Bientôt des cultures résistantes à la sécheresse ?

Aymeric Pontier
Spécialiste environnement
14 juillet 2020 à 17h17
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Changement réchauffement climatique

En réalisant une modification génétique, des chercheurs sont parvenus à donner à l’Arabette de Thalius (plante à fleurs d’origine européenne) des qualités similaires à celles des plantes succulentes désertiques : elle est ainsi capable de stocker plus d’eau et donc de survivre à des conditions arides. Les scientifiques espèrent étendre cette innovation aux cultures agricoles.

Publiée dans la revue The Plant Journal, cette découverte repose sur le transfert du gène VvCEB1, présent naturellement chez le raisin, qui permet l’agrandissement des cellules du fruit au cours de son développement. L’équipe scientifique est issue du Département des sciences végétales appliquées de l’Université nationale de Kangwon (Corée du Sud) et du Département de biochimie et de biologie moléculaire de l’Université du Nevada (USA).

Les résultats obtenus par les chercheurs

Après des années de tentatives, les scientifiques sont enfin parvenus à reproduire le gène VvCEB1 dans l’Arabette de Thalius (Arabidopsis thaliana), une plante fréquemment utilisée dans le cadre de recherches génétiques. Leur expérience a consisté à sur-exprimer ce gène au point de conduire la plante à développer des cellules beaucoup plus grandes que d’ordinaire, qui soient capables de stocker des quantités d’eau importantes.

Ce faisant, ils ont donné à l’Arabette une caractéristique similaire aux plantes succulentes, qui peuvent survivre dans des milieux arides sur une longue période. Avec cette modification génétique, l’Arabette de Thalius est devenue capable de résister à des conditions de vie extrêmement sèches, et même de tolérer des sols riches en sel !

En exposant les plants génétiquement modifiés à des conditions de sécheresse intenses, plus de 90 % de ceux-ci ont non seulement survécu, mais ont continué à prospérer et à croître comme si de rien n’était. À titre de comparaison, moins de 25 % des plants (non modifiés) témoins ont survécu à ces mêmes conditions.

Comment expliquer ce phénomène ?

La surexpression du gène a offert l’Arabette de Thalius la possibilité de se doter de cellules plus grandes, agissant comme une « sorte de réservoir » en cas de besoin. Dès lors, la plante exprimant le VvCEB1 peut retenir plus d’eau, et devenir plus tolérante au sel, probablement parce que des cellules plus grandes et plus aqueuses aident la plante à diluer le sel absorbé par les sols salins, expliquent les scientifiques.

Mais ce n’est pas tout ! Les chercheurs ont fait une autre découverte : en plus d’avoir des cellules plus grandes, l’Arabette modifiée avait également des stomates (les pores des plantes via lesquels l’eau transpire vers l’extérieur dans des conditions sèches) moins nombreux et plus petits sur ses feuilles, par rapport à la normale. C'est ce qui l’a aidé à perdre son eau plus lentement, et donc a la conserver enfermée plus longtemps.

Reproduire l’expérience sur d’autres cultures

Concevoir des plantes plus tolérantes à la sécheresse et plus adaptées à une forte salinité n’est pas anodin dans le contexte de réchauffement climatique actuel. La capacité à stocker l’eau est même un trait essentiel pour que les végétaux survivent aux fortes chaleurs et à la réduction des apports en eau. En outre, cela pourrait permettre de les faire pousser dans des zones considérées jusqu’ici comme impropres aux cultures.

Pourtant, l’idée de transférer les gènes responsables de cette caractéristique est restée largement inexplorée jusqu'ici. Les chercheurs entendent changer cela rapidement, et se fixent comme objectif prioritaire d’intégrer leur découverte à d’autres cultures.

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Commentaires (11)

toug19
Ouai mais sommes nous sure de maitriser les effets à long terme?
jardinero
Faudra quand même un peu d’arrosage au démarrage.<br /> Je dirais que si c’etait prêt aujourd’hui ca maintiendrait la surface cultivée actuelle .<br /> Mais dans 5 ans il y aura des surfaces perdues.<br /> Un travail sur la réalisation de réserves nationales d’eau ,permises par les pluies parfois excessives ,serait utile aussi .
Bombing_Basta
Le génie génétique qui doit sauver l’humanité de tous les maux créés par l’humanité, on y croit, on y croit, on y croit, d’autant qu’on nous dit qu’il n’y a aucun danger, alors ON Y CROIT !!!
kiwi5
doit y avoir un brevet dessus, le cout sera prohibitif et les endroits vraiments secs et pauvres le resteront
glandeuranon
Un pansement sur une jambe nécrosée
carinae
mais déjà mieux que rien. Ça pourrait être utile dans le Sud de la France par exemple ou dans des zones semi-désertiques…
EnLighter
Une très bonne nouvelle. Enfin une recherche en génétique des cultures qui ne va pas dans le seul sens de la maîtrise des semences pour maximiser les profits.<br /> Si nous sommes capables de faire des pipelines sur des milliers de kilomètres pour du pétrole ou du gaz, il serait bien possible de faire la même chose pour de l’eau.<br /> Un échange eau contre énergie intermittente entre des pays qui sont en excès d’eau à certaines périodes de l’année au nord et ceux qui sont sur exposés au soleil mais qui manquent d’eau au sud serait largement faisable dès maintenant … mais il faut croire que cela ne rapporterait pas encore assez de dividendes pour que cela soit envisagé.
kiwi5
maximiser les profits, beh si, parce que l’on diminue les couts de production relatifs a l’eau. De plus on ne sait pas si les grains produits sont fertiles, si faut racheter du grain, va falloir raquer.<br /> Les produits avec l’eau ne veulent pas la donner car ils vendent leurs produits a ceux qui n’en ont pas, on va pas leur donner les moyens d’en produire, et le coup du pipeline cela fait un sacree acte de soumission et de dependance<br /> non mais ce sera certaiment cool quelque part a long terme, mais on ne va pas croire aux miracles annoncee
EnLighter
Pour le moment c’est de la recherche fondamentale, donc «&nbsp;open&nbsp;» pour tout le monde. Il faut donc se réjouir d’une telle avancée dans ces conditions.<br /> Je ne comprends pas où est la soumission quand un pipeline arrive chez toi pour te fournir quelque chose pour lequel tu es prêt à payer. D’autant que cela évite des transports polluants et coûteux. Les pays d’Europe ne sont pas soumis à la Russie et cela n’empêche pas l’avancée de Nordstream 2. D’ailleurs, il n’y a que les USA que ce pipeline gène. Les choses sont plus complexes que ça et surtout, je parle d’une solution équilibrée - eau contre énergie propre. L’indépendance consiste à pouvoir se passer de quelque chose et non pas à ne pas l’avoir tout court.
kiwi5
hmm le lien de dependance c’est lorsque un truc aussi essentiel t’est delivre par un unique fournisseur. Dans une reunion diplomatique si on te menace de couper l’eau ca ne doit pas etre facile a ignorer.<br /> merci pour la precision de la recherche fondamentale, je pensais que de nos jours tout etait soumis a brevet et que dans l’agriculture on fait le coup des gmo steriles dont il faut racheter les graines. peut etre etait cela aussi le lien de dependance.<br /> alleluia si on peut croire au miracles
Bust4Rhymes
Us facile de faire des expériences génétique de ce type sur des plabtes que sur des patients humain
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