Critique Foundation : l'Empire a le cul entre deux crises

Antoine Roche
Publié le 21 novembre 2021 à 18h18
Fondation

Apple TV+ voulait, elle aussi, sa grande série de science fiction. Mais pour lutter face à The Expanse, Star Wars et autres Star Trek, il fallait frapper fort, quitte à prendre des risques. C'est donc sur la saga aussi culte que complexe Fondation, d'Isaac Asimov, que la firme a jeté son dévolu.

Pour quel résultat ? C'est ce que nous allons voir tout de suite.

6 /10
Foundation
Aucun prix trouvé sur ce produit.
Les plus
  • Vous aimez la grande science-fiction
  • Vous voulez en prendre plein les yeux
  • Les adaptations qui prennent des libertés ne vous dérangent pas
Les moins
  • Vous êtes allergique à la science-fiction
  • Vous n'aimez pas les séries aux directions ambigues
  • Vous voulez une adaptation à la lettre

Accompagnez la lecture de cet article avec la musique de la série :

Fiche technique Foundation

Informations
GenreScience-Fiction, Drame
RéalisationJosh Friedman, David S. Goyer
EditeurSkydance Television, Phantom Four production
PlateformeApple TV+
Nombre de saisons1
Nombre d'épisodes (Total)10
ClassificationDéconseillé / interdit aux moins de 12 ans

Foundation : yes, no, maybe, I don't know, can you repeat the Seldon ?

Alors que l'Empire galactique humain domine les étoiles grâce, notamment, à une lignée de clones au pouvoir depuis des siècles, un homme, le Docteur Hari Seldon, prédit la chute imminente du système. Grâce à la psychohistoire, une science mathématique capable de calculer les événements futurs, Seldon parvient à convaincre l'Empereur de bâtir une Fondation où sera conservé tout le savoir de l'humanité, pour pouvoir la reconstruire après cette catastrophe inévitable.

Après la diffusion de ses deux premiers épisodes, ma confiance en cette adaptation de Fondation était assez élevée, et plus encore après l'annonce d'une future saison 2. Mais à l'issue des 10 épisodes de cette première saison, le doute est de mise.

L'œuvre culte d'Isaac Asimov fait partie de ces sagas de SF réputées impossibles à adapter. Et dans les faits, la série invoque peu de réminiscences des livres… Mais c'était assez inévitable.

Si vous connaissez le matériau original, vous savez que Fondation est une œuvre assez lente, qui se déroule sur une gigantesque période temporelle, qui est peu portée sur l'action et… plutôt abstraite, ce qui n'est jamais aisé à porter à l'écran. Un concept aussi flou et peu visuel que les « mathématiques capables de prédire l'avenir » est un véritable casse-tête à introduire, et les équipes de David S. Goyer et Josh Friedman (qui comptent d'ailleurs dans leurs rangs Robyn Asimov, la fille de l'auteur américano-russe) ont bien fait ce qu'elles ont pu, du moins on l'imagine.

Découvrez notre critique du roman d'Isaac Asimov :

Les chiffres, c'est pas une science exacte

Cet élément absolument central de Fondation est finalement plutôt bien amené et expliqué dans les débuts de la série. Il devient malheureusement secondaire par la suite, laissant la place à d'autres intrigues et personnages, pour montrer un peu plus de conflits armés et de politique que de science. Admettons, le choix s'entend pour intéresser les spectateurs et les garder éveillés en rendant l'ensemble plus dynamique.

On regrette alors que ces intrigues, tournant autour de personnages, de villes entières voire de planètes, ne soient pas toujours captivantes ou surprenantes. Peut-être avons-nous avalés trop de séries ces dernières années, mais les trois quarts des plot twists de Fondation se repèrent à 100 années-lumière, et ce, malgré les changements opérés par rapports aux livres… Nous y reviendrons.

