En transformant l'ADN viral en composants structurels nanométriques, des chercheurs de l'Université de Sydney sont parvenus à concevoir des nanorobots capables d'exécuter des tâches à l'échelle moléculaire. Et le potentiel de ces créations est immense.

L'ADN ontient l'ensemble des instructions génétiques nécessaires au développement, au fonctionnement et à la reproduction de chaque organisme.  © Billion Photos / Shutterstock
L'ADN ontient l'ensemble des instructions génétiques nécessaires au développement, au fonctionnement et à la reproduction de chaque organisme. © Billion Photos / Shutterstock

Les équipes du Nano Institute de Sydney travaillent à faire avancer la médecine moderne, notamment grâce à la convergence entre biologie moléculaire et robotique. Leur approche leur a permis de concevoir des robots microscopiques dont les dimensions se mesurent en millionièmes de millimètre. Théoriquement, ces nanorobots, en tant que machines biologiques programmables, pourraient accomplir des missions thérapeutiques précises.

Les résultats de leurs travaux ont été publiés il y a trois jours dans la revue Science Robotics. Voilà une avancée un peu plus rassurante, comparée à l'évolution de la législation sud-africaine sur les modifications génétiques.

L'art de sculpter l'infiniment petit

L'équipe australienne repousse les limites de la miniaturisation en créant un véritable catalogue de nanostructures. Parmi leur collection de plus de cinquante créations figure une carte de l'Australie de 150 nanomètres, un dragon, un minuscule dinosaure (que l'on peut voir sur la vidéo partagée par The Guardian). Le Dr Shelley Wickham, qui considère celui-ci comme sa création favorite, explique que sa structure combine zones rigides et parties articulées, une configuration « impossible à obtenir au hasard ».

Ces réalisations, observables uniquement au microscope électronique, constituent une vitrine des possibilités offertes par cette technologie. Chaque forme créée représente un défi technique sérieux, nécessitant un contrôle précis de l'assemblage moléculaire pour obtenir la structure désirée.

 Les nanorobots offrent un potentiel immense pour révolutionner la médecine. © Gorodenkoff / Shutterstock
Les nanorobots offrent un potentiel immense pour révolutionner la médecine. © Gorodenkoff / Shutterstock

Quand l'ADN devient un jeu de construction

Comment ça marche ? La fabrication de ces nanorobots repose sur une méthodologie d'assemblage moléculaire très précise, comparable à un jeu de construction microscopique. Le processus débute par l'extraction d'ADN de bactériophages, des virus spécialisés dans l'infection de bactéries. Cet ADN subit ensuite un processus de pliage contrôlé, grâce à une technique baptisée origami ADN, générant des structures cylindriques baptisées voxels (oui, comme les blocs de base qui constituent le monde de Minecraft).

Ces composants élémentaires intègrent 300 séquences d'ADN spécifiques, agissant comme des points d'ancrage moléculaires. Le Dr Wickham compare ce processus à un système de velcro microscopique : chaque séquence ADN possède une « signature » unique qui détermine où et comment elle se fixera aux autres composants. Les voxels, dotés de sites de liaison externes programmables sur leur surface, s'auto-assemblent en configurations prédéfinies selon un plan précis, formant ainsi des nanorobots fonctionnels. Cette technique permet une construction modulaire et programmable, où chaque composant trouve automatiquement sa place dans l'architecture finale.

Le professeur Arnan Mitchell du RMIT (Institut royal de technologie de Melbourne) souligne le potentiel thérapeutique de ces nanorobots, particulièrement dans l'administration ciblée de médicaments. « Ces machines moléculaires pourraient transporter des agents thérapeutiques jusqu'à leur cible, les protéger durant leur trajet, puis les libérer sous l'effet de stimuli externes comme la lumière ou la chaleur ».

Si cette technologie est tout à fait passionnante, nous sommes encore loin de pouvoir envisager des applications cliniques à grande échelle. On ne conçoit pas ces nanorobots avec du matériel classique, et leur construction requiert des compétences techniques élevées et des outils informatiques sophistiqués. Ces derniers devront aussi résister aux conditions présentes dans le corps humain (enzymes, système immunitaire) en restant fonctionnels et biocompatibles. Dernier point, et non des moindres : les coûts de production, qui sont encore extrêmement élevés ; il faudra encore de nombreuses années de recherche et de développement avant de les voir dans l'arsenal des chirurgiens.

Source : The Guardian