports privés » du monde, pourtant construit grâce à d'importants investissements publics (plus de 220 millions de dollars) répartis entre l'état du Nouveau-Mexique et la région. Mais sur le Spaceport America qui compte en tout, y compris les contrats ponctuels, jusqu'à 811 emplois, il y a bien peu d'activité. En 2022, les six sociétés qui louent des espaces sur place, en incluant la plus importante, Virgin Galactic, ont généré 7,5 millions de dollars de revenus. Ce à quoi le Nouveau-Mexique ajoute à nouveau entre 5 et 10 millions chaque année, pour soutenir l'activité... En réalité, le fameux « boom » du tourisme spatial suborbital n'est pas venu, et la promesse semble s'éloigner d'année en année. Il y avait bien un espoir en 2023 avec les six campagnes de vol de l'avion-fusée VSS Unity, mais l'activité va décliner.

Virgin Ralentic

En effet, pour Virgin Galactic, l'accueil des touristes, leur vol jusqu'à plus de 80 km d'altitude puis leur retour au sol, champagne à la clé, ne génère que très peu de revenus et l'entreprise a perdu jusqu'à 100 millions de dollars par trimestre. Le vaillant avion-fusée VSS Unity devrait ainsi voler encore deux fois avant de prendre sa retraite d'ici l'été 2024, le temps pour Virgin Galactic d'assembler puis de tester une nouvelle génération d'appareils.

Ce développement n'est pas mené au Spaceport America, mais en Californie, à Mojave. L'accueil luxueux, le lounge et ses fauteuils profonds risquent de prendre la poussière, autant que ses hangars. Et parmi les autres entreprises présentes sur le Spaceport, certaines ne se portent pas forcément mieux. SpinLaunch y avait assemblé son premier démonstrateur de « centrifugeuse spatiale », mais l'entreprise ne communique plus ou presque depuis environ 18 mois. Dans le secteur, ce n'est pas de très bon augure.

Aux abords du Spaceport America, il y a ça. Mais encore faut-il que ça fonctionne... © Spinlaunch
Aux abords du Spaceport America, il y a ça. Mais encore faut-il que ça fonctionne... © Spinlaunch

Peut-être encore une décennie et ça décolle ?

Selon les autorités et les responsables, plutôt que de tourner la page, il serait bon de renforcer les aides et les investissements, afin de garder les emplois et même de générer des filières de formation. L'administration cherche à attirer de nouveaux acteurs dans la région, en particulier le « NewSpace » et ses lanceurs. Mais le désert qui entoure le Spaceport America ne garantit pas aujourd'hui des couloirs de vols suffisants face aux risques de chutes de débris en cas de problème : c'est la raison majeure pour laquelle la quasi-intégralité des vols orbitaux américains a lieu depuis des installations au bord de l'Océan.

Face à cela, ils tentent même de faire changer la loi, pour autoriser éventuellement les entreprises les plus fiables à s'affranchir de certaines obligations. Cela suffira-t-il pour assurer la pérennité du spatioport du Nouveau-Mexique ?

Source : Space News

Eric Bottlaender

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Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser v...

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Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser vos questions !

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Commentaires (3)

JulienBache
Toujours agréablement surpris par de tels articles. Encore un peu on se croirait intelligent avec nos routes solaires française. Merci
bizbiz
«&nbsp;C’était le premier des « spatioports privés » du monde, pourtant construit grâce à d’importants investissements publics (plus de 220 millions de dollars) répartis entre l’état du Nouveau-Mexique et la région&nbsp;»<br /> Un truc de riches, fait par les riches et pour les riches sur des deniers publics… d’une inutilité consternante.
xryl
Bof, 811 emplois pour 10 millions de dollars/an, ça fait en gros $12500/an par tête de pipe. C’est beaucoup moins cher que les milliers de commissions bidules que nous avons chez nos chers fonctionnaires qui, elles, ne sont pas ordonnées par des riches et ne produisent rien non plus. Bref, je préfère mille fois avoir un spacioport comme celui ci qui ne «&nbsp;coûte&nbsp;» que $15000 au contribuable (le reste étant payé par les «&nbsp;riches&nbsp;» comme vous dîtes), qu’un aéroport dans ma ville qui donne 45000€ par travailleur par an, prélevé sur nos impôts locaux et taxes sur le transport. Ça se rapproche plus du «&nbsp;ruissellement&nbsp;» promu par les riches, justement.
bizbiz
Le rapport entre un aéroport et ce truc en dormance ?
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