C'est l'histoire d'un singe...
King Kong, tout le monde connaît. Le grand singe super baraqué, la jolie blondinette qui hurle tout le temps et, bien sûr, l'Empire State Building de New York. Une fois n'est pas coutume cependant, Peter Jackson a décidé d'aller au-delà de cette image connue de tous pour son « remake » cinématographique et, en toute logique, UbiSoft a suivi les traces du Néo-Zélandais. King Kong le jeu vidéo nous propose donc d'incarner l'écrivain Jack Driscoll alors qu'il s'embarque avec le réalisateur Carl Denham, l'actrice Ann Darrow et toute une équipe bien décidée à trouver une île de légende. Alors que la tempête fait rage, leur navire, le Venture, atteint finalement les cotes de ladite terre et, les canots mis à la mer, tout ce petit monde s'apprête à vivre une grande aventure. C'est à ce moment-là que le joueur peut commencer à faire gigoter son nouveau meilleur ami incarné au cinéma par Adrien Brody. Notons de suite que les personnages du jeu ont tous été modélisés d'après les traits des véritables acteurs et qu'UbiSoft a obtenu la participation des doubleurs de la version française pour le jeu.Après une introduction limite moche et quelques minutes de jeu, Ann Darrow se fait « emballer » par Kong : l'aventure peut démarrer
Malgré cette « authenticité » accrue, il ne faut pas plus de cinq minutes pour constater l'étendue du désastre : King Kong n'est pas du tout au niveau des standards PC actuels et la « patte » de la version Playstation 2 est à ce titre omniprésente. Les textures sont très faibles, la pluie battante bien trop simpliste et les canots donnent l'impression de glisser sur une eau que l'on n'avait pas vue aussi mal réalisée depuis un bon moment ! En principe, cette séquence d'introduction doit nous faire vibrer et le joueur doit être absorbé par son caractère immersif. Hélas, il faut bien reconnaître que l'effet est complètement loupé et que nous regrettons déjà le débarquement de Normandie dans Call Of Duty 2 par exemple. La réalisation rend l'ensemble un peu grotesque et le réalisme semble avoir été oublié aux vestiaires : les rames ne touchent par exemple jamais l'eau et, nous l'avons dit, les canots donnent l'impression de glisser sur l'eau, mais le pire est atteint avec les animations des personnages qui, malgré la tempête, restent parfaitement statiques dans leur chaloupe !
Durant cette séquence, nous n'avons rien d'autre faire que de constater les dégâts, heureusement, la chute d'une partie de falaise met fin à nos souffrances en assommant notre alter ego. Réveillé sur la plage quelques instants plus tard par Ann Darrow, Jack reprend vite ses esprits. On remarque au passage l'horrible modélisation des cheveux de la jeune femme et on commence à craindre le pire... Alors que Denham se lance déjà, caméra en mains, à la découverte de l'île, Hayes préfère envoyer une fusée de détresse au Venture afin de signaler que l'accostage ne s'est pas passé comme prévu. Tout le monde suit bientôt Denham et une grotte nous permet de découvrir le système de tir employé par les développeurs. Il faut savoir que King Kong est pour l'essentiel un FPS, mais pas n'importe quel FPS. Pour nous plonger au maximum dans l'ambiance, Michel Ancel et son équipe ont décidé de se passer d'interface et de visée. Tout se fait de manière « logique ». Ainsi, pour connaître le nombre de balles qu'il nous reste, on doit attendre un commentaire de notre héros et pour viser il faut passer en mode « zoom » où Jack utilise sa deuxième main comme réticule.
... qui prend un petit peu le joueur pour un Kong !
Ce parti pris n'est généralement pas gênant, mais de temps à autre, on regrettera tout de même de ne pas savoir exactement combien de balles il nous reste. Pour la vie, les choses sont encore plus simples, puisqu'à la manière de Call Of Duty 2 (encore lui), les développeurs ont opté pour un filtre « rouge » qui modifie l'image lorsque l'on est touché : encore un coup, c'est la mort alors que seulement quelques secondes de repos permettent de récupérer un niveau de santé optimal. Là encore, le réalisme en prend un coup, mais ce n'est pas trop gênant. La progression dans l'aventure est déjà plus problématique, UbiSoft ayant opté pour un système de courtes séquences entrecoupées de minuscules cinématiques destinées à nous montrer la progression dans le scénario. C'est assez étrange et on ne peut pas dire que cela permette de renforcer spécialement l'ambiance. Ce n'est toutefois pas encore le plus gênant. On regrette également l'utilisation systématique de scripts pour faire intervenir les différentes créatures et l'absence presque totale d'intelligence artificielle chez des monstres qui, il faut l'avouer, ne peuvent de toute façon pas être très futés. Ce n'est donc toujours pas le plus gênant.On fout le feu, on récupère des « clefs », on fout le feu... que tout cela est passionnant !
