Le sous-sol béarnais, une source inattendue d'hydrogène blanc ?

16 décembre 2023 à 10h45
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 Le Béarn, son jambon, ses fromages de brebis et… son hydrogène blanc ? © Scharfsinn / Shutterstock
Le Béarn, son jambon, ses fromages de brebis et… son hydrogène blanc ? © Scharfsinn / Shutterstock

Un trésor énergétique se cache sous le sol du Béarn, dans les Pyrénées-Atlantiques. Une entreprise spécialisée du domaine vient d'obtenir le droit d'explorer ce gisement très prometteur.

Après la découverte de la plus grande réserve mondiale d'hydrogène blanc en Moselle, une autre bonne nouvelle nous vient cette fois-ci du sud-ouest de la France. La société TBH2 Aquitaine, a obtenu un permis officiel exploratoire afin de sonder cette ressource dans le Béarn pendant cinq ans. C'est la toute première fois qu'un tel permis pour explorer une zone renfermant de l'hydrogène souterrain (ou hydrogène blanc) est délivré.

Celle-ci, couvrant une surface de 225 km2, pourrait être un réservoir potentiellement exploitable au long terme. Emmanuel Macron, conscient du caractère unique et important de cette découverte, a promis des « financements massifs pour explorer le potentiel de l’hydrogène blanc ».

Un potentiel géologique unique

Vincent Bordmann, président de l'entreprise Terrensis (société industrielle de greentech) souligne que ce sous-sol réunit « toutes les conditions nécessaires pour rendre possible la génération et l’accumulation d’hydrogène ». La production de l'hydrogène de manière naturelle est un processus complexe, nécessitant que l'eau de pluie interagisse avec la roche mantellique (roches situées entre la croûte terrestre et le noyau). Cette réaction est semblable à la production d'hydrogène par électrolyse, mais sans intervention humaine ou émission de gaz à effet de serre.

Le directeur scientifique de RealtimeSeismic (entreprise spécialisée en géophysique), Claudio Strobbia explique que retenir l'hydrogène est un défi très complexe. En effet, celui-ci est la molécule la plus petite de l'univers (74 picomètres, soit 13,5 millions de fois plus petite qu'un grain de sable en moyenne). Avec ce petit gabarit, sa capacité à traverser aisément les couches poreuses est très importante. Toutefois, les spécificités de la région où l'exploration se déroulera (roches imperméables et formations concaves) forment un environnement facilitant le piégeage de l'hydrogène, et donc sa future extraction.

 La région concernée comporte des caractéristiques uniques © chayanuphol / Shutterstock
La région concernée comporte des caractéristiques uniques © chayanuphol / Shutterstock

Des technologies d'exploration avancées

TBH2 Aquitaine, pour assurer le succès de son projet, va sortir l'artillerie lourde et s'appuyer sur trois technologies de pointe. Claudio Strobbia rentre ainsi dans les détails de leur méthodologie et explicite ces trois techniques :

  • Utilisation de gravimètres : une technique qui permet de détecter les variations de densité, provoquées par la composition minéralogique du manteau.
  • La seconde méthode est la magnétométrie, qui capte les modifications du champ magnétique dans les couches géologiques. Certains éléments magnétisables les font varier assez fortement, notamment le fer.
  • Enfin, la troisième est une technique largement éprouvée, la sismique active et passive. Claude Strobbia indique qu'elle est « la plus utilisée au monde pour l’exploration du sous-sol ». On pourrait la comparer à une forme d'IRM géologique, qui peut fournir des images précises du sous-sol et des zones potentiellement exploitables.

L'extraction de l'hydrogène et ses implications

La phase d'exploration devrait s'étendre sur une durée comprise entre deux et trois ans. Elle est d'une importance cruciale puisque c'est à ce moment-là que sont évaluées la quantité d'hydrogène disponible et la faisabilité de son extraction. Si la phase s'avère concluante, l'étape qui suivra sera un forage en bonne et due forme.

