GoPro : dans les coulisses de la production d'une vidéo de sports extrêmes

04 juillet 2013 à 16h52
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GoPro est presque devenu, par antonomase, un nom commun désignant cette catégorie de caméra sport que le fabricant a largement contribué à démocratiser. Il faut dire que le fabricant sponsorise de nombreux événements et sportifs, ce qui lui permet d'inonder le Web de vidéos. Mais comment sont-elles réalisées ? Quels sont leurs secrets de fabrication ? Pour le savoir, nous avons récemment suivi une équipe de production dans les coulisses des GoPro Mountain Games, à Vail, dans le Colorado.

Les caméras GoPro avaient beau être initialement destinées, comme leur nom l'indique, aux athlètes sinon professionnels, au moins de haut niveau, elles sont désormais connues de tous les sportifs du dimanche.

Étanches et ultra-compactes, elles peuvent se fixer à la tête, au torse, sur un vélo, une moto ou une voiture, et permettent de tourner des images difficiles voire impossibles à tourner autrement. Avec leur objectif très grand angle caractéristique (170°), elles permettent d'immerger le spectateur, en particulier avec des plans à la première personne. Associées à des disciplines spectaculaires et à des montages très rythmés enfin, elles donnent lieu à des vidéos qui marquent les esprits.

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En dépit de leur prix élevé et de leur usage restreint, elles représentent ainsi 26% du marché américain des caméras... mais aussi 93% du marché mondial des caméras portables (wearable), qui compte plusieurs autres modèles dignes de ce nom, que nous avons déjà testés (voir GoPro, Drift, Sony, Contour, Gobandit : 5 action cams en test !). Ce marché progresse bien plus vite que celui des caméras ou que celui des appareils photo conventionnels, selon le cabinet d'études IDC.

Pour ce faire, et sur un modèle similaire à celui de Redbull, le fabricant investit beaucoup en communication, au point d'éclipser la concurrence. Il sponsorise beaucoup d'événements et de sportifs, et réalise ainsi des vidéos promotionnelles qu'il présente ensuite en tête de gondole dans les magasins de sport et boutiques de location (de skis par exemple).

Appâté par ces vidéos, le sportif du dimanche se porterait bien acquéreur pour impressionner lui aussi ses amis. Mais comment tourne-t-on au juste une vidéo réussie ? A quel point le consommateur lambda peut-il réaliser une vidéo aussi impressionnante ? Réponse dans les prochaines pages.




La captation

100 GoPro et une équipe de télévision

Cette année GoPro était le sponsor principal des Mountain Games, un événement annuel accueillant 3000 spectateurs et participants, sportifs amateurs à professionnels, dans l'une des stations de ski les plus huppées des États-Unis, Vail. L'occasion idéale pour faire le pont entre les derniers, déjà acquis à sa cause, et les premiers, vers lesquels il se tourne désormais car ils incarnent ses perspectives de croissance.

C'est aussi l'occasion de tourner de nouvelles vidéos. GoPro assurait ainsi la captation des épreuves des coupes du monde de plusieurs disciplines plus ou moins extrêmes (slackline, vélo slopestyle ou encore kayak freestyle) pour ses propres besoins, mais cette fois aussi pour le compte de la chaîne de télévision NBC.

Dans les deux cas, le fabricant déploie des moyens fort similaires à ceux d'un programme télévisé, des préparatifs à la post-production. En l'occurrence, NBC avait fait dépêcher une équipe de télévision de Ekko Media, une société de production spécialisée dans les programmes sportifs. Au total 20 personnes étaient impliquées dans la production de vidéo, dont 7 employés de GoPro (et non d'un sous-traitant) tournant exclusivement avec les caméras maison, sous la responsabilité de leur propre producteur Aaron Huffman, ainsi que 3 assistants.

Naturellement l'objectif du fabricant était de tourner un maximum d'images avec ses propres caméras. Il avait amené un total de 100 caméras Hero 3 Black Edition, d'innombrables cartes mémoires et batteries ainsi que toutes sortes de fixations. Jusqu'à 40 tournèrent simultanément pour une épreuve de kayak filmée exclusivement à la GoPro.

