Extreme Networks : "Pour l'instant, on est obligé de prioriser la bande passante"

16 février 2011 à 17h57
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C'est sur le chemin du retour du Mobile World Congress, où il a passé les deux premiers jours du salon, que le PDG d'Extreme Networks, Oscar Rodriguez, nous a reçus pour un entretien. PDG du groupe depuis seulement six mois, il a été engagé pour recentrer l'activité de l'équipementier réseau, challenger de Cisco. Il a accepté de répondre à quelques questions sur l'actualité et les activités d'Extreme Networks.

Bonjour, Oscar Rodriguez. Pouvez-vous nous résumer brièvement votre activité ?

Bien sûr. Extreme Networks peut être vu comme un concurrent de Cisco. Nous travaillons dans le réseau, mais à la différence d'eux, nous ne faisons que ça. Nous sommes d'ailleurs la dernière grande entreprise qui ne fait que ça au niveau global. Nous ne faisons que du switching, mais nous le faisons bien, et c'est qui peut pousser nos clients à nous préférer parfois à Cisco ou Juniper qui ont des solutions plus larges. Nous nous concentrons sur trois points : les datacenters et le cloud, que nous aidons à être plus efficaces dans leurs accès réseaux, les services aux fournisseurs d'accès, en les aidant notamment à aller vers le LTE, et les campus de données.

Vous avez récemment annoncé votre participation au groupe de travail autour d'OpenStack. Qu'allez-vous y apporter ?

C'est l'un des trois points sur lesquels nous travaillons : les datacenters et le cloud. L'initiative OpenStack est intéressante pour nous, car il s'agit d'un consortium qui permet à ses acteurs de mettre en place les meilleures pratiques. Les standards ouverts y ont une très large place, et c'est là où nous avons des choses à apporter. A chaque fois qu'un nouveau marché s'ouvre, il y a différentes personnes qui se lancent, et donc différentes façons de faire. Si on applique ça à tous les niveau d'une infrastructure, sur le stockage, sur les unités de calcul, et sur les réseaux, cela devient problématique pour les clients finaux.

L'avantage des standards ouverts, c'est qu'ils permettent à beaucoup de monde de participer, et qu'ils ont un double effet positif : d'abord, ils permettent aux clients de choisir entre des vendeurs qui se différencient sur les services, et non sur des technologies qui bloquent toute la chaîne, et ensuite, ils permettent de faire baisser les prix pour les vendeurs, et donc pour les clients. Cela offre une facilité sans équivalent pour toucher toutes les parties, du stockage au réseau. A la fin de la journée, on permet à un directeur des systèmes d'information de choisir quel cloud il veut, en donnant la plus-value par les services.

Avant, c'était assez simple : on avait des fermes de serveurs qui étaient connectés au réseau. Avec la virtualisation d'une part, qui permet de migrer une machine virtuelle d'un serveur à l'autre, il faut la capacité à la suivre, et à adapter les réglages du réseau. C'est ce que nous fournissons, en repérant automatiquement ce que VMware fait bouger, et en lui apportant l'efficacité nécessaire sur le réseau. L'avantage, c'est qu'on n'a pas besoin de passer par des opérateurs humains, donc on évite les erreurs, et on peut les déployer sur des usages plus complexes.

Donc vous adaptez entièrement l'accès au réseau en fonction de l'appareil qui se connecte ?

Non, nous ne travaillons pas uniquement sur la notion de machine, mais aussi sur celle d'utilisateur. Finalement, que je sois sur mon ordinateur, sur ma tablette, ou sur mon smartphone, je suis une seule et unique personne, avec mes usages qui ne vont pas tous changer d'un appareil à l'autre. Sur un campus universitaire avec lequel nous travaillons par exemple, nous avons pu adapter en fonction des rôles : un médecin qui va devoir utiliser ses machines, aura besoin d'un accès réseau important, mais surtout prioritaire sur l'étudiant qui veut essentiellement utiliser Netflix ou le web.

Nous sommes donc capables de donner la priorité à ce médecin. On peut gérer beaucoup de choses, en attribuant des droits de bande passante par utilisateur, et par machine virtuelle. Et là où nous voulons aller, c'est vers la capacité à gérer aussi les machines physiques en même temps.

Vous m'avez dit faire 20% de votre chiffre en Europe avec des opérateurs. Est-ce que cette priorisation, que vous défendez, n'est pas contraire à la neutralité des réseaux dans leur cas ?

C'est une question que l'industrie doit se poser. Cela dit, j'attire votre attention sur le fait que beaucoup de secteurs appliquent une différenciation selon le prix payé par les consommateurs. Dans une compagnie aérienne, on a un meilleur siège si on paye plus. L'important, c'est de garantir l'accès aux réseaux à tous, pas forcément d'empêcher les opérateurs de se différencier sur certains services, qu'ils peuvent faire payer plus cher. De toute façon, avec la multiplication des appareils, ça devient extrêmement compliqué de tout gérer. Il y a de plus en plus de besoins, d'appareils, et pour l'instant, on est obligé de prioriser la bande passante.

Le principal problème vient donc de la multiplication des appareils qui accèdent au réseau. Le problème sera peut-être moindre avec le LTE, mais pour l'instant on n'en est pas encore là. L'autre souci vient principalement du logiciel. On le voit au Mobile World Congress, dont je reviens : là où les vendeurs de téléphones peuvent se différencier, c'est sur les applications. C'est compréhensible : ce qui fait que mon smartphone ou ma tablette est à moi et pas à quelqu'un d'autre, c'est que je le personnalise avec mes applications et mes usages. Mais le problème du logiciel, c'est que c'est comme un gaz : tant qu'il a de l'espace, il s'étend. Ce qui fait que les logiciels aujourd'hui ne sont pas développés avec un logique d'efficacité, mais pour avoir des cycles de développement rapide.

Ca prend beaucoup de ressources, ensuite, et notamment sur le réseau. Et comme on ne peut pas toujours ajouter de la bande passante, on doit bien prioriser, une fois encore.

Mais le LTE, ce réseau de données de quatrième génération pour les appareils mobiles, ne va-t-il pas rendre ces problèmes caduques, justement ?

Oui, les évolutions récentes, du LTE à l'IPv6, sont encourageantes et vont nous permettre de nous poser la question différemment dans le futur. Quand le LTE sera banalisé, le problème sera sans doute plus proche des questions liées au cloud. Cela dépendra de la confiance qu'on a dans les réseaux. Est-ce qu'on met tout dans le réseau, avec une conscience absolue, ou est-ce qu'on préfère avoir un maximum de données en local, auquel cas les applications seront à privilégier. Pour l'heure, les limites de bande passante obligent à rester sur un modèle lié aux applications.

Mais de toute façon, quand on parle du LTE, on en est vraiment aux prémices. Cela n'arrivera probablement que dans sept ou huit ans, voire une dizaine d'années pour qu'on ait une vraie couverture globale. Là où c'est encourageant, c'est que c'est l'un des sujets les plus importants du Mobile World Congress de Barcelone.

Pourquoi si tard ? L'installation des réseaux peut se faire par ajout, sans remplacer les réseaux 3G, et le Japon semble déjà très en avance...

C'est un problème d'investissement. Les opérateurs ont déjà mis beaucoup d'argent dans la 3G, qui est arrivée assez vite en Europe, aux Etats-Unis ou au Japon. Il a fallu à peu près trois ans. Maintenant, les opérateurs veulent déjà voir un retour sur investissement avant de se lancer dans une nouvelle mise à niveau de leurs réseaux. Et le LTE change quand même l'architecture du réseau. Comment évoluer ? Les opérateurs sont obligés de passer par une phase de planification importante, car le pire qui pourrait arriver, c'est que les anciennes normes de réseaux ne soient plus prises en charge, et que certains utilisateurs se retrouvent en 0G. C'est compliqué pour les opérateurs, qui ne peuvent pas obliger leurs clients à s'équiper en masse de nouveaux appareils.

L'exemple du Japon n'est pas vraiment représentatif, à ce niveau-là. Le pays est toujours en avance, car il regorge d'early adopters. Les consommateurs japonais ont une tolérance très forte aux choses nouvelles, même si celles-ci ne fonctionnent pas à 100%. Certaines cultures y sont plus réticentes, mais au Japon, cela oblige vraiment les opérateurs à aller vite. Mais cela arrivera en Europe et aux Etats-Unis aussi, et nous comptons bien y participer avec les nouveaux routeurs dédiés au backhauling 4G, la collecte des flux d'un réseau mobile, que nous avons présentés au MWC.

Je vous remercie.
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