Uber devrait mettre fin à son activité à Bruxelles, mais comment en est-on arrivé là ?

Alexandre Boero
Par Alexandre Boero, Journaliste-reporter, responsable de l'actu.
Publié le 24 novembre 2021 à 21h45
© Tero Vesalainen / Shutterstock.com
© Tero Vesalainen / Shutterstock.com

Contrainte par la Cour d'appel de Bruxelles, Uber devrait annoncer d'ici la fin de la semaine son retrait de la capitale belge. Mais les chauffeurs n'entendent pas se laisser faire.

Les rues bruxelloises vont-elles être immobilisées dans les prochains jours ? C'est en tout cas l'appel qui a été lancé par les chauffeurs VTC de la plateforme Uber (ou LVC, Location de Voiture avec Chauffeurs pour les Belges), ce mercredi. Il suit l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Bruxelles, le même jour, qui adresse à Uber l'injonction de cesser ses opérations dans la Washington d'Europe, et ce dès vendredi.

Un coup fatal pour Uber en Belgique

Le couteau sous la gorge, Uber devrait disparaître du paysage de Bruxelles. La Cour d'appel de la capitale précise, dans son arrêt, qu'à partir du vendredi 26 novembre à 18 heures, les applications qui collaborent avec des chauffeurs titulaires d'une licence LVC (VTC) ne pourront plus opérer dans la capitale, ce qui comprend donc l'application Uber.

Cela ne signifie pas pour autant qu'Uber sera indisponible dès cette limite franchie, mais elle deviendra en tout cas illégale, et il est difficile d'imaginer la firme américaine outrepasser une décision de justice.

Il faut savoir que la plateforme ne subit pas son premier revers de taille à Bruxelles. En 2015, la justice bruxelloise avait déjà empêché le fonctionnement du service UberPop, une branche d'Uber – aussi interdite en France – qui permettait de fournir un service assuré par des particuliers qui n'avaient pas à remplir les conditions restrictives des taxis et des VTC. C'est donc un coup fatal qui est porté par la Cour d'appel au géant de la mobilité.

Un appel au blocage de Bruxelles dès jeudi

Uber compte plus de 2 000 chauffeurs à Bruxelles, et la grande majorité (95 %) est sous licence bruxelloise. En théorie, les seuls 5 % qui opèrent aujourd'hui sous licence flamande auront encore le droit de travailler à Bruxelles au-delà de vendredi. Autant dire qu'Uber ne devrait pas s'en encombrer et pourrait cesser purement et simplement son activité sur place.

Du côté de l'application, on évoque un jugement « dramatique », et les chauffeurs concernés, eux, appellent d'ores et déjà à « bloquer tout Bruxelles, dès demain », précisent-ils. « Nous sommes profondément préoccupés pour les 2 000 chauffeurs bruxellois LVC qui vont perdre leur capacité à générer des revenus à partir de vendredi », déplore le patron des opérations d'Uber en Belgique, Laurent Slits, qui évoque une décision « prise sur la base d'une réglementation obsolète, rédigée à une époque antérieure aux smartphones ».

De quelle réglementation Laurent Slits parle-t-il, et surtout, pourquoi parle-t-il de smartphone ? Ce qui est en cause ici, c'est l'ordonnance taxis de 1995, un texte qui apparaît désuet et dont la réforme voulue par le gouvernement bruxellois, discutée depuis 2018, n'a à ce jour pas pu aboutir. D'un point de vue juridique, les LVC n'ont pas le droit de faire du « maraudage ». Par ailleurs, Uber se base sur la réservation du trajet via smartphone, une méthode qui n'est pas couverte ni évoquée dans l'ordonnance de 1995 et qui donc prive Uber de s'y rattacher, même si la justice a pu accorder, par le passé, une autorisation VTC aux chauffeurs de la plateforme. Mais cette fois, la Cour d'appel a tranché en ne se focalisant que sur la conformité de l'activité d'Uber (« un service consistant en une application disponible sur Internet qui met en relation des entreprises ou des personnes physiques disposant d’une licence de location de voiture avec chauffeur, et des personnes souhaitant se faire transporter ») à l'ordonnance.

Les autorités politiques ont été interpellées par les chauffeurs et la direction de l'entreprise. Une réponse rapide est attendue, mais rien n'indique qu'elle ira dans le sens des conducteurs et de la plateforme.