Pour expliquer le processus d'extraction, les fondateurs de TBH2 Aquitaine expliquent : « Lorsqu’on fore et qu’on arrive au réservoir, l’hydrogène passe de la roche vers le puits et remonte à la surface ». Un processus qui permettrait le captage de l'hydrogène et son acheminement vers des sites industriels en phase de décarbonation de leurs procédés.

La décennie 2020 est décidément un très bon cru pour la France ; on pourrait même parler d'une année 2023 millésimée ! Si cette réserve béarnaise et le gigantesque gisement situé dans le puits Folschviller en Alsace sont un jour exploités, cela placerait l'Hexagone en très bonne position stratégique. Le potentiel est là, les technologies sont présentes également et le soutien gouvernemental devrait, dans l'idéal, se mettre en place rapidement pour assurer le succès de ces missions. Aucune source d'énergie n'est parfaite, mais il ne faudrait ne se fermer aucune porte pour nous sevrer de notre dépendance aux énergies fossiles.

Source : L'Usine Nouvelle

Camille Coirault

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Commentaires (13)

sebstein
Cette réaction est semblable à la production d’hydrogène par électrolyse, mais sans intervention humaine ou émission de gaz à effet de serre.<br /> Oui, mais les grands pouvoirs impliquent de grandes responsabilités… il faudra veiller à ne pas se précipiter et faire les choses bien. Si les fuites d’hydrogènes (ce qui est commun à toute forme d’extraction) dépassent les 9%, l’effet sur le climat est négatif par rapport aux énergies carbonées.<br /> D’autre part, l’hydrogène, quand il est consommé pour produire de l’énergie, produit de la vapeur d’eau, qui est également un gaz à effet de serre.<br /> Certes, la durée de vie de la vapeur d’eau dans l’air est courte, mais ça c’est dans l’état stable actuel connu. Qu’en serra-t-il lorsque la quantité de vapeur d’eau générée sera plus importante ? Difficile à prédire. Cela pourrait également avoir des influences sur la fréquence et l’intensité des précipitations.
BJ_Inc
Exactement, quand on sait que la vapeur d’eau est le premier gaz a effet de serre loin devant le CO2, c’est un comble…imaginez si tout le parc automobile passait aussi a l’hydrogène… le non sens total.<br /> Après sur une installation industriel, je pense que la vapeur serait condensée en sortie pour obtenir directement de l’eau
Loposo
Metz bientôt le futur dubai
Krypton_80
BJ_Inc:<br /> imaginez si tout le parc automobile passait aussi a l’hydrogène<br /> Pas besoin que tout le parc automobile passe à l’hydrogène, les voitures 100% électriques peuvent aussi générer indirectement de la vapeur d’eau dans certains cas, l’électricité pour les alimenter ne poussant pas encore aux arbres.<br /> Centrale_nucleaire2560×1676 390 KB<br /> « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme », c’est la loi de conservation de la matière et elle est applicable à toutes les sciences/technologies.<br /> BJ_Inc:<br /> Après sur une installation industriel, je pense que la vapeur serait condensée en sortie pour obtenir directement de l’eau<br /> Manifestement ils n’y ont pas encore pensé, ou alors ce n’est pas prioritaire.
MattS32
