Yannick Vicaire, Greenpeace : "Le terme de 'technologies vertes' est réducteur"

24 octobre 2007 à 14h51
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A la veille de la conclusion du Grenelle Environnement, Yannick Vicaire, responsable de la campagne 'toxiques' de Greenpeace France, précise les attentes de l'organisation écologiste et donne son point de vue sur "la prise de conscience" environnementale des industriels, plus particulièrement des constructeurs de matériel électronique.

AB - Yannick Vicaire, bonjour. Qu'espère Greenpeace du Grenelle Environnement ?

YV - Pour le Grenelle, je prefère parler de ce que "nous demandons" plutôt que de ce que "nous espérons". Le Grenelle, s'il se veut vraiment à la fois un virage écologique et une réponse urgente aux problèmes les plus critiques de la crise environnementale et sanitaire, doit sanctuariser dans les opérations économiques et industrielles deux principes : d'une part, le principe de substitution : c'est-à-dire le remplacement des substances dangereuses et matériaux néfastes par des alternatives plus sûres et plus écologiques, d'autre part, la responsabilité élargie et individuelle du producteur : chaque entreprise est responsable des impacts générés par ses propres activités/produits, c'est le fameux pollueur-payeur qui n'a jamais été vraiment mis en oeuvre.

Ces deux demandes sont celles que nous adressons actuellement au secteur électronique et sur lesquelles nous notons les 14 multinationales leaders du marché PC/teléphone mobile (cf. guide pour une high-tech responsable) mais elles valent aussi pour les autres secteurs industriels et peuvent sous-tendre toute politique environnementale liée à l'utilisation de substances chimiques (eau, air, déchets, risques industriels).

AB - Les industriels, les constructeurs de matériel électronique notamment, sont plus nombreux à mener des politiques en faveur du respect de l'environnement. Ces politiques sont-elles satisfaisantes à vos yeux ?

YV - Il y a dans l'industrie une prise de conscience, ou du moins, le sentiment partagé que, ce que les Anglais appellent le "business as usual", ne peut pas continuer. Néanmoins, si la communication "verte" a explosé, les initiatives concrètes se font attendre. L'échelle des mesures prises reste aussi dérisoire face aux enjeux. Il y a aussi des apparences trompeuses, certains fabricants électroniques font des effets d'annonce, par exemple sur la réduction de leur impact climatique, en faisant semblant d'ignorer que leurs entreprises ne font plus que de l'assemblage et de la distribution et sous-traitent toute la production, or c'est évidemment dans cette dernière que se situe l'essentiel des impacts.

De nombreux efforts sont faits en terme de gain d'efficacité énergétique des produits électroniques - il faut s'en féliciter, mais là encore ne pas oublier que la croissance du secteur va "annuler" les bénéfices de ces gains énergétiques. Le début de chaîne, c'est-à-dire, l'extraction des minerais et la consommation de ressources naturelles (comme l'eau), reste aussi le parent pauvre de toute démarche environnementale du secteur. Sur ce point, on peut s'intéresser à l'initiative positive commune de certaines industries avec les ONG écologistes pour promouvoir la responsabilité du producteur (cf. déclaration commune).

AB - Les "technologies vertes" peuvent-elles influencer un changement dans la vie quotidienne aussi important que celui lié aux technologies de l'information ?

YV - Je n'aime pas le terme de "technologies vertes" - il tend à faire croire que seules des solutions techniques/technologiques vont nous sortir de la crise. Bien entendu, c'est un élément de réponse, mais il y a beaucoup à faire sur d'autres plans. Un mécanisme de marché comme la responsabilité individuelle du producteur qui incite le fabricant à minimiser ses coûts de gestion des déchets (en révisant la conception des produits) peut changer la donne en quelques années.

Souvent une écoconception est une simplification et non pas un niveau supérieur de complexité technologique. Le modèle d'entreprise est un autre facteur non technologique : par exemple, les fabricants de photocopieurs ne sont plus depuis longtemps des "vendeurs de produits" mais des "loueurs de services" et cette distinction change totalement le cycle de vie d'un photocopieur et le rapport de l'utilisateur à cet appareil, pour le mieux. C'est un modèle à l'opposé de celui dit "d'obsolescence programmée" où l'entreprise compte cyniquement sur un taux de renouvellement de plus en plus rapide de ses produits (et fait tout ce qu'il faut pour : batterie non remplaçable, logiciels et système d'exploitation envahissants, privilège au remplacement plutôt qu'à l'upgrade, etc.) Le secteur informatique a un rôle particulier à jouer en étant attentif à la réduction de ses impacts spécifiques, mais aussi parce qu'il peut apporter des solutions de "dématérialisation" utiles à l'ensemble des secteurs industriels et commerçants.

En complément, je vous invite à visionner la video qui illustre notre dossier iPhone et vise à rappeler à Steve Jobs, président d'Apple, ses engagements pris en mai dernier (greenmyapple.fr).

AB - Yannick Vicaire, je vous remercie.
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