Editeur d'un blog consacré à la télévision et à la vidéo numérique, Laurent Esposito évoque l'émergence du videocast au sein de la blogosphère
Quel rapport entre une interview du plus médiatique ministre
de la République par le plus
médiatique des blogueurs français, un ancien journaliste
financier de LCI travaillant à Wall
Street, un autre journaliste
financier quant à lui toujours à l'antenne sur LCI, un
ardent défenseur
de la fibre optique, un blogueur
illuminé et un geek entrepreneur
? Vous avez trouvé ?
Réponse : la vidéo, mais pas n'importe quelle vidéo...
il s'agit ici de la vidéo personnelle podcastée (à
télécharger) ou streamée (à visionner immédiatement)
depuis le web, aussi appelée vidéocast.
Explication. La vidéo numérique personnelle, vous connaissez
: celle que vous et moi pouvons en principe réaliser en un tour
de main grâce à un camescope DV (ou HDV pour les plus fortunés)
ou à partir d'un vidéophone
si l'on est équipé d'une caméra sur son téléphone
3G. Rien de révolutionnaire jusque là, nous sommes tous familiers
de ces objets technologiques à défaut de les avoir déjà
manipulés. La production d'images vidéo personnelles est
devenue un lieu commun.
La nouveauté réside en fait dans l'étape suivante.
Il devient de plus en plus facile de réaliser un montage sur son
ordinateur ou son mobile à partir des rushes vidéo tournés
et surtout de diffuser ce montage grâce à l'Internet. Des
plates-formes d'agrégation et de distribution de contenu vidéo
comme DailyMotion, Google
Video, Pooxi.com ou encore, last
but not least, Vpod.TV (Video Publishing
On Demand) constituent autant de lieux d'hébergement gratuits de
ces vidéos personnelles à l'échelle du web.
Dans un contexte de large équipement en haut débit (9
millions de foyers français fin 2005), d'un parc de caméraphones
en forte croissance et de démocratisation des blogs
au-delà des geeks et des ados, l'année 2006 se présente
à nous comme l'année de l'émergence d'un nouveau média
: le vidéocast ou télévision personnelle.
Cette télévision sera personnelle à double titre.
Personnelle dans ses contenus, d'abord, parce que la manière dont
ils sont réalisés et (auto)produits relève de l'initiative
individuelle ou, à tout le moins, amateur. Je prends ma caméra,
je filme, j'interview, je monte mes images et travaille ma bande son, j'upload
mon montage sur une plate-forme vidéo et enfin je diffuse ma vidéo...
tout cela, sans l'intervention de professionnels de l'audiovisuel.
Personnelle dans sa consommation, ensuite, car la diffusion de ces vidéos
ne relève pas du mode « broadcast » (un point de diffusion
unique, un signal unique, vers une multitude de récepteurs au même
moment) mais plutôt du mode « unicast » (un destinataire
à la fois, à la demande). Grâce à sa connexion
Internet, c'est le téléspectateur qui choisit le programme
qu'il va voir, quand il va le visionner (maintenant ou plus tard) et sur
quel terminal (ordinateur, baladeur
vidéo, mobile, voire même son bon vieux téléviseur
s'il est raccordé au PC).
Le citoyen, internaute, mobinaute, téléspectateur, vidéaste
- appelons-le comme on veut car il est par essence protéiforme -
devient, par le truchement de la vidéo numérique, à
la fois émetteur et récepteur de programmes audiovisuels
personnels. Chacun dispose virtuellement de la possibilité d'exprimer
un point de vue et/ou de consulter les contenus vidéo produits par
ses pairs.
Dans une étude de l'IDATE
sur les perspectives d'évolution de la télévision
en 2015, Laurence Meyer évoque trois scenarii dont un baptisé
« Bienvenue dans l'ère de l'Egocasting ». Selon la directrice
d'étude Médias de l'institut, ce
scénario « suppose l'émergence d'une TV alternative
universelle distribuée en peercasting sur l'Internet ,et d'un modèle
de TV nomade qui se base sur l'usage généralisé de
baladeurs numériques multimédia ».
Cette télévision personnelle est intimement liée
à l'évolution combinée des blogs et du podcasting
vers le format vidéo. Conséquence, on retrouvera autour de
ce nouveau média personnel les mêmes problématiques
que celles déjà soulevées dans la blogosphère.
Comment protéger les auteurs d'images électroniques et
de musique originales ? Comment exercer son droit à l'image lorsque
l'on apparaît dans une vidéo ? Contenus vidéo gratuits
et/ou payants ? Règles déontologiques pour les reportages
et interviews ?...
L'un des facteurs de réussite de cette télévision
personnelle et participative sera, comme dans le cas des télévisions
locales d'expression citoyenne, la capacité des vidéastes
non professionnels à s'approprier ces outils vidéo et à
forger leur propre rhétorique de l'image, quitte à casser
les codes de la télévision traditionnelle. Il existe aujourd'hui
chez les téléspectateurs un marché non satisfait par
les contenus des chaînes de télévision. Les vidéocasteurs
ont devant eux des pans entiers de créativité à explorer.
Au-delà de l'utopie de médias sans journalistes ou du journalisme
citoyen, il y a une myriade de micro-télévisions très
segmentantes par leur thématique, très communautaires par
leurs échanges contributifs et forcément très personnelles
par leur contenu, à bâtir !
Et vous, quels programmes vidéocast souhaiteriez-vous voir ou
réaliser en 2006 ?
Vidéocast : 2006, année de la télévision personnelle
Par Jérôme Bouteiller.
Publié le 02 janvier 2006 à 00h00
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