sebstein:<br /> Certes, la durée de vie de la vapeur d’eau dans l’air est courte, mais ça c’est dans l’état stable actuel connu. Qu’en serra-t-il lorsque la quantité de vapeur d’eau générée sera plus importante ? Difficile à prédire.<br /> La durée de vie de la vapeur d’eau dans l’atmosphère est faible parce qu’elle arrive vite à saturation et condense. En avoir plus ne changerai pas grand chose à ça, simplement ça condenserait un peu plus.<br /> En outre, les apports en vapeur d’eau qui proviendraient d’un (improbable !) passage massif des voitures à l’hydrogène seraient totalement négligeables par rapport aux émissions naturelles de vapeur d’eau.<br /> Par exemple à l’échelle de la France, si on part sur 40M de voitures faisant 15 000 km par an à raison de 1 kg d’H2 (soit 9 litres d’eau liquide après combustion) aux 100 km, ça ferait 54 milliards de litres d’eau évaporés dans l’atmosphère par an. Dit comme ça, c’est sûr, ça parait beaucoup. En fait, c’est minuscule.<br /> Parce que la principale source de vapeur d’eau dans l’atmosphère, c’est l’évaporation des océans, qui se fait au rythme de 16 milliards de litres par seconde. En moins de 4s, les océans envoient donc plus d’eau dans l’atmosphère que ce que ferait tout le parc de véhicules individuels français passé à l’hydrogène en un an.<br /> C’est pour ça que la vapeur d’eau n’est pas problématique directement dans le dérèglement climatique : même si elle est le plus gros contributeur de l’effet de serre (de l’ordre de 90% si je me trompe pas), la hausse des émissions liées à l’activité humaine est absolument négligeable, et donc sans impact significatif.<br /> Il y a par contre un impact indirect, c’est que la hausse de la température moyenne de l’atmosphère peut faire augmenter sa concentration moyenne en eau… Mais là dessus non plus, qu’on en émette un peu plus ou un peu moins ne changera rien à cette augmentation, vu les quantités émises naturellement.<br /> À noter aussi que les voitures thermiques émettent aussi de l’eau, en plus du CO2, même si c’est environ 2 fois moins qu’une voiture à hydrogène : brûler un litre d’essence rejette environ 2.3 kg de CO2 et 1.1 kg d’eau.<br /> Krypton_80:<br /> BJ_Inc:<br /> Après sur une installation industriel, je pense que la vapeur serait condensée en sortie pour obtenir directement de l’eau<br /> Manifestement ils n’y ont pas encore pensé, ou alors ce n’est pas prioritaire.<br /> Tu sais que si tu vois quelque chose sortir des cheminées de refroidissement des centrales, c’est justement parce qu’une grande part de la vapeur d’eau s’est condensée au contact de l’air extérieur plus froid ? Parce que c’est ça qu’on voit en fait, le nuage qui sort, c’est de la vapeur d’eau condensée (de l’eau liquide donc… sous forme de gouttelettes). Si ça n’était pas condensé, tu ne verrais rien, la vapeur d’eau est un gaz transparent.
sebstein
Merci pour ces calculs.<br /> Reste la part d’hydrogène « gaspillée ».<br /> 9 % sur toute la chaine d’approvisionnement ce n’est pas tant que ça…<br /> D’autant que, vu la mine d’or sur laquelle se couchent les lorrains, la tentation sera forte de procéder à la hâte.<br /> Au vu de la volatilité de l’hydrogène, il va falloir être prudent, si la France veut montrer que l’environnement est vraiment une priorité, ou bien si elle ne vaut pas mieux que l’Arabie Saoudite…
MattS32
Oui, clairement les fuites c’est un problème… Elles sont estimées entre 5 et 10% aujourd’hui, ce qui est déjà élevé, et c’est d’autant plus gênant que le PRG de l’hydrogène, déjà élevé à 100 ans, l’est encore plus à 20 ans (en d’autres termes, si on a des émissions d’hydrogène qui ont un impact légèrement inférieur aux émissions de CO2 économisées grâce à la filière hydrogène, on a un bénéfice sur le climat à 100 ans, mais on accélère le réchauffement à 20 ans…).<br /> Une des solutions pourrait être de passer par le méthanol pour limiter les fuites… mais on aurait alors une perte de rendement.<br /> Le mieux finalement c’est de réserver l’hydrogène aux usages où il n’y a pas d’alternative.