Le show se montre parfois un peu trop générique, perdant alors de vue ce qui faisait l'identité des romans, ce qui les rendait uniques et précurseurs. Néanmoins, quelques idées fonctionnent vraiment bien, à commencer par les histoires concernant l'Empereur… que nous vous laisserons découvrir.

Les personnages et les jeux d'acteur sont également à saluer, tout particulièrement les performances de Lee Pace (Halt and Catch Fire) et Jared Harris (Chernobyl).

Mais en dehors de quelques sursauts de génie, la plupart des histoires racontées ennuient, qu'il s'agisse d'un récit à l'échelle galactique ou d'un drame plus intime et personnel. Si avec les livres on se sentait investis par la mission des héros pour appliquer le « Plan » de Seldon, ici on se retrouve passifs, contemplant des événements dans lesquels on ne s'immerge pas ou peu.

« On aurait adoré que Fondation devienne un pilier du catalogue Apple TV+ »

La série, ambitieuse, multiplie en outre les bonds temporels et géographiques, nécessitant une véritable attention pour ne pas perdre le fil conducteur, dont la direction générale est d'ailleurs rarement très claire. Les faiblesses et les temps morts sont heureusement compensés par l'introduction d'éléments mystérieux, tandis que quelques épisodes (notamment vers la fin de la saison) parviennent à donner aux spectateurs l'envie de poursuivre pour comprendre les ressorts de l'intrigue.

Pour nourrir cette dernière, et pour échapper aux pièges d'une transposition scabreuse, la production a en fait choisi ici de raconter sa propre histoire en développant des éléments secondaires des romans. Et le choix se défend, en cela qu'elle permet notamment de construire les personnages (pas toujours de manière très adroite, certes) que l'on pourrait bien retrouver dans de prochaines saisons.

Et de fait une saison 2 est déjà en chemin, alors que David S. Goyer a évoqué son souhait d'en réaliser idéalement huit. Avec sept tomes constituant le Cycle de Fondation, on comprend qu'il en garde sous le pied…

De l'Art ou de l'adaptation

Un autre choix qui se tient, qui fera peut-être grincer des dents certains et tant pis pour eux, c'est celui du changement de sexe (et partiellement de destin, mais chut) de deux protagonistes. Une décision bienvenue pour moderniser un récit de son époque (1951), initialement très masculin.

Ce que l'on a du mal à comprendre en revanche, c'est le fait de balancer l'un des plus gros retournements scénaristiques des livres au détour d'un misérable dialogue, sans rien en faire par la suite… L'effet de surprise est totalement gâché et désamorcé : dommage.

À cette étape de la critique, vous pourriez vous demander : pourquoi continue-t-on de regarder Fondation ? Eh bien sans doute pour voir toujours plus de plans époustouflants et découvrir ce que cet univers visuel a à nous offrir. En effet, en termes de production, Apple TV+ ne se moque vraiment pas du monde, et le résultat pourrait être encore plus bluffant que ce que propose le pourtant déjà solide film Dune (en tout cas sur une belle télévision).

La mise en scène et les décors intérieurs comme extérieurs sont tous plus travaillés les uns que les autres, et pour la partie sonore, la plateforme s'est payée les services de Bear McCreary (Battlestar Galactica) qui ravit nos oreilles dès le générique.

Reste qu'un bel enrobage ne fait malheureusement pas tout. On aurait adoré que Fondation devienne un pilier du catalogue Apple TV+, peut-être que cela arrivera avec la (les ?) prochaine(s) saison(s), mais pour l'heure, For All Mankind conserve à nos yeux sa place de leader, captivant dès son lancement et sans discontinuer.

Conclusion
Note générale
6 / 10

Foundation n'est pas une mauvaise série. Mais la première saison de cette adaptation de l'œuvre hautement complexe d'Asimov n'est, sans grande surprise, pas parfaitement satisfaisante. Malgré une débauche de moyens impressionnante, force est de constater, que l'on soit connaisseur ou non des romans originaux, qu'il n'est pas évident de rentrer dans la série et de se sentir investi dans son récit. L'espoir reste heureusement permis pour la suite.