Source : Reuters

Alexandre Boero
Par Alexandre Boero
Journaliste-reporter, responsable de l'actu

Journaliste, responsable de l'actualité de Clubic. En soutien direct du rédacteur en chef, je suis aussi le reporter et le vidéaste de la bande. Journaliste de formation, j'ai fait mes gammes à l'EJCAM, école reconnue par la profession, où j'ai bouclé mon Master avec une mention « Bien » et un mémoire sur les médias en poche.

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Proutie66

Bravo à tous. Uber, et ses « aspirants », détruisent l’emploi, donc l’individu.

Steph29

Tu as sans doute raison, mais va expliquer ça aux chauffeurs de Bruxelles.

Bombing_Basta

@rédacteur
Ce serait un minimum de préciser pourquoi cette décision a été prise, non ?

mais comment en est-on arrivé là ?

Bah du coup on ne sait toujours pas…

AlexLex14

Dis toi une chose : nous avons apporté les informations qui sont en notre possession actuellement. Tout simplement.

Si on connaissait la motivation de l’arrêt, on l’aurait donnée.

PS : l’article a été mis à jour, avec toutes les questions que tu te poses, et je t’invite aussi à lire mes commentaires plus bas :wink:

Tchuss

ccvman

À paris les chauffeurs gagnent le SMIC, ils font des horaires pas possible, ils s’achètent des voitures de luxe à crédit pour frimer et ne s’en sortent pas, Uber existe en France car l’état restreint l’obtention d’une licence taxi, il y a une liste d’attente, c’est du grand n’importe quoi

ouchdinw

Un peut plus complet ici

En gros c’est simplement une société de taxis qui est contre uber car il on pas toute les charges et papier licences à avoir comme les chauffeurs de taxis
Du coup concurrence déloyale

JohnLemon

Voilà un bel exemple de la manière dont un acteur privé se permet de demander à ses collaborateurs ou indépendants sous contrat de faire pression sur des institutions étatiques. Et malheureusement ça en dit long sur l’avenir du code du travail et des conditions d’emploi.

AlexLex14

Hello tout le monde, je viens de faire une veille sur le sujet et de remonter pas mal d’années de sources et un avis juridique officiel.

Voici le paragraphe ajouté à l’article :

« De quelle réglementation Laurent Slits parle-t-il, et surtout, pourquoi parle-t-il de smartphone ? Ce qui est en cause ici, c’est l’ordonnance taxis de 1995, un texte qui apparaît désuet et dont la réforme voulue par le gouvernement bruxellois, discutée depuis 2018, n’a à ce jour pas pu aboutir. D’un point de vue juridique, les LVC n’ont pas le droit de faire du « maraudage. » Par ailleurs, Uber se base sur la réservation du trajet via smartphone, une méthode qui n’est pas couverte ni évoquée dans l’ordonnance de 1995 et qui donc prive Uber de s’y rattacher, même si la justice a pu accorder, par le passé, une autorisation VTC aux chauffeurs de la plateforme. Mais cette fois, la Cour d’appel a tranché en ne se focalisant que sur la conformité de l’activité d’Uber (« un service consistant en une application disponible sur Internet qui met en relation des entreprises ou des personnes physiques disposant d’une licence de location de voiture avec chauffeur, et des personnes souhaitant se faire transporter ») à l’ordonnance. »

AlexLex14

En gros, ces 6-7 dernières années à Bruxelles, il y a eu différentes décisions de justice, tendant à combler peu à peu un vide juridique en la matière, causé par l’ordonnance désuète de 1995.

Officiellement, l’activité de VTC (ou LVC) sur place est autorisée et est reconnue. Mais c’est le service qui amène à l’exercice de cette activité qui, lui, n’est pas reconnue par l’ordonnance de 95. Uber étant un service basé sur l’utilisation du smartphone, et l’ordonnance n’évoquant que la délivrance du service par un taxi (« réservation à la centrale téléphonique, dans un cab rank ou simplement en rue par un signe de main »), bein Uber a les fesses entre deux chaises, et la Cour d’appel a écarté les chaises aujourd’hui.

Une réforme est bien évoquée depuis plusieurs années, pour remettre au goût du jour l’ordonnance, mais les discussions n’ont jamais pu aboutir, sous la pression, entre autres, des taxis.

Voilà, vous savez tout (enfin presque, difficile de résumer des années de procédures et de combat acharné en quelques lignes).

Bonne soirée tout le monde :slight_smile:

Gweegoo

« la Washington d’Europe »
« Uber a les fesses entre deux chaises, et la Cour d’appel a écarté les chaises aujourd’hui »
Inspiré!