Non, le plus pénible est sans aucun doute l'aspect beaucoup trop linéaire / simpliste de l'aventure. Les niveaux ne sont pour ainsi que des couloirs ultra limités dans lesquels le personnage n'a pratiquement rien à faire. Les « énigmes » sont très simplistes, mais surtout les développeurs ne se sont pas cassé la tête et se permettent de nous les resservir à de nombreuses reprises : ainsi, Jack ira régulièrement à la recherche de ces bâtons permettant d'actionner des portes en bois auxquelles il est strictement impossible de mettre le feu alors même que la seconde méga énigme du jeu est la quête du feu pour enflammer les nombreuses ronces qui ne manquent pas de bloquer les passages. À côté de ça, l'île est recouverte d'une épaisse jungle qui se résume en fait à des couloirs parfaitement délimités desquels on ne s'éloigne jamais. Dans la peau de Jack Driscoll, le joueur n'a pratiquement jamais à revenir sur ses pas (ou alors simplement d'une salle, il ne faudrait pas faire travailler notre tête), il n'a pas non plus à choisir de direction et ne risque donc pas de se perdre à moins que cela n'ait été prévu par les scénaristes.
Après une grosse heure de jeu qui nous donne l'impression d'être revenus trois ans en arrière, Ann Darrow est enlevée par une tribu de l'île. Capturé lui aussi, Jack Driscoll assiste, impuissant, au sacrifice de l'actrice offerte à la gigantesque créature que les autochtones craignent : Kong. À partir de là, le jeu nous propose en alternance de prendre le contrôle de Driscoll dans un pseudo FPS de nous avons déjà massacré et d'incarner Kong dans un clone du Prince Of Persia sauce UbiSoft. Plus convaincantes que le FPS, ces séquences « plates-formes » ne représentent au mieux que 20 % du jeu. On y contrôle Kong à la troisième personne et on peut courir le long de parois verticales ou sauter de branche en branche. Le but de ces séquences est lui aussi répétitif puisqu'il s'agit de se promener quelques minutes pour arriver devant un boss : ici de grosses bébêtes volantes, là deux T-Rex hargneux et enfin quelques serpents très collants. Pas totalement désagréables, ces scènes ne souffrent pas des mêmes défauts que le FPS puisque la linéarité est moins gênante. Par contre, les caméras imprécises, l'impossibilité de voir ce que voit Kong ou les contrôles peu clairs sont vite « gonflants » et je pèse mes mots !
La réalisation technique de ces séquences n'est d'ailleurs pas plus réussie que celle du FPS et même si je n'attache généralement pas une grande importance aux graphismes, il faut bien avouer que dans un jeu d'ambiance comme King Kong, cela fout tout par terre. Impossible d'entrer dans le jeu quand le moteur est à ce point anachronique. Impossible de ressentir quoi que ce soit quand la perspective ne permet pas d'entrer dans la peau du personnage. Enfin, il faut bien admettre que ce King Kong sent très très fort la production terminée à la hâte pour engranger les brouzoufs à la sortie du film. J'en veux pour preuve le manque de soin apporté aux niveaux de l'aventure ou bien l'absence de réglage de difficulté. En outre, un système de sauvegarde automatique vient encore diminuer la durée de vie particulièrement faible en enregistrant la progression toutes les quinze secondes. Du coup et sans forcer, on termine l'aventure en à peine six heures... Moins que la trilogie DVD du Seigneur Des Anneaux ! Aventure qui se termine d'ailleurs en eau de boudin dans un New York abominable. Le joueur n'a accès qu'à trois pauvres rues, il est impossible de détruire quelque bâtiment que ce soit et le chemin est balisé pour nous mener à l'Empire State Building, pathétique !
À gauche et à droite deux des rares scènes franchement réussies du jeu et au centre la plus belle capture que j'ai pu prendre
Conclusion
Mais quelle déception que ce King Kong. Quelle énorme déception de voir Michel Ancel revenir pour nous offrir un titre à ce point sans saveur. « Son » King Kong n'est qu'une banale succession de petites épreuves orientées action, sans aucune imagination, sans panache et sans ambiance. La réalisation technique n'est pas du tout conforme à ce que l'on attend aujourd'hui sur PC : on sent très clairement la Playstation 2 et ses limitations derrière le « floutage » des textures, derrière l'effet de feu absolument risible, derrière les modélisations très simplistes des cheveux ou derrière la profondeur de champ tout simplement dérisoire.La conception des niveaux n'est pas plus intéressante et la succession de « couloirs » est pathétique. Le personnage principal de l'aventure, Jack Driscoll, n'en finit plus de tourner en rond dans cette jungle alors que les quelques séquences mettant en scène Kong font « Prince Of Persia du pauvre ». Mi-FPS, mi-plateformes, King Kong est un authentique gâchis qui se termine en une blague à la hauteur du tour de biceps de l'énorme singe lorsque ce dernier arrive dans un New York réduit à sa plus simple expression où seules trois ou quatre voitures circulent. Je ne vais même pas vous parler du scandale de la double version (basique que nous avons testée / gamer que l'on attend toujours), mais voilà un titre qui ne devrait amuser que les joueurs occasionnels peu exigeants et encore, durant tout au plus une demi-journée... Espérons que le film soit moins décevant !
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