Vingt-cinq associations européennes de consommateurs ont déposé une plainte auprès de la Commission européenne contre Shein. Elles accusent la plateforme de recourir à des « dark patterns » pour pousser les clients à acheter plus, souvent sans leur plein consentement.

LEurope est saisie par des associations de consommateurs pour les "dark patterns" qu'utilsierait Shein pour vendre toujours plus - ©PixieMe / Shuttertstock
LEurope est saisie par des associations de consommateurs pour les "dark patterns" qu'utilsierait Shein pour vendre toujours plus - ©PixieMe / Shuttertstock
L'info en 3 points
  • Vingt-cinq associations européennes accusent Shein d'utiliser des "dark patterns" pour manipuler les achats des consommateurs.
  • Les techniques incluent des offres limitées et des compteurs de stock trompeurs, influençant les décisions d'achat.
  • Shein, sous pression en Europe, coopère avec les autorités après des plaintes sur ses pratiques commerciales.

[Article mis à jour le 5 juin 2025 à 16 h 10, voir en bas de page]

Les techniques mises en cause ont pour effet de manipuler les décisions des utilisateurs, souvent à leur insu. L’UFC-Que Choisir, partie prenante de la plainte, évoque des pratiques trompeuses, comme la personnalisation abusive des promotions, les faux compteurs de stock ou la difficulté à annuler une commande. Le Bureau Européen des Unions de Consommateurs (BEUC) a également pris part à cette action collective, qui cible des méthodes répandues sur Shein et d’autres sites marchands. Cette plainte tombe plutôt mal pour Shein, qui se prend de plein fouet plusieurs vents mauvais en Europe.

Les techniques dénoncées usent de biais bien connus

Les associations pointent plusieurs mécanismes qui influencent la décision d’achat. Elles montrent que Shein joue sur la pression du temps avec des offres limitées, affichées comme « en rupture imminente ». Ce genre d’alerte est censé déclencher une réaction rapide et l'achat, souvent sans réflexion.

Shein aurait également recours à la personnalisation des promotions et ainsi adapter ses offres selon le profil du client, donnant l’impression d’un avantage unique. Pourtant, les remises ne sont pas toujours réelles, ce qui déforme la perception de la valeur.

Parmi ces « dark patterns », déjà dénoncés par l'UFC-Que Choisir, on trouve aussi l’affichage de compteurs qui indiquent un nombre réduit d’articles disponibles. Cette technique suggère une rareté artificielle, et pousse à l’achat immédiat.

Les associations dénoncent également les obstacles mis à l’annulation ou au retour d’un produit. Les processus sont souvent complexes, longs, ou peu clairs. Cela complique la décision de renoncer à un achat impulsif.

Ces stratégies exploitent des biais psychologiques, comme la peur de manquer une bonne affaire ou le désir d’exclusivité. Le tout est de faire en sorte que l’utilisateur ne soit pas conscient de la manipulation.

La Commission européenne est désormais chargée d'enquêter sur l'existence de ces "dark patterns" en cours sur Shein - ©RaffMaster / Shutterstock
La Commission européenne est désormais chargée d'enquêter sur l'existence de ces "dark patterns" en cours sur Shein - ©RaffMaster / Shutterstock

Une procédure lancée au niveau européen, en pleine période de tensions pour Shein

SHEIN traverse une période de turbulences européennes. Dans plusieurs pays européens, les initiatives se multiplient pour encadrer ses pratiques. Début mai, la France a entamé une procédure via le règlement européen sur les services numériques (DSA). L’UFC-Que Choisir, en lien avec le Bureau européen des unions de consommateurs (BEUC), accuse Shein de recourir massivement aux techniques de « dark patterns » pour influencer ses utilisateurs. Un peu plus tôt en avril, c'est la CNIL qui avait mis la plateforme chinoise dans son viseur pour sa gestion des cookies.

Shein a assuré de son côté qu’un audit indépendant avait été réalisé et que des ajustements avaient déjà été engagés. « Nous prenons ces préoccupations très au sérieux », a déclaré un porte-parole de l’entreprise, affirmant que la plateforme coopérait pleinement avec les autorités. En parallèle, Bruxelles examine les éléments transmis par la France. Si les faits sont jugés fondés, la Commission pourrait ouvrir une enquête formelle.

Cette pression réglementaire s’ajoute à un contexte de croissance spectaculaire pour Shein en Europe. En 2023, sa filiale irlandaise, Infinite Styles Ecommerce Co, a enregistré un chiffre d'affaires de 7,68 milliards d’euros, en hausse de 68 % par rapport à l’année précédente. Son bénéfice net a plus que doublé, atteignant 99,5 millions d’euros. Un essor rapide qui attire forcément l’attention des régulateurs.

Mise à jour :

Quentin Ruffat, porte-parole de SHEIN en France, a souhaité réagir à cet article:

« Les consommateurs européens seraient mieux servis si le BEUC acceptait de nous rencontrer, nous permettait d’expliquer notre mode de fonctionnement et discutait de manière ouverte et transparente avec nous de toutes leurs préoccupations. Malheureusement, ils ont choisi de rejeter chacune de nos nombreuses demandes de rencontre au cours des dernières années.

Nous travaillons déjà de manière constructive avec les autorités nationales de protection des consommateurs et avec la Commission européenne pour démontrer notre engagement à respecter les lois et réglementations de l'UE. Nous poursuivons activement ce processus pour répondre à toute préoccupation. Nous serions également heureux d'engager un dialogue similaire avec le BEUC, s'ils acceptaient notre demande de rencontre.

Ce refus de dialogue est extrêmement décevant, d'autant plus que SHEIN connaît une popularité croissante auprès des consommateurs européens, qui reconnaissent que notre plateforme offre un meilleur rapport qualité-prix, plus de choix et des prix abordables, à un moment où les familles sont de plus en plus attentives à leurs dépenses ».