Nike fait face à une action collective suite à l'arrêt de son projet NFT RTFKT. Les plaignants accusent la marque d'abandon et réclament des millions de dollars de dédommagement pour la chute vertigineuse de la valeur de leurs actifs numériques.

- Nike est poursuivi pour l'arrêt brutal de son projet NFT RTFKT, causant d'énormes pertes financières aux acheteurs.
- La plainte accuserait Nike d'avoir vendu des NFTs comme titres non enregistrés, enfreignant des lois de protection.
- Les acheteurs réclament 5 millions de dollars en dommages via une action collective déposée à Brooklyn, New York.
L'équipementier sportif américain est poursuivi en justice par des acheteurs de ses Non-Fungible Tokens (NFTs) liés au projet RTFKT. Acquise en 2021 au plus fort de l'engouement pour le Web3, cette initiative de baskets virtuelles a été stoppée net en janvier 2025. Les investisseurs floués crient au rug pull, une pratique consistant à abandonner un projet après avoir attiré les investissements, et estiment que Nike a vendu des titres non enregistrés.
L'acquisition de RTFKT et les promesses initiales
Fin 2021, en pleine effervescence autour des NFTs et du métavers naissant, Nike annonçait l'acquisition de RTFKT Studios, une start-up spécialisée dans la création de baskets et d'objets de mode virtuels. L'objectif était clair : positionner la marque à la virgule à l'avant-garde de l'innovation numérique et capitaliser sur ce nouveau marché. RTFKT s'est rapidement fait connaître pour ses drops numériques exclusifs, comme le « MNLTH » révélant une paire de Nike Dunks virtuelles, ou ses avatars CloneX conçus en collaboration avec l'artiste Takashi Murakami, bâtissant une communauté engagée de près de 400 000 abonnés sur X (anciennement Twitter).
Pourtant, en décembre 2024, coup de théâtre : RTFKT annonce via les réseaux sociaux la cessation de ses opérations pour la fin janvier 2025. Si Nike évoque une réévaluation de ses priorités dans sa stratégie d'innovation numérique, de nombreux acheteurs y voient une tout autre manœuvre : un rug pull. La fin des opérations signifiait également la fin des quêtes et défis en ligne qui permettaient aux détenteurs de NFTs d'accéder à certains produits ou avantages, un argument de vente majeur lors de l'achat.
Le cas RTFKT n'est malheureusement pas un incident isolé dans le paysage post-bulle des NFTs. D'autres grandes entreprises, comme Starbucks avec son projet Odyssey, ont également mis fin à leurs initiatives Web3 face à un marché en berne et un intérêt retombé. Ces arrêts brutaux illustrent la dégonflement spectaculaire de la bulle spéculative autour des NFTs, dont la valeur et l'attrait ont chuté de manière significative depuis leur apogée en 2021-2022.
Des actifs numériques aux lourdes pertes
Pour les acheteurs des NFTs Nike x RTFKT, la décision de l'équipementier a eu des conséquences financières désastreuses. Certains de ces jetons, qui s'échangeaient en moyenne autour de 3,5 Ether (environ 8 000 dollars à l'époque) lors de leur lancement en avril 2022, ne valaient plus que 0,009 Ether (environ 16 dollars) en avril 2025, soit une perte de valeur abyssale. La fermeture annoncée a porté le coup de grâce à la demande sur le marché secondaire, entraînant une chute libre des prix.
Au cœur de l'action collective intentée contre Nike se trouve l'accusation selon laquelle ces NFTs constitueraient des unregistered securities, c'est-à-dire des titres financiers vendus sans enregistrement préalable auprès des autorités compétentes, comme la Securities and Exchange Commission (SEC) aux États-Unis. Les plaignants soutiennent que Nike a utilisé sa notoriété et sa puissance marketing pour promouvoir ces actifs dont la valeur dépendait intrinsèquement du succès du projet et des efforts promotionnels de la marque. Ils affirment que s'ils avaient su qu'il s'agissait de titres non enregistrés, ils n'auraient jamais investi. Ces actifs numériques, souvent consultés depuis un smartphone, ont vu leur valeur s'effondrer.
Le statut juridique précis des NFTs reste une zone grise aux États-Unis, et aucun tribunal n'a encore statué de manière définitive sur leur classification en tant que titres financiers. Des acteurs majeurs du marché, comme la plateforme OpenSea, plaident pour qu'ils soient exclus de cette réglementation, arguant qu'ils ne correspondent pas à la définition légale d'un titre. Les plaignants dans l'affaire Nike estiment cependant que le tribunal peut statuer sur les violations présumées des lois de protection des consommateurs sans nécessairement trancher la question complexe de la nature juridique des NFTs, illustrant la complexité réglementaire de ces nouvelles technologies, qu'il s'agisse d'un smartphone pliable ou d'actifs numériques. D'autres marques de luxe, comme Dolce & Gabbana, ont également fait face à des poursuites similaires pour des problèmes liés à la valeur et à l'accessibilité de leurs NFTs.
Déposée devant un tribunal fédéral de Brooklyn (district Est de New York), l'action collective menée par Jagdeep Cheema vise à obtenir plus de 5 millions de dollars de dommages et intérêts. Elle repose sur la violation présumée des lois sur la protection des consommateurs dans plusieurs États américains, dont New York, la Californie, la Floride et l'Oregon. L'issue de cette procédure sera suivie de près.
Source : The Verge