L'impact énergétique de l'IA est déjà énorme… et ce n'est que le début

09 juin 2023 à 12h35
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© cottonbro studio / Pexels
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La consommation d'eau et d'énergie des infrastructures faisant fonctionner des programmes tels que Bard ou ChatGPT augmente aussi vite que ces derniers deviennent populaires et puissants.

Ce n'est un secret pour personne : Internet pollue. En effet, les centres de données du monde entier sont responsables de 2 à 3 % de nos émissions de CO2. S'il est important, ce pourcentage démontre aussi notre dépendance à l'égard du numérique.

Un voyage en Twingo 1 jusqu'à la bibliothèque polluerait-il moins que l'utilisation de ChatGPT ?

Si les IA génératives promettent de révolutionner notre quotidien, elles peuvent aussi avoir un impact environnemental considérable. Par leur complexité, elles nécessitent une grande puissance de calcul, et donc beaucoup d'énergie. Si leurs éditeurs comme Google ou OpenAI ne communiquent pas sur leur consommation, certains chercheurs se sont penchés sur la question.

C'est le cas de Sasha Luccioni et de son équipe, qui ont calculé la quantité d'énergie requise pour entraîner et utiliser une IA créée de toutes pièces. En quatre mois, leur expérience aurait produit jusqu'à 50 tonnes de CO2, dont 25 pour la seule formation du programme, soit l'équivalent de 30 vols entre Londres et New York.

© PublicDomainPictures / Pixabay
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Toutefois, la chercheuse souligne que le réseau électrique sur lequel fonctionnent leurs équipements est en partie alimenté par de l'énergie nucléaire. GPT-3, nettement plus énergivore, est raccordé à un réseau plus carboné. Il aurait généré 500 tonnes de CO2 rien que pour son entraînement. L'équivalent de plus de 1 million de kilomètres parcourus par des voitures à essence.

Bard a soif, vraiment très soif

Les centres de données ne consomment pas que de l'électricité. En effet, ils produisent beaucoup de chaleur, et lorsque la climatisation traditionnelle n'est pas envisagée pour les refroidir en raison de sa consommation d'énergie, l'eau prend le relais.

Une autre étude a estimé que la formation de GPT-3 aurait consommé à elle seule... 700 000 litres d'eau douce. Cependant, les données officielles ne sont pas ou peu divulguées, et les chercheurs soulignent que la consommation d'eau dépend fortement de l'emplacement de l'infrastructure. En effet, un serveur situé dans un endroit chaud nécessitera plus de refroidissement qu'un autre qui se trouve dans une région plus tempérée.

Or, les géants de la technologie cherchent à réduire leur empreinte carbone, au risque de s'implanter dans des zones ensoleillées pour profiter de l'énergie solaire. Cela se fait souvent au détriment des ressources en eau.

Des ressources mal utilisées ?

Pour Sasha Luccioni, le problème n'est pas tant la conception des infrastructures qui font fonctionner l'IA générative, mais plutôt l'utilisation qui en est faite. Selon elle, ces programmes sont utilisés pour tout et n'importe quoi, en raison de l'effet de mode et du fait que les entreprises se forcent à les utiliser, de peur de se laisser distancer par la concurrence.

© Sanket Mishra / Pexels
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Pour la chercheuse, il s'agit d'une aberration : « Il y a tellement d'approches et de méthodes d'IA efficaces et à faible impact que les gens ont développées au fil des ans, mais on veut utiliser l'IA générative pour tout. » Elle ajoute : « Si les entreprises sont plus transparentes sur les ressources naturelles utilisées et les émissions de carbone émises lors de la création et de l'utilisation des modèles d'IA, elles pourraient contribuer à ouvrir des discussions sur le moment et la manière d'utiliser stratégiquement l'IA générative. »

En définitive, le danger le plus immédiat de ces programmes ne serait pas tant les risques qu'ils font peser sur nos sociétés, mais plutôt leur impact sur l'environnement. Et ce n'est pas ChatGPT qui va nous aider à résoudre ce problème, car selon lui : « En tant que modèle de langage d'IA, je n'ai pas de présence physique et je ne consomme pas directement d'énergie. » Peut-être devrions-nous apprendre aux intelligences artificielles à ne pas trop nous ressembler, au risque de générer plus de déni que d'objectivité ?

Source : The Guardian

Maxence Glineur

Geek hyper connecté et féru de podcasts, je suis toujours en train de lire ou écouter des points infos en tout genre. Entre histoire, tech, politique, musique, jeux-video et vulgarisation scientifique...

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Geek hyper connecté et féru de podcasts, je suis toujours en train de lire ou écouter des points infos en tout genre. Entre histoire, tech, politique, musique, jeux-video et vulgarisation scientifique : toute l'actualité (ou presque) attise ma curiosité. Sinon, j'aime le rock et le lofi, les game-nights toujours trop longues, les bons films et les nanards.

