À VivaTech, La Poste a présenté son prototype de serrure connectée, destiné à équiper les Français, d'ici 2027, d'une boîte aux lettres plus sécurisée, sans pour autant la remplacer.

Arnaud Dagès présente à Clubic la serrure connectée de La Poste © Alexandre Boero / Clubic
Arnaud Dagès présente à Clubic la serrure connectée de La Poste © Alexandre Boero / Clubic

La Poste a présenté à VivaTech et à Clubic mercredi son premier prototype de serrure connectée, fruit d'un an et demi de développement. Particulièrement bien pensée, la serrure utilise la technologie NFC des smartphones pour fonctionner sans pile ni alimentation électrique. Le projet vise à sécuriser les livraisons de colis dans les boîtes aux lettres existantes, sans nécessiter leur remplacement complet.

La Poste modernise la boîte aux lettres avec la technologie NFC, et plus de sécurité

À notre micro et sur le stand de La Poste, Arnaud Dagès, chef de projet innovation au sein de l'opérateur postal, fait le constat suivant : « Nos boîtes aux lettres, elles existent depuis 1899 en France, on peut tous avoir une boîte aux lettres à domicile. Elles sont normalisées depuis 1979, et on reçoit de plus en plus de colis, qui ont de plus en plus de valeur. » Alors, face à la réalité des vols de colis notamment, l'entreprise a choisi l'innovation, plutôt que le remplacement massif. On vous explique.

La solution développée par le groupe reprend les dimensions des cylindres mécaniques existants. Cette serrure numérique intègre du chiffrement asymétrique, et des infrastructures à clés publiques (PKI). « C'est ce qu'on utilise typiquement dans les cartes bancaires, avec de la Java Card », précise Arnaud Dagès. Le niveau de sécurité pour nos boîtes aux lettres est ici inédit.

« On a un système qui n'utilise aucun code et ça, en termes de sécurité, c'est un cran qui nous permet de remonter le curseur », ajoute l'expert. Contrairement aux solutions actuelles vulnérables, cette serrure connectée échange les données « de manière chiffrée entre deux smartphones », pour éviter toute interception malveillante.

L'originalité de ce que propose La Poste n'est autre que le fonctionnement autonome de la serrure. Sans pile ni connexion électrique, cette dernière capte en fait l'énergie NFC du smartphone qui sert à la déverrouiller pour s'alimenter. Un peu comme lors d'un paiement sans contact. « On va réutiliser l'énergie qu'on utilise quand on fait un chargement de badge avec son smartphone », explique le responsable innovation. Une prouesse technique qui pourrait bien garantir la longévité du système.

Du coup, « on va capter cette énergie pour l'alimenter, et il y a deux sujets sur lesquels on travaille », nous dit Arnaud. Le premier, c'est l'actionneur, « donc le petit truc qui va déverrouiller la serrure », et le second consiste à « être en capacité de faire dans un temps très court tous les traitements de certificats et de cryptographie ».

Le groupe La Poste s'entoure de partenaires pour créer le standard européen de la serrure connectée

La Poste ne développe pas seule cette innovation. Six partenaires industriels collaborent désormais avec elle. Euro-Locks apporter son expertise sur la serrurerie, Spirtech celle sur la carte à puce, et UBI Solutions fait briller son savoir-faire dans la traçabilité logistique. DOM Ronis, acteur du contrôle d'accès ; Édélen, fabricant de boîtes aux lettres ; et Urmet, producteur d'électronique, complètent la liste.

Avec cette collaboration élargie, La Poste vise à créer « un standard de marché qui aura des critères de certification en termes de pérennité, de sécurité, et de compliance pour être interopérable », espère Arnaud Dagès. Une méthode déjà éprouvée avec Vigik+, où La Poste avait collaboré avec des industriels du marché. Demain, ces partenaires actuels deviendront concurrents sur le marché, chacun proposant ses propres solutions basées sur ce standard commun.

Le projet, démarré il y a un an et demi, affiche d'ailleurs des ambitions européennes, malgré des critères initialement français. « On se projette avec une vision européenne », confie le chef de projet, qui prend comme exemple l'expérience de GeoPost, la branche colis express de La Poste, présente dans plus de 50 pays.

L'expérience utilisateur au cœur de cette serrure connectée

Les premiers prototypes présentés à VivaTech fonctionnent, certes, mais ils nécessitent encore des améliorations avant l'industrialisation, prévue pour 2027. L'objectif demeure de transformer l'expérience utilisateur sans complexifier l'usage. « Ça doit rester un simple bouton de boîte aux lettres », insiste Arnaud Dagès, malgré la technologie embarquée.

L'interactivité est un point fort du travail opéré en développement. Les utilisateurs pourront très bien déléguer temporairement l'accès à leur voisin via une application mobile, pratique pendant les vacances. Plus innovant encore, le système permettra d'échanger des clés virtuelles entre smartphones sans codes visibles, éliminant les vulnérabilités liées au partage traditionnel de codes.

La traçabilité renforce aussi la sécurité, sans compromettre pour autant la vie privée. C'est ce que promet en tout cas La Poste. Respectueux du RGPD, le système enregistre les activités sans données nominatives. « Nos systèmes ne sont pas nominatifs. La boîte aux lettres n'a pas connaissance des identités, elle a connaissance de l'activité qui est effectuée, de livraison de colis, de l'enveloppe, et elle a connaissance de l'entreprise qui le fait », précise Arnaud Dagès. Les habitants conserveront l'historique complet des ouvertures, de quoi augmenter un peu plus la sécurité de leurs livraisons.