Les plus
  • Vous aimez la grande science-fiction
  • Vous voulez en prendre plein les yeux
  • Les adaptations qui prennent des libertés ne vous dérangent pas
Les moins
  • Vous êtes allergique à la science-fiction
  • Vous n'aimez pas les séries aux directions ambigues
  • Vous voulez une adaptation à la lettre

Besoin d'une nouvelle série à regarder ? Retrouvez toutes nos chroniques et critiques séries.

Par Antoine Roche

Journaliste spé culture pop (séries/ciné/JV), technologie (SVoD, OS, apps…) et jeux de mots douteux. Pas forcément dans cet ordre.

Vous êtes un utilisateur de Google Actualités ou de WhatsApp ?
Suivez-nous pour ne rien rater de l'actu tech !
Nos experts recommandent des produits et services technologiques en toute indépendance. Si vous achetez via un lien d’affiliation, nous pouvons gagner une commission. Les prix mentionnés sont susceptibles d'évoluer. En savoir plus
Commentaires (0)
Rejoignez la communauté Clubic
Rejoignez la communauté des passionnés de nouvelles technologies. Venez partager votre passion et débattre de l’actualité avec nos membres qui s’entraident et partagent leur expertise quotidiennement.
Commentaires (10)
zeebix

J’ai personnellement aimé cette première saison, trop courte à mon goût, mais de qualité.

supermerguez

Avec mon épouse on aime beaucoup.
La réalisation est quand même incroyable et la qualité d’image de Apple TV permet d’en profiter pleinement.

Zosobk

Je ne connais pas l’œuvre originale mais je trouve l’article un peu dur avec cette série. La qualité est là et l’histoire est plutôt cohérente malgré les différentes histoires. C’est vrai que les 2 premiers épisodes étaient meilleures que les suivants. J’ai plutôt hâte de voir la suite et je suis un spectateur assez difficile surtout avec les séries…

kanda

C’est surement pas le « Fondation »’ attendu. C’est « autre chose » qui s’inspire de Fondation mais pas plus. La partie Terminus est une demi-farce hélas. Mais si l’on fait abstraction des multiples sacrilèges, c’est une série SF sympa avec une belle réalisation.

Ginkoh83

Les « fans » d’Asimov c’est comme ceux de Star Wars, il y a ceux qui ne jurent que par le triptyque central des 3 romans et ceux qui voient le tout (7 romans) comme un ensemble cohérent. Un commentaire plus haut parlait de la non présence des Cléon mais si on lit les 7 bouquins ils y sont bien !
De mon côté j’ai lu toute son « histoire du futur » soit environ 20 bouquins, des nouvelles sur les robots en passant par le trop sous-estimé cycle d’Elijah Bailey qui est un Blade Runner puissance 10 par son côté enquête policière jusqu’au cycle de Fondation. C’est donc de manière chronologique que j’ai découvert Fondation qui commence par l’histoire de Seldon justement.
Si l’épisode 1 était vraiment réussi je n’ai vraiment pas aimé le second avec trop de scènes d’amourette inappropriées et injustifiées et des prises de libertés par rapport à l’œuvre que j’ai eu du mal à digérer. J’ai poursuivi le reste de la saison avec plus de détachement, en me disant que ce n’était qu’une adaptation qui s’inspirait des romans car sinon on peut vraiment considérer qu’il y a peu de respect des écrits d’Asimov. Au final oui ça se laisse regarder, c’est souvent beau et bien mis en scène. Mais j’ai quand même pris plusieurs coup de poignards par moments par l’irrespect vis à vis de l’œuvre, notamment avec le personnage de Demerzel…

Wen84

Bref, ça a quand meme l’air d’etre bien médiocre. Encore un projet cahier des charges (Mais il parait que c’est une qualité)

smover

Fondation est un chef d’oeuvre de la Science-Fiction avec 3 livres fantastiques, et des suites à rallonge faites pour l’argent.