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D'une manière générale, l'équipe multiplie les caméras non seulement pour combiner plusieurs réglages (angle de champ de 170, 120 ou 90 degrés, cadence de prise de vue de 30 à 120 i/s), puisqu'elles sont le plus souvent fixes, mais aussi et surtout pour ne rien manquer : « Nous n'avons pas de seconde chance, » rappelle Aaron, « nous anticipons l'imprévu car on ne peut pas compter sur le hasard, c'est pourquoi nous utilisons de multiples caméras ».

Faire porter des caméras à certains participants requiert aussi un stock important. Mais trois athlètes nous ont expliqué que la plupart refusaient d'en porter au-delà des entrainements : un participant aux épreuves de kayak freestyle a mentionné la trainée dans l'eau, des participant à celles de vélo slopestyle (sauts et figures) ou de slackline (funambulisme) ont quant à eux évoqué l'impact du poids de la caméra et de sa fixation sur leur liberté de mouvement ou sur leur équilibre.

Or les participants n'exécutent leurs plus belles figures que pendant les phases finales, lorsqu'ils ne portent plus de caméra sur eux. Ce n'est que dans le cadre de vidéos promotionnelles que GoPro peut obtenir les plans à la première personne les plus impressionnants. « Nous essayons malgré tout d'obtenir quelque chose de nouveau pendant les compétitions », précise le producteur, qui admet que c'est plus difficile sans vue à la première personne.

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Cable cam, drone et autres fixations inédites

Pourtant en raison de l'objectif très grand angle de ces caméras, il faut filmer les athlètes de quelques mètres seulement pour obtenir un cadrage satisfaisant. La production a donc recours à des perches, avec lesquelles les opérateurs cadrent à l'aveugle, ou à des systèmes faits maison, dotés de poignées, d'un moniteur professionnel et d'un microphone externe. Mais l'application smartphone ou l'écran maison optionnel ne sont pas utilisés.

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La cable cam fonctionne entièrement sur batterie, sans retour vidéo

GoPro dispose d'ailleurs de son propre ingénieur mécanicien, chargé de confectionner des systèmes de fixation spécifiques. On lui doit notamment ce qu'il appelle sa « cable cam », un lot de quatre caméras évoluant sur un filin à l'aide d'une accroche motorisée et téléguidée, permettant de filmer de près les vélos lorsqu'ils décollent de tremplins. Il conçoit également des systèmes permettant de se filmer à la troisième personne, à l'aide de tubes, ou des systèmes motorisés à coulisse, permettent d'effectuer des traveling au sol ou sur les équipements des participants, mais leur mise en œuvre délicate, tant sur le plan technique que de la sécurité, les écarte à la fois des compétitions et de la commercialisation.

La production a parfois recours à un drone, un quadricoptère téléguidé commercialisé auprès du grand public quant à lui, le Phantom de DJI Innovations.

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Mais aussi des caméras de télévision pour combler quelques lacunes

Enfin lorsqu'aucun système de fixation ne permet de se rapprocher suffisamment de l'action, des solutions broadcast conventionnelles prennent le relai : caméras d'épaule à zoom, pieds, nacelles et mêmes grues.

Pour une épreuve comme le kayak freestyle, il y a même plus de caméras broadcast que de GoPro, trois contre une. Le kayakiste surfe sur une vague artificielle et reste donc relativement statique. L'opérateur en charge de la GoPro sur cette épreuve estime que cette caméra offre un excellent compromis entre prix et qualité, mais que dans ces conditions, avec un rythme de changement de plan plus lent, seule son étanchéité fait réellement le poids face à de véritables caméras de télévision.

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Pour les finales de kayak freestyle, une seule des quatre caméras était une GoPro


Retrouvez le matériel nécessaire aux captations de caméra embarquée sur Xtremcam.com.

La post-production

Des heures de rushes pour ne rien manquer

En définitive un tournage avec des caméras miniatures présente moins de spécificités qu'on ne pourrait le croire. Au-delà des possibilités offertes par leur compacité et leur étanchéité, ou au contraire des contraintes liées à leur objectif ultra grand angle (170°), il n'y a pas tellement de secret de fabrication.

Autrement dit ce sont bels et bien les performances filmées et le montage qui rendent une vidéo de sport impressionnante.