Palou
MattS32:<br /> ça ferait 54 000 milliards de litres d’eau évaporés dans l’atmosphère par an. Dit comme ça, c’est sûr, ça parait beaucoup. En fait, c’est minuscule.<br /> mais en sachant qu’ l’hygrométrie idéale est de 50 grammes d’eau par m2 d’air, ça fait quand même 20 fois plus
MattS32
Palou:<br /> mais en sachant qu’ l’hygrométrie idéale est de 50 grammes d’eau par m2 d’air, ça fait quand même 20 fois plus<br /> Dans un logement… Tu ne peux pas prendre ce taux et rapporter ça à la surface du sol extérieur, ça n’a plus aucun sens car si dans un logement on peut parler par m² en considérant qu’il y a en moyenne une hauteur standard de l’ordre de 2m50, dès qu’on est en extérieur la hauteur n’est plus du tout la même, donc on a des volumes d’air beaucoup plus grand… 50g par m² en intérieur, ça fait en gros 20g par m^3. Du coup en extérieur avec une colonne d’air de plusieurs milliers de mètres, tu n’est plus à 50g par m² mais a plusieurs dizaines de kg…<br /> Et pour l’hygrométrie, il s’agit en outre d’une valeur «&nbsp;instantanée&nbsp;» : 20g par m^3 au moment de la mesure. Tu ne peux pas comparer ça avec un cumul d’émissions sur l’année, puisque la durée de vie de la vapeur d’eau dans l’air est très inférieure à l’année… De l’ordre de quelques jours à peine.<br /> Fondamentalement, si on augmente les émissions de vapeur d’eau, l’impact que ça a n’est pas une augmentation du taux moyen de vapeur d’eau dans l’air, mais simplement une augmentation des précipitations pour éliminer cet «&nbsp;excédent&nbsp;». Et 54 milliards de litres de précipitations en plus par an à l’échelle de la France, c’est même pas l’épaisseur du trait (c’est ce qui tombe en moyenne en… un peu plus d’1 heure).
MattS32
J’ai revu mes calculs, dans mes deux messages précédents, je me suis planté d’un facteur 1000… Les émissions d’eau de 40 millions de voitures sur un an ne sont pas 54 000 milliards de litres mais 54 milliards de litre.
Krypton_80
MattS32:<br /> Tu sais que si tu vois quelque chose sortir des cheminées de refroidissement des centrales, c’est justement parce qu’une grande part de la vapeur d’eau s’est condensée au contact de l’air extérieur plus froid ?<br /> Tout à fait, ce qui n’est pas contradictoire avec ce que j’ai répondu plus haut. Pour avoir de l’eau sous forme de gouttelettes, il faut avoir au départ de la vapeur d’eau. Si 100% de la vapeur d’eau était captée et condensée (c’est ce que j’ai compris de l’autre commentaire), alors on ne verrait pas de nuage du tout.<br /> Mais oui, comme tu l’as dit, si ça n’était pas condensé on ne verrait rien, mais ça voudrait dire qu’il ferait tellement chaud que l’on serait probablement en pleine extinction de masse avec un réchauffement climatique extrême !
Maspriborintorg
L’hydrogène s’échappe en quantité astronomique depuis de nombreuses régions de la planète, la réaction d’oxydation des roches chaudes par l’eau infiltrée y produisant de l’hydrogène. La plupart du temps, la densité des sources est trop faible pour l’exploitation. L’hydrogène s’échappant dans l’atmosphère, et, si il ne se combine pas avec l’oxygène lors des orages permanents sur toute la planète, finira par s’échapper dans l’espace!<br /> L’eau formée par la combustion de l’hydrogène capté pour utilisation ne forme qu’une quantité négligeable de vapeur d’eau comparée à celle produite par l’évaporation des océans, mers et lacs qui est de 503’000 km³ par an!
AdminOfPlaygroup
On est d’accord que même si c’est «&nbsp;propre&nbsp;», ça reste une énergie fossile !
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