Les 5 freins qui vont ralentir les voitures autonomes

08 septembre 2015 à 09h18
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Les voitures disposent de plus en plus d'éléments électroniques, les rendant davantage connectées. Une évolution forte, mais l'étape suivante, celle des véhicules totalement autonomes, est encore loin d'être atteinte.

Google et Uber mènent des tests, les constructeurs automobiles explorent de nouveaux systèmes sur leurs prototypes, les voitures autonomes sont le sujet phare de réflexion du secteur. A tel point que le cabinet AT Kearney estime à 500 milliards de dollars la valeur générée par ces recherches.

Le jackpot n'est toutefois pas pour tout de suite puisque ces estimations tablent sur le fait que le secteur atteindra sa pleine puissance d'ici 2035. De nombreux facteurs viennent en effet ralentir le développement des véhicules autonomes.

C'est ce que nous explique en détails le cabinet auteur de l'étude baptisée « la route, vers la voiture pleinement autonome ».

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Des lois incompatibles

Actuellement, en droit français, le code de la route, dans son article R412-6 indique que tout conducteur « doit se tenir constamment en état et en position d'exécuter commodément et sans délai toutes les manœuvres qui lui incombent ».

Même si le texte est globalement flou et laisse une latitude plutôt importante aux forces de l'ordre, il énonce que les possibilités de mouvement du conducteur « et son champ de vision ne doivent pas être réduits par le nombre ou la position des passagers, par les objets transportés ou par l'apposition d'objets non transparents sur les vitres ».

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En partant du principe qu'une voiture autonome n'a pas besoin de pilote, celui-ci devra tout de même être en mesure de pouvoir prendre la main instantanément sur la conduite. Dans une configuration classique, le conducteur devrait donc demeurer constamment en état de vigilance et être à même de réaliser toute manœuvre utile. En l'état actuel de la loi, l'apport des voitures autonomes serait minime puisque cela reviendrait, peu ou prou, à devoir rester les mains sur le volant, au cas où...

Au niveau international, certains pays comme les Etats-Unis sont déjà prêts à modifier leur cadre légal. Preuves en sont la multitude de tests déjà réalisés sur le territoire. En Europe, si des expérimentations ont déjà été conduites, certains Etats ont signé la Convention de Vienne sur la circulation routière. Ces derniers opèrent ainsi dans un cadre plus restreint.

L'absence de standards communs

Pour le moment, chaque partie mène ses expérimentations dans le but de proposer sa solution de mobilité, dans un horizon plus ou moins lointain. A chaque constructeur, un système propre est souvent déployé. Le secteur souffre de fait d'un manque d'uniformité dans les services proposés.

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Le constat est partagé par Remi Cornubert, responsable en charge de l'Automobile au cabinet A.T. Kearney. Il précise : « en matière de standards, l'industrie automobile est un mauvais élève même si l'on voit se développer des initiatives nationales dans le domaine. De même, des consortiums existent dans les systèmes d'exploitation ou les couches basses ».

En matière de systèmes embarqués, industriels de l'automobile, des télécommunications et de l'informatique collaborent depuis plusieurs années au sein du CCC, le Car Connectivity Consortium. L'entité a par exemple permis de mettre au point MirrorLink, une technologie reproduisant l'environnement ainsi que les applications des smartphones sur l'écran de bord.

Plus récemment, des groupements (de constructeurs d'un même pays) se développent. C'est notamment le cas en Allemagne d'une union regroupant BMW, Audi et Daimler qui a permis de racheter Here Maps, l'activité de cartographie jusqu'à présent propriété de Nokia.

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Malgré ces tentatives, subsiste la question des éventuels dialogues entre plusieurs véhicules ne disposant pas du même système de communication (une voiture Google parlera-t-elle à une automobile Apple ?) ou même de la réaction d'un véhicule face à un autre qui ne sera, pour sa part, pas connecté. D'autres points sont encore sources d'interrogations comme la rencontre avec d'autres éléments mobiles parfois difficilement identifiables, comme les vélos.

Le manque d'infrastructure physique adaptée

Pour que les véhicules autonomes puissent circuler librement, un environnement adapté devra les accueillir. Les routes devront être massivement équipées en capteurs, antennes et autres éléments permettant d'assurer une communication en continu entre les différentes automobiles.

