Ceatec : le smart-grid, nouvelle marotte des fabricants japonais

07 octobre 2010 à 13h13
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Le concept du smart grid.
Sur le stand de Nissan, au salon Ceatec de Tokyo, on a choisi la pédagogie par l'illustration pour expliquer le smart grid. Quoi de plus évident pour le fabricant de voitures que de l'illustrer avec un tour virtuel en ville ? Votre voiture - totalement électrique - circule entre immeubles équipés de panneaux solaires, centrales éoliennes, arbres artificiels hybrides. Tout le concept du smart grid, c'est la circulation de cette électricité entre la voiture, les bâtiments, les centrales, et les unités de stockage. Pour fonctionner, le concept a besoin d'une mutualisation de l'énergie, une idée à laquelle semblent adhérer tous les fabricants japonais.

Echanges énergétiques
En privilégiant des circuits courts de distribution de l'électricité, le smart grid est l'une des solutions d'économies d'énergies. Un bâtiment de bureaux produit de l'électricité grâce à des panneaux solaires. Il alimente l'activité dans ses étages, et recharge les voitures électriques dans son parking souterrain. Une maison, inhabitée en journée, peut recharger d'anciennes batteries de voitures recyclées, qui seront vidées pour l'alimentation de nuit. Avec le surplus, elle peut alimenter la maison voisine, dépourvue de panneaux.

S'il n'y a pas suffisamment de soleil pour assurer le fonctionnement des panneaux solaires, la maison déstocke son électricité, et la voiture garée dans le parking de l'immeuble videra à son tour une partie de sa batterie pour alimenter les bureaux. C'est ce concept d'échange qui est au coeur du smart grid, et tout le problème est là : comment allouer intelligemment l'énergie à l'endroit qui en a le plus besoin, tout en délestant celui qui en produit le plus.

Cloud electricity
Si la voiture peut faire office de médiateur électrique, en remplissant ses batteries dans la maison et en les vidant dans le parking du bureau un jour de pluie, il faut trouver d'autres systèmes. La batterie de voiture n'est pas assez puissante pour alimenter une usine composée de machines-outils, de robots, etc. Le stockage est toujours un problème central, et si Mitsubishi estime que deux batteries de voiture recyclées, avec une capacité restante de 80%, pourraient alimenter un foyer de quatre personnes, les cloud centers imaginés par Fujitsu ne peuvent pallier une chute de production que pendant quelques minutes. Panasonic a développé lui aussi un système similaire.

L'idée du cloud center, développé notamment par Fujitsu, est de disposer de bâtiments entiers remplis de batteries à charge et à décharge très rapide. Cela permettrait d'assurer la continuité de l'alimentation, en cas de conditions climatiques défavorables ou de demande élevée. L'électricité reste un produit qui fluctue en fonction de la demande, et à la production hétérogène. Constante pour les centrales nucléaires, elle dépend des conditions climatiques pour le solaire, l'éolien ou même l'hydrolien.

Une interface de gestion de la délivrance en fonction de la demande est donc nécessaire, avec une capacité de stockage. Les cloud centers de Fujitsu.

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Exemple de HEMS.
HEMS, BEMS, FEMS et NGTS
Ces sigles un peu barbares définissent en fait une classification assez simple des besoins et capacités de production énergétiques du futur. HEMS pour Home Energy Management System (système de gestion de l'énergie résidentielle). BEMS et FEMS concernent respectivement les bâtiments (bureaux, magasins, hôpitaux et administrations) et les usines. Ces trois catégories peuvent être alternativement grandes productrices d'électricité ou grandes consommatrices. Pour les NGTS, Next-gen Traffic Systems (systèmes de transports de nouvelle génération), il s'agit essentiellement d'une catégorie déficitaire sur le plan énergétique, mais qui peut servir, comme nous l'avons vu, de vecteur d'échange.

Le principe de la mutualisation et de la circulation de l'électricité semble être acquis chez les industriels japonais, de même qu'ils ont une idée précise des équipements existants qu'ils peuvent utiliser, et de ceux qu'ils doivent déployer. Toute la question va donc être celle de la production. De ce point de vue, Toshiba comme Fujitsu estiment que les capacités solaires et éoliennes sont importantes. Le Japon ne dispose pas de larges étendues désertes où implanter des champs de panneaux, mais les nombreux toits semblent être le terrain d'expérimentation favorisé par les industriels.

Le Japon a d'ailleurs mis en place une législation d'aide à l'installation de panneaux solaires. Selon une représentante de Fujitsu, l'installation de panneaux sur une maison individuelle, qui coûte 3 millions de yens (26 000 €), ne reviendrait plus qu'à 1 à 2 millions de yens (8 700 à 17 300 €) une fois les subventions du gouvernement déduites.

Pour Hitachi par contre, les énergies renouvelables ne seront pas suffisantes, et un recours à une importante industrie nucléaire est inévitable. Précisons que le géant a des intérêts dans l'atome, et peut donc difficilement dire le contraire. Ceci dit, son argument n'est pas inintéressant, puisqu'il estime que les énergies renouvelables manquent de fiabilité, et que la seule alternative sur une solution solide et continue est entre le nucléaire et les énergies fossiles productrices de gaz à effets de serre.

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L'arbre artificiel de Nissan.
Smart cities
Retour sur la vivifiante prospective de Nissan. Le fabricant estime que dès 2020, il sera possible d'appliquer ces principes de smart grid dans les transports, avec les flux d'échange entre voitures et bâtiments. Pour 2030, Nissan s'attend à voir des routes intelligentes, qui permettent de recharger les voitures en roulant, à partir des arbres artificiels disposés le long de la route.

D'ici à ce que ces villes intelligentes soient construites et fonctionnelles, les fabricants réalisent des expérimentations à l'échelle de grandes agglomérations. Toshiba travaille à Okinawa sur les systèmes de micro-grid, pour les villes de taille réduite, mais aussi à Bombay, en Inde, comme Hitachi. Ce dernier est également présent à Los Alamos, aux Etats-Unis, et Toshiba fait des expérimentations à New Mexico.

Mais surtout, Toshiba, Fujitsu, Hitachi, Mitsubishi et Nissan ont une ville-laboratoire : Yokohama. Sous le patronage du METI, le ministère de l'Economie japonais, qui finance le projet par le biais de l'agence publique NEDO. Ce Yokohama Smart City Project (YSCP) permet aux grands fabricants de tester leurs concepts et leurs technologies, en partenariat avec les grands fournisseurs d'énergie, comme Tokyo Gas ou les compagnies électriques.

Le smart grid est donc encore à l'état de concept, même si le Japon semble prendre les devants sur la technologie. Les enjeux sont importants. Ainsi, plusieurs études estiment que l'Europe pourrait sécuriser son alimentation énergétique en développant un réseau smart grid avancé. Des économies d'énergie de 5 à 10% seraient envisageables en développant le smart grid. La démarche est longue, et le Japon semble s'engager dans une voie intéressante, notamment sur le plan de la collaboration entre tous les plus grands acteurs du secteur.
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