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Commentaires (12)

Oncle_Picsou
"En définitive, le danger le plus immédiat de ces programmes ne serait pas tant les risques qu’ils font peser sur nos sociétés, mais plutôt leur impact sur l’environnement. "<br /> Qu’est-ce qu’il ne faut pas entendre comme anneries, franchement…<br /> 700 000 litres d’eau = 1/4 de piscine olympique plus ou moins, ou 1/4 du débit en 1 seconde des chutes du Niagara, soit quelque chose d’insignifiant.<br /> Pareil pour les 500 tonnes de Co2…<br /> Ca en devient vraiment ridicule cette eco culpabilisation permanente.
Neophus975
Ça changera de taper sur le bitcoin tiens ! maintenant c’est l’IA !
bennukem
Surtout que l’eau est retournée d’où elle vient.
brice_wernet
Il faut comparer au coût écologique de former des humains et de les utiliser ensuite pour un travail.<br /> Pas sûr vu l’efficacité moyenne que l’humain soit mieux qu’une IA du point de vue CO2
Nmut
Oui, pris isolément, ce n’est pas significatif. Le problème c’est surtout que l’on ne pose pas la question AVANT mais seulement après coup, et que la généralisation fait le problème. Tout comme ta twingo qui seule n’a absolument aucun impact, mais multiplié par le nombre de français ça commence à être embattant, et par la population mondiale « véhiculée », c’est critique.
Nmut
Pas toujours. Un pompage dans une nappe profonde par exemple ne sera pas remplacé avant plusieurs années, voir plusieurs dizaines d’années. On ne sait justement pas comment sont refroidis les data centers. Ca peut même se faire par convection naturelle (comme OVH à Strasbourg… Bon OK, il y a d’autres problèmes, ça crame bien par exemple… ).
Oncle_Picsou
Je ne pense pas que ce soit une bonne comparaison, l’utilisation de l’IA, contrairement à un trajet en twingo pour aller à la boulangerie, peut permettre d’éviter l’utilisation de ressources, que ce soit en optimisant des processus existants, ou en remplaçant tout simplement un travail humain (qui aurait dû, lui, prendre sa twingo pour venir au boulot!).
Francis7
Il y a de graves problèmes de sécheresse en Californie qui affectent le lac et réservoir Mead. C’est une importante ressource d’eau potable qui dessert plusieurs régions.
ypapanoel
Je m’apprêtais à dire la même chose : tu m’enlèves les mots de la bouche <br /> Les chiffres annoncés sont ridicules : une industrie de 300 personnes consomme à la louche entre 4 et 10 fois ces chiffres.<br /> Mais comme personne n’a de notion des valeurs (on voit trop souvent des articles donnant des chiffres avec des erreur x1000 sans que ça gène personne) ça passe. Et on fait buzzer<br /> Et après on s’étonne que la confiance dans les médias baisse de jour en jour…
StephaneGotcha
A notre époque, tout doit mesurer sa consommation d’énergie, c’est certain.<br /> En revanche, dire dans un titre que l’impact de l’IA est énorme et que dans la 2eme phrase, c’est 2 % de nos émissions de CO2 c’est un peu gros.<br /> Je suppose qu’utiliser une IA 1h par jour tous les jours (ce que « personne » ne fait encore) doit correspondra a 1 trajet modeste en voiture à essence …
bmustang
et on nous dira que ia va résoudre tous nos problèmes d’eau, d’énergie… foutaise biensur ! ia nous rationnera tous ou nous fera tous crever pour garantir son fonctionnement, voilà la réponse
Stellvia
Vous êtes au courant que l eau ne disparaît pas de la surface de la terre, elle est pas vaporisée dans un monde parallèle, vous le savez, hein ???
Nmut
Je ne parlais pas de comparer l’IA à la Twingo, mais que l’empreinte environnementale est due à la multiplication, pour la Twingo comme pour l’IA. 1 IA, 100 IA, 1000 IA ne sont pas un problème, tout comme 1000 Twingo n’ont aucune influence, mais 1 milliard d’IA est un problème tout comme 1 milliard de Twingo!
Nmut
Je suis d’accord, sauf que 2% c’est colossale en valeur, même si cela semble peu. Encore une fois, comme le souligne @ypapanoel, un problème de valeurs et de manipulation des grands nombre que l’esprit humain ne peut pas faire.
Nmut
Effectivement la quantité d’eau ne changera globalement pas, la dispersion d’hydrogène dans l’espace est faible. Mais c’est « l’utilisabilité » (disponibilité d’eau potable et d’eau agricole) qui va changer. Le cycle de l’eau est aussi un cycle fragile, une augmentation de l’énergie atmosphérique entraine une irrégularité de la pluie supérieure (moins de pluie, pluie plus fortes), donc une absorption des sols moindre, des cours plus pollués, des inondations plus fréquentes, …
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