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Pour le cabinet A.T Kearney, ce paramètre est celui qui mettra le plus de temps à se développer. Il prévoit ainsi l'émergence de réseaux globaux de mégalopoles seulement à l'horizon 2035. Toutefois, certaines villes déjà saturées pourraient presser le pas et demander à leurs gouvernements respectifs de mettre en place plus rapidement que prévu les structures logistiques et routières adéquates.

C'est donc dans une optique de « ville intelligente » que les projets de voitures autonomes devront se lover s'ils désirent disposer d'une implantation sur un territoire. Un point sur lequel le travail à accomplir reste immense à tel point que des constructeurs actuels, comme Tesla, parent au plus pressé.

Remi Cornubert explique : « Actuellement Tesla place des bornes non pas dans les endroits dans lesquels il existe des besoins en termes de mobilité mais plutôt là où se trouvent ses clients. Mais cette stratégie est, dans un certain sens, contrainte par le manque d'infrastructures ».

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En attendant, la recherche explore également ce terrain. Aux Etats-Unis, par exemple, l'université Michigan a fait bâtir une fausse ville dédiée aux voitures autonomes. Baptisé Mcity, ce complexe de 4 km2 doit permettre de tester les interactions de type machine-to-machine, à savoir lorsqu'un véhicule « parle » à un autre, ou interagit avec son environnement.

Une infrastructure technique et logistique suffisamment robuste ?

En matière de cloud computing, bien des services garantissent des taux de 99,95 % de disponibilité. Ce qui signifie que sur l'ensemble d'une année calendaire, une marge d'erreur pendant laquelle l'outil sera en panne, est permise. Un tel événement ne saurait se produire dans l'hypothèse d'une conduite engageant la sécurité corporelle d'un utilisateur.

On imagine mal un véhicule incapable de fonctionner par manque de réseau ou par mauvais temps. Dans ce cadre, si la logistique joue un rôle, le risque de panne doit être intégré par les constructeurs. En informatique, l'une des parades classiques est la redondance, c'est-à-dire la répétition de plusieurs équipements afin qu'en cas de dysfonctionnement, le relais puisse être pris de manière transparente.

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Une telle logique s'avère difficilement applicable à l'automobile connectée. Remi Cornubert précise : « si je comprends ce concept dans le domaine de l'aviation, il n'est pas possible de l'appliquer à l'automobile. Tout simplement à cause des coûts que cela impliquerait mais également de la place que prendrait ces dispositifs dans l'habitacle, s'ils sont en double ».

Les voitures autonomes et connectées devront donc garantir un service sans failles, non seulement du point de vue technique mais également sur le terrain de la sécurité.

Le manque de sécurité

Les dernières preuves de hacking portant sur des équipements embarqués au sein de voitures ont démontré que ces systèmes électroniques n'étaient pas exempts de tout reproches. Charlie Miller et Chris Valasek, qui ont intégré Uber depuis leur exploit, sont ainsi parvenus à prendre le contrôle d'une Jeep Cherokee.

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La question de la sécurité demeure donc capitale dans la mesure où le fait de laisser la main à un véhicule autonome devra être s'accompagner d'une confiance avec le matériel. Une position que partage le cabinet. Celui-ci estime que les constructeurs devront aussi bien garantir la sécurité de leurs passagers dans leur habitacle que les informations qu'ils diffuseront par le biais de leur voiture.

Les constructeurs auront la tâche de rassurer leurs clients et de rendre leurs systèmes les plus difficilement piratables. Un pari permanent au travers duquel les acteurs du marché devront obligatoirement passer s'ils désirent que leurs services soient adoptés par l'ensemble du public.

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Olivier Robillart

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Mêler informatique, politique et journalisme tu essaieras ! Voilà ce que m'a demandé un jour un monsieur ridé tout vert qui traînait dans un square en bas de mon immeuble. J'essaie désormais de remplir cette mission en tant que rédacteur pour Clubic. Je traite principalement de politique numérique tout comme de sécurité informatique et d’e-Business. Passionné de Star Wars, de Monster Hunter, d’Heroic Fantasy et de loisirs numériques, je collabore régulièrement à de multiples projets vidéo de la rédaction. J’ai également pris la fâcheuse habitude de distribuer aux lecteurs leur dose hebdomadaire de troll via la Clubic Week.

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