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On l'a vu, la production attache un soin particulier à filmer un maximum pour ne rien manquer. Au terme des deux jours de compétition des Mountain Games, elle repart ainsi avec pas moins de 8 To de séquences, l'équivalent de 500 cartes mémoires de 16 Go, soit autant d'heures de vidéo en Full HD 1080/30p. Fort heureusement l'essentiel des plans sont tournés en 1080/60p, pour permettre des ralentis plus fluides, ce qui signifie que cette quantité de données représente deux fois moins de temps. Certains sont même tournés en 720/120p, quitte à les mettre à l'échelle, d'autres à l'inverse en 1920 x 1440 à 48 i/s, c'est-à-dire au ratio 4:3, ce qui offre une plus grande marge de manœuvre dans le cadrage.

Le producteur Aaron pense en tirer une demi-douzaine de vidéos de 2 à 3 minutes, qui complèteront la collection de vidéos diffusées régulièrement sur leur chaîne YouTube.

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Si le cadre 4:3 était trop haut, il est toujours possible de cadrer plus bas en post-production en repassant en 16:9, et même d'ajuster au cours du plan

Avant de démarrer le montage, l'équipe traite les plans avec GoPro Studio. En plus de transcoder les fichiers de l'AVC au CineForm, un codec plus adapté à l'édition, ce logiciel maison offre quelques spécificités, telles que la correction automatique des importantes distorsions, en fonction des métadonnées de chacun des plans.

Mais GoPro n'utilise pas son propre logiciel pour le reste de l'édition, pas à la hauteur des montages complexes qu'elle réalise. Aaron et son équipe utilisent des logiciels « plus avancés » comme Final Cut Pro d'Apple ou Premiere Pro d'Adobe. Ces solutions offrent des fonctions de stabilisation ainsi que des réglages fins en matière de colorimétrie. À ce sujet les plans sont tournés en mode ProTune, qui délivre un rendu moins flatteur, inadapté à une utilisation directe, mais plus dynamique, c'est-à-dire plus détaillé dans les hautes et basses lumières. Mais Aaron indique qu'ils ne font « rien qu'une équipe de télévision ne fait pas », dans le but de « démontrer ce que leur petite caméra sait faire et fait bien ».

Si l'on en croit le producteur, tout tient donc aux prouesses filmées et au montage, souvent très rythmé et accompagné d'une bande son adaptée.

Un logiciel de montage pour transformer le sportif amateur en professionnel

L'enjeu pour GoPro est donc de permettre aux amateurs de réaliser des vidéos dignes de ce nom, pour les inciter à les partager avec leurs amis et séduire d'autres consommateurs.

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Le logiciel dispose de montage pré-travaillés

Le fabricant prépare pour ce faire GoPro Studio 2.0, qui compte mettre à la portée du premier venu la réalisation de vidéos réussies. Pour ce faire, le logiciel proposera des templates de vidéos promotionnelles officielles, en rythme avec de la musique. L'utilisateur n'aura qu'à remplacer les plans d'origine par les siens, et il obtiendra en quelques minutes une vidéo à la hauteur, prête à flatter son égo sur les réseaux sociaux.

Testé et approuvé par notre envoyé spécial, pas sportif pour deux sous, qui s'est perdu en vélo de montagne après avoir abandonné l'épreuve, à bout de souffle, mais est parvenu à faire illusion en accélérant (sensiblement) ses plans. Après tout, de l'aveu d'un des développeurs du logiciel, GoPro accélère la plupart de ses plans de 10%... En voilà enfin un secret de fabrication !



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Romain Heuillard

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C'est vers l'âge de 12 ans, lorsque j'ai reçu mon premier ordinateur (un Pentium 100), que j'ai décidé d'abandonner ma prometteuse carrière de constructeur de Lego pour me consacrer pleinement à ma nouvelle passion pour l'informatique. Depuis je me suis aussi passionné pour l'imagerie en général et pour la photo en particulier, mais je reste fan de sujets aussi obscurs que les procédés de fabrication de composants électroniques ou les microarchitectures de processeurs, que l'infiniment grand et l'infiniment petit. Je suis enfin foncièrement anti-DRM et pro-standards ouverts.

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