Des scientifiques ont repéré un phénomène atmosphérique qui rend les vagues de chaleur plus fréquentes et plus longues. Ce mécanisme se renforce avec le réchauffement climatique et pourrait s’intensifier lors de certains épisodes El Niño.

©aleks333 / Shutterstock
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L'info en 3 points
  • Les vagues de chaleur sont plus fréquentes et longues, amplifiées par des ondes planétaires bloquées en altitude.
  • Le réchauffement de l'Arctique modifie le jet-stream, rendant les systèmes météo plus stables et persistants.
  • El Niño exacerbe ces blocages, augmentant la probabilité et l'intensité des canicules à travers le globe.

Les vagues de chaleur battent désormais des records de température. Elles durent plus longtemps et reviennent plus souvent. Après que l'ADEME et l'Arcep ont alerté sur l'effet dévastateur du numérique sur le réchauffement climatique, depuis peu, les chercheurs observent une nouvelle dynamique : des ondes planétaires se bloquent en altitude et perturbent durablement la météo. Une étude publiée en juin 2024 montre que ces épisodes, associés à des canicules intenses, sont trois fois plus fréquents qu’il y a soixante-dix ans. Ce changement découle de la transformation de la structure de l’atmosphère, liée au réchauffement global et à la fonte rapide de l’Arctique. Le phénomène El Niño, bien connu dans le Pacifique, pourrait encore renforcer cette tendance.

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Les grandes ondes atmosphériques se figent plus souvent à cause du réchauffement de l’Arctique

En altitude, les ondes planétaires dessinent la circulation de l’air. Elles orientent les dépressions, les anticyclones et les précipitations. Ces vagues existent depuis longtemps. Mais, dans certaines conditions, elles se bloquent et deviennent plus intenses. Les climatologues parlent alors d’amplification quasi résonante, ou QRA. Ce phénomène transforme des variations météo en blocages persistants. L’équipe de l’université de Pennsylvanie a analysé soixante-dix ans de données. Dans les années 1950, un seul épisode de ce type survenait chaque été. Aujourd’hui, on en compte trois. Ces blocages coïncident avec des canicules marquantes, comme celle de 2003 en Europe ou celle de 2021 dans le nord-ouest du Pacifique.

L’Arctique se réchauffe bien plus vite que le reste de l’hémisphère nord. Cette différence modifie le jet-stream, le courant d’altitude qui fait le tour du globe. Il devient plus ondulé, ralentit et bloque plus facilement les systèmes météo. Sur les continents, la surface chauffe davantage que celle des océans. L’atmosphère réagit en formant des structures plus stables. Les chercheurs notent que le contraste thermique entre terre et mer augmente, ce qui favorise la résonance des ondes planétaires.

Illustration du phénomène climatique El Niño / La Niña, entre chaleur extrême et tempêtes de pluies - ©Quality Stock Arts / Shutterstock

El Niño renforce l’instabilité dans un climat déjà sous pression

Le réchauffement global crée un contexte favorable à ces blocages, mais El Niño ajoute sa propre perturbation. Ce phénomène naturel modifie les températures de surface dans le Pacifique et influence la circulation de l’air à l’échelle mondiale.

Les scientifiques ont comparé les données récentes et remarqué que les étés avec épisodes QRA suivent souvent des hivers marqués par un El Niño fort. La corrélation atteint 0,63 pour les événements les plus intenses, selon l’indice ONI, qui mesure la température dans la zone « El Niño 3.4 ». Pendant la phase de maturité d’El Niño, les anomalies de température dans les tropiques déclenchent une série de perturbations qui se propagent jusqu’aux moyennes latitudes. Elles forment un « guide d’ondes » qui piège les vagues atmosphériques dans une configuration quasi stationnaire.

Quand El Niño laisse place à La Niña, l’équilibre ne revient pas tout de suite. Ce basculement peut même renforcer les blocages. Les auteurs de l’étude précisent que ce moment augmente particulièrement le risque de résonance. Les modèles climatiques actuels peinent à simuler correctement ces enchaînements. Ils sous-estiment l’effet combiné d’El Niño et du réchauffement arctique sur la formation de ces blocages. Cette limite complique la prévision précise des futures canicules, surtout à long terme.

Les chercheurs rappellent que la fréquence des épisodes QRA a déjà triplé depuis les années 1950. Si la tendance se poursuit, les vagues de chaleur pourraient devenir non seulement plus probables, mais aussi plus longues et plus intenses. Les données accumulées montrent une évolution nette, qui concerne directement la façon dont les canicules s’installent.