Les 3 livres sont géniaux, et au même titre que Dune -le film de Denis Villeneuve est quasi parfait pour moi- ils auraient mérité une adaptation fidèle.

Quelle prétention sans borne a pu avoir l’équipe Apple TV de se dire qu’ils vont revoir l’histoire et faire mieux que l’auteur ? Hallucinant de voir une telle oeuvre traitée de la sorte.

N’y allons pas par quatre chemins : les livres sont passionnants, la série est chiante. Qu’elle soit très bien réalisée ne change rien.

Styxou

Ayant lu les romans, j’ai apprécié cette série.
Ce n’est évidemment pas une adaptation fidèle, mais plutôt une histoire inspirée du Cycle de Fondation (sauf pour le premier épisode, qui retranscrit assez bien les premières pages du premier tome).
Le jeu d’acteur est bon, l’esthétique est très réussie, la musique claque sa mère.
L’arc narratif autour de la dynastie de clones génétiques est intéressante. Elle pose la question de ce qu’être humain, et de ce qu’être un robot. Par contre, les lois de la robotique sont balayées. J’ai l’impression qu’elles reviendront dans la saison 2. On sent qu’il y a un doute dans le regard de Demerzel, par moments. Cette question est incontournable pour une oeuvre inspirée de l’univers d’Asimov.
Le scénario manque juste un peu de profondeur, c’est dommage, mais il y a du potentiel. J’ai cette sensation que cette première saison pose les fonda… bases pour un développement ultérieur et plus profond des intrigues.

gf4

Mon commentaire part du principe que vous connaissez les livres et avez vu la série en entier. Donc attention: SPOILERS.

-----------------SPOILERS-----------------

J’ai lu 7 romans du cycle de Fondation il y a un moment maintenant (au moins quinze ans) et je ne me rappelle plus exactement de tous les détails.

Tout d’abord ce qui est bien :

  • La série a les moyens, la photo est grandiose, les décors vraiment magnifiques, la production impeccable. On est devant ce qui se fait de mieux à ce niveau à l’heure actuelle.
  • Au début, l’histoire est plutôt bien respectée : Seldon, la psyco-histoire, etc.
  • L’arc des Cléon clonés est intéressant. Ca n’est pas dans les livres mais c’est une bonne idée pour insister sur la déliquescence de l’Empire.
  • J’ai déjà dit que c’était somptueux ?

Ce qui fâche :

  • On réécrit et on ajoute des pans entiers de l’histoire : Invictus, amourettes sans intérêt. Et puis surtout, salvor la fille de gaal ? VRAIMENT ?
  • Demerzel qui assassine des gens ? VRAIMENT ?
  • L’hologramme de Seldon qui se déclenche parce qu’un vaisseau lui tire dessus ?
  • Du girl power partout, comme dans toutes les séries actuelles d’ailleurs.

-----------------SPOILERS----------------

J’ai du mal à comprendre ce qui est de « Fondation » dans cette série Fondation. Ca aurait pu garder le même Univers mais avec une histoire différente.

Je suis bien conscient qu’adapter l’oeuvre d’Asimov est impossible alors pourquoi tenter quelque chose qui sera de toute façon un échec ?

La série n’est pas mauvaise en soi (ni particulièrement bonne d’ailleurs) mais elle s’oublie aussi vite qu’elle se regarde.

Je ne pense pas regarder la saison 2.

Sur la même plate-forme, préférez For All Mankind, qui elle, est réussie !

Blackalf

Je dis ça, je dis rien, mais un spolier est censé être caché. ^^

Spoiler

Astuce : dans la fenêtre de message, l’icône « engrenage » permet de